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La crise,
cette invitée de dernière heure qui permet de dire aux convives
déjà à table qu’il n’y a plus rien à manger, mais que la maîtresse de maison n’y
est pour rien,… est
une aubaine pour les politiciens.
QU’EST-CE QUE LA CRISE ?
A écouter les « experts » en « économie officielle », les faiseurs d’opinions et les commentateurs attitrés des pouvoirs, la crise est une chose qui surgit à l’improviste, imprévisible et imparable. Un monstre froid et impersonnel qui dévaste les édifices sociaux consciencieusement et humainement élaborés par les femmes et hommes au pouvoir…. Ceux la même qui demandent l’adhésion du peuple et qui satisfont, ou auraient bien voulu satisfaire, ses désirs.
L’imprévisibilité
de la crise ne peut qu’entraîner le dédouanement du politicien. L’édifice économique et
social s’est écroulé, au mieux, a été endommagé par une force
incontrôlable… Il faut subir la crise comme on subit un
phénomène climatique ou sismique. On peut certes se protéger
préventivement pour limiter les dégâts, mais on ne peut pas
éviter que le phénomène se produire.
Bien sûr, les experts-économistes officiels ou apparentés, donneurs de leçons, prévisionnistes « extralucides », et surtout les politiciens vont, poussés dans leurs derniers retranchements, trouver quelques « coupables » : les spéculateurs, les traders, les prises de risques insensées, les paradis fiscaux, mais aussi et surtout la « gabegie des dépenses salariales et sociales ». Hormis cette dernière catégorie tous seront dédouanés. La charge reposera sur les « efforts à faire pour le peuple »,… banques, spéculateurs et paradis fiscaux pourront, après avoir été timidement montré du doigt, continuer leurs petites et grandes affaires financières.
Bref la crise c’est le résultat des « comportements collectifs qui ne sont que l’expression des égoïsmes individuels » ; et comme les politiciens ne sont que les représentant du peuple,… ils n’y sont pour rien. CQFD.
Ben voyons !
Le raisonnement est un peu schématique et sommaire, mais c’est l’ossature du discours que l’on entend dans la bouche des politiques et des médias.
LA BOUEE DE SAUVETAGE
Comme la
plupart des citoyens peine pour savoir exactement ce qui se
passe, ce qui se joue, quelle
est la part de
l’inévitable et du provoqué, le degrés d’implication des
politiques, des financiers, ils s’en remettent aux discours
officiels (de droite comme de gauche) et aux « experts » qu’ils
voient à la télévision, entre une série débile et une rencontre
sportive.
Ces derniers, une vingtaine, toujours les mêmes, traversent les périodes de calme et d’agitation bardés de leurs certitudes et de leurs statistiques, donnent moult conseils qui n’ont qu’un seul et unique objectif : pérenniser le système marchand. Car, dans leurs explications il ne saurait être question de remettre en cause ses fondements. La crise serait un mal qu’il faut soigner pour rendre le système sain… Les comparaisons avec la médecine ne manquent pas : crise de croissance, cancer, infection, partie saine, thérapie de choc, remède de cheval, trancher dans le vif, métastases….
On a toujours une petite crise sous le coude, ou quelque chose qui y ressemble, pour tout justifier… surtout l’injustifiable :
- crise de la dette souveraine au sujet de laquelle les pouvoirs interviennent, non pour améliorer la condition des peuples, mais rassurer les marchés financiers spéculateurs,
- « crise du système des retraites par répartition », pour justifier le recours à la capitalisation et donc a une gestion spéculative des retraites (rôle des fonds de pensions),
- « crise du système de santé » ce qui permet de liquider le service public de la santé et de développer le secteur privé essentiellement intéressé par l’argent,… dégradation de l’hôpital public !
- ….. et ainsi pour tous les secteurs (éducation, justice, énergie,…)
La crise
est une aubaine pour « remettre les pendules à l’heure » et nier
les contradictions qui minent les rapports sociaux, accroissent
les inégalités et détruisent le tissu social (exclusion,
chômage, inégalités,…). L’imagerie
maritime est elle aussi largement utilisée : nous sommes sur
le même bateau, la solidarité s’impose et pour éviter la
catastrophe il faut que celles et ceux qui rament (pardon, les
forces vives !) redoublent d’effort !.
Quiconque remet en question cette délirante explication est immédiatement qualifié de naufrageur.
La crise économique est une chose trop sérieuse pour être laissée au peuple… Il faut des gens compétents pour l’éradiquer.
LA DEMOCRATIE FACE A LA CRISE
Dans un système qui se dit démocratique, il est facile pour le pouvoir de se défausser sur les citoyens,… de même qu’il est difficile aux citoyens d’accuser le pouvoir.
Pourquoi ?
Parce que le pouvoir a une légitimité qu’il tient du peuple, ce qui veut dire que le pouvoir, et ses décisions, sont en principe l’expression du peuple. On comprendra que le peuple peut difficilement aller à l’encontre de « ses propres décisions », incarnées par le pouvoir qui est issu de lui…. Alors que dans un système totalitaire, donc sans légitimité populaire, le peuple peut toujours accuser le pouvoir d’agir à l’encontre de ses intérêts,… cela n’est plus possible dans un système qui se dit démocratique, et qui l’est aux yeux du peuple.
Pour rompre ce paradoxe il faut aller au-delà des évidences citoyens/pouvoir et faire de la crise quelque chose d’extérieur, une sorte de chose naturelle à laquelle se heurte la collectivité : le peuple et ses dirigeants.
C’est tout
le sens de la conception libérale de l’économie. En effet, si le
substrat économique de
la société est déconnecté du
politique, du social bref… de l’humain, s’il est considéré comme
quelque chose de « naturel », donc d’insensible aux humains,…
alors de fonctionnement économique de la société échappe à tout
contrôle (un peu comme un raz de marée, une irruption volcanique
ou un tremblement de terre). Conséquence : personne ne peut-être
tenu pour responsable : c’est la loi du marché,….Seuls
les experts peuvent analyser le phénomène et préconiser les
mesures à prendre.
La démocratie existe, puisque le pouvoir est élu, mais les mesures à prendre échappent au peuple qui doit s’en remettre aux spécialistes.
Le tour de passe-passe est ainsi complet, l’illusion démocratique est assurée, et l’action « rationnelle » garantie par les experts. La crise n’est désormais plus qu’un dysfonctionnement du système qu’il s’agit de réparer pour retrouver tout son équilibre et sa fonctionnalité. Les mesures à prendre son impératives et ne peuvent qu’être acceptées par le peuple puisque ce sont ses représentant qui les cautionnent et les préconisent.
Il se peut même, que le peuple, dans son incohérence, son inconscience et son irresponsabilité exige des mesures qui vont à l’encontre des intérêts du système… et donc, officiellement, de ses propres intérêts. Il s’agit donc, pour rétablir la vérité, soit de convaincre, soit de réprimer les récalcitrants, forcément irresponsables.
Les politiques peuvent même, corriger les décisions aberrantes du peuple et faire l’inverse de ce qu’il a prévu (cas du Traité Constitutionnel Européen refuse par les citoyens français), ou bien encore refuser un référendum populaire sur les mesures à prendre (cas de la Grèce), ou bien faire prendre les décisions par des technocrates sans légitimité (cas général de l’Europe), ou bien …. A quoi d’ailleurs, à ce stade, sert la légitimité ?
On peut même changer le personnel politique ce qui donnera l’impression du changement.
C’est exactement ce qui se passe aujourd’hui en France et en Europe.
La crise est donc une aubaine pour « resserrer les boulons », liquider les acquis sociaux, liquider les services publics, faire travailler plus pour gagner moins,…
Droite et Gauche s’entendent comme larrons en foire pour gérer ce type de situation et pérenniser ce système qui nous conduit à la catastrophe. Elles agitent l’épouvantail de l’extrémisme de droite pour stabiliser la situation politique, extrême droite qui sera toujours à temps de prendre les commandes si le peuple se rebiffe trop.
mars 2012 Patrick MIGNARD