L'En Dehors

La réponse est aussi dégoûtante et simple que l'administration Bush elle-même : sous-estimant l'intelligence collective et l'intégrité morale des Américains, Bush a essayé d'utiliser la tragédie du 11/9 pour avoir plus de votes - d'où son choix. J'imagine qu'il pensait que s'il avait rappelé au peuple américain combien on doit avoir peur de tous ces « terroristes contre la liberté », on votera peut-être pour lui. Il a même essayé de changer la date traditionnelle de la réunion en la repoussant jusqu'à l'anniversaire de la mort des 3000 personnes qui se trouvaient dans les Tours jumelles - un souhait que même son papa n'a pas pu l'aider à réaliser et qui a scandaliser encore plus le peuple américain.

Il est essentiel que les personnes à travers le monde comprennent et voient à travers les médias indépendants (parce que la révolution ne sera pas télévisée…du moins pas aux Etats-Unis, peut-être en France…) ce qui se passe à New York City - non pas parce que la vie d'un Américain ou sa liberté est plus importante que celle d'un irakien ou d'un palestinien, mais parce que le pouvoir mondial des Etats-Unis est tel et que le peuple américain veut renverser ces connards mais sont face à des systèmes d'oppression cruels et rares lorsqu'on tente de le faire. Nous, le peuple américain, avons besoin d'une solidarité internationale et nous devons connaître et diffuser la vérité.

Des foules d'Américains sont descendus dans la rue le premier jour de la présidence de Bush. Dans des centaines de villes à travers les Etats-Unis (j'étais à Denver, on était des centaines), nous avons manifesté contre son occupation illégale de la Maison blanche enragés et les larmes aux yeux. Avant la guerre contre l'Afghanistan (j'étais à Boston, nous étions 500) et puis contre l'Irak (j'étais à Boston et nous étions dans les milliers, alors même que le 15 février 2003 à NYC, 250 000 citoyens outragés ont manifesté !) et partout où Bush est allé comme Président depuis, le coût de la sécurité a été immense. Bush ne dormira même pas à NY la semaine prochaine, tellement il a peur du peuple qu'il espère va l'élire, malgré toute la sécurité. Et ce sont les contribuables qui payent pour notre propre oppression (ou, en double-langage, notre « sécurité »).

La RNC coûte 25 millions de dollars aux Américains en sécurité et pas seulement pour les manifestations : depuis plusieurs semaines le FBI a envahi les maisons de musulmans, d'Arabes et de personnes qui combattent pour la liberté pour savoir si quelqu'un envisage de commettre des actes violents (ou si ces personnes connaissent quelqu'un qui envisage de le faire - HA !). De plus, le FBI a sélectionné 56 « anarchistes primaires » qui seront surveillés de près jusqu'à la fin de la Convention. Six flics et un chef ont été assignés pour suivre jour et nuit chaque mouvement de ces combattants pour la liberté. Mais malgré cela et sous la protection de la police, le FBI, le CIA, des maréchals et d'autres armes des forces sécuritaires américaines, le maire de NY, Michael Bloomberg, ne sachant plus quoi faire, a tenu une conférence de presse la semaine dernière où il a proposé des réductions (pour les hôtels, les restos et les musées) à chaque manifestant qui promet de se comporter sagement à New York.

des banderolles apparaissent un peu partout sur les buildingss et les ponts à New York

William Dobbs, porte-parole de United for Peace and Justice, un groupe anti-guerre qui lutte contre la ville de New York pour pouvoir organiser une manifestation anti-guerre de 250 000 personnes à Central Park le dimanche 29 août, a écarté la proposition du maire en disant « C'est ridicule. Nous ne voulons pas de réductions, nous voulons nos droits de premier amendement ». Ce premier amendement déclare que le Congrès ne peut passer de loi qui réduit la liberté de parole ou de la presse, ou les droits des personnes de s'assembler de façon pacifique, ou de pétitionner le gouvernement pour une réparation de griefs.

Manif à vélo de Critical Mass le 27 aout

Pendant ce temps, de l'autre côté de la rue, quelques minutes avant le début de la conférence de presse du maire Bloomberg, quatre femmes de Code Pink (une organisation féministe anti-guerre) furent arrêtées quand des policiers ont pénétré dans leurs chambres à 200 dollars la nuits au moment même où elles déployaient du neuvième étage une combinaison rose où l'on pouvait lire « Vous dites bienvenues, nous disons où ? Manifestons le 29/8 à Central Park ». Les femmes furent inculpées pour « mise en danger imprudente », « publicité illégale » et « conduite désordonnée ». De quoi se demander combien de personnes sont espionnés par le FBI….

Alors les New Yorkais n'ont pas le droit de manifester ? C'est quoi l'histoire ? Nous ne sommes plus protégés par notre constitution ? Où est passé le « droit de s'assembler pacifiquement » qu'on avait été enseigné en CE2 ? La liberté aux Etats-Unis c'est le plus grand mythe du monde, les mecs. NE CROYEZ PAS A HOLLYWOOD. C'est un mensonge que toute la propagande ou la sous-éducation du monde ne peut pas soutenir. Moi, une personne blanche, je ne me sens pas en sécurité aux Etats-Unis, pas à cause d'un casier judiciaire (je n'en ai pas, même pas une seule amende pour conduite trop rapide - mais il y a quand même un dossier sur moi au FBI), mais parce que la police peut faire ce qu'elle veut le FBI aussi. Mais si vous ne me croyez pas, demandez à n'importe quel homme noir aux Etats-Unis comment il se sent ; demandez à une mère célibataire à Los Angeles ; un sans-papier à Nouvelle Orléans ; demandez à Mumia ; demandez à un des milliers d'immigrés détenus et torturés dans une prison américaine depuis 3 ans (sans chef d'inculpation, juge, ni avocat) comment ils vivent le Rêve américain ; demandez à un militant qui doit vivre avec la menace constante de représailles et de perte de son intimité personnelle ; demandez à un américain autochtone ; demandez à une vieille américano-japonaise à Seattle ; demandez à des parents qui viennent de vendre leur maison pour payer les factures médicales de leur enfant ; demandez à un ancien combattant de la guerre du Viétnam…putain, demandez à presque n'importe quelle personne qui n'est pas riche, blanche, hétérosexuelle, de sexe masculin et conservateur, et vous verrez qu'il n'y a plus personnes qui croient en leurs mensonges de merde. Personne.

United for Peace and Justice tente depuis un an d'avoir un permis de la ville de New York pour manifester le 28 août, le jour avant le début de la Convention, à Central Park. La ville rejette toute demande en disant que la manifestation abîmera l'herbe (je ne blague pas) et qu'il créera un problème de sécurité. Mais le parc est régulièrement utilisé pour des événements culturelle (un concert de Dave Matthews où le nombre de spectateurs était 70 000, par exemple), alors ceci est clairement un problème politique et une infraction directe contre les droits du peuple américain sous le premier amendement. La ville de New York a proposé d'accepter une manifestation sur le West Side Highway, mais les organisateurs ont rejeté cette proposition à cause des menaces qu'une telle manifestation pourrait poser sur la santé des participants (endroit isolé, pas d'ombre, etc), surtout pour ceux qui sont très jeunes, très vieux ou handicapés.

La Coalition anti-guerre, United for Peace and Justice, a alors tenté de poursuivre en justice la ville de New York devant la Cour fédérale en disant que le refus du permis était une violation directe de nos droits sous le premier amendement. Néanmoins, il y a quelques jours un juge fédéral a refusé cette tentative de dernière minute en disant qu'il était « trop tard ».

Malgré la sécurité, malgré le fait d'être espionné et malgré que le droit de défiler a été refusé, malgré le fait que toute personne qui arrive à New York pour manifester le 28/9 pourra être arrêtée et sujette à des interrogations de la part du FBI, malgré tout cela le peuple viendra montrer une résistance sans précédente au système américain. Les manifestants (trop de groupes pour que je les note ici) seront et sont en train d'arriver de partout aux Etats-Unis, et ils sont préparés, intelligents, ILS SAVENT PAR EXPERIENCE à quoi s'attendre. Plus la ville essaye de faire peur, plus les gens veulent manifester. Et ils ne seront pas tous à la même manif, ils ne seront pas habillés pareils, et ils n'auront pas tous les mêmes idées. Beaucoup de militant s'en fichent de Central Park. Beaucoup seront déguisés comme des « personnes normales » (en costard ou t-shirt yankee). Le peuple manifestera de plusieurs façons nouvelles, peut-être, puisque les gens deviennent plus intelligents et puisque les règles ont changé. La police sera sans doute violente et arrêtera des centaines si pas des milliers, comme d'hab, mais aucun combattant pour la liberté considère qu'être emmené les menottes aux poignets est un honneur ou un signe de succès. Le but est d'envoyer le message le plus fort à Bush et à son administration, un message qui dit que les gens sont prêts à EXIGER la paix et la justice pour tous. Ce que les gens veulent c'est de faire entendre leur voix. Et ils l'ont peut-être déjà fait : Bush ne dormira pas à NY, le maire à essayer de « soudoyer » les gens pour qu'ils se taisent ; un procureur de la république a annoncé que la ville anticipe 1000 arrestations/jour pendant la semaine de la Convention. Mais il est trop tard d'arrêter le peuple américain qui sont unis dans la lutte et qui en ont marre. Comme Gandhi a dit, « Premièrement ils vous ignorent, deuxièmement ils se moquent de vous, puis ils vous combattent et puis vous gagnez. » Nous sommes à la 3e étape et je pense que bientôt nous verrons que Michael Bloomberg, qui a répondu à un journaliste qui lui a demandé s'il pensait que les mesures sécuritaires additionnelles contrarieraient les gens » en disant « Je pense que les New Yorkais seront contents d'avoir plus de sécurité » avaient tort.

Je n'écris même pas ceci des Etats-Unis, le pays où presque toutes les personnes que j'aime habitent et où je pouvais lire ma poésie devant un auditoire de personnes qui parlent ma langue : Je connais bien la bête qu'est le gouvernement américain et je sais aussi combien il est facile de détester les Américains ou de penser qu'on devrait pas laisser notre gouvernement bombarder la moitié du monde. Je comprends la frustration, le dégoût et la peur, vraiment. J'espère que les populations mondiales écouteront les poètes comme Alice Walker et Saul Williams, des réalisateurs comme Michael Moore, des journalistes comme Amy Goodnman et Mumia Abu-Jamal et toutes les personnes qui seront à New York City du 29 août au 2 septembre, pour que vous puissiez avoir confiance en les efforts énormes et beaux qui sont en train d'être faits pour non seulement virer ce putain de Bush mais aussi pour exiger que le gouvernement impérialiste et détestable américain se mette devant ses responsabilités pour tout le mal qu'ils ont commis contre nous tous.