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Concrètement, la libéralisation du commerce s’est traduite par une arrivée en masse de semences importées, et par une augmentation du prix des pesticides et des engrais. Dans ce contexte, les coûts de production agricole ont grimpé : aujourd’hui, cultiver un hectare au Maharashtra coûte 11 000 roupies, contre 5000 il y a dix ans.
Mais les politiques néolibérales ont aussi attaqué les mécanismes d’accompagnement et de soutien que l’Etat apportait aux paysans. Le Maharashtra, pourtant l’Etat le plus riche du pays, a ainsi mis fin à la garantie des prix du coton : jusqu’en 2004, l’Etat garantissait aux paysans d’acheter la totalité de leur production cotonnière à prix fixe. Les politiques d’austérité sont passées par là, sapant les protections érigées par l’Etat, et mettant en compétition le coton indien avec le coton américain subventionné, ce dernier étant jusqu’à 40% moins cher.
Alors vers qui se tourner ? Seuls 12% des prêts bancaires bénéficient aux agriculteurs, bien qu’ils représentent les deux tiers de la population active. Pris dans l’étau, avec des coûts de production plus élevés d’un côté, une chute de leur revenu et un moindre accès aux prêts bancaires de l’autre, les paysans n’ont d’autre choix que de se tourner vers des usuriers qui pratiquent des taux d’intérêt ahurissants et les plongent en quelque mois dans une situation inextricable. Comble de l’ironie, ces prêteurs d’argent travaillent en collaboration étroite avec les mêmes vendeurs des semences et pesticides : ceux qui prêtent sont ceux qui génèrent la nécessité de prêt. Et en bout de course, c’est souvent en ingurgitant les pesticides
en partie responsables de leur appauvrissement- que les paysans indiens mettent fin à leurs jours...
Retour en arrière...
Pourtant, la politique agricole indienne a longtemps eu comme priorité la souveraineté alimentaire : à ce titre, l’autosuffisance alimentaire et l’approvisionnement intérieur étaient des points cruciaux.
En 1994, l’Inde va entrer dans la ronde macabre en adhérant au cycle de l’Uruguay, ancêtre de l’OMC. Dès lors, elle va progressivement mettre en application des mesures de libéralisation commerciale : l’ouverture aux importations, la réduction des mesures de soutien et l’élimination des subventions à l’exportation seront les trois axes sur lesquels vont d’abord se concentrer les mesures.
Mais plus généralement, c’est un véritable virage néolibéral que l’Inde effectue au cours des années 90. Bien qu’ayant conservé jusque là une relative indépendance vis-à-vis des institutions financières internationales, elle va peu à peu lancer des politiques macroéconomiques tout à fait conformes à celles des programmes d’ajustement structurel : coupe franche dans les budgets publics, baisse puis arrêt des subventions aux produits de première nécessité et aux secteurs fragiles (parmi eux les agriculteurs), privatisations, facilitation des mouvements de capitaux, etc.
L’effet conjugué de ces politiques économiques et des mesures de libéralisation commerciale impulsées par l’entrée de l’Inde dans le futur OMC vont se potentialiser et se révéler catastrophiques pour les 65% d’Indiens qui vivent de l’agriculture.
Nécessaire changement
L’abandon immédiat et inconditionnel des politiques néolibérales en Inde, dans tous les domaines, est une exigence. L’Inde doit recouvrer sa souveraineté, en particulier sa souveraineté alimentaire. Les droits humains fondamentaux des paysans indiens sont prioritaires face aux exigences de libéralisation commerciale mortifères. Pour opérer ce changement radical de logique et placer comme objectif la satisfaction des besoins humains dans le respect de l’environnement et dans un esprit de justice sociale, ce ne sont pas les moyens qui manquent : avec presque 7% de croissance en 2004-2005 et disposant d’importantes réserves de change, la conjoncture est tout à fait favorable pour effectuer ce renversement de la donne. La mondialisation et son contenu actuel ne sont pas un cadre indépassable. Bien au contraire, elles sont un cadre qui doit nécessairement être dépassé pour qu’un jour, les paysans indiens aient une autre issue que la mort.
par Julie Castro
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