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Selon des statistiques citées par le
journal Le Monde (21 février 2003), les condamnations pour outrages à
personnes dépositaires de l’autorité publique ont progressé de 42%
entre 1995 et 2001, et celles de rébellion de 27%. Cette augmentation
"exponentielle", pour reprendre l’expression d’un syndicat de
magistrat, s’explique par l’usage que les flics font de ces délits.
Le délit d’outrage sert d’abord à couvrir les violences policières.
Lorsque les flics tapent sur quelqu’un, à l’occasion d’une arrestation
ou au commissariat, ils poursuivent presque systématiquement cette
personne pour "outrage", alors souvent associée à la "rébellion" et aux
"violences volontaires sur personne dépositaire de l’autorité
publique". C’est une manière pour eux de justifier les marques de coups
visibles : puisque cette personne était violente, il a bien fallu la
maîtriser, et donc faire usage de la force. Ils se dédouanent ainsi, à
l’avance, de toute mise en cause de leur violence devant un tribunal.
Le délit d’outrage permet de poursuivre ceux que les flics considèrent comme des gêneurs.
Cas typique : un passant qui intervient lors d’un contrôle d’identité
ou une arrestation à laquelle il assiste et qu’il trouve trop musclée.
Il peut facilement se retrouver inculpé d’outrage, éventuellement de
rébellion voire "d’incitation à l’émeute" (cf : précisions juridiques
en page suivante). On a vu aussi des cas où l’outrage et ses délits
associés servaient à envoyer en taule, pour plusieurs mois, ceux que
les flics avaient ciblés comme des meneurs dans une cité.
Le délit d’outrage permet aux flics d’arrondir leurs fins de mois.
La loi Le Pors oblige l’Etat à verser à ses fonctionnaires les dommages
et interêts qu’ils ont obtenus lors des procès et que les condamnés ne
peuvent payer. En cas d’outrage, les flics qui se portent partie civile
obtiennent souvent des sommes de plusieurs centaines d’euros qu’ils
sont sûr de toucher, même si le condamné est le dernier des RMIstes.
Cette fonction du délit d’outrage n’est pas à négliger, elle explique
en partie l’augmentation spectaculaire de l’outrage dans les
statistiques de ces dernières années.
Ces conseils ne
sont pas des solutions miracles, mais doivent permettre d’éviter les
pièges les plus grossiers. Ils sont valables aussi quand on est
conjointement accusé de rebellions et de menaces.
Dans le cas des affaires d’outrage et de rébellion, le dossier de
l’accusation se résume la plus part du temps aux déclarations des
flics. En droit, un témoignage policier n’a pas plus de valeur que
celui de n’importe qui. Dans les faits, la connivence entre la justice
et la police est telle que le tribunal va favoriser cette dernière . Il
est donc indispensable de contester avec le plus de force possible la
version des flics, et de contre-attaquer par une mobilisation et
éventuellement une plainte contre les brutalités policières.
L’expérience montre qu’ainsi, si on arrive rarement à la relaxe, on
aboutit à des peines moins graves. Une peine légère dans ce genre de
cas signifie concrètement que le juge n’a pas vraiment cru les flics :
mais il va rarement jusqu’à les désavouer totalement. En revanche,
toute autre stratégie de défense, et en particulier celle qui s’imagine
que "faute avouée est à moitié pardonnée" conduit en général aux peines
les plus lourdes.
Contester la version des flics,
C’est avant tout nier l’outrage ou la rébellion, c’est donc pour celui
qui est accusé nier avoir prononcé certaines paroles ou effectué
certains gestes. Mais attention : nier les insultes, mais reconnaître
par exemple avoir "crié" ou s’être "énervé, c’est déjà trop. Le juge
s’appuiera sur ce prétexte pour condamner, avec un raisonnement du
style "puisqu’il était énervé, il est fort possible qu’il se soit
laisser aller aux insultes". Il faut donc savoir présenter une version
vraisemblable, qui ne laisse aucune prise à une interprétation
malveillante ("j’étais très calme", "je ne me suis jamais adressé
directement aux policiers"...), et ne pas en varier.
Il faut savoir aussi, pour celui qui est accusé, à quel moment donner
sa version des faits. En garde à vue, juste après une arrestation
mouvementée, et face à ses accusateurs, ce n’est pas toujours le
meilleur moment. Les flics risquent aussi de rédiger ou modifier leurs
propres déclarations en fonction de ce que la personne en garde à vue
aura dit, de manière à l’enfoncer d’avantage. Durant la garde à vue, il
est parfaitement possible de ne pas répondre aux questions des flics et
de garder le silence : c’est un droit reconnu, quoiqu’en disent les
flics. En revanche, devant le procureur ou le juge, il faut parler :
mais à ce moment là, par l’intermédiaire d’un avocat, on aura eu accès
au dossier et on pourra connaître la version des flics, à partir de
laquelle on pourra élaborer sa propre défense.
Enfin, contester la version des flics, c’est durant le procès traquer
les incohérences dans leurs déclarations et faire citer des témoins qui
viennent les contredire. C’est le travail de l’avocat. Même commis
d’office, un avocat n’a pas à imposer sa stratégie de défense à son
client, mais doit se plier à ce qu’il demande : sinon il faut en
changer. C’est là qu’un comité de soutien peut intervenir.
Comité de soutien
La mobilisation autour d’un comité de soutien (amis, famille, etc...)
vise à briser l’isolement de l’accusé face à la machine judiciaire. Sur
le plan pratique, le comité de soutien peut déjà, si nécessaire, servir
à trouver un avocat qui accepte la stratégie choisie par le prévenu. Il
va aussi s’intéresser aux témoins qui ont vu la scène. Il faut savoir
que l’avocat n’est pas supposé rencontrer les témoins de la défense,
encore moins aller les chercher : on pourrait le soupçonner de s’être
entendu avec eux sur la version que ces témoins doivent livrer au
tribunal. C’est donc au comité de soutien de faire ce travail : bien
entendu le comité de soutien ne doit "trouver" que des gens qui
témoignent dans le sens favorable à la défense. Le comité de soutien va
aussi ramener à l’avocat les pièces nécessaires lors du procès
(attestation de logement, de stages, d’études, de séjour...).
Le comité de soutien peut aussi, dans certains cas et si le prévenu est
d’accord, servir à rendre l’affaire publique : présence à l’audience,
tracts, presse, appui d’associations... C’est une stratégie offensive
dont l’expérience montre qu’elle peut être efficace
Porter plainte contre les flics :
Il faut savoir que ces plaintes sont très longues, aboutissent rarement
et la plupart du temps se perdent dans les sables. Le système est conçu
pour cela. Il est illusoire d’imaginer que la justice se "rendra
compte" des torts de la police et reconnaitra ses droits de "victime" à
celui qui s’est fait tabasser (sauf dans de rares cas). En revanche, la
plainte à l’Inspection Générale de la Police Nationale (IGPN),
l’Inspection Générale des Services (IGS) ou encore devant le Comission
Nationale de Déontologie de la Sécurité (CNDS) peut fournir un argument
au procès pour soutenir la thèse de la défense.
Pour plus d’informations :
Fiches pratiques d’informations juridiques disponible sur le site :
www.resistons.lautre.net
Guide de self-défense juridique disponible sur le site :
www.guidejuridique.lautre.net
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