La majorité des électeurs ne croient plus en ce que disent les politiciens, experts en baratin publicitaire. La farce bat son plein, et le plébiscite de Nicoléon a un arrière-goût de tragédie en ces temps de crise, qu'il a lui-même créée. Mais quand les "veaux" votent dans cette guignolerie spectaculaire, ce n'est plus pour un candidat, mais par défaut ou contre les autres qui sont encore pires. On élimine plutôt que l'on sélectionne. La plupart ont compris que les élections sont des "pièges à cons", qu'une fois élu le président ne respecte jamais ce pour quoi il a été élu. Il ne reste que le choix de se faire avoir, trompé et manipulé. Dans cette magouille, l'important n'est pas le choix, mais le show, l'illusion de la démocratie.
La démocratie républicaine est construite sur la représentativité de ses élus, au scrutin majoritaire. Mais il n'y a pas de majorité pour gouverner le pays. C'est le système électoral qui en fabrique artificiellement une, qui ne représentera en fait, qu'une petite minorité. Ainsi, étant donné que la moitié des électeurs ne sont pas convaincus par le candidat pour lequel ils votent, celui qui arrive en tête au premier tour ne représente donc, qu'environ 15 % des suffrages exprimés, qui eux-mêmes ne représente qu'environ 75 % des inscrits, sans oublier les 15 % de non inscrits. Au bout du compte, le candidat en tête se retrouve à ne représenter qu'environ 10 % de la population. Une personne sur dix fera une majorité fictive, qui décidera de tout. Ce système fait comme si la démocratie fonctionnait encore. Ayant largement fait la preuve de sa non-représentativité, il n'est plus ni crédible ni défendable.
N'étant pas représentatif, nos élus ne se considèrent pas comme mandatés
par le peuple, mais comme étant mis en place dans un "job" qu'ils
feront comme ils voudront. Comme dans n'importe quelle entreprise, ces
cadres de l'État, spécialistes en gestion, ne pensent qu'à leur
carrière. Ils ne nous représentent pas, ils ne représentent
qu'eux-mêmes. N'étant pas révocables les élections leur donnent carte
blanche. Ceci leur permet de promettre n'importe quoi, car ils savent
qu'une fois élus, ils seront libres de faire ce qu'ils veulent. Même les
référendums n'ont plus aucune incidence sur leurs décisions. Quant aux
partis qui veulent rendre le pouvoir au peuple, certains se souviendront
que ce slogan s'est trop souvent changé en "tout le pouvoir au parti",
avec les conséquences que l'on connaît.
En élisant l'autorité suprême du pays, c'est un pacte de servitude
volontaire que l'on signe jusqu'à la prochaine fois. "La démocratie
(représentative) bourgeoise est l'appropriation du pouvoir politique des
individus, rebaptisés électeurs, par des représentants. Ceux-ci, au nom
de leurs électeurs, emploient ce pouvoir au bénéfice de la classe
dominante. Le vote est la légitimation formelle des maîtres." (Robert
Chasse, Situationist International, New York 1969)
Les représentants du commerce politique, domestiques du grand capital et
de la haute finance escroquent le bien publique pour le livrer aux
entreprises mafieuses de l'affairisme mondial. Le pouvoir est usurpé au
peuple, c'est pourquoi son autorité est toujours abusive. Et comme le
dit la chanson, "pour être heureux vraiment faut plus de gouvernement".
Les professionnels de l'embrouille se lancent sur le marché du pouvoir.
Les candidats montent leur campagne comme une campagne publicitaire dont
ils seraient eux-mêmes la marchandise à promouvoir. Le but est de
vendre son image et d'attirer l'électeur, comme une prostituée aguiche,
séduit et trompe le client. Tout n'est que jeux d'apparences et
manipulations des plus bas instincts. La crédulité et le masochisme se
répandent dans la population comme une épidémie.
On voudrait nous faire croire que choisir son maître, c'est la liberté.
Pourtant, ce maître n'est que le gérant du marché, le gestionnaire des
affaires, le bureaucrate en chef, le chien de garde du système que l'on
choisit parmi les moralistes, les démagos, les hypocrites, les
malhonnêtes, les menteurs, les magouilleurs et les manipulateurs, les
escrocs et les truands. On élit celui qui nous imposera les directives
des technocrates européens, eux-mêmes aux ordres des mafias financières à
dominante américaine, installant le contrôle et la maîtrise du système
pour les meilleurs profits d'un groupuscule de grands bourgeois et
quelques aristocrates des trafics financiers de grande envergure. Les
élus ne nous représentent pas, mais seulement les intérêts de cette
caste dominante, instaurant la dictature des affaires et des trafics en
tout genre.
"Diviser pour régner" est la base opérationnelle du pouvoir. Les
discours contradictoires ont ceci en commun c'est que chaque sujet est
bien séparé des autres. La séparation fait le jeu de la bureaucratie,
qui devient ainsi l'unification effective d'un monde parcellaire. En
dissociant, fragmentant, morcelant, c'est la compréhension globale du
monde qui disparaît, et le fonctionnement du système devient
inaccessible. Alors, l'idéologie dominante effectue son tour de
passe-passe et l'unité de la vie se fond dans une succession
d'objets, la vie devient objet dans le spectacle des marchandises.
La société n'a plus ni mémoire ni devenir, on pare au plus pressé, on
n'y réfléchit plus qu'à très court terme, en se moquant des
conséquences, dans l'urgence aveugle du faire pour faire sans trop y
croire. Le meilleur des mondes est aujourd'hui construit sur le meilleur
des mensonges. En inventant la crise, l'escroquerie est parfaite, car
elle passe par une fausse piste économique qui a été rendue
indiscutable. La crise est crue, et l'exploitation capitaliste n'a plus
de limite.
"La gangrène se propage dans un système livré à lui-même, sans réelle
gouvernance, qui impose les contraintes implacables nécessaires aux
affaires mafieuses de financiers multimilliardaires, libres de piller
tout ce qu’ils trouvent, tels des charognards dévorant ce qui reste d’un
monde en décomposition.
Le spectacle, qui n’est rien d’autre que la vision publicitaire du monde
marchand sur lui-même, ne parle que de crise économique, doublée d’une
récession sociale, pour mieux faire disparaître cette gigantesque rafle
des richesses par quelques accapareurs au dessus des
lois, au-delà du visible, qui provoquent la ruine progressive du
système.
Le pire est à venir. La peur de l’avenir n’est que l’expression de
l’incertitude du devenir des capitalistes qui n’ont plus de futur. Tous
ceux qui n’ont plus grand-chose à perdre ont tout à espérer d’un nouveau
monde émergeant par nécessité. Ce qui nous arrive n’est pas un accident
de parcours, mais bien l’aboutissement du capitalisme, l’achèvement
d’un monde suicidaire."
(L'INVENTION DE LA CRISE, escroquerie sur un futur en perdition, aux Éditions L'Harmattan, 2012)
Pour en finir avec une survie de plus en plus insupportable, il s'agit
maintenant de refaire un monde sans le monde des affaires, de reprendre
le pouvoir sur nos conditions d'existence et construire ensemble par une
démocratie directe à taille humaine avec des mandataires révocables,
l'autogestion généralisée de la vie par tous et partout.
Lukas Stella