Lu sur
A-Infos : "Est-ce un terme infamant ? Injurieux ? Un vilain gros mot qu’il est interdit de prononcer sous peine de passer pour un malpoli ? Une nouvelle insulte des sauvageons des cités, genre ta mère anarchiste devant le Prisu ? Un mot tabou qui porte malheur selon les superstitieux ? Un mot malpropre qui salit la bouche de qui le prononce ? On se perd en conjectures, tant il semble que ce mot est absent des médias. Du moins
dans son acceptation normale, c’est à dire politique et positive. Au point qu’on est en droit de se demander si n’apparaît pas une nouvelle résurgence de l’OULIPO (Ouvrage de Littérature Potentielle, groupe d‘écrivains autour notamment de Raymond Queneau qui expérimentaient et s’amusaient avec les mots). Un de leurs jeux favoris était d’écrire un texte où jamais n’apparaissait une certaine lettre, un A ou un I par exemple. Georges Perec établit le tour de force d’écrire un livre entier sans la moindre lettre E. Il intitula son livre l’absente. On aurait pu aussi bien titrer cet article l’absent…
Exemple d’absence. L’encart livres du quotidien Libération, un jeudi il y a quelques mois. Présentation succincte de la réédition du livre (ô combien essentiel) d’Émile Pouget, le sabotage. On peut s’en réjouir,
mais il faut mettre un bémol : on y décrit Pouget comme un syndicaliste (normal), mais nullement il n’est fait part qu’il était anarchiste ! Même pas sous le vocable «soft» libertaire ! C’est comme présenter un livre sur Benoît Frachon, ou Georges Séguy, et omettre de dire que, s’ils étaient secrétaires généraux de la CGT, ils étaient avant tout des responsables du Parti communiste ! Le journaleux de Libé aurait dû au minimum citer l’anarcho-syndicalisme de Pouget, mais c’est sans doute trop lui demander que d’être un tantinet politiquement cultivé, l’information (la déformation) des lecteurs, c’est un métier !
Absence toujours, à la télé régionale cette fois, FR3 Normandie, les actualités haut-normandes du mercredi 5 janvier au soir... Un (bon) auteur régional de polars, Philippe Huet, vient de sortir un livre sur Jules Durand, ce militant anarchiste havrais, animateur du syndicat des charbonniers, injustement condamné à mort pour la mort d’un mouchard et qui, sa peine commuée à la suite d’une campagne d’opinion, finira malheureusement dans un asile d’aliénés… Sujet de routine sur l’auteur, puis autour du port au temps des navires à charbon et sur les conditions terribles de la classe ouvrière, enfin on arrive à Jules Durand : militant syndicaliste et … idéaliste ! Pourtant ce livre, ce n’est pas la redécouverte d’un militant tombé dans l’oubli. Depuis des décennies, il
existe au Havre un groupe anarchiste portant ce nom ! Sans parler d’un grand boulevard ! Qui, un tant soit peu sérieux, peut parler de Jules Durand sans évoquer son anarchisme ou son anarcho-syndicalisme ?A moins
bien sûr de pratiquer volontairement cette censure ! Alors, la rédaction de FR3 Normandie, incapable et ignare ou intellectuellement malhonnête ?
Pour terminer «en beauté», Libé du vendredi 7 janvier et ses pages Rebonds…* Une page entière, «Lettre ouverte à Louise Michel, rebelle éternelle», du facteur médiatico-LCR Olivier Besancenot. Avant de lire, on se doute déjà un peu du contenu, car, en ce qui concerne Louise Michel, on en a l’habitude. Ce n’est pas nouveau, sa figure emblématique a été récupérée par les staliniens, en témoigne le nombre incalculable d’écoles et de collèges Louise Michel dans les villes dirigées ou ayant été dirigées par des municipalités cocos. A chaque fois, c’est la Communarde qui est mise en avant… On sait que Bébé Krivine aime faire accroire qu’il est de tendance libertaire. On connaît son discours qui consiste à dire je suis libertaire de cœur, mais réaliste, alors j‘adhère à une orga instituée pour «avancer»… C’est pour ça que le poupon rouge est à la LCR et que cette dernière, de plus en plus réaliste et de moins en moinsrévolutionnaire, en est à «combattre le néolibéralisme» et à se traîner dans la mouvance altermondialiste molle façon ATTAC… Bref, on ne s’attend pas à être surpris et effectivement tout son pensum au ton mielleux et pseudo affectueux n’est qu’une énième tentative laborieuse de récupérer éhontément et la Communarde et la militante féministe et révolutionnaire de l’après Commune. Et c’est là qu’on croit rêver et qu’on relit le texte à deux fois : toute une page sur Louise Michel sans dire qu’elle était anarchiste. Un OVNI littéraire! Tout juste à la fin lui concède-t-il un drapeau… rouge et noir ! Une imposture historique ! Toute une vie bafouée sous d’hypocrites hommages ! On connaissait les staliniens et leurs
pratiques de retoucher les photos pour faire disparaître les communistes tombés en disgrâce, les trotskistes ne font pas mieux ! Dans les biographies, on gomme. «L’Anarchie seule peut rendre l’homme conscient, puisqu’elle seule le fera libre», on efface. «Le pouvoir est maudit et c’est pour cela que je suis anarchiste», un coup de Blanco ! «Éh bien moi, j’ai pris le drapeau noir et j’ai été dire que le peuple était sans travail et sans pain. Voilà mon crime.», à la trappe ! Avec les traitements de texte, le virtuel, c’est encore plus facile ! La
réécriture de l’Histoire, une monomanie marxiste… Mais pas seulement. On pourrait multiplier à l’envi les exemples où les médias, quels qu’ils soient, rebaptisent les militant(e)s anars pour mieux les nier. Les anars
espagnol(e)s ont fourni certainement les plus nombreux cas, dilué(e)s qu’ils sont souvent sous l’appellation consensuelle de Républicains…
Osons le mot, même si ça peut sembler un peu fort : du révisionnisme ! Les anars n’ont jamais existé et n’existent pas. Ce n’est pas «y’en n’a pas un sur cent et pourtant ils existent», c’est «y’en n’a pas et ils n’existent pas !» Des fantômes de l’Histoire. La preuve, on n’en parle pas dans les journaux ou à la télé ! Il y a une négation volontaire ou par bêtise, par manque de rigueur, de volonté de recherche, un comble pour ceux qui se prétendent journalistes. En tous les cas, le nouveau candidat perpétuel trotsko ne manque pas d’air. Aucune excuse, c’est en toute connaissance de cause qu’il a pondu sa… On va essayer de rester poli (c’est dur), tirer la chasse, ne pas lui faire l’honneur d’un débat courtois ou même d’une polémique forcément stérile. En cette année et ce mois du centenaire de sa mort, Louise Michel mérite beaucoup mieux. Nous n’aurons donc qu’un mot (deux pour être précis) pour le joufflu gonflant : TA GUEULE !
Eric G. (Groupe de Rouen)
*Ce n’est pas l’article ironique du lendemain qui nous fera changer d’avis, même si sur le fond on est plutôt d’accord. Louise Michel y est certes reconnue comme anarchiste mais c’est en passant, parmi d’autres grandes causes qu’elle a embrassées. Et c’est l’anarchie avec un petit a…
On cite vaguement quelques commémorations, mais ce sont d’anonymes associations qui les font. Exit encore les libertaires !
Le Monde libertaire, l’hebdomadaire sans Dieu, sans maître et sans
publicité de la Fédération anarchiste, chaque jeudi dans vos kiosques.
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Archives sur le net :
http://www.federation-anarchiste.org/mlTransmis par le secrétariat aux Relations Extérieures de la Fédération
anarchiste.
Sommaire :
Page 3 : Le tsunami est plus meurtrier que le réchauffement global, par
Philippe Pelletier
Page 5 : L’autruche mord dans la nouvelle année, par « Evergreen » Fred
Page 6 : Lutter pour le droit à l’avortement, par le groupe Claaaaaash
Page 8 : Avortement, s’informer, informer, c’est aussi lutter, par Rose
Paradis
Page 11 : Paradigme perdu, la formation professionnelle à la trappe, par
Hugues Lenoir
Page 15 : Contre-réforme Raffarin, l’addition, par Michel Sahuc
Page 16 : L’exposition Strubel, par A.Robèr
Page 17 : Le mot « anarchiste » et les médias, par Eric
Page 18 : « Maraboutés », insurrection, résurrection, par Le Furet et M.
Rollin
Page 19 : Révolutionnaires inconnu-e-s, de Voline à Durruti en passant
par Emma, par Jon la Claque
Page 21 : « Cher Olivier … », Réponse au porte-parole de la LCR, par
Virginie et Jean-Pierre
Page 22 : Vie du mouvement et Radio libertaire
Page 23 : Agenda militant
La citation de la semaine :
« je me suis souvent posé la question : comment les masses peuvent-elles
permettre leur exploitation par une minorité ? La réponse est : parce
qu’elles s’identifient à elle. »
Emma Goldman
à 09:12