Infos en soldes / 2 / La politique, c’est le fric
Lundi 22 novembre / Psittacisme.Ce matin, Laurent F. le Magnifique, qui n’a toujours pas admis que le vrai-faux responsable mais pas coupable dans l’affaire du sang contaminé ne serait jamais élu président de la République -et donc ne désespère pas d’apparaître comme le futur candidat « naturel » de la
gauche à la présidence de la République- en a remis une couche sur son unique sujet de préoccupation.
Quand on n’a rien à dire mais qu’on ne veut pas se faire oublier, le
mieux est encore de se répéter : c’est ce que doivent se raconter les
cadors du PS depuis six mois* qu’ils nous bassinent avec leur oui, leur
non, leur p’têt’ ben qu’oui, p’têt’ ben qu’non, à propos de cette
Constitution européenne qui, a contrario de la politique antisociale du
gouvernement, les empêche apparemment de dormir.
Pendant de temps-là, alors que les Shadoks (nous) pompent, les neufs «
sages » (hum !) du Conseil constitutionnel se sont aperçus que la
Constitution giscardienne étant incompatible avec celle de la Ve
République, il faudrait conséquemment modifier ou l’une ou l’autre.
Alors, pour ou contre le lifting de la Constitution française, voilà un
sujet fort qui devrait tenir en verve nos politiciens de l’opposition
jusqu’au printemps, voire jusqu’aux vacances de l’été prochain.
*le plus comique est que 68% des Français (et j’irais perso jusqu’à 80%
en comptant faux-jetons et frimeurs), selon un sondage CSA, ne savent
toujours pas vraiment de quoi il retourne ; toutefois le même
pourcentage d’entre eux pencherait tout de même pour le oui (signez
donc les yeux fermés, puisqu’on vous dit que c’est moderne !). Raté,
Laurent ! Quoique il soit toujours temps de changer d’avis, hein ?
Mardi 23 novembre / Retour ou anomie du politique ?
A l’instar du fan club de George Bush Jr qui, nonobstant la remise en
rayon du produit pour quatre ans supplémentaires, a massivement déserté
les forums de discussion du Net depuis qu’il a dû admettre l’enlisement
de l’armée de son champion en Irak et la remise à des jours meilleurs
des prouesses économiques espérées at home, les néostaliniens n’osent
pas encore encenser ouvertement le petit père Poutine dont les
massacres périphériques et parfois intra muros que commet l’ex-Armée
rouge contrarient le culte montant, d’autant plus que les
fondamentalistes musulmans qui le combattent en Tchétchénie sont
eux-mêmes des alliés objectifs dignes d’admiration, car, chez les
nostalgiques de la bureaucratie autoritaire et de la redistribution des
queues de cerises, tout ce qui lutte contre l’hégémonisme étasunien en
particulier et l’horreur capitaliste en général, fût-ce la pire
réaction, est béni.
En Ukraine, c’est le candidat de Bush, de l’Union européenne aux 20
millions de chômeurs et des mafias avides de privatisations, Viktor
Iouchtchenko*, qui mobilise les forces progressistes, les artistes de
variétés et la jeunesse aux cheveux longs tandis que son adversaire
l’autre Viktor, Ianoukovitch, bidonne le scrutin pour arriver en tête
de l’élection présidentielle avec la bénédiction de Poutine, des
conservateurs pro-Russes, vieux apparatchiks plus ou moins guettés par
la misère en cas de victoire libérale, et le soutien musclé des «
gueules noires » pas encore remises de la disparition de l’URSS.
On aura compris que Dieu joue du côté du libéralisme et Satan pour ces
bolchéviques qui, s’ils n’osent plus dire leur nom, n‘en demeurent pas
moins tels qu’en eux-mêmes, des boeufs.
Au Pays Basque espagnol, les néofascistes de l’ETA, qui, entre autres
assassinats sordides d’enfants, de vieillards, de travailleurs
modestes, de journalistes, d’élus, ont abattu ou tenté de le faire
jusqu’aux libertaires fondateurs du mouvement, et leur relais non
clandestin l’ex-Batasuna, se posent en défenseurs de la liberté, du
progrès social et depuis tout récemment -donneurs d’ordres en prison et
zéro succès dans l’opinion oblige-, du dialogue politique. Regardez-les
bien : ils sont souvent jeunes, dynamiques, décontractés, sympas, donc
ils donneraient facilement à croire que les ultranationalistes
intolérants et racistes qu’ils sont, ce n’est pas eux, mais leurs
adversaires en col blanc.
En Corse, on trouve les mêmes, en moins violents pour l’instant :
d’archaïques adorateurs du fusil d’assaut, qui ne conçoivent d’autre
horizon que le village, d’autre famille que le clan, d’autres droits
que ceux de la coutume et du sang, d’autre langue que le patois. A
chacun son Pinzutu, disent-ils (et son Arabe). Vous imaginez l’émotion
si sur le continent les universités d’été des associations ou partis se
concluaient par un « A chacun son Corse » ?
Si le Front national ne cartonne pas fort sur l’île de Beauté, c’est
normal, il a avec les nationalistes locaux un redoutable concurrent.
Imbéciles heureux qui sont nés quelque part, chantait Brassens.
Le plus consternant est que ces mouvements qui ambitionnent de rajouter
des frontières à celles déjà existantes et un nouvel Etat, autoritaire
à n’en pas douter, là où il n’y en a déjà que trop, s’attirent la
sympathie de « contestataires » qui prennent la remise en cause
réactionnaire d’un système politique pour la révolution.
Qu’on ne s’y trompe pas : je suis éminemment favorable à la liberté des
peuples à disposer d’eux-mêmes (mais les peuples ne veulent ni des
polpotistes** de l’ETA, ni des truands ou des romantiques issus des
différentes factions de l’ex-FNLC) et pour la disparition à terme de
l’Etat bureaucratique et des frontières (à quoi tiennent par-dessus
tout les nationalistes de tout poil) ; j’appelle seulement à une prise
de conscience politique qui ne mélangerait pas les lanternes rouges
avec les vessies blanches, qui ne confondrait pas les ambitions de
quelques aventuriers idéalistes, vénaux ou mégalomaniaques avec
l’aspiration des populations à jouir simplement de l’existence.
*aparté un brin sexiste : la numéro 2 du parti de Iouchtchenko est bien
jolie (la politique, aujourd’hui, ça tient à ce genre de petits détails)
**fascistes, stals, nazis, polpotistes, comme on le sait, ce n’est pas
la même chose, mais c’est le même genre, alors on se permettra la
confusion pour ne pas se répéter
Mercredi 24 novembre / l’enthousiasme des néophytes
Quoi qu’on pense par ailleurs de l’homme de l’Ouest, Iouchtchenko, et
de celui de l’Est, Ianoukovitch, on saluera la détermination des
Ukrainiens à ne pas se soumettre à ce que la majorité considère comme
une arnaque politique et un déni de justice.
Courage d’individus qui osent encore défendre une démocratie toute
neuve, tandis que dans une vieille nation fourbue comme la France, les
citoyens rentrent sagement chez eux après que le monarque républicain a
fait celui qui n’avait rien entendu de leur voix, comme ce fut le cas à
la suite des récentes élections régionales et européennes.
Jeudi 25 novembre / l’escroc et l’assassin
Emouvante rencontre à Tripoli entre le bureaucrate faussement austère
Chirac et le toujours plus dandy Kadhafi, jamais en retard d’une tenue
extravagante prétendue traditionnelle ni d’un clin d’œil séducteur aux
bédouins à base de tente ultraluxueuse et de chameaux en pur poil ;
c’est son côté chic et toc assez out, mais sympatoche.
Pourquoi tant d’amour soudain, après tant de querelles au prétexte de
conceptions divergentes quant à l’émancipation des peuples, en fait
pour des bouts d’ingrat désert tchadien sur fond d’aéronefs
touristiques envoyés au tapis ?
Le business, pardi, qui est ce qu’il reste quand on a renoncé ici à
chanter les louanges de la révolution, là à défendre la vertu de la
démocratie et qu’ensemble on résume la justice comme les relations
cordiales à un bon vieil échange technologie contre pétrole,
c’est-à-dire à quelques sordides tractations financières.
/ Rasée gratis
Banco, plus de 2000 morts à Falloujah ! Pour Thanksgiving, double ration de dinde pour les boys !
Sacré George, va ! toujours irradiant le bonheur, pas vrai ?
Vendredi 26 novembre / Thriller
Qui de Philippe Douste-Blazy ou de Thierry Breton occupera à Bercy le
trône encore chaud de l’empereur Sarkosy, qui vient dêtre sacré au
Bourget (l’hyperbolique « sacre » est une naïveté ridicule du service
com’ de l’UMP, pourtant toute la presse a docilement repris ce bourrage
de crâne à coups de gros sabots) ? le suspense est à son comble !
- Hey ! Delfe ! on s’en tape !
- Ah ? moi aussi.
Mathias Delfe