--> Contrat de transition professionnelle : comment détruire à la fois le code du travail et l’assurance chômage.
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collectif-RTO : Il est des réformes qui font grand bruit, parce que leurs instigateurs, bêtement les font passer en grande pompe, au point que même les syndicats et la gauche sont obligés de prendre position et d’aller manifester.D’autres comme le contrat de transition professionnelle sont annoncées très discrètement et lancées sous forme d’expérimentations : aujourd’hui le CTP ne concerne que quelques centaines de salariés, demain nous tous...
Jean-Louis borloo est un destructeur polyvalent : on lui doit les destructions de logements HLM, mais aussi celle du droit du travail.
Avec le contrat de transition professionnelle, notre prodige faitd’une pierre trois coup : il s’attaque à la fois au cdd et au cdi, à l’assurance chômage et au cadre national de la loi.
Le CTP est en effet une expérimentation : le texte est passé par ordonnance et ne s’applique qu’à certains bassins d’emplois : ainsi que vous habitiez la Creuse ou le Nord Pas de Calais, les règles qui vous seront applicables ne seront pas les mêmes.
En quoi consiste le CTP
Il s’agit d’un contrat conclu entre un licencié économique et l’AFPA : il s’agit d’une période pendant laquelle vous serez indemnisé à hauteur de 80 pour cent de votre salaire brut.
Voilà pour la carotte, puisque le montant de l’indemnisation est supérieur à ce que vous toucheriez aux ASSEDIC.
Seulement pendant un an , la CTP vous fera alterner périodes d’actions de recherche et de retour à l’emploi ( bilan de compétences , ateliers ....), périodes de formation et ....périodes de travail.
Or lorsque vous signifiez votre accord à l’employeur concernant la CTP, vous ne connaissez pas encore le contenu du dispositif et ce à quoi vous allez vous engager : c’est huit jours plus tard que vous avez un entretien avec votre référent et un mois après que l’AFPA vous propose le plan d’action « concerté »
Le dispositif permet de faire jusqu’à neuf mois de CDD sur 12 prévus pour la CTP : pendant ces périodes, votre allocation est versée à l’employeur, qui fait une très bonne affaire : cet employeur peut d’ailleurs être privé ou public...Si le montant de l’allocation est supérieur au salaire, le différentiel vous est versé.
Mais votre CDD est totalement dérogatoire : en effet vous ne toucherez pas d’indemnité de fin de contrat,.Encore une bonne affaire pour l’employeur....Ces périodes de travail effectif sont en effet considérées comme des périodes de formation, et vous avez le statut de stagiaire de la formation professionnelle.
Et pas question de refuser emplois précaires, prestations inutiles : le contrôle sera beaucoup plus serré qu’à l’ANPE ( oui c’est possible ).En effet dès votre entrée dans le dispositif vous signez chaque mois sur des objectifs de reclassement ciblés :et le texte indique que les emplois qui peuvent vous être proposés doivent correspondre à votre formation antérieure mais aussi à celles faites dans le cadre de la CTP.Le critère du bassin d’emploi est aussi pris en compte.
D’autre part, la CTP est immédiatement rompu si votre référent considère que vous n’avez pas rempli vos objectifs, notamment toute proposition d’emploi correspondant aux critères du contrat signé , y compris si cette offre implique « une mobilité géographique »
Traduction dans les faits : dans votre bassin d’emploi, il y a du recrutement dans le secteur des produits congelés : l’AFPA vous propose une formation de trois mois puis un CDD de la même durée.Vous refusez, vous êtes passibles de sanctions allant jusqu’à la sortie du dispositif.
Autre exemple : vous avez signé pour une formation dans les métiers du Bâtiment : on vous propose d’aller travailler à 300km de chez vous, vous devez accepter
Le contrôle dans le cadre de la CTP n’est en effet pas mensuel mais hebdomadaire , par téléphone ou en entretien....
ET APRES ?
Si au bout d’un an vous n’avez toujours pas trouvé d’emploi, ou si vous vous faites virer du dispositif en cours de route, vous avez la possibilité , si vous avez suffisamment bossé avant votre licenciement économique de percevoir vos droits aux ASSEDIC.
Mais attention : toute la période pendant laquelle vous étiez en CTP sera déduite de votre durée d’indemnisation, MEME LES PERIODES TRAVAILLEES en CDD.Il y a donc de grandes chances que votre indemnisation chômage soit tout simplement caduque
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La CTP, actuellement en expérimentation dans plusieurs zones frappées par les licenciements économiques fait figure de tête de proue de ce que les gouvernements appellent sécurisation du parcours professionnnel, formation tout au long de la vie pour la gauche : il s’agit de faire du salarié une variable d’ajustement à l’état du marché de l’emploi : la formation ne tient plus aucun compte de nos envies , il s’agit simplement de s’adapter aux demandes des patrons , demandes dont l’AFPA se fait la courroie de transmission.
Il s’agit aussi d’une destruction complète des droits collectifs : plus de droit du travail applicable à tous les salariés de la même manière, mais dans la même entreprise des gens qui font le même boulot avec des statuts très différents.Plus de droits collectifs à l’indemnisation, mais des contrats individuels d’objectif contrôlés de manière de plus en plus précise qui conditionnent le versement d’une allocation.
Voilà ce qui cache derrière le discours de ceux qui prétendent accompagner les évolutions de l’emploi salarié en proposant des garanties attachées au salarié et non plus à l’emploi occupé, puisque les périodes de non-emploi sont de plus en plus fréquentes. Voilà comment de l’UMP au PS, on utilise nos revendications et nos analysessur l’évolution et la discontinuité de l’emploi en les vidant de leurs sens.En faits de nouveaux droits, il s’agit surtout de celui de devenir totalement flexible sous peine de perte totale du revenu de remplacement.
La première entreprise qui a choisi de jouer le jeu en prenant des salariés en CTP est une entreprise d’abattage de viande : son patron se félicite d’avoir ainsi la possibilité de toucher des personnes qui ne se seraient pas intéressées à ces métiers sans la CTP.. ;
Dans les deux Sèvres, à l’occasion d’un plan social dans l’entreprise heuliez, la CFDT saisit l’occasion pour demander , non pas l’annulation du plan social mais la mise en oeuvre d’un contrat de transition professionnelle : et c’est encore le syndicat le plus proche du MEDEF qui en parle le mieux : « nous proposons que les salariés soient provisoirement mis à disposition d’une sorte de banque aux emplois , afin de répondre aux demandes d’autres entreprises « .
Dernier détail : au moment ou l’on, se félicite la baisse des licenciements économiques, il n’est peut-être pas inutile de rappeler qu’un slarié en CTP , comme c’est le cas d’ailleurs en convention de reclassement personnalisé n’est pas comptabilisé dans les chiffres des licenciés économiques , ni dans ceux du chômage, puisqu’il est stagiaire de la formation professionnelle.