Les élections approchent les ambitions s’expriment, les appétits s’aiguisent et les belles résolutions se fondent dans le magma informe des pratiques, peu ragoûtantes, de l’électoralisme.
Savoir
qui est le plus « unitaire », avec qui « on va pouvoir
composer une liste », discuter, celles et ceux que l’on va pouvoir
« soutenir »… Rien que du « fondamental » aux yeux
de celles et ceux qui veulent construire un « monde nouveau ».
LA
LENTE DECADENCE DES « COLLECTIFS UNITAIRES »
Pour
s’en rendre compte il suffit de lire les interventions et les déclarations sur
les sites et sur les forums…et le résultat de tout ce déploiement, stérile,
d’énergie.
Aujourd’hui
tous les regards, toutes les volontés, toute l’énergie militante sont tournés
vers un seul et unique objectif,… participer aux prochaines élections. Ils ne
parlent plus que de ça, ne pensent plus qu’à ça !
Celles
et ceux qui se sont proclamés leader de ce/ces mouvement/s n’en finissent pas
de magouiller et d’expliquer doctement que la stratégie qui est la leur et qui
a fait faillite est évidemment la meilleure… des noms ?...
Que
la plupart des militants et non militants, anti libéraux et altermondialistes
qui peuplent et animent ces collectifs soient politiquement honnêtes, c'est-à-dire
agissent en toute bonne foi, sans arrières pensées bureaucratiques, c’est
certain…. C’est d’ailleurs ça qui fait le pathétique de la situation… il n’ont
pas le moindre doute sur le sérieux et l’efficacité de leur action… alors
qu’irrémédiablement ils vont, une fois de plus, « se faire avoir »…
Et si encore ce n’était que la première fois, mais c’est chaque fois la même
chose..
Ainsi,
ce qui pourrait représenter l’un des niveaux le plus conscient et le plus
déterminé pour « changer la société », se fourvoie systématiquement
dans des impasses, tombe naïvement dans les pièges grossiers que tend le
système dominant pour égarer les critiques et stériliser toute velléité de
changement.
Le
vrai problème c’est que ces militants ne se rendent pas compte que leur
attitude est essentiellement et purement défensive. La virulence
critique de leur discours leur donne l’illusion de la radicalité dans l’action.
Nous
en sommes aujourd’hui à un tel point de soumission aux règles soit disantes
« démocratiques », et à une perte de réalité de ce qu’est
concrètement l’action politique, que l’on confond le discours et la pratique.
L’ENTONNOIR
POLITIQUE
Le
débat politique aujourd’hui, si l’on peut appeler cela un débat, c’est comme un
liquide que l’on a agité et que l’on fini par verser dans un entonnoir… un
tourbillon se forme, emportant tout… et fini par passer par le trou. Une fois
dans la bouteille, il n’y a plus qu’à mettre un bouchon, l’étiquette, la date
et le tour est joué…
Une
fois dans l’entonnoir, il n’y a plus rien à faire, les bords sont glissants,
aucune prise possible, on est irrémédiablement entraîné et le résultat est sans
surprise, il est même prévu à l’avance.
Que
les organisations politiques traditionnelles foncent têtes baissées dans cette fiction
politique, on peut le comprendre, elles défendent avant tout leurs intérêts
d’organisation et se sentent parfaitement à l’aise dans ce type d’ « opposition »,…
l’entonnoir fait partie de leur univers. Mais, que des structures
essentiellement militantes, sans à priori organisationnel, sombrent dans la
même pratique… voilà qui est affligeant.
Le
tourbillon des prochaines élections est entrain d’emporter le débat politique,
de le réduire à de misérables spéculations qui se règleront au niveau des états
majors des organisations politiques et de préférence… à Paris.
Oh
bien sûr, on va faire miroiter au militant de base, bien fidèle et bien
disposé, son pouvoir, son autonomie, sa libre détermination,… et autres fadaises.
Mais, pris dans la dynamique électorale, à l’exclusion de toute autre, il va se
retrouver, comme chaque fois, à faire des « choix » qui n’aboutiront
à rien… sinon à une nouvelle frustration… à partir de laquelle il espèrera,
parce qu’il ne faut jamais désespérer, que la « prochaine fois sera la
bonne ».
Comme
pour la préparation de l’ « arbre de Noël » , le système
nous fait exposer bougies, boules et autres « flon flon », puis nous
les fait ranger jusqu’à l’année suivante. Les mêmes artifices que nous
ressortirons pour nous saouler d’images, d’espoir, nous donner l’impression du rêve et de…
l’existence du Père Noël.
Ainsi,
d’élections en élections, de générations en générations, on joue, en toute
bonne fois le jeu d’un système qui nous a emprisonné dans une logique que l’on
n’a même plus l’idée de remettre en question et qui constitue l’univers
féerique du militant.
OU
EST L’ERREUR ?
Il
y a au moins deux erreurs.
La
première erreur consiste à ne pas voir (je vais être dur, militant-e-s
sensibles s’abstenir) !) que la majorité des citoyens se foutent
totalement des discussions qui animent les organisations d’extrême gauche
et les collectifs anti libéraux et mondialistes.
Vous
avez bien lu : je dis bien qu’ « ils s’en foutent ». Pas qu’ils le fassent savoir bruyamment en
agressant,… bien au contraire, ils s’en foutent tellement qu’ils n’en
parlent même pas et que, quand il faut voter, l’écrasante majorité vote
pour les candidats que vous savez… Ne me racontez pas à ce propos la
« fable du NON » qui a « mélangé » l’extrême gauche et
l’extrême droite et qui va être déboulonné dans un silence assourdissant !
…
Ceci,
devrait mettre la « puce à l’oreille » des altermondialistes, non pas
sur le fond de leurs analyses… que je partage, mais sur la stratégie à mettre
en place.
D’où
la deuxième erreur. Tout ces militant-e-s en quête d’un « monde
nouveau », ne voient ce monde qu’en pensée, en images, dans leur
imagination assurément fertile… Ils en parlent abondamment, le décrivent et…
finissent par croire qu’à force d’en parler, il va se matérialiser.
Il
y a une coupure entre le monde imaginé et les conditions de sa réalisation.
Cette dernière ils la voient de manière magique que l’on peut
résumer par :
- convaincre
le plus grand nombre,…
- le
faire voter (ce plus grand nombre) pour
le porteur de ce projet,…
- une
fois élu mettre en place le projet.
Comme
les choses seraient simples si elles fonctionnaient comme
cela ! ! !
Mais ça ne marche pas comme cela, ça n’a
jamais marché comme cela. L’Histoire ne fonctionne pas suivant ce schéma simpliste.
Toutes les expériences violentes ou pacifiques au 20e siècle qui ont
« tenté l’expérience », ont toutes fini dans le drame et le chaos,
toutes ont fait faillite.
L’agitation
fébrile qui agite les milieux alternatifs, altermondialistes, « révolutionnaires »
est non seulement naïve mais est l’expression concrète d’une impuissance
politique fondée sur une faillite de la pensée stratégique.
Ce
qui est extraordinaire et ahurissant c’est la cécité, la farouche et
inconsciente attitude actuelle qui, quoique conduisant systématiquement à
l’échec, est maintenue, reproduite, conseillée et théorisée. Ce n’est plus de
la conscience, mais de la foi.
Patrick
MIGNARD
Voir
aussi :
« ETRE OU NE PAS ETRE
EN POLITIQUE »
«SE
REAPPROPRIER L’ECONOMIQUE ET LE SOCIAL»
« MISERE DE LA
CONDITION MILITANTE »