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C’est une ironie de notre époque que l’OMC et la concurrence libre et non faussée sont actuellement présentés comme du « développement ».
L’agrandissement des marchés ouverts aux multinationales dans l’agriculture, les services et les produits industriels au travers du cercle de Doha est appelé le « Cercle Développemental de Doha ». Et « développement » sera le maître mot lors du conseil de l’OMC qui aura lieu à Hong Kong du 13 au 18 décembre 2005. Un ensemble de mesures spécial « développement » a été introduit dans l’ébauche du texte du traité dans le paragraphe 37 intitulé « Aide pour le Commerce ».
« Nous accueillons les discussions des ministres des finances et du développement dans divers groupes, y compris le FMI et le Comité de développement de la Banque Mondiale qui ont eu lieu cette année sur l’extension de l’aide pour le commerce. L’aide pour le commerce devrait servir à aider les pays en voie de développement, en particulier les pays les plus pauvres, à construire et assumer leur capacités à fournir les produits et les infrastructures nécessaires au commerce dont ils ont besoin afin de mettre en application et de bénéficier des accords de l’OMC et plus largement d’élargir leur commerce. L’aide pour le commerce ne peut pas remplacer les bénéfices de développement qui résulteraient d’une conclusion ambitieuse au DDA, particulièrement en ce qui concerne l’accès au marché. Cependant cela peut représenter un complément significatif au DDA. Nous invitons le Conseil Général d’organiser une réunion avant le mois de juillet 2006 consacré à étudier comment l’Aide au Commerce pourra contribuer le plus efficacement possible à une conclusion réussie et ambitieuse du DDA. »
Quand le marché libre a été lancé par l’OMC, il y a une dizaine d’années, le slogan était : « Commerce pas Charité ». Dix années de l’OMC ont exposé à quel point les règles de l’OMC étaient astreignantes et très injustes. Le « développement » était devenu la difficulté qui montrait que la promesse de liberté de commerce s’évanouissait.
Mais le ministère de Hong Kong ne se contentera pas de jouer sur les mots. Ce qui est proposé dans l’Aide pour le Commerce » c’est une nouvelle convergence et cohérence des obligations coercitives de la libéralisation des marchés entre l’OMC, la Banque Mondiale et le FMI.
« Construire et assumer les capacités à fournir les produits » implique la destruction de la souveraineté alimentaire et la réorientation de l’agriculture du tiers monde vers l’industrialisation agricole pour des produits rentables à exporter.
Les « infrastructures nécessaires au commerce » implique les privatisations des services d’énergie et de l’eau, les privatisations des autoroutes, des ports maritimes ; des aéroports et la « Walmartisation » du détail. En d’autres termes, l’Aide au Commerce signifie que la Banque Mondiale et le FMI utilisent leur pouvoir financier pour imposer la libéralisation du commerce et imposer les privatisations comme conditions incontournables aux pays en voie de développement.
L’ »Aide au Commerce » signifie que la Banque Mondiale et le FMI réunis avec l’OMC abusent et imposent leur conditions pour élargir et accroître les marches des MCC dans chaque secteur : agriculture, services, productions.
Une telle dictature ne peut absolument pas s’appeler « développement ». Le « développement » concerne l’évolution endogène et naturellement auto organisé d’un organisme, une personne, une société, un pays. Le développement doit donc obligatoirement être basé sur la souveraineté et l’espace économique et politique ne sert qu’à l’auto détermination. Le développement dans sa véritable signification, dérivée de la biologie se réfère à une évolution naturellement organisée, pas des changements imposés. Ces derniers signifient « anomalies » non pas développement.
Le « développement » devait être un projet post colonial, un choix pour faire accepter un modèle de progrès dans lequel le monde entier serait refait sur le nouveau modèle de l’ouest colonisateur, sans avoir à passer par l’assujettissement et l’exploitation que le colonialisme entraîne. La prétention était que le style du progrès occidental était possible pour tous. Le développement comme le bien-être amélioré pour tous, a ainsi été calqué sur les catégories économiques occidentales des besoins, de productivité et de croissance. Des concepts et des catégories sur l’utilisation du développement économique et des ressources naturelles qui ont émergés dans le contexte spécifique de la croissance capitaliste et industrielle au centre du pouvoir colonial, ont été élevés au niveau universel d’applications d’éléments présupposés dans un contexte totalement différent de besoins basiques de satisfaction pour les populations des pays du tiers monde indépendants depuis peu..
Cependant, comme Rosa Luxembourg l’a démontré, le début du développement industriel en Europe de l’ouest nécessitait l’occupation permanente des colonies par les puissances coloniales et la destruction des économies locales naturelles. Selon elle, le colonialisme est une nécessaire condition constante pour la croissance capitaliste : sans les colonies, l’accumulation du capital s’arrêterait net.
Le développement comme accumulation de capital et commercialisation de l’économie pour la génération de surplus et de profits implique donc la reproduction non seulement d’une forme particulière de création de richesses , mais aussi la création de pauvreté et de vols de biens qui lui sont associés.
Une réplique d’un développement économique basé sur la commercialisation de l’utilisation des ressources pour les commodités de production dans les pays nouvellement indépendants a créé les colonies internes. Le développement était ainsi réduit à la continuation du processus de colonisation ; c’est devenu une extension du projet de création de richesses de la vision économique du modèle patriarcal occidental, qui a été ancré sur l’exploitation et/ou l’exclusion des femmes (de l’ouest et d’ailleurs), sur l’exploitation et la dégradation de la nature, et sur l’exploitation et l’éradication d’autres cultures. Le « développement » ne peut qu’entraîner la destruction pour les femmes, la nature et les cultures asservies, c’est pourquoi, à travers le tiers monde, les femmes, les fermiers et les tribus luttent et combattent le « développement » comme ils combattaient auparavant pour se libérer du colonialisme.
Les programmes d’ajustement structurels de la Banque Mondiale et du FMI qui forcent la libéralisation du marché à travers des conditions imposées ont amplifiés la dévastation de leur financements initiaux du « développement ». La libéralisation du marché agricole a été imposé en changeant les lois nationales sur le territoire et les semences facilitant le contrôle des industriels sur les fournitures de graines et l’agriculture.
Combiné avec la libéralisation du commerce et de l’OMC, l’annulation de restrictions quantitatives, et la promotion du « dumping » social, les financements de la Banque Mondiale a conduit à l’appauvrissement et au surendettement d’une majorité de fermiers et depuis la dernière décennie, plus de 40000 fermiers Indiens ont été conduits au suicide par désespoir car le fardeau de coûts de productions élevés et les bas prix de vente de leurs produits les ont étranglés eux et leur bétail.
Tuer des fermiers n’est pas du développement.
Les programmes de privatisation de l’eau et de l’énergie appliqués par la Banque Mondiale ont conduits à augmenter les tarifs par dix et ont retiré les services publiques essentiels à la population. Retirer les droits humains fondamentaux à l’eau n’est pas du développement. C’est un génocide.
La réunion Ministérielle de Hong Kong a été définie comme une rencontre sur le « développement ». Les mouvements des populations ont dit à la Banque Mondiale que 50 ans cela suffit et nous disons à l’OMC que 10 ans c’est assez et cela doit cesser.
La convergence de la libéralisation du commerce telle qu’elle est imposée par l’OMC et la Banque Mondiale dans l’ensemble des mesures de l’Aide pour le Commerce doit être répondue avec un agenda clair des populations qui expose que la libéralisation du commerce n’est pas du développement, c’est en fait de l’anti développement, du mauvais développement ; nuisance destructrice.
Nous ne pouvons pas permettre que le développement soit utilisé comme un processus de domination, d’exploitation, de recolonisation. Cela doit être un processus libéré par les énergies des populations qui reprennent leur souveraineté sur les territoires, l’eau, les semences, le bétail, les cultures.
Après Hong Kong, ce sont les initiatives solidement enracinées qui ont créées des alternatives basées sur la souveraineté des populations qui définiront ce qui servira de référence au développement et ce qui devraient être les lois du marché.
Vandana Shiva
Traduit par satya le 17/02/2006 depuis http://www.zmag.org/bios/