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E. Armand : Profils de Précurseurs et Figures de Rêves, Chapitre VIII
--> Un grand humaniste anglo-saxon : Havelock Ellis

Nous ne connaissons guère en France Havelock Ellis qui a atteint 70 ans le 2 février 1929, que par la traduction qu’a éditée le Mercure de France de ses « Etudes de Psychologie sexuelle » (Studies in Psychology of Sex) – son œuvre capitale, d’ailleurs. Le Mercure de France a publié également une traduction de son « Monde des Rêves » (World of Dreams) où il a anticipé Sigismond Freud. Mais ce serait mal connaître l’œuvre vraiment conséquente de ce grand penseur de ne voir en lui que le psychologue de la Sexualité. C’est un Libérateur, un Emancipateur dans le sens grandiose du mot. S’il a voulu réhabiliter la sexualité de l’opprobre où l’ont tenue et la tiennent encore les préjugés décorés du nom de sociaux, il s’est montré l’ardent défenseur des droits de la femme, non pas au point de vue politique exclusivement, non pas qu’il voulût qu’elle imite l’homme, mais il a revendiqué pour elle la liberté de développer sa féminité sans limites autres que celles tracées par sa nature de femme. Havelock Ellis a mené combat pour l’Eugénisme, pour la sélection en matière de procréation, non dans un sens étroit et réglementé, mais comme une conséquence de l’éducation personnelle. Il a enfin opposé avec véhémence la Nature à l’artificiel ou plutôt au compliqué de la civilisation, c’est-à-dire qu’il a proclamé la supériorité de l’état de nature sur l’état de civilisation en tant qu’hostile à la nature.

Havelock Ellis s’est occupé d’éthique philosophique (The New Spirit, The Soul of Spain, Philosophy of Conflict, Affirmations, Impressions and Comments. Little essays of Love and Virtue), d’art et de literature (British Men of Genius, the Dance of Life), de psychiâtrie (The Criminal). Il a même fait du roman (Kanga’s Creek), idylle australienne : il ne faut pas oublier qu’il a été quelque temps maître d’école dans la brousse de la grande île océanienne (1) et c’est aussi un poète de valeur. Descendant de marins, il a continué la tradition familiale en abordant à de nombreuses plages et en ne craignant pas, le plus souvent, d’explorer des régions où d’autres ne voulaient pas s’aventurer.

Apparenté aux Whitman, aux Carpenter, Havelock Ellis m’a toujours fait l’effet d’être une sorte de Léonard de Vinci anglo-saxon. A l’occasion de ses soixante-dix ans, un de mes amis, M. Joseph Ishill, auquel j’ai déjà fait allusion en parlant d’Elisée Reclus, a édité un volume qui n’a a été tiré qu’à 500 exemplaires, où des écrivains et des savants ont voulu rendre hommage au talent et à l’ampleur de vues du grand polygraphe qui nous occupe. Parmi les collaborateurs de cet ouvrage : Elie Faure, Hugh de Sélincourt, J.A. Hobson l’envisagent comme un humaniste et ce dernier dit de lui qu’il est « l’un des quelques grands humanistes de notre époque » – pour John Haynes Holmes, il est « la distillation parfaite de tout ce qu’il y a de mieux dans notre civilisation » – pour Annie G. Porritt, il est « le défenseur, le prophète, le voyant du mouvement féministe » – pour Margaret Sanger, il est « une des plus grandes forces génératrices de vie de notre siècle ». William Lloyd a vu en lui « le plus satisfaisant des grands hommes » qu’il ait jamais rencontrés – Pour Pierre Ramus, il est « le plus grand des investigateurs des mystères sexuels ». – Llewelyn aperçoit surtout en lui « une personnalité sensitive et au cœur tendre ».

N’est-ce pas un témoignage de la multilatéralité et de la fécondité de la pensée d’un auteur que les impressions différentes qu’il laisse chez des femmes et des hommes, dont le moins qu’on puisse dire est qu’ils n’obéissent pas à des considérations irréfléchies.

Pour ma part, dans ce volume, j’ai envisagé Havelock Ellis comme un artiste, plus spécialement comme un prophète de la joie de vivre. Dans la Pensée, l’Expression écrite, la Danse, la Morale, la Science, la Religion, il distingue, il découvre autant d’arts différents ; il est l’un de ceux qui veulent que la vie collective et que la vie individuelle soient semblables à une œuvre d’art. Il se montre ainsi un vrai fils de la Renaissance, l’un de ceux qui demandent à la vie d’être autre chose qu’une vallée de larmes, qui l’envisagent comme une marche alerte et joyeuse vers des coteaux aux pentes couvertes d’ombrages riants et éternellement verts.

En pleine boucherie mondiale, l’optimiste qu’est Havelock Ellis ne désespérait pas. C’st ainsi que dans ses Essays in War-Time, – « Essais écrits en temps de guerre » – il s’écriait :
« … La Guerre – dans le sens où la comprend l’humanité – semble être ignorée parmi les animaux vivant dans la Nature. Elle semble également avoir été ignorée, autant que les recherches permettent de s’en rendre compte, de la vie de l’homme primitif. Les hommes étaient bien trop occupés à combattre la nature pour se battre entre eux, bien trop absorbés à découvrir des méthodes d’autoconservation pour qu’il leur soit resté suffisamment d’énergie pour inventer des méthodes d’autodestruction. On supposait autrefois que les récits de guerre homériques représentaient un tableau de la vie à l’origine du monde. En fait, le tableau homérique correspond à un stade de la barbarie humaine, dans sa manifestation européenne, cela est certain, stade par lequel passait aussi l’Europe Septentrionale ; où en Bretagne, il y a environ quinze cents ans, le voyageur grec Posidonius rencontra les chefs de clan celtiques vivant à peu près comme les héros des temps homériques. Nous savons maintenant qu’Homère loin de nous ramener à un âge primitif représente l’achèvement d’un longue évolution de développement humain, marquée par un lent et constant accroissement de civilisation et dune vaste accumulation de luxe. La guerre est un luxe, en d’autres termes une manifestation d’énergie superflue, impossible aux âges primitifs où toutes les énergies de l’homme sont consacrées à la tâche primordiale de conserver et préserver la vie. La guerre a donc eu un commencement dans l’histoire humaine. Est-il déraisonnable d’imaginer qu’elle aura également une fin ?... »

Les hommes de notre siècle persécutent l’anormal, le non-conformiste. Quiconque s’écarte de al « Sagesse » contemporaine, ne veut pas s’incliner devant le culte de l’affairisme, est bon pour l’internement dans un asile d’aliénés ou taxé de demi-fou. Non sans ironie, dans ses Impressions and Comments – « Impressions et Commentaires » – Havelock Ellis leur rappelle l’origine de la civilisation et de la religion occidentales :
« Si les asiles d’aliénés tels qu’on les comprend actuellement avaient existé il y a trois mille ans, nous aurions pu avoir ou ne pas avoir la Grèce ou Rome – c’est douteux – mais il est certain que nous n’aurions eu ni l’Ancien ni le Nouveau Testament. La religion hébraïque aurait péri par anémie et la religion chrétienne n’aurait pu voir le jour. Presque tous les prophètes des Juifs, à partir de Samuel, sont des clients pour les aliénistes et des candidats aux maisons de fous. S’il avait existé un asile d’aliénés dans les environs de Jérusalem, Jésus-Christ y aurait été infailliblement enfermé dès le début de sa carrière publique. Son entrevue avec Satan sur le sommet du Temple aurait suffi à le signaler, et tout ce qui est arrivé par la suite n’aurait eu pour effet que confirmer le diagnostic. Toute la conformation religieuse du monde moderne est due à l’absence, à Jérusalem, d’un asile d’aliénés. »

Dans sa préface à The New Spirit, il a expliqué qu’il voulait jeter sur le monde le coup d’œil d’un oiseau ; sa vie tout entière s’est passée, d’ailleurs, à s’élever « toujours plus haut » – on dirait la nostalgie d’un aigle captif. On sent cela dans certaines de ses phrases, même séparées de leur contexte : « un frémissement libérateur » – « une expansion joyeuse de tout l’être » – « une main qui se tend vers l’illimitable » – « le feu central de la vie lui-même » – « la somme des impulsions expansives et mises en liberté de tout notre être ». A mesure que nous parcourons l’œuvre de ce grand essayiste, nous éprouvons le sentiment d’être mis en présence d’un voyageur qui a visité de nombreux jardins, mais sans jamais se départir de son calme. Il a cueilli tout ce qu’il a rencontré sur son chemin : les bonnes comme les mauvaises herbes des expériences humaines, mais cela silencieusement, sans infliger condamnation, sans que la compassion ne cesse d’accompagner ses constatations. Havelock Ellis n’a rien du Vandale vindicatif qu’il nous semble souvent démasquer chez Nietzsche ni du Goth brutal sous les espèces duquel se présente fréquemment Bernard Shaw.

– o –

J’ai dit que ses études de Psychologie Sexuelle (la traduction française est due à M. Van Gennep) était son œuvre maîtresse. La publication du premier tome donna lieu à des poursuites ridicules de la part de la police anglaise et les volumes qui suivirent durent être édités aux Etats-Unis. Il n’est aujourd’hui aucun médecin, aucun sociologue digne de ce nom, aucun sexologue qui ne se réfère à cet ouvrage, bourré de documentation. Ses travaux font autorité.

Tout le monde sait que tout en paraissant extérieurement très en avance pour tout ce qui concerne la vie sexuelle, la France est à la vérité un pays très retardataire en matière d’éducation et de psychologie sexuelles.

En France, certes, on jouit d’une certaine liberté sexuelle, dont l’amplitude dépend des dispositions du pouvoir ; mais tout ce qui a trait au sexuel devient facilement matière à plaisanterie, trop facilement, ou encore il est entendu que ce n’est pas un sujet dont on discute en bonne compagnie. Ceux-là même dont les mœurs indiquent qu’ils sont des émancipés montrent de la répugnance à discuter sincèrement de la question sexuelle, dès lors qu’on l’envisage autrement que sous l’angle pathologique.

Toutes les familles en France comptent un, deux, ou trois enfants au plus. Une foule de ménages sont sans enfants, y compris ceux des dirigeants politiques. Cela n’empêche pas les lois réprimant la propagande néo-malthusienne et l’avortement d’être ridiculement sévères.

Sans doute, en France, on fait de la psychologie sexuelle, c’est-à-dire qu’en de romans plus ou moins bien écrits, on analyse les états d’être et les mouvements de l’âme que peut susciter la passion amoureuse.

Ce que Havelock Ellis a entendu par psychologie sexuelle est tout autre chose que cette analyse romantique et sans portée. C’est pourquoi il convient de le remercier de la lumière qu’il a projetée sur la route si longtemps obscure et obscurcie sur laquelle se meut la sexualité.

C’est à la fois en biologiste et en philosophe que Havelock Ellis a considéré la psychologie sexuelle. Il part de ce principe que l’instinct sexuel est un fait humain dont il est vain de se dissimuler l’importance et les répercussions sur l’espèce et sur l’individu. La sexualité doit être étudiée dans toutes ses manifestations et il n’est aucune de ses manifestations dont l’étude ne puisse être avantageuse à l’esprit et au cœur de l’homme. Fermer les yeux devant le fait sexuel ou l’aborder avec des préjugés, c’est – selon lui – se comporter en insensé et en ignorant.

Dans ses « Petits Essais sur l’amour et la vertu » Havelock Ellis a répondu à ceux qui l’accusaient de faire œuvre de perversion en ces termes : « Le moraliste qui exclut la passion de la vie n’est pas de notre époque ; depuis longtemps sa place est parmi les morts. Car nous savons ce qui se passe dans le monde quand triomphent ceux qui rejettent la passion. Quand l’amour est disparu, c’est la haine qui prend sa place. Les orgies amoureuses les plus déréglées ne sont que fêtes innocentes comparées aux orgies de la haine. Les nations – qui auraient pu s’adorer l’une l’autre – se coupent mutuellement la gorge quand c’est la cruauté, la propre-justice, le mensonge, l’iniquité et toutes les puissances de Destruction qui ravagent le cœur humain : la terre est dévastée, les fibres de l’organisme humain se détendent, tous les idéaux de la civilisation s’avilissent. Si le monde n’est pas las de la haine à présent, il ne le sera jamais, mais quoi qu’il doive arriver au monde, souvenons-nous qu’il reste encore l’individu pour accomplir le labeur de l’amour : faire le bien, même dans un monde mauvais ».

J’ai été profondément frappé de la loyauté et du courage dont fait preuve Havelock Ellis en étudiant le délicat sujet de ce qu’on a coutume d’appeler les aberrations sexuelles. Grâce à son grand cœur, nous en sommes venus à nous demander si non seulement les soi-disant anormaux sexuels n’étaient pas des victimes innocentes de l’inimitié sociale, mais si, à cette inimitié – déjà lourde à porter – ne s’ajoutait pas, en plus, la réprobation personnelle provenant de l’ignorance où ils sont, eux, tenus, en général, des variations ou des déviations de l’instinct sexuel. N’est-il pas barbare d’admettre et de tolérer que l’anomalie sexuelle fasse de ceux qui en sont l’objet de véritables parias, alors que leur conduite quotidienne ordinaire ne présente aucune déformation ? Plus encore : les anomalies sexuelles ne doivent-elles pas être classées, tout simplement, parmi les divers aspects dont sont susceptibles l’instinct et l’impulsions sexuels et certaines d’entre elles, malgré leur bénignité, apparaîtraient-elles si horribles si leur « horreur » ne servait pas si bien les intérêts de ceux qui ne considèrent, dans le fait sexuel, que la manifestation procréatrice ?

Toutes ces questions, les ouvrages de Havelock Ellis incitent le penseur à se les poser. On peut ne pas partager toutes les conclusions de l’auteur des « Etudes de Psychologie sexuelle », on ne saurait contester qu’il ne nous conduise à de vastes clairières, où viennent déboucher toutes sortes de chemins imparfaitement tracés ou à peine entrevus jusqu’à lui.

*
* *

Havelock Ellis est aussi un naturiste, avons-nous dit. Il est toujours demeuré en contact étroit avec la nature. Les plus importants de ses ouvrages ont été composés dans un petit cottage, à Carbis Bay, sur la côte de Cornouailles, face à la mer. Il a toujours regretté d’être obligé de quitter ce séjour enchanteur pour retourner à la vie fiévreuse et agitée de Londres où l’appelaient ses recherches.

Qui douterait d’ailleurs de son « naturisme » après la lecture des passages ci-dessous, extraits de Impressions and Comments, 1re, 2e, et 3e séries :
« Les enfants sont davantage que des ruisseaux murmurants, les femmes avantage que des fleurs odoriférantes, les hommes davantage que des arbres ambulants. Mais par un côté pourtant, ils font partie du spectacle et de la musique de la Nature, non pas simplement en tant que créateurs de tableaux et de mélodies, mais parce qu’ils sont plus essentiellement eux-mêmes et la musique et le spectacle. Nous ne saurions trop souvent nous rappeler que l’art de l’homme est non seulement un art créé par la Nature, mais que l’homme lui-même est la Nature. Par suite, dans la mesure où nous nourrissons cette foi et où nous cherchons à vivre en conséquence, nous justifions notre droit à la Terre et nous conservons nos relations vitales et saines avec la vie de la Terre. Les poètes se plaisent à voir des émotions humaines dans la succession des phénomènes économiques. Mais il nous faut apercevoir aussi la force du soleil et la poudre de la terre dans les jets saccadés du sang dans les artères de l’homme ».
« La civilisation et la morale peuvent paraître nous tenir à l’écart de la nature. Le monde a été cependant – et littéralement parlant – planté en nos cœurs. Nous sommes de la même substance que l’Univers. En présence de ce fait, les Mœurs et la Civilisation s’effondrent dans le Néant ».
« …Tout le jour, je suis resté étendu sur la falaise ou sur le sable, travaillant, tandis que de temps à autre, mes yeux, se levant, s’arrêtaient sur le spectacle d’un mère, pas trop éloignée, jouant avec son enfant. Le soleil et l’air, se mêlant à cette radieuse vision, s’infiltraient en mon sang, déversant une nouvelle vigueur en mes veines, une nouvelle inspiration en mes pensées… L’Inspiration ! C’est seulement ici que je me sens inspiré, que je respire véritablement, dans l’air pur et chaud qui vient de la mer, nourriture du corps et de l’âme, symbole de l’amour, vin enchanteur du monde ».
« … Il fait une chaude journée, mais la chaleur est douce. La chaleur du soleil et la fraîcheur de l’air semblent, à cette époque délicatement équilibrée de l’année, alterner, de façon rythmique, en une délicieuse harmonie. Loin des yeux des hommes, nous sommes libres d’entr’ouvrir nos vêtements et de continuer, si nous le voulons, jusqu’à nous en débarrasser complètement, de sorte que le soleil et l’air puissent jouer délicieusement à travers notre chair ».

Il est une devise célèbre que Havelock Ellis a placée en tête d’une série e sonnets de sa composition, série intitulée Life and the Soul – la vie et l’âme – et que voici : « La Vie est davantage que l’aliment et le Corps plus que le vêtement ». Le choix de cette devise n’en fait-il pas un « naturiste intégral » ?

(1) Il faut aussi mentionner ses ouvrages d’éthique sexuelle. Love and Marriage, The object of Marriage, Man and Woman.

Ecrit par Cercamon, à 21:04 dans la rubrique "Culture".

Commentaires :

  Garibal
29-03-07
à 10:25

Vente d'ouvrages


Monsieur,

Je suis secrétaire d'une assocaition et détenons la collection des 24(je crois) volumes d'Havelock Ellis portant sur l'Etude de la psychologie sexuelle.
Cette vente se ferait profit de notre association.
Pensez-vous que nous pouvons la vendre et par quel réseau ??

Je vous remercie de votre réponse

Florence Garibal

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