Infos en solde / 9 / Le spectacle continue
Samedi 22 janvier / mise en situation : D’après les RG, la « mouvance » la plus radicale de l’extrême droite –des skinheads aux néonazes- compterait de 2500 à 3500 individus, soit l’effectif d’un tout petit camp d’observation, où le scientifique pourrait apprécier la rapidité avec laquelle ces spécimens de brutes abjectes recréeront entre eux clivages, ségrégations, exclusions et exécutions tout en laissant en paix une société extérieure à quoi ils sont inassimilables.
Aucune contrainte là-dedans, ou si peu : les camps, ils en raffolent.
/ République bananière
A l’exception notable de Jean-Pierre Chevènement, définitivement hors
concours, de tous les tocards infatués de soi celui qui doute le moins
de lui-même, François Bayrou, a été réélu président de l'UDF avec 98,46
% des voix.
Evidemment, la république bananière Udéhef, inexistante sur l’échiquier
mondial, n’a qu’une très faible importance stratégique, mais être mieux
élu que Sarkosy ou Chirac, et presque aussi bien qu’un dictateur
standard, c’est une consolation.
Dimanche 23 janvier / C’était dans l’En Dehors
Il y a quelques mois (mardi 16 novembre, in Ivoirienne Air Force),
notre collaborateur, seul dans la presse, émettait quelques doutes
quant à la « destruction » de l’aviation militaire ivoirienne par les
forces françaises de l’opération Licorne en représailles de l’attaque
subit par ses soldats, raid qui fit officiellement neuf victimes.
De fait, aujourd’hui, l’ONU vient d’autoriser le gouvernement de Côte-d’Ivoire à réparer les appareils « détruits ».
Vous en connaissez beaucoup de machines « détruites » qui soient réparables ?
Non, ce qui est détruit le demeure ; n’est réparable que ce qui est endommagé, le plus souvent légérement.
En d’autres termes, l’armée de l’air ivoirienne -dont on ne sait
toujours pas ce qu’elle représente matériellement- n’a jamais été
détruite, mais simplement mise hors service le temps que les relations
entre ce pays et la « communauté » internationale se trouvent
normalisées.
Et les lecteurs, spectateurs, auditeurs à qui la presse officielle a
servi cette soupe de la « destruction » ont été tout simplement abusés
par des jean-foutre et des incompétents aux ordres de la cellule
communication de la Défense nationale.
/ Bourrer le mou
Dans le même ordre d’idée (cf. brève précédente), alors que le nombre
des touristes victimes du tsunami du 26 décembre ne cesse d’être revu à
la baisse, celui des autochtones, particulièrement à Sumatra, ne cesse
d’augmenter.
C’est peut-être exact, hélas, mais il s’agit peut-être aussi d’un bon
moyen d’encaisser le maximum de subventions et dons internationaux. Qui
vérifie ? personne*.
* si : Thomas Hofnung, dans Libé du 25 janvier (Thomas doit lire l’En Dehors)
Lundi 24 janvier / Rions un peu
Il y a deux mois de cela, deux troufions de l’US Army, Charley Hooser
et Rami Dajani, ont tué d’une balle dans la tête Louma Hadi, la
traductrice irakienne qui les assistait dans leurs interrogatoires.
C’était une plaisanterie, ont-ils plaidé avant d’être condamnés à 36
mois de prison pour Hooser qui tenait le flingue et 18 mois pour Dajani
qui trouvait ça marrant.
Les compères ont argué pour leur défense qu’ils ignoraient que le
pétard, qui appartenait à Louma, était chargé. Le b.a ba pour tout
policier, militaire ou même simple chasseur a beau être de considérer a
priori qu’une arme est toujours prête à tirer, c’est fou ce que ces
messieurs, de bavure en bavure, peuvent l’oublier.
Autant de taule pour une mauvaise farce, ça fait beaucoup ; d’un autre côté, pour un meurtre, ce n’est pas cher payé.
L’un dans l’autre, nos deux comiques ne s’en tirent pas si mal. Faut dire que de nos jours, à Bagdad, une vie humaine…
/ That’s entertainment*
Jolie réussite que la démonstration de solidarité corporatiste qui a
réuni dans les locaux de Libération une quarantaine de directeurs de
rédaction venus entretenir on se sait quelle flamme du souvenir en
l’honneur de Florence Aubenas et de son guide Hussein Hanoun al-Saadi,
lequel au passage a bien de la chance de n’avoir pas été enlevé en
compagnie d’un quelconque homme d’affaire, sinon il serait solidaire
tout seul.
Cela fait chaud au cœur de voir des gens qui d’habitude se jalousent ou
se détestent cordialement se tenir par la main en évoquant une
fraternité professionnelle qui ne sert à rien d’autre qu’à se faire
mousser, à apparaître au devant de la scène en costume de probité, car
les ravisseurs, que leur geste soit politique ou crapuleux, n’ont pas
pour coutume de se soucier des témoignages d’affection, en admettant
qu’ils leur parviennent, surtout quand ils sont pure représentation.
Mieux : ils s’en contrefoutent.
En revanche, tous les journalistes au chômage ou en situation précaire
apprécieraient certainement un élan de solidarité en leur faveur des
décideurs de la profession, mais là, attention, c’est du concret, pas
du cinoche, alors ils peuvent aller se faire brosser.
*c’est du spectacle
Mardi 25 janvier / Elle est bien bonne
L’ONU dément d’avoir autorisé Gbagbo a réparer ses aéronefs détruits
(sic), tandis que quatre appareils prétendument hors d’usage revenaient
d’un pays ami (?) où ils se planquaient sagement en attendant des jours
meilleurs pour se poser à Abidjan ou Yamassoukro, je ne sais plus (info
chopée hier soir sur le télétexte d’où elle a déjà mystérieusement
disparu ce matin).
Mea culpa, j’insiste lourdement, mais la désinformation persistante sur
un sujet qui passionne infiniment moins les médias nationaux qu’un
concours de boules au Liechtenstein, cela me semble préoccupant quant à
la fièrement revendiquée liberté, autonomie, indépendance et
impartialité de la presse.
Plutôt que de se demander jusqu’au vertige s’il est bien raisonnable
d’envoyer des reporters en Irak, peut-être ne serait-il pas inutile
d’en dépêcher au moins un en Côte-d’Ivoire ?
Mercredi 26 janvier / En attendant les Césars
Ouvertures du Forum économique de Davos en Suisse et du Forum social de Porto Alegre au Brésil.
Qu’est-ce que vous préférez ? la montagne et la neige ou la plage et le soleil ?
Le vrai chic pour les contestataires les plus huppés, c’est de profiter des deux.
/ Impayable
A Davos, un Chirac virtuel, puisqu’il est coincé à Zurich par le
mauvais temps et s’exprime par écran interposé, plaide dix ans après
Attac pour une sorte de taxe Tobin sur les transactions financières
dont le produit servirait à lutter contre le sida.
En l’écoutant, on se dit qu’il aura vraiment tout récupéré –et sans
finesse- de la bien-pensance de gauche ; toutefois, que les pédégés et
autres affairistes qui frémissent ne se fassent pas trop de bile : avec
lui, dans le domaine social, il n’y a jamais de passage de la parole à
l’acte.
/ Pub
Mais à quoi sont donc utiles les portraits géants de Florence Aubenas
et d’Hussein Hanoun installés place de la République ? à faire pleurer
les auteurs du rapt ? à faire qu’on n’oublie pas les disparus (que
Monsieur Lambda, qui d’ailleurs s’en fiche, les oublie ou non, ça
change quoi à leur sort)?
On croirait une pub pour le dernier spectacle de Robert Hossein ou le dernier film de Spielberg.
Eh bien, c’est exactement cela : de la communication commerciale, une
campagne promotionnelle gratuite inespérée pour Libé qui perd des
lecteurs comme son concurrent Le Monde, et qui va en perdre encore plus
en employant les mêmes grossières méthodes de marketing que lui, grâce
à son nouvel actionnaire, l’altermondialiste notoire Edouard de
Rothschild, de chez Rothschild § Cie, établissements financiers
spécialisés comme on le sait dans l’aide au Tiers-Monde et aux
publications de la gauche alternative.
Jeudi 27 janvier / Rien ne va plus
Rompant avec la complaisance traditionnelle de la droite envers cette
catégorie particulière de fonctionnaires, Le Figaro vient de révéler
qu’avec une moyenne de 27 heures par semaine, les flics ne travaillent
pas davantage que les profs.
Et les paranoïaques qui aperçoivent des uniformes partout seront
soulagés d’apprendre qu’à raison de 9 petites heures hebdos sur le
terrain, la police ne monopolise pas vraiment la rue.
Motivé par l’intérêt confraternel, nous ne résisterons pas au plaisir
de désigner à nos amis du Figaro un groupe, très coûteux pour la
collectivité, d’agents de l’Etat qui ne travaille pas du tout : les
militaires.
Vendredi 28 janvier / Ca n’a pas traîné
Un mois après le raz de marée des bons sentiments ponctuels suite au
tsunami du siècle (lequel est encore un enfant, quand même), les
accusations de détournement de fonds commencent à pleuvoir sur des
responsables indonésiens, militaires et politiciens en tête, of course,
mais aussi, pour l’indispensable touche d’humour, sur des spécialistes
de la lutte anti-corruption.
Vous n’avez rien donné ? vous n’avez rien perdu.
/ Mathias Delfe n’est pas gentil
Ce triste individu n’aime pas les umpistes, les sociaux-démocrates, les
clowns Verts, les bushistes et poutinistes, les islamistes, même
modérés, les staliniens, les fanatiques, les croyants, le pape et sa
pompe, les nazis, les etarras, les nationalistes, les capitalistes, les
sionistes, les théologiens, les missionnaires, les soutanes, les
sectes, les guides charismatiques, les réactionnaires, les chefs, les
regards furieux, l’esprit de sérieux, les féministes misandres et les
antiféministes bardotiennes, les grandes gueules, les beaufs, les
prosélytes, les ascètes, les buveurs d’eau, les confréries, les
corporations, les mafias, le népotisme, les imposteurs, les héritiers
d’empires financiers ou industriels, les people, les flics, les
truands, etc…
Toutefois, s’il peut lui arriver de brocarder les hommes chétifs, les
femmes vulgaires, les homos maniérés, les chauves, les gros, les
maigres, etc…, c’est toujours de manière générique, donc en ne visant
personne en particulier, car nul ne saurait être jugé autrement que sur
ses actes et paroles (« il est con » peut et doit être un constat
argumenté, « et en plus, il est laid », n’est qu’une appréciation
subjective dialectiquement méprisable ; « elle est belle » n’a
politiquement aucun intérêt non plus, mais enfin, ce n’est pas encore
une insulte).
Maintenant que vous savez que ce personnage n’est pas fréquentable, il ne vous retient pas.
Mathias Delfe