Ceuta et Melilla : non à la militarisation des frontières reconverties en murs de la honte
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Solidal : "Face aux graves évènements qui se sont produits aux frontières de Ceuta et de Melilla, qui ont provoqué le décès d’au moins huit personnes et fait des dizaines de blessés, dont le seul délit était le désir de trouver un futur plus digne, nous souhaitons exprimer notre douleur, notre indignation et notre condamnation énergique.
En premier lieu, il est nécessaire de procéder à une investigation sur les graves atteintes et violations des droits de l’homme qui se produisent aux alentour des deux frontières, que soient également clarifiés, avec l’aide d’observateurs internationaux, les faits survenus, et enfin que les responsabilités pertinentes soient déterminées.
Nous rejetons le fait que l’unique voie d’aborder le phénomène migratoire entre l’Afrique et l’Europe soit la militarisation et la conversion des frontières en nouveaux murs de la honte, cette fois enclavés en territoire africain.
L’Union Européenne ne doit pas affronter les problèmes sous-jacents et dérivés des migrations avec des politiques chaque fois plus dures, basées sur l’imperméabilisation des frontières, sur des systèmes de contrôle policiers sophistiqués, sur le recul dans les politiques d’asile, sur des accords d’expulsions collectives, sur des centres de rétention et d’internement, sur l’externalisation de sa gestion de l’asile et des migrations, etc...
Au contraire il est nécessaire de mettre en marche des politiques généreuses et d’une plus grande perspective qui mettent en avant la Coopération effective pour le Développement et la Solidarité et qui sauvegardent les droits humains. Nous ne pouvons pas faire de l’Europe une Forteresse régie uniquement par l’égoïsme économique quant à l’acceptation des personnes migrantes.
Or, les évènements survenus ces derniers jours à Ceuta et Melilla s’encadrent bien plus dans ces politiques au profil dur et non-solidaire, et aux conséquences tragiques, que dans cette autre approche présidée par la Coopération, la Solidarité et les Droits Humains.
Dans ce contexte, nous mettons également en question le projet de création de Centres pour Mineurs au Maroc, traité dans le sommet hispano-marocain du 28 septembre 2005, devant les douteuses garanties de respect des droits rassemblés dans les Conventions Internationales en ce qui concerne l’Enfance.
Nous dénonçons de la même manière que le Maroc ait accepté de se transformer en gardien de la frontière sud de l’Union Européenne. Le manque de garanties démocratiques et la violation des droits humains sont une réalité constante dans un pays choisi précisément pour effectuer la sale besogne pour le compte de l’U.E.
Il est inacceptable que l’Union Européenne détourne le regard face aux violations de droits élémentaires perpétrées par le Maroc envers les migrants.
L’Europe ne peut pas oublier ses responsabilités dans les problèmes de fond qui sont à l’origine du désespoir des africains qui tentent d’arriver jusqu’à elle.
Il s’agit de personnes qui, après de nombreux maux pour traverser la moitié de l’Afrique, se retrouvent vivant dans des conditions inhumaines, dans l’attente d’une opportunité pour entrer en Europe. Il ne faut pas s’étonner qu’après les coups, et le harcèlement des différents corps de police marocains, et face à l’imperméabilisation chaque fois plus importante de la frontière, ils parviennent à des situations de désespoir inimaginables.
L’Europe doit assumer sa responsabilité historique et actuelle dans la situation de tout un continent qui a aujourd’hui plus de 100 millions de pauvres extrêmes. Avec la participation soulignée d’entreprises transnationales, l’Afrique et les africains ont été spoliés, dépouillés, et ont été condamnés à la dislocation et à la misère. Et quand, fruit de leur situation extrême, ils tentent d’émigrer, l’Europe les empêche de le faire légalement et ne leur laissent pas d’autre alternative que de tenter la terrible traversée de l’émigration irrégulière.
Pour toutes ces raisons, et en étant dans le même temps conscients de la complexité des facteurs qui ont une incidence sur ce problème, nous souhaitons :
- Que soit créée une Commission de Recherche, avec la participation d’observateurs internationaux indépendants, qui clarifie tout ce qui est arrivé dans les luctuosos ( ?) événements de Ceuta et de Melilla, et détermine les responsabilités adéquates.
- Que s’arrête immédiatement la persécution, le harcèlement, la violence et les déportations vers le décès aux frontières de l’Algérie et de la Mauritanie de la part du gouvernement marocain envers les migrants subsahariens.
- Que soit autorisé et facilité l’accès d’une aide d’urgence de la part d’organismes internationaux à caractère humanitaire à ces personnes.
- Que soient scrupuleusement respectées les conventions internationales et les lois espagnoles qui protègent le demandeur d’asile et qui établissent des protocoles d’attention aux migrants. En particulier, doivent cesser les expulsions collectives illégales pratiquées par la Guardia Civil espagnole.
- Nous critiquons en l’espèce l’emploi de l’Armée dans des tâches de contrôle de frontières puisque nous ne parlons pas d’une affaire à caractère militaire mais d’un problème humanitaire et social grave.
- De manière plus générale, nous croyons indispensable un changement de direction dans les politiques migratoires de l’Union Européenne, qui auraient comme axe inspirateur les critères de solidarité et de respect des droits humains. De la même manière qu’il résulte indispensable de rendre l’accueil plus digne et de favoriser des politiques pour l’insertion des personnes qui sont arrivées en Europe.
- Finalement, et comme mesure d’effets à plus long terme, nous nous solidarisons à toutes les campagnes et exigences qui posent l’annulation de la dette externe, le destin du 0,7 % au Développement et la mise en marche d’un d’un ambitieux plan de coopération pour le développement structurel destiné prioritairement à mettre un terme aux situations de pauvreté et de misère que vit le continent africain. De la même manière que nous considérons soutenir tous ceux qui travaillent pour la fin de la violence, qui détruit de nombreux pays africains, et pour leur démocratisation.
Par
Hébert Abd-El Krim*, SOLIDAL - 7/10/2005
à 00:13