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Mythes nuisibles de la prostitution

Lu sur Bulletin SansTitre : "Une interview de Ania, femme rebelle de Pologne : "Mon rêve c'est une brigade de prostituées révolutionnaires contre la religion... "

Véronika : Peux tu nous dire brièvement, pour commencer quelles sont tes passions et ce que tu fais ?
Ania : Je suis étudiante en sciences sociales, impliquée dans le mouvement anti-guerre et dans la solidarité avec la Palestine occupée. Je participe à de nombreuses autres activités de différents mouvements libertaires. Mes passions et en même temps mes plus importantes aventures de vie sont l'anarchisme et le féminisme. J'ai décidé de me prostituer il y a 10 ans. Je pensais que ce serait un moyen de financer mes études.

Veronika : Pourquoi as-tu décidé de donner cette interview ?
Ania : La prostitution tient une grande place dans ma vie et je ne peux, ni ne veux, le nier ou le taire. D'un autre côté, durant les 10 années pendant lesquelles j'ai exercé cette "profession" je n'ai eu que peu d'occasions de parler librement et sincèrement de ce sujet et c'était toujours dans le cadre de discussions privées. Mais toutes les prostituées, dans leur diversité ont besoin de la moindre plateforme de libre expression. Comme tout groupe social nous avons besoin de dialogue J'y vois un terrain pour les féministes, partout mais particulièrement en Europe de l'Est. C'est mon appel et ma profonde demande aux féministes : ne laissez pas cet espace retourner à l'Eglise, à l'Etat, aux statistiques de police, aux porte-paroles policiers, à la presse de caniveau ... bref, ne le laissez pas aux hommes.
Lorsque je parle de mes expériences personnelles de la prostitution j'ai l'impression de ne pas parler seulement de moi. Je suis persuadée de parler pour de nombreuses femmes qui, pour différentes raisons " n'ont pas de voix ", particulièrement en Europe de l'Est et en Pologne. C'est pour cela que je parle de " nous ", même si j'en ai fini depuis quelques semaines avec cette "profession". Le vieux slogan féministe " le privé est politique " prend son sens avec nous : j'ai conscience que mon histoire est l'histoire de centaines ou de milliers de femmes, avec quelques différences de détail bien sûr.
En dehors du fait que je veuille rendre justice à mes camarades femmes auxquelles je dois la solidarité, c'est la première occasion pour moi depuis 10 ans de partager mes idées. En 10 ans de prostitution je n'ai trouvé aucun milieu, aucune tribune où je pourrais parler librement de la "profession "de ma vie. Je ne pense pas que ce soit bien. Nous, prostituées, sommes condamnées à la double vie. Nos familles, nos amis (si nous en avons) nos professeurs etc... ne savent pas, n'imaginent pas ou ne veulent rien savoir de cette " deuxième vie ". La société préfère taire notre existence et ne rien savoir du tout sur nous, même si nous sommes un groupe social considérable. Nous sommes soit un remord, soit un danger pour un système, pour le patriarcat, pour les hommes. Peut être parce que notre existence brise trop de tabous ? Peut être parce que nous en connaissons parfois plus sur les hommes que leurs propres femmes, leurs familles, leur milieu ? Ils nous montrent la part d'eux même qui devrait rester dans l'ombre, qui devrait être cachée à leur entourage. C'est peut être pour cela qu'ils font tout pour nous empêcher de parler librement. Les prostituées elles mêmes ont peur de prendre la parole. Elles savent bien qu'elles ne sont pas les bienvenues dans la sphère publique. Les hommes ont réussi à les repousser sous terre, à les séparer des autres femmes, des autres gens. C'est pour ça que la prostitution s'accompagne d'une terrible solitude, d'une solitude inhumaine. Ce serait très intéressant d'étudier les mécanismes d'exclusion qui sont à l'oeuvre ici.
Je pense que la morale et la religion sont parmi les plus importants.

Veronika : comment définis-tu la prostitution ?
Ania : C'est une des questions les plus difficiles. Personnellement j'ai déjà utilisé le terme " profession " mais je préfèrerais toujours mettre ce terme entre guillemets. Aujourd'hui le travail de prostitution n'est pas comparable avec aucune autre activité lucrative, avec aucune autre " profession " en fait. Je vais essayer d'expliquer. Ce travail " cimente " la domination patriarcale des hommes. Ce sont eux qui dictent les conditions. Celui qui paie dicte les conditions. L'arrangement entre la prostituée et le client n'est pas horizontal. Il ne le sera jamais tant que l'argent jouera son rôle. Le fait de vendre des services sexuels écarte une femme du contact avec son propre corps et du plaisir qu'elle peut en tirer. Il l'écarte de toute connaissance des besoins de son propre corps. C'est un aspect extraordinairement cruel qui découle du fait d'utiliser son propre corps comme un outil.
J'ai entendu l'argument qui ramène la prostitution à un travail physique quelconque. C'est une grossière simplification. Dans aucun autre travail l'objectivation n'est poussée aussi loin. Les travailleuses à l'usine n'ont pas à accepter une douleur dans leur ventre pendant leur travail. Je me demande si les clients des prostituées savent combien d'entre elles travaillent pendant leurs règles. Laisse moi expliquer ce que cela veut dire, vraiment. Avant les rapports, la prostituée place un morceau d'éponge naturelle dans son vagin ou une pièce d'éponge commune ou un tampon coupé en deux. Cela dépend de ce qu'elle a ou de ce qu'elle peut se payer (l'éponge naturelle est la plus saine mais aussi la plus chère). Elle fait souvent cela rapidement et sans hygiène. Elle se blesse souvent, surtout si elle a les ongles longs et le plus souvent elle les a parce que c'est une des exigences du marché, c'est-à-dire des hommes. Le rapport est alors douloureux, en particulier si elle s'est griffée. Dans bien des cas elle ne peut pas dire à l'homme qu'elle préfèrerait ne pas être pénétrée.
Parfois elle est incapable de contrôler l'intensité du rapport. Ensuite, elle devra retirer l'éponge, à nouveau dans la hâte... et ceci plusieurs fois par jour, pendant plusieurs jours. On pourrait dire que c'est sa faute, qu'elle n'a qu'à pas travailler pendant ses règles, mais ce n'est pas facile. Les prostituées travaillent quand elles ont besoin d'argent, comme tout le monde. Le client, bien sûr ne voit rien parce que la prostituée est une excellente actrice. Elle a besoin de l'être. L'une de mes amies a travaillé une semaine entière alors qu'on lui avait dit d'aller à l'hôpital. Elle avait un kyste, qui s'est bien sûr percé pendant son travail. J'ai vu des femmes travailler alors qu'elles étaient enceintes. L'une d'entre elles était amenée par son mari, prés de l'autoroute où elle travaillait. C'était en Pologne, proche de la frontière allemande mais j'ai entendu les mêmes histoires en Allemagne alors ce doit être pareil partout.
Quand je parle d'une " femme qui ne peut contrôler l'intensité du rapport " je veux dire qu'elle est violée. Ni plus, ni moins. Les clients excités souvent ne voient pas sa résistance, et s'il la voit sa réaction peut être terrible. Il a payé pour un service et il veut l'avoir, comme il l'a imaginé. Le sadisme est notre pain quotidien. Je me suis souvent demandé pourquoi des clients généreusement pourvus par la nature choisissaient des prostituées frêles et délicates, celles avec un visage d'enfant... Chaque prostituée doit verrouiller ses sensations de douleur et ses sensations en général, le dégoût par exemple. C'est pour cela que je pense que les prostituées sont les personnes les plus à l'écart de leur propre corps, qui en retirent le moins de plaisir. Plus encore que les nonnes, je dirais et certainement plus que les femmes travaillant à l'usine qui, au moins, disposent de leur propre corps... théoriquement. Elles n'ont pas à sourire alors que quelqu'un les viole. " Le marché " impose les conditions de travail mais ce caractère impersonnel fausse la réalité. " Marché " ne signifie rien d'autre que " les hommes ". Ce sont eux qui dictent l'apparence des prostituées, le prix, la nature du service. Même le terme " service " est très ambigu. De nombreux hommes voudraient exercer du pouvoir sur la personnalité de celle qu'ils paient. La relation entre la prostituée et le client est souvent (toujours ?) une guerre larvée ou ouverte. Je pense que, plus ou moins consciemment, c'est une source d'excitation sexuelle pour le client. Certains en sont clairement conscients. Ils ressentent du plaisir et de l'excitation à dépasser les limites. Si elle refuse qu'on lui touche le visage ou d'être embrassée, par exemple, ce qui sont les tabous les plus courants des prostituées (chacune a ses propres tabous) le client qui sait qu'elle dépend de son argent, qu'elle ne partira pas, qu'elle ne lui criera pas dessus, cherchera toujours à le faire. Si elle réagit, elle a de grandes chances de perdre sa place. Cela m'est arrivé assez souvent. La " contrainte " est peut être la meilleure description de la façon dont je perçois la prostitution. Je dois rajouter ici que selon moi dans une société patriarcale toutes ou la plupart des relations entre sexes touchent à une forme de prostitution. A l'école, à l'université, dans la rue, TOUTE femme, quelque soit son age, son apparence ou son statut social, parfois, est traitée comme une prostituée. Chacune de nous est humiliée, à ceci près que les prostituées prennent de l'argent pour cela.
Il n'y a pas grande différence entre une prostituée et une " femme bien " complètement assujettie au patriarcat. La différence existe entre elles et ces femmes qui ont appris à se battre pour l'autonomie (sexuelle ou autre).

Veronika : Comment en es-tu venue à choisir ce moyen de gagner de l'argent? A prendre cette décision... très dure dans une vie...
Ania : Aucune femme ne peut prendre facilement une telle décision. A cette époque déjà, j'avais vaguement conscience des conséquences possibles. Je me rappelle que je pensais qu'il y avait des femmes " faites pour " cette " profession " mais je ne m'incluais pas dedans. Aujourd'hui je pense qu'aucune d'entre nous n'est " faite pour " ça. Avant de n'avoir ne serait-ce que l'idée d'envisager cette possibilité, j'ai fait le tour de toutes les autres qui s'offraient à moi ? En fait, il n'y en avait pas beaucoup. J'étais très jeune, un an après mon bac, sans " profession " en main, un peu effrayée d'avoir à vivre de façon indépendante. Après la fin du lycée j'ai quitté la maison de mes parents. Comme mon père ne voulait pas payer mes études j'avais conscience que je devais commencer à travailler. J'ai vite vu qu'avec des petits boulots étudiants, un travail dur chez Pizza Hut ou des cours particuliers je n'arrivais pas à couvrir tous mes frais. Je n'avais pas de bourse, mon père gagnait trop... En fait j'ai gagné un procès pour une pension mais le juge a considéré que " comme toute bonne jeune fille, vous devriez vous réconcilier avec votre père et rentrer à la maison ". Alors j'ai juste eu 100zl par mois (50 euros), même pas de quoi payer le loyer de la plus petite chambre. Mais je me rappelle que je me battais... je me souviens de l'insensibilité de l'intendant de l'université auquel j'ai fait part de mes difficultés en lui demandant de l'aide. Je me demande comment tout cela aurait tourné si les universités polonaises avaient un responsable de l'égalité et des droits de la femme, comme en Allemagne. Qui sait... j'aurai au moins su à qui m'adresser.

Veronika : Prostitution et société polonaise. Qu'est ce que cela t'évoque?
Ania : Dans la société polonaise, la plupart des gens se revendiquent comme fidèles à la foi. L'église catholique a une énorme influence sur toute la sphère morale. La " moralité double " des catholiques fait des dégâts sur tout le monde, d'énormes dégâts. Mais puisque le patriarcat et la religion sont des systèmes installés par les hommes, ceux qui souffrent le plus sont les femmes et les enfants, placés sous leur influence. Parmi les femmes, les prostituées souffrent le plus parce qu'elles sont les moins émancipées. Les prostituées polonaises sont souvent, trop souvent des femmes qui ont un sens très faible de leur propre valeur. Elles ont entendu en tant qu'enfants parler des kurwas', putes, salopes... ou tous les mots qu'on peut utiliser dans cette société pour qualifier les prostituées. Cela existe partout, mais en Pologne certaines ont adopté cette morale catholique et se considèrent elles mêmes comme " les pécheresses ". C'est pour cela qu'elles ne résistent pas, ne s'organisent pas en syndicats, ne se battent pas pour leurs droits et font rarement preuve de solidarité envers leurs amies prostituées, comme les Allemandes, par exemple. Elles essaient très rarement de se libérer du contrôle des hommes, riverains, macs ou police. Les effets de cette influence catholique sont dramatiques et je pense que ce n'est pas bien mieux dans les autres pays d'Europe de l'Est. J'ai vu des prostituées d'ex pays soviétiques effrayées, soumises comme des agneaux, esclaves parfaites. Certaines d'entre elles étaient même dévotes. L'une d'entre elle lisait la Bible tous les jours après le travail. Je me demande comment elle pouvait dormir avec la dose de damnation envers les prostituées que ce livre contient. Bref, en Europe de l'Est, les prostituées ne sont pas rares et ce sont probablement elles qui souffrent le plus du fait ce cette lutte supplémentaire contre leurs propres scrupules. Cela doit être un cauchemar. En tous cas, je n'aimerais pas être dans la peau d'un prêtre quand un beau jour, toutes les femmes arriveront à la conclusion logique que c'est le clergé qui est responsable de leur satanée mauvaise conscience d'elles mêmes... J'espère que ce jour viendra. Mon rêve c'est une brigade de prostituées révolutionnaires qui combatte la religion... Certaines prostituées ont adopté le mythe de la " Mère polonaise " et se torturent entre elles avec ça. Je connaissais une femme qui combattait sans pitié contre les femmes sans enfants. Elle déclarait que seules les femmes qui travaillent pour leurs enfants méritent le respect. Elle travaillait pour son fils. C'est juste une exemple de stupide " division en classes " parmi les prostituées. J'ai déjà parlé des immigrées. C'est une classe à part parmi les prostituées : si elles vivent et travaillent illégalement elles sont des victimes faciles des hommes, macs ou policiers. Elles n'ont aucun droit alors elles sont soumises et obéissantes.
C'est pareil partout. En Pologne ce sont des femmes de Russie, d'Ukraine ou de Bulgarie. En Allemagne, il y a peu c'était des femmes de Pologne, Tchéquie ou d'autres nouveaux pays européens qui peuvent travailler légalement en Europe maintenant. En Espagne ce sont des femmes d'Amérique latine ou d'Afrique. Elles sont à vendre. C'est de la traite d'esclaves. Ce n'est pas vrai que les hommes ne le savent pas. Ils profitent de leur situation comme clients ou policiers. Certains interviennent d'ailleurs dans les deux rôles. Un des night-club de Wroclaw où je travaillais il y a 10 ans était " protégé " par la police locale. Presque tous les jours des policiers étaient invités et clients. La femme qui possédait ce club était rackettée par la mafia, alors, entre deux démons, elle finit par préférer la police. Bien sûr les policiers savaient très bien quelles filles étaient illégales et ils les faisaient chanter. De toute façon ils nous ont toutes fait chanter. Cela arrive partout où la prostitution est illégale. Ces flics savaient très bien que dans ce club travaillait une fille de 16 ans " Dominika ", une enfant magnifique qui servait les invités spéciaux, dont les flics. Et rien ne les autorisait à ça, pas même le fait que Dominika se prostituait depuis qu'elle avait 13 ans.

Veronika : Venons en aux mythes sur la prostitution véhiculés dans notre société. Pourquoi, à ta connaissance les femmes se lancent-elles dans ce métier ?
Ania : Parmi les mythes qui tournent autour des prostituées, le plus dangereux est probablement celui ...disons de la " nymphomane " même si je n'aime pas ce terme (il signifie une femme qui a plus de besoins sexuels que la moyenne). Même des féministes utilisent ce modèle pour parler des prostituées. Alors je demande pourquoi, aujourd'hui, dans les sociétés occidentales dites civilisées les femmes qui ont soit disant de plus gros besoins choisiraient elles la prostitution ? Elles peuvent se réaliser sexuellement dans la liberté et l'égalité. Même en Pologne après tout nous avons des clubs échangistes qui sont probablement la place idéale pour une prétendue nymphomane. Que reste-t-il alors ? Les raisons économiques. C'est la source de la prostitution : l'inégalité économique et la pauvreté. Cela explique pourquoi les femmes, et non les hommes forment le gros des prostituées alors que tout le monde clame que les besoins sexuels des hommes sont plus gros. C'est aussi pour cela que la plupart des femmes travaillant aujourd'hui dans les rues de Pologne sont des femmes de l'ex bloc de l'Est, principalement d'Ukraine et de Bulgarie.
A côté de l'aspect matériel, une raison à mon avis très importante qui pousse une femme à accepter la prostitution est le masochisme. Les phallocrates l'attribuent aux femmes en général. Ils n'ont pas tort à propos des prostituées à cette différence que la source de ce masochisme n'est pas à chercher dans une " nature féminine " mais... dans le viol. Selon les statistiques que j'ai trouvé dans la littérature féministe allemande 90% des prostituées ont été violées enfant. Un masochisme pathologique expliquerait aussi l'addiction des prostituées à leur" profession ": beaucoup ne peuvent pas arrêter même si les bénéfices matériels ne sont pas évidents. Elles acceptent le stress, l'humiliation, le risque de maladie. Je connais des femmes qui ont pu arrêter de se prostituer après avoir complètement fini une psychothérapie.

Veronika : d'après ton expérience quels autres mythes ou fausses analyses sont reproduits, y compris parmi les libertaires. Qu'est ce qui devrait être clarifié?
Ania : La question " faut il éliminer ou légaliser la prostitution ? " est souvent débattue. Mais les gens considèrent à tort ces deux approches comme contradictoires. Je conçois la légalisation comme une étape nécessaire vers... l'élimination de la prostitution. Elimination pour le bien de toutes les femmes. Lorsque la prostitution est légalisée les conditions de travail sont plus humaines et cela doit être un objectif du moment que la prostitution existe. On peut incontestablement arriver plus facilement à la légaliser qu'à éradiquer les causes de la prostitution.
Commençons par ce qui est réalisable pour aujourd'hui, si cela permet d'aider ces femmes. La société doit beaucoup aux prostituées et les hommes ont accumulé une grosse dette envers elles. Ce sont eux, les clients qui devraient faire en sorte que les prostituées vivent mieux mais il est clair qu'ils s'en moquent complètement. Je (nous) peux leur en vouloir pour cela.

 Veronika : penses tu que dans une société postcapitaliste et libertaire, une société qui dise au-revoir aux relations autoritaires il y aurait encore une place pour la prostitution?
Ania : Pour moi, le terme " prostitution " lui même est complètement discrédité. Je parle de tout ce qui me lie personnellement à la prostitution. Une nouvelle société assumerait de nouvelles relations entre hommes et femmes, entre les genres. Il existe une demande de prostitution aujourd'hui parce que la plupart des clients sont des hommes malades dont la satisfaction provient de l'humiliation d'une autre personne. La plupart seraient décris comme déviants, y compris par la société patriarcale. Ces hommes ont besoin d'une thérapie mais je ne peux pas dire de quelle forme. Si le rôle de thérapeutes devait être assumé par les prostituées, comme c'est le cas aujourd'hui alors cette société devrait aux prostituées le respect qu'elles méritent pour la difficulté du travail qu'elles fournissent. Mais, de quoi parle t-on alors qu'en Pologne aujourd'hui, par exemple, même les infirmières sont considérées comme des parasites de l'Etat ? Alicja Frohnert, journaliste allemande et ancienne prostituée qui a écrit sur la croissance polonaise pense que les prostituées devraient être payées par la Sécurité sociale dont dépendent concrètement les clients et que ces services devraient être prescrits par des médecins, notamment des psychiatres et des sexologues, sur ordonnance. Dans l'état actuel de la situation, cette perspective me paraît assez intéressante. Cela permettrait au moins de montrer le rôle que jouent les prostituées. Reste la question de savoir si après élimination de la pauvreté il resterait des femmes prêtes à exercer cette "profession"...

Publié en anglais sous le titre "the harming myths of prostitution" dans le numéro 25, décembre 2005 de la revue "Abolishing the borders from below"
Traduit par Sylvain Rouillon sylvain.rouillon@no-log.org
Diffusion encouragée

Ecrit par , à 11:14 dans la rubrique "Le privé est politique".

Commentaires :

  satya
23-05-06
à 14:22

bien !!

cet article est nettement plus réaliste et honnête que l'autre qui était passé et auquel j'avais réagit. pour moi là il peut y avoir de réelles questions, discussions et avancées à faire ensembles depuis ce genre d'expression.

quand à son rêve, je dirais qu'avec ce genre de discours ce n'est pas une brigade de prostituées mais bien de femmes qui veulent se vivre libres (et je parle ici plus libertaire que libérale !!!) dont elle peut rêver.

satya
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  Anonyme
22-07-06
à 14:38

Re: bien !!

A ce compte là, n'importe qui joue un role de "psychologue" quand il écoute et répond avec empathie quelqu'un qui a des problèmes et discute un quart d'heure  avec leur client-e, commerçante de quartier, voisine, astrologue ou voyante extra-lucide, eux aussi font oeuvre de psychothérapeutes!
Les prostituées disent que leurs "habitués" ont souvent "besoin de parler", mais ils payent AUSSI pour une femme soumise sexuellement !
Il y a tout de meme une confusion des sentiments chez certains qui ont un besoin narcissique d'être aimé en dépit de ce qu'il font subir à la pute : c'est une façon aussi de se déculpabiliser en ayant établi une "relation". Par exemple le cas d'un homme qui va dans un bar, boit un verre, discute, drague une pute et ensuite et monte ensuite avec elle: il n'estt pas dupe, mais il se donne l'illusion d'une rencontre fortuite et d'une attirance sexuelle réciproque, comme on l'a tous vu dans nombre de films où c'est une scène classique ou dans de nombreux reportages.
Ce qui serait supposé le conforter quand même dans l'idée que toutes les femmes sont vénales, et que payer pour le sexe c'est normal.

Répondre à ce commentaire

  satya
22-07-06
à 15:00

Re: Re: bien !!

Il y a tout de meme une confusion des sentiments

je le crois en effet, mais cette confusion de sentiments nous habite touTEs et nous avons souvent beaucoup de difficulté à vraiment avoir une approchaine "saine" en ce qui concerne le sujet de la prostitution car il nous mets face à face avec nous même et notre rapport à notre propre sexualité (qui est souvent majoritairement largement conditionnée).


 
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  les marques du plaisir
22-07-06
à 15:41

Re: Re: Re: bien !!

Bah ... je pense que tu touches du doigt le vrai problème ... le sujet de la prostitution est bien souvent utilisé par certaines comme un moyen de parler de leur rapport difficile à la sexualité ... la leur et celle des autres ....

parcequ'au fond qu'est ce qui choque certaines ?

l'exploitation ? j'en suis pas sur puisqu'un homme prostitué est pas un exploité , comme il a été donné de le lire ailleurs il ya quelques jours ....

Bien loin de moi l'idée de fantasmer la prostitution au travers des romans et films, comme l'anonyme du dessus ... Mais j'ai connu des femmes se livrant a la prostitution ( et je précise connu intimement mais au sens amical du terme ) et qui, sans en tirer une gloire , se sentaient moins "humiliées" et "dominées"par leurs clients qu'elles ne l'avaient été par dans un rapport salarial "normal" par des petits chefaillons ou de "gentilles" patronnes . Mais surement n'étaient elles que de pauvres victimes innocentes n'ayant pas encore eu la "révélation" selon les saintes du puritanisme féministe .... 

Mais je voudrais l'interroger ... pour vous chére anonyme, une femme ayant des désirs sexuels disons hors norme ... elle est sujet ou objet ? victime ou libre ?

Ou une femme est elle incapable de désir , au sens sexuel du terme ??????

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  Anonyme
22-07-06
à 18:06

Re: Re: Re: Re: bien !!

"Mais je voudrais l'interroger...pour vous chère anonyme"
Pourquoi, vous etes flic? Des flics qu'ont une pute comme indic, ça n'existe que dans les films? Et puis ça fait un peu interrogatoire inquisitorial, comme formulation.
 
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  Anonyme
22-07-06
à 20:12

Re: Re: Re: Re: Re: bien !!

Oui c'est , vrai poser des questions de cette manière, et supposer que l'Anonyme estforcément une femme, c'est déjà se poser comme male dominant auquel on devrait rendre des comptes, ça n'incite pas au dialogue.
 
Répondre à ce commentaire

  les marques du plaisir
23-07-06
à 00:41

Re: Re: Re: Re: Re: Re: bien !!

Je suis toujours étonné de cette capacité à ne jamais répondre à certaines questions ....

Flic ? surement bien moins que certaines .... qui hésitent souvent dans leur comportement face aux "femmes de mauvaise vie" entre le flic sarkozien et le psy néo stalinien ( mais n'est ce pas un peu la même chose ? )

Non juste un sale machiste qui estime qu'une femme quel que soit son choix de vie, et même de sexualité, est avant tout un être humain ...

Quand au sexe des anonymes, moi qui ait pas mal navigué en entomologue du  coté des tenants males de la suprématie féminine , je suis bien certain que certaines difficultés de positionnement par rapport au corps sont "unisexe" ....

la polêmique c'est du débat, l'injure, c'est le refus du débat .... et il est vrai que dés qu'on s'aventure sur les questions des corps, des désirs, des sexualités, on trouve plus d'injures que de polémique .... dans le monde binaire dans lequel beaucoup vivent ....

Répondre à ce commentaire

  les marques du plaisir
23-07-06
à 00:45

Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: bien !!

PS : étant peu versé dans les faux-culteries de langages j'emploie indifféremment le masculin ou le féminin .... avec de temps à autres de magnifiques fautes de frappe ....

Répondre à ce commentaire

  Anonyme
23-07-06
à 10:42

Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: bien !!

Moi aussi je suis toujours étonnée devant la capacité de certains à ne jamais répondre aux questions ou à les dévier pour éviter d'y répondre.

Une prostituée n'est pas un psychothérapeute, pas plus qu'un astrologue. Proposer que  les prostituées soit prescrites par un médecin et leurs prestations remboursées par la Sécu me parait (pour le moins) absurde et ridicule.

En outre ce n'est pas une profession et ça ne le sera jamais. S'il existe un "plus vieux métier du monde" c'est celui de sage-femme, la femme étant effectivement obstétricienne depuis la nuit des temps. Vouloir en faire une "profession libérale" comme infirmière me parait inacceptable, et d'ailleurs impossible; au regard de la loi cela supposerait une formation professionelle, un diplome et des annonces à l'ANPE. En tel cas (absurde), quid de celle qui se trouve au chomage, ne désire pas se prostituer, mais se verrait supprimer ses allocations si elle n'acceptait pas le "poste" proposé? Ce serait par ailleurs la régression totale en ce que ça représenterait le meilleur moyen de refuser les femmes (qui ont déjà plus de difficultés que les hommes), dans le monde du travail pour réserver les meilleurs emplois pour les hommes. En somme cela signifierait: si vous etes au chomage allez vous prostituer. Et pour quoi les femmes devraient se retrouver dans une situation qui serait pire que ce qu'elle est actuellement? Pour contenter un groupuscule (Lesputes) qui prétend d'une part etre mieux sous tous les rapports que l'ensemble des femmes et etre déjà mieux payées? Si elles gagnent tant que ça elles peuvent très bien se constituer une assurance volontaire, quand à la retraite, elles ont droits comme les autres au minimum vieillesse.
 
Répondre à ce commentaire

  les marques du plaisir
24-07-06
à 18:55

Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: bien !!

Euh bac-pro option pute ... fallait oser .....

Mais pourquoi ce ne serait pas une "profession" ? 

Un certain nombre de pratiques "médicales" passablement charlatanistes se trouvent dans une sorte de no man ( ou woman ) land législatif , ce qui ne les prive pas de tout droit en tant que travailleur indépendant .

Entre temps c'est un "boulôt" , et y a des nanas et des mecs qui ont celui là pour vivre ... par "choix" ou par "obligation" ....

L'acharnement législatif et policier à virer les prostitué(E)s des lieux ou ils/elles sont visibles c'est le même que celui des bobos avec les SDF .... ce qu'on ne voit pas existe pas ....

Bien loin de moi l'idée d'idéaliser telle ou telle catégorie opprimée sous prétexte qu'elle est opprimée, que ce soit les "femmes" , les "jeunes" les "immigrés" ou les "putes" ...

Mais pas question non plus de laisser convoquer les baronnes du puritanisme pour remplacer une barbarie incontestable par une barbarie semblable .... au nom de la "morale" ...

PS je suis toujours curieux de réponses sur la question du désir ... et de la sexualité ....

Répondre à ce commentaire

  Anonyme
24-07-06
à 22:55

Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: bien !!

Non, ce n'est pas une "profession" et ça ne le sera jamais, pas plus qu'astrologue ou certains de ces praticiens de ces médecines alternatives qui sont autant d'arnaques. Tout au plus, ça peut etre classé comme "travailleur indépendant" (le terme me parait plus heureux que "travailleur du sexe" qui serait plus adapté pour "sexologue" -état qui me parait rentrer dans la catégorie des praticiens de médecine alternative équivalent à une arnaque-), et qui peut en ce monde patriarcal correspondre à "vocation", comme pour les pretres. La rémunération pour les sacrements est en ce cas, comme pour les astrologues, prévue sous forme de "don", bien que dans nos sociétes matérialistes les "dons" aient un barème précis.

Il n'y a rien à oser et je n'ai jamais parlé de bac-pro. Je me suis cependant mal exprimée, j'aurais du parler de "qualification professionelle" et non de diplome. On ne peut en effet envisager une "qualification professionelle" de pute. Sans doute celle de "masseuse" et autres kinésithérapeutes pourraient-elles etre éventuellement envisageables; encore devrait-il falloir pouvoir en faire état et avoir des connaissances réelles en ces domaines. Pour le reste un bac est une garantie de pouvoir s'en sortir mieux que si l'on est semi-analphabète dans le cas où pour survivre on se soit malheureusement trouvée réduite à cette extrémité pour de multiples raisons, comme payer ses études par exemple (c'est le cas d'Ania, mais c'est aussi le cas de celles qui sont escorts, ou qui vendent leurs ovocythes,ce qui ne diffère guère de la prostitution).

Les baronnes du puritanisme sont des dames de charité qui ont peut-etre bien fait carrière...par le biais de leurs bons offices en épousant un baron. Mais elles ne sont en aucun cas féministes.

Pour la question du désir et de la sexualité je pourrais éventuellement répondre si j'en comprenais vraiment le sens. si c'est à propos de plusieurs niveaux dans la confusion, il me semble avoir déjà répondu: pute n'est pas plus qu'astrologue une profession.
 
Répondre à ce commentaire

  les marques du plaisir
25-07-06
à 10:00

Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: bien !!

comme quoi hein ... on eput être d'accorde des fois ....

ma question sur le desir et la sexualité était là juste pasque j'ai bien souvent entendu dans la bouche de certaines "féministes" ( les baronnes puritaines ... ) les mêmes arguments envers les "putes", le même discours qu'envers certaines femmes de "mauvaise vie" ... C.A.D. si elles pratiquent une sexualité sans l'extrème onction préalable de "l'amour toujours" avec plein de majuscules et de grands sentiments, c'est parceque ce ne sont que de pôvres femmes victimes qui n'ont pas eu la révélation ....

ma question sur le desir et la sexualité était :

que penser d'une femme qui a des pratiques sexuelles "hors normes", libre dans le choix de ses partenaires etc ...  victime ou acteur ? désirante ou victime du "patriarcat" , .... ou pour faire en raccourci : une femme est elle capable de désir sexuel , ou est elle condamnée "génétiquement" à l'amour toujours .... ???????

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  Anonyme
25-07-06
à 12:07

Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: bien !!

Tu connais mal les féministes et tu as une approche du féminisme plutot superficielle je trouve. Qu'une femme éprouve du désir sexuel, ça me parait évident. Elles se plaignent surtout qu'il ne compte pas puisque dans le cadre patriarcal seul celui de l'homme compte et la femme aucune autre raison d'etre que de satisfaire le sien à lui. C'est pas une raison pour devenir pute.
 
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  Cercamon
25-07-06
à 13:41

Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: bien !!

J'aimerai nuancer : "dans le cadre patriarcal seul celui de l'homme compte". C'est une certaine image d'un certain plaisir de l'homme qui compte. Je connais plusieurs hommes qui ne rentrent pas dans leur pays (pays 'ach'ment patriarcaux) simplement parce qu'ils ne pourraient pas y vivre comme ils veulent avec leur compagne ou parce qu'ils savent que ce qu'ils ont vécus à l'étranger "n'est qu'une parenthèse", et qu'une choisie par la famille les attends au foyer... ici quelle est ma liberté d'homme ? celle d'aller aux putes ? et bien je vous la laisse la liberté...

Il n'y a dans mes propos aucune volonté de nier une quelconque dissymétrie. Mais la dissymétrie est dans plus d'une dimension... dans les "avantages" et les "inconvénients"...

Et pour poursuivre, et aller plus loin dans le sens de l'anonyme, "en faire une raison pour devenir pute", ça n'a rien de subversif, c'est accepter pleinement une place assignée par un système.

Pour aller plus loin encore, on pourrait (et ça commence à se faire) arriver à un point où l'on accepte, voir connote positivement, le fait que les filles "s'assument" en "salopes", en "qui n'ont pas froid aux yeux", on ne pourra qualifier cela de vraie émancipation que si l'on est attentif au cadre dans lequel ça se passe, hors assignation...

L'intérêt d'être anarchiste, ou de se revendiquer de la pensée anarchiste, c'est d'avoir une vision peu plus "globale" de la chose...
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  les marques du plaisir
25-07-06
à 14:39

Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: Re: bien !!

euh tu appelles "plaisir" ce petit "soulagement" qui se rapproche bien de celui de la grenouille ???  parceque c'est un cadre que j'estime aussi aliénant pour l'homme, cette limitation à une "éjaculation de sous chef de bureau" aprés un coit lapinesque ... et pour relativiser encore plus, c'est un comportement que l'on trouve largement chez les homos mecs aussi ....

Chuis pas persuadé que les adeptes du cadre patriarcal aient plus de vrai plaisir que leurs "victimes" ....

Le plaisir sexuel nait d'un jeu subtil sur le jeu du pouvoir, pas du jeu du pouvoir .... Et il demande que les deux ( ou plus si affinité ... ) partenaires aient fait un peu de ménage dans ses notions de pouvoir .... de propriété ... de rôles "assignés" ....

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