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«Mai 68 caricaturé, détourné, occulté»

Lu sur Contre journal : «J'accuse les médias, les intellectuels, les historiens de ne pas avoir voulu montrer les acquis fugitifs mais immenses de 68» estime Bernard Collot, enseignant et blogueur, dans un texte envoyé à Libération, réaction au numéro spécial consacré à mai 68, le1er février. Il est l'auteur sur son blog d'un dossier consacré « au bouillonnement des années 60 -70 ».

« C’est avec une colère de plus en plus grandissante que je lis, j’entends, je vois l’image que l’on fabrique de mai 68.

J’accuse les Cohn Bendit, Sauvageot, Glucksmann et autres de l’avoir transformé en une pièce de théâtre parisienne dont ils ont été ou veulent pour certains rester les vedettes.

J’accuse les intellectuels d’aujourd’hui d’ignorer ou de feindre ignorer que d’autres intellectuels, bien avant 68, avaient jeté les bases de ce qui a failli être une révolution.

J’accuse les partis politiques, les organisations syndicales, d’avoir mis tout leur poids pour enrayer ce qui leur échappait et risquait de les remettre en cause, ce qu’ils paient encore aujourd’hui.

J’accuse les médias de se cantonner dans la reproduction d’une image sans avoir jamais cherché à savoir et informer sur ce qui se passait sous la partie visible de l’iceberg complaisamment étalée. Je les accuse avec les intellectuels, les historiens de ne pas avoir voulu montrer comment les acquis fugitifs mais immenses de 68 ont été patiemment détricotés dès le lendemain pendant 40 ans. Je les accuse d’escroquerie intellectuelle, d’aveuglement historien, de déni d’information.

J’accuse Libé (et July), qui avait été l’avènement d’une nouvelle conception de la presse détachée du conformisme et du politiquement correct, d’avoir bradé ce qui faisait son essence et son sens jusqu’à oublier dans son analyse de 68 sa propre origine et sa propre histoire.

Mais je n’accuse pas Sarkozy d’en avoir encore peur et de vouloir définitivement éradiquer tout ce qui pourrait encore en rester ! C’est à dire terminer le boulot de tous ses prédécesseurs entamé dès le lendemain du mois de mai.

Mai 68, c’est ailleurs qu’à Paris, ailleurs que sous les barricades ou dans les scènes de la Sorbonne qu’il a vraiment eu lieu. Même si les manifs, heurts avec les CRS, slogans étudiants, en ont été l’étincelle et une pseudo-vitrine.

C’est partout ailleurs qu’il a eu lieu, là où les micros et caméras ne vont pas. Cela a été une formidable prise de conscience pacifique de la citoyenneté. Une étonnante découverte des autres et du pouvoir collectif qui pouvait en découler, une étonnante pratique de l’écoute, une rupture des clivages sociaux culturels.

Dans ma campagne, nous nous retrouvions quotidiennement, enseignants novateurs, enseignants traditionnels, parents, paysans, artisans, anciens de 36... Entre pétanques, saucissons et beaujolpif nous nous penchions sur notre école, nos relations socio-économiques, le travail, nos institutions et nous trouvions des consensus dont on était sûrs qu’ils pouvaient être concrétisés dès le lendemain, au moins à notre niveau local. Nous étions prêts à les mettre en œuvre nous-mêmes. Nous n’inventions pas une utopie, nous vivions déjà dans l’autogestion sans avoir à la théoriser.

Les clivages qui paraissaient insurmontables s’écroulaient tout seuls. Des curés (pas tous bien sûr) défendaient les grévistes en pleine chaire. Nous allions casser la croûte et discuter avec les grévistes des usines de St-Etienne, des ouvriers grévistes venaient casser la croûte avec des instits grévistes. L’école, la bouffe, le boulot à la chaîne… devenant l’affaire de tous.

Les solidarités pour pallier aux effets de la grève s’établissaient toutes seules. Covoiturage, accueil des enfants, confection des repas… C’est à cette époque que sont nées les crèches parentales, «Libération» servant de relais informatique. La fabuleuse aventure des Lip dont on se garde bien de parler aujourd’hui mais qui faisait qu’on était tous fiers d’arborer une « lip » !

Ce qu’on se garde bien de dire aussi c’est que c’est bien avant 68 cela bougeait. Dans mon domaine, l’école, dès les années 60 les mouvements pédagogiques avaient retrouvé le dynamisme, l’invention qui avaient été les leurs dans les années précédent 1936 !

Et personne ne rend compte du détricotage entrepris, dès les années 70, pour éliminer ou rendre stériles les acquis, qu’ils soient au niveau du monde du travail ou de l’éducation. Ce qui permet de dire sans rire que 68 n’a servi à rien ! Comme on pourrait d’ailleurs dire aujourd’hui que 1936 n’a servi à rien, que 1789 n’a servi à rien puisqu’on se retrouve sous un régime monarchique avec un droit du travail réduit à pas grand chose.

Au niveau de l’éducation le détricotage a duré 40 ans, et c’est encore l’éducation au premier chef qui est visé par les déclarations présidentielles hystériques. Les 3 derniers ministres n’ont fait que mettre un point d’orgue à l’élimination de ce qui avait été injecté par les ministères des années 70, injecté il est vrai sans modifier un système qui date lui du XIXème siècle. Dans cette démolition patiente, des ministres de gauche se sont d’ailleurs illustrés comme Jean-Pierre Chevènement !

Ce qui a fait peur, en 68, ce qui fait toujours peur à Sarkozy et je le comprends, c’est qu’en dehors du théâtre parisien, des milliers de personnes ne se sont pas révoltées mais sont devenues citoyennes, ont osé penser, proposer, échanger, concevoir, critiquer et même se critiquer, réaliser, assumer… par elles-mêmes, collectivement, librement, de façon adulte et consciente. C’est terrifiant pour toute la nomenclature politique, syndicale, économique, possédante. Bien plus qu’une révolte qu’on peut mâter, détourner, gruger. Le spectacle des pavés arrachés ou des graffitis estudiantins qu’on expose encore aujourd’hui ne sont que des leurres bien utiles. »

Ecrit par libertad, à 11:56 dans la rubrique "Pour comprendre".



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