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L'En Dehors


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Qu'est-il advenu de Bruno Manser?
Lu sur Peuples des forêts primaires : "Qu'est-il advenu de Bruno Manser? Ces derniers mois, la question a tourmenté ses proches, ainsi que ses amis du Bruno-Manser-Fonds (BMF) et du Cercle bâlois pour la protection de la forêt pluviale.A l'heure actuelle, nous ne pouvons y répondre. Une chose est sûre: l'ethnologue, aujourd'hui âgé de 46 ans, a disparu sur l'île de Bornéo, dans l'Etat malaisien du Sarawak. Il était parti du Kalimantan (Indonésie) au printemps, dans l'intention de rejoindre à travers la jungle les Penan encore nomades de la forêt du Sarawak – un peuple quotidiennement confronté aux bûcherons, à la police et aux militaires. Depuis lors, nous avons perdu sa trace.

Ses études achevées, Bruno Manser a d'abord conduit des estivages alpestres avant de passer six ans (de 1984 à 1990) chez les derniers nomades penans. Durant cette période, il a appris la langue, le savoir et les techniques de survie de ce peuple vivant de chasse et de cueillette, tout en réalisant de nombreux dessins et croquis. Admis comme l'un des leurs par les autochtones, il était devenu lui-même un Penan, au point d'être surnommé "Laki Penan" (l'homme penan). Le "Penan suisse" a acquis une grande considération chez ces nomades de la forêt. Comme eux, il se déplaçait nu à travers la jungle, connaissait les animaux et les fruits de la forêt, et tirait à la sarbacane. Les bruits nouveaux des tronçonneuses et des bulldozers se rapprochant toujours plus, il fut le premier à prendre conscience que pour défendre le milieu vital des Penan, une protestation organisée devenait nécessaire.

C'est ainsi que des barricades ont été érigées sur les routes, qui s'enfonçaient dans la forêt vierge, construites par les sociétés d'exploitation avec la bénédiction et la protection du gouvernement. Ces actions non violentes et ponctuelles des autochtones ont attiré l'attention des Occidentaux sur le Sarawak à la fin des années 80.

Pour les nomades penans menacés dans leur existence, et plus tard pour l'opinion mondiale, Bruno Manser est devenu le symbole de la résistance contre la destruction sans scrupules de la forêt vierge du Sarawak, en même temps que l'adversaire du Chief Minister Taib Mahmud. Le 15 février 2000, peu avant son départ, Bruno Manser expliqua à OnlineReports: "Par l'octroi de licences aux sociétés d'exploitation du bois, Taib Mahmud est personnellement responsable de la transformation en champ de bataille – en une seule génération – de la presque totalité de la forêt vierge du Sarawak."

En 1990, le protecteur de la forêt pluviale, désigné "ennemi public n° 1", a dû quitter précipitamment les Penan ("ma deuxième famille") et la Malaisie, recherché par des unités spéciales.

Mais Bruno Manser ne céda pas. A Bâle, il fonda le Bruno-Manser-Fonds, soutenu par de nombreux donateurs. D'abord conduit par Roger Graf, puis par John Künzli, le secrétariat du BMF s'est progressivement développé pour devenir un centre reconnu d'information sur les forêts tropicales. Pendant ce temps, Bruno Manser veillait – à la fois avec audace et avec le style tranquille et crédible qui est le sien – à la médiatisation des problèmes de la préservation des forêts tropicales et de l'équilibre climatique.

Ce faisant, il alla souvent jusqu'à la limite de ses possibilités physiques et psychiques, avec toute la détermination héritée de ses ancêtres appenzellois. En 1993, il resta 60 jours sans manger devant le Palais fédéral pour convaincre le Conseil fédéral et les consommateurs suisses de la nécessité d'une déclaration obligatoire pour tous les bois et de l'urgence d'un arrêt des importations de bois tropicaux. La grève de la faim, soutenue par 37 organisations et partis politiques, par les autorités législatives de la ville de Bâle et par de nombreuses personnalités, a eu plus tard quelques effets positifs, mais à l'heure actuelle, il n'existe toujours pas de déclaration obligatoire pour le bois vendu en Suisse. Bruno Manser s'est opposé à la destruction de la forêt pluviale par de nombreuses conférences en Suisse et à l'étranger, et par des contacts divers, ainsi qu'en dénonçant les infractions liées à la déforestation et en lançant diverses actions spectaculaires. Mais en dépit de petits progrès, il avait l'impression que la cause des Penan ne progressait pas, car il se mettait à leur place.



Dernière photo de Bruno Manser avant d'entrer au Sarawak

Bruno Manser a beaucoup souffert de ces lenteurs. Déjà en mars 1998, il avait affirmé: "Aussi longtemps que la déforestation se poursuit au Sarawak et que les bulldozers continuent leurs terrassements, notre action n'a pas abouti. Je suis las, mais je ne peux pas m'arrêter avant que ne soient tenues les promesses faites: la création d'une réserve de la biosphère chez les Penan, et leur autodétermination."

Le sort des forêts primaires a constamment préoccupé cet "homme des bois". Il a séjourné des semaines durant dans des forêts vierges africaines et américaines.

Plusieurs fois, il est retourné incognito au Sarawak pour revoir les amis qui l'attendaient. Il était alors le témoin de la destruction rapide de leur habitat par des compagnies telles que Samling Co, Rimbunan Hijau Sdn. Bhd., W.T.K., etc.: peuples déracinés, nouvelles routes, coupes rases, paysages livrés à l'érosion, cours d'eau sans vie, disparition de la faune et de la flore etc. Bruno Manser sentait bien que le temps était compté, pour les Penan, pour la forêt et pour son action.

En 1998, il décida de risquer le tout pour le tout, mais d'abord par la diplomatie. Il proposa au Chief Minister Taib Mahmud de collaborer à la création de la réserve projetée chez les Penan et s'excusa d'avoir contrevenu aux dispositions légales malaisiennes sur l'immigration. Cette démarche resta sans réponse, de même que diverses autres tentatives visant à ouvrir le dialogue avec ce haut responsable.

Alors Bruno Manser apprit (en un temps record) à sauter en parachute. En signe de réconciliation, il voulait apporter par la voie des airs l'agneau de la paix au Chief Minister (musulman), lors de la fête marquant la fin du Ramadan (Hari Raya Haji). Sous les pressions de l'ambassade de Malaisie à Genève, la compagnie aérienne refusa de transporter l'agneau "Gumperli" et le projet échoua. Afin d'attirer l'attention sur la situation toujours plus désespérée régnant au Sarawak, le Bâlois réalisa son saut en parachute (avec l'agneau) le 6 avril 1998, au-dessus du siège de l'ONU à Genève. Mais la capitale du Sarawak, Kuching, restait muette. C'est là qu'en mars 1999, les employés de douane laissèrent entrer dans le pays un commerçant portant le costume de son père, un attaché-case et une cravate mal nouée. Le 29 mars 1999, jour où l'on fêtait solennellement le retour des pèlerins de la Mecque (Hari Raya Haji), Manser effectua un survol très médiatique (en ULM) de la résidence du Chief Minister, atterrit volontairement à proximité et se laissa arrêter. Il fut aussitôt transféré à Kuala Lumpur, puis expulsé. Sa tentative, pourtant empreinte d'humour et de goût du risque, visant à convaincre Taib Mahmud de la nécessité de protéger la forêt pluviale, se soldait encore une fois par un échec.

Craignant que ce qui restait de la forêt des Penan ne soit également sacrifié à l'industrie du bois, Bruno Manser retourna au Kalimantan, dans la partie indonésienne de Bornéo, le 15 février 2000. C'est là qu'il fut rejoint par John Künzli et par l'équipe de tournage qui avait autrefois réalisé le film "Tong Tana" avec lui (elle voulait cette fois le filmer marchant dans la jungle en direction du Sarawak). Plus tard, John Künzli accompagna seul Bruno Manser qui, au moment de la séparation, lui confia quelque 400 cartes postales destinées à ses amis.

De là jusqu'à la frontière, Bruno Manser fut accompagné par un Suisse résidant sur place. Le voyage commença en canoë et se poursuivit à pied. Il dura deux semaines et il pleuvait chaque jour. Ils arrivèrent près de la frontière complètement épuisés. Le 18 mai, Bruno Manser confia à son compatriote une lettre destinée à son amie, dans laquelle il évoquait ses problèmes de santé: colique et côte cassée.

Le secrétaire du BMF John Künzli apprit par la suite que Bruno Manser avait franchi la frontière boisée du Sarawak le 22 mai, avec le concours d'un guide indigène. Son dernier signe de vie date du 23 mai. Ce jour-là, dissimulé dans un buisson à proximité de la petite ville de Bareo, il écrivit une lettre à son amie. Il se dit fatigué et précisait qu'il attendait la nuit pour marcher sur les routes forestières. Selon Künzli, cette lettre a été postée par quelqu'un à Bareo. Elle est arrivée en Suisse munie d'un timbre malaisien, mais non oblitérée.

Depuis lors, le bureau du BMF à Bâle a tenté à de nombreuses reprises d'établir un contact avec le militant écologiste et de connaître son lieu de séjour, soit par l'intermédiaire de personnes de confiance, soit par divers moyens de communication (dont certains hélas ne fonctionnent pas). En vain. Pas davantage de succès avec les recherches entreprises par les Penan, qui ont passé au peigne fin – par petits groupes, discrètement, des semaines durant – les forêts, les zones d'exploitation forestière et la région des sources du Limbang. Seul résultat: deux hommes confirmèrent l'avoir conduit quelque temps à travers la jungle du Sarawak. Sinon, rien de concret. Au mieux, des indices comme cette requête au Chief Minister, rédigée en malais par des nomades de la région du Limbang, ou l'édification inattendue, près de Long Kevok (le 11 août par une centaine de Penan), de la plus importante barricade depuis les années 80. Ces faits pourraient en effet suggérer que le Suisse soit à l'origine de cette nouvelle vague de protestations.

En septembre, le bruit courut en territoire penan que Bruno était dans la région. Il y eut d'autres rumeurs, comme celle disant qu'il aurait été abattu par les forces armées à Long Kevok. Le 21 octobre, un ami du disparu – son instructeur-parachutiste – se rendit dans la région de Bareo où le Bâlois avait été vu pour la dernière fois. Aucune des personnes qu'il interrogea ne savait quelque chose concernant le disparu.

Tout reste possible et aucun scénario ne peut être exclu:

– Bruno Manser a pu disparaître intentionnellement pour aider les Penan dans leur ultime combat et pour attirer l'attention de l'opinion mondiale sur la déforestation au Sarawak. Cette possibilité ne peut pas être écartée, car le lutteur a souvent risqué sa vie en balayant les inquiétudes de ses amis. On peut lui opposer les étroites relations qu'il entretient avec sa famille et ses amis: jusqu'ici, il leur a toujours donné un signe de vie, quelle que soit sa situation. "Non, non, il n'est jamais resté aussi longtemps absent sans nous faire parvenir un message" a déclaré sa mère. Sa sœur, son frère et ses amis sont du même avis et redoutent qu'il se soit produit un événement grave.

– Malade ou blessé, Bruno Manser est peut-être hébergé par une famille de nomades. Dans la forêt du Sarawak, les dangers ne manquent pas: malaria, infections, morsures de serpents et accidents de toutes sortes. C'est pourquoi les nomades se déplacent rarement seuls à travers la jungle, ce que Manser a dû faire à plusieurs reprises pour parvenir chez ses amis. Toutefois, les Penan ne l'ont pas découvert au cours de leurs recherches. L'homme peut être considéré comme un spécialiste de la survie dans la jungle. Très expérimenté, il est servi par une volonté de fer et une excellente condition physique. En outre, grâce à ses connaissances dans le domaine de la chasse et de la cueillette, il n'est pas exposé à souffrir de la faim.

– Bruno Manser est peut-être en prison. Il se déplaçait sur des routes forestières et dans une région étroitement surveillées par des policiers et des militaires. L'hypothèse d'une capture ne peut donc être écartée. Elle serait tenue secrète pour éviter un retentissement certain au plan international.

– Bruno Manser peut avoir demandé à une partie des 9000 Penan (dont 300 au maximum sont encore 100% nomades) de le cacher et de n'en parler à personne. La soudaine reprise des actions de protestation, après des années de calme, plaide pour cette hypothèse. Mais Roger Graf, qui connaît bien les lieux, affirme que si l'écologiste se cachait quelque part, l'information serait depuis longtemps parvenue à nos oreilles.

– Peut-être que Bruno Manser est mort. La région est très dangereuse. Dans cette forêt ravinée et parcourue de nombreux cours d'eau, les glissades, les chutes et les noyades ne sont pas rares. On peut s'y égarer sans espoir ou périr d'une septicémie. Par ailleurs, un assassinat ne peut être exclu, sa tête étant mise à prix. Des unités de la police et de l'armée stationnant dans la région pourraient être intéressées à la disparition du Suisse insoumis. Les connaisseurs redoutent également que le protecteur de la forêt pluviale soit tombé entre les mains de bûcherons furieux ou de représentants de compagnies d'exploitation décidés à faire disparaître définitivement cet agitateur.

Désormais, les diplomates suisses cherchent à leur tour à découvrir ce qu'il est advenu de Bruno Manser. Comme OnlineReports a été le premier média à l'annoncer le 18 novembre, le BMF a maintenant informé le Département Fédéral des Affaires Extérieures (DFAE). Le 20 novembre la famille Manser demanda au DFAE de lancer un avis de disparition en Malaisie et de prier par les voies diplomatiques l’aide officielle à Kuala Lumpur.

Le même jour Associated Press Malaysia distribua le message qu’en octobre un ami (restant anonyme) avait reçu des e-mails de Bruno. Le BMF considère très improbable cette possibilité, car Bruno ne sait pas se servir d’un ordinateur et il n’a jamais envoyé des e-mails. L’office faisait cela pour lui. La région où Manser a disparu n’est pas développée, il n’y a ni électricité ni fils téléphoniques. Quoiqu’on ne puisse pas exclure que Bruno Manser ait contacté un ami, ce message ne peut pas être vérifié, tant que cet « ami » reste inconnu. Il est aussi possible que ce soit une fausse nouvelle donnée intentionnellement!

Or, les destructeurs des forêts pluviales à Bornéo ont aussi appris la disparition de Bruno Manser. Les journaux malaisiens rapportent que la police et les politiciens dénient que Manser soit entré au Sarawak. Mais le cas échéant, ils lui recommandent de partir tout de suite et de ne pas ameuter les Penan contre les mesures de développement du gouvernement....




Ce compte rendu est mis aimablement à notre disposition par Internet Information Services (www.OnlineReports.ch). Il a été actualisé et élagué par le BMF.
Ecrit par libertad, à 16:12 dans la rubrique "Ecologie".



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