Ce sont aujourd'hui les OGM dits thérapeutiques qui tentent de faire accepter cette technologie au public européen. Cependant que les « faucheurs volontaires » poursuivent leurs actions de résistance.
C'est la troisième vague d'OGM qui débarque, tentant un nouvel argument pour faire accepter cette technologie par le public. Voilà des plantes génétiquement modifiées pour aider à soigner des maladies redoutables. Sur les 24,15 hectares d'essais d'OGM recensés en 2005 dans les champs français, 20,33 sont consacrés à du maïs modifié dans ce but. Les parcelles sont cultivées dans le Puy-de-Dôme, fief de Limagrain, poids lourds bleu-blancrouge des semences et mère, via sa filiale Biogemma, de la société Meristem Therapeutics au nom de laquelle sont menées ces cultures. Un essai teste la production d'un anticorps pouvant intervenir dans le traitement de cancers, les autres la production d'une lipase gastrique pouvant soulager les malades de la mucoviscidose.
Ces organismes transgéniques sont lancés après l'échec en Europe de deux premières vagues. À la fin des années 90, les OGM prétendent être une réponse à la faim dans le monde mais la faiblesse des arguments est patente. L'implantation de leurs cultures n'ayant pas soulevé de débats en Amérique du Nord, l'opposition, faible, ayant été facilement ostracisée, les firmes agrochimiques avaient sous-estimé le rejet européen de ces nouveaux produits.
À une population plus attentive aux problèmes environnementaux est avancée une deuxième vague d'arguments : les OGM permettent d'utiliser moins de pesticides. Las, si les premières observations semblent le montrer, les résultats à longs termes sont très équivoques. Pire, plus on avance dans le temps, plus les chiffres tendent à prouver l'augmentation de l'usage des pesticides(1). Et les arguments contre les cultures en plein champ d'OGM à but thérapeutique s'accumulent à leur tour. Des scientifiques les expriment sans ambiguïté : les molécules recherchées peuvent être produites plus sûrement, plus économiquement et moins dangereusement en laboratoire (2).
Opiniâtre résistance
Les mensonges des firmes « biotech » n'affolent pas les « faucheurs volontaires ». Cet été, ils ont repris leur opiniâtre travail de résistance. À l'exception d'une première action près d'Orléans en juillet, la neutralisation des champs s'effectue sans annonce, généralement de nuit, pour assurer son succès. Au 23 août, on compte une douzaine de parcelles neutralisées, dont quatre d'OGM «thérapeutiques » de Meristem.
Les cadres de Limagrain sont ulcérés. Ils réclament des sanctions exemplaires contre ceux qui appellent à ces actions, et menacent de délocaliser leur activité en Amérique, privant ainsi le Puy-de-Dôme de nombreux emplois potentiels... Le parquet de Clermont-Ferrand a ouvert le 4 août deux informations judiciaires contre X pour destruction en réunion. Depuis, un hélicoptère de la gendarmerie survole régulièrement les huit parcelles de maïs encore sur pied dans le département. Gendarmes mobiles, vigiles et chiens sont aussi en poste près des champs. 13'
Lautomne s'annonce difficile pour les résistants aux OGM, tant la volonté de casser leur mouvement est manifeste de la part des firmes et du gouvernement français. Une longue suite de procès les concernera jusqu'au 16 novembre ; elle débutera justement dans le Puy-de-Dôme, à Riom, le 14 septembre (voir p.24). Le 16 août, le gouvernement, via le préfet du Gers, a fait suspendre par le tribunal administratif de Pau l'organisation pour octobre d'un référendum sur les essais OGM en plein champ dans le département, décidée le 30 juin par le conseil général.
Pendant ce temps, les OGM poussent: une mauvaise herbe mutante, résistante aux herbicides, a été découverte en Grande Bretagne, croisement involontaire entre du colza transgénique et une moutarde sauvage. Quant à la Commission européenne, elle a profité des vacances estivales pour autoriser l'importation dans l'Union du MON 863, maïs génétiquement modifié par Monsanto. Des malformations développées par des rats nourris avec ce maïs posent problème. Mais ce ne sont pas des rats qui vont entraver le progrès - financier - des fabricants d'OGM!
Benoît Ducasse
(1)Barbara Dinham. Pesticide Action Network UK, Pestides news, juin 2005
(2)Voir « Un cheval de Troie génétiquement modifié », Campagnes solidaires n°197 (juin 2005)
(3)Au bouclage de ce journal, deux nouvelles actions viennent pourtant de se dérouler dans le PuX-de-Dôme
Campagnes solidaires n°199 septembre 2005
à 19:45