--> En cas d’abus des entreprises, les prud’hommes peuvent requalifier un stage en contrat de travail.
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l'Humanité : « Les stagiaires sont en situation de passagers clandestins dans l’entreprise », estime Lionel, de Génération précaire. Le Code du travail ne mentionne que les stagiaires de la formation professionnelle. Le jeune hyperqualifié, opérationnel, docile et payé presque rien, c’est un no man’s land en droit du travail : aucune règle ne précise la rémunération, la durée du stage, ou le nombre des stagiaires que l’entreprise peut embaucher. « Rien n’empêche une entreprise d’avoir dix stagiaires pour un titulaire, comme c’est le cas dans certaines maisons d’éditions », remarque Lionel.
En matière de rémunération, une rumeur persistante plafonne l’indemnité des stagiaires à 30 % du SMIC. En fait, explique Lionel, une gratification de stage est exonérée de cotisations sociales en dessous de 30 % du SMIC pour les stages obligatoires dans le cadre d’une formation (25 % pour les stages non obligatoires). « Et même quand on passe ces seuils et que ces cotisations sont dues, elles ne comprennent pas les cotisations chômage et retraite complémentaire, précise Lionel. Cela crée un effet de seuil très fort. » Détail souvent négligé par le patron : dans le cas d’un stage non obligatoire et non payé, l’employeur est tout de même tenu de payer les cotisations sociales à hauteur de 25 % du SMIC, y compris les cotisations pour accident du travail.
Pour le reste, les droits des stagiaires sont réduits au minimum : « On ne peut pas se syndiquer, être élu ou délégué, faire grève, on est virable sans préavis ni indemnités », explique Lionel. Les abus sont nombreux : le plus fréquent, « c’est un poste de travail avec tous ses attributs physiques, bureau, téléphone, ordinateur, missions, sur lequel se succèdent les stagiaires ». Si le stagiaire occupe manifestement un poste de salarié, il peut demander aux prud’hommes la requalification de son stage en contrat de travail : il lui faudra montrer l’existence d’un lien de subordination avec l’entreprise, prouver qu’il est affecté à un emploi normal de l’entreprise, qu’il travaille à temps plein et qu’il ne peut donc pas se rendre à ses cours, qu’il ne reçoit pas de formation... « Nous encourageons les stagiaires à saisir les prud’hommes, mais à consulter d’abord un avocat ou un syndicaliste », indique Lionel. Autre moyen juridique, l’abus de vulnérabilité et de dépendance, invoqué avec succès dans une affaire devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence. « Mais tous les stages abusifs ne relèvent pas de la correctionnelle », prévient le militant. Enfin, explique-t-il, une règle « jamais appliquée » réserve à l’URSSAF « le droit, indépendamment des revendications du stagiaire, de requalifier le stage en contrat de travail, afin de récupérer les cotisations qui lui sont dues ».
L. B.