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ECHECS ET REUSSITES DANS UNE STRATEGIE DE CHANGEMENT
--> MATIERE A REFLEXION
L’homme « moderne », celui qui a conscience de faire son histoire a oublié des éléments essentiels, des aléas de la construction historique et en particulier que tout n’est pas succès et/ou échec.

 

Cette conception plombe la conscience de l’action et dans l’action. Elle perturbe, voire annihile les enseignements que l’on pourrait tirer de/s l’expérience/s. Des jugements beaucoup trop rapides et définitifs sont portés sur des actions, des expériences qui ont échoué ou ont dégénéré, à l’inverse, par manque d’imagination et de pertinence théorique, on s’attache à des schémas, des modèles qui ont systématiquement échoué. L’Histoire ne se fait pas linéairement.

 

 

LES ENSEIGNEMENTS DE L’HISTOIRE

 

 

On ne se penche jamais trop, et même pas assez, sur l’Histoire.

 

Il faut au préalable se débarrasser de la méthode stupide avec laquelle elle est enseignée et qui en fait une « aventure hollywoodienne » sans logique et se résumant, la plupart du temps, à quelques épisodes spectaculaires et mythifiés.

 

On ne trouve pas dans l’Histoire de réponses précises à des questions précises, car toutes les questions que l’on peut se poser sur le « que faire » se rapportent bien évidemment à des évènements présents et/ou à venir… or, toute situation est nouvelle.

 

Par contre l’Histoire nous dit ce qui s’est passé,… A nous d’analyser les situations et d’essayer de comprendre le « pourquoi » des évènements passés. ; d’en décrypter la logique, mais aussi les éléments irrationnels, aléatoires et/ou subjectifs, pas pour les nier, mais pour les relativiser et en faire des éléments de connaissance pour l’action.

 

Le fait que les évènements historiques aient un sens n’est pas aux yeux de tous évident … en effet on peut avoir une vision purement fataliste de l’Histoire : « Ca s’est passé par ce que ça devait être ainsi !... le Destin, Dieu,… »… Ce type de conception de l’Histoire arrête net toute réflexion sur son sens… les voies du Seigneur et/ou du Destin étant impénétrables.

 

Par contre une conception « non fataliste » se doit de trouver un sens à l’Histoire, c'est-à-dire à l’enchaînement d’évènements qui aboutissent à une situation. La démarche est difficile car elle est l’inverse de celle d’un problème : on connaît la solution (la situation finale) et l’on essaye de lui appliquer une démonstration (trouver le sens). Paradoxalement, l’important est moins dans la solution que dans la manière de poser le problème.

 

 

AMELIORATION ET / OU DEPASSEMENT D’UN SYSTEME

 

 

La solution à une situation sociale n’obéit pas à une logique formelle.

 

Par exemple, ce n’est pas en améliorant le rapport salarial qu’on le dépasse ou ce n’est pas en faisant du tri sélectif que l’on combat la pollution et le gaspillage. De même, ce n’est pas parce que « l’on a toujours fait ainsi » qu’il faille agir de la même manière.

 

Ceci paraît évident, pourtant à l’examen de la pratique politique cela ne l’est pas du tout. Cela ne l’est d’autant moins que tout système entretient cette confusion, faisant croire qu’il est ce que l’on fait de mieux en matière d’organisation sociale et politique… et que de simples modifications suffiront pour régler les problèmes non pas qui se posent, mais que lui pose.

 

Le formalisme de la solution évite de poser le vrai problème qui est celui de la nature, des principes et des conséquences du rapport social. C’est ce formalisme primitif et stupide que l’on affuble du terme de bon sens ou de fidélité (prise au sens le plus conservateur du terme), et qui fonde la réflexion de l’essentiel des politiques, du moins de celles et ceux qui sont sincères, même celles des « progressistes ».

 

La démarche –appelons la « critique » - qui consiste à dépasser, nier, ce formalisme est donc fondamentale pour poser le problème correctement, c'est-à-dire en des termes qui permettent de trouver un solution véritable et historiquement adaptée.

 

Cette démarche est difficile car elle oblige à réviser ses conceptions, ses habitudes, ses croyances, voire ses dogmes,… ce qui apparaît chez beaucoup, une démarche impossible, comme une trahison de principes et de valeurs. Ceci montre la confusion extrême que l’on fait entre, défense des valeurs et analyse politique. En effet, si la défense des valeurs est une constante, la situation politique, elle, change,… et des méthodes, des actions, des stratégies valables à une époque peuvent ne peut l’être à une autre… C’est ce que n’ont pas compris les politiques – du moins les sincères - qui veulent le changement social.

 

Un autre obstacle se dresse cependant, même quand on a posé correctement le problème, celui du lien entre le processus mis en place et le succès escompté.

 

 

UTILITE ET LIMITE DE L’EXPERIENCE

 

 

La mise en place, dans le cadre d’une transition, au sein même du système dominant, de structures alternatives, expression des contradictions du système et des principes de fonctionnement du nouveau, est indispensable. C’est en leur sein que se forgent les pratiques futures et mêmes les relations sociales nouvelles.

 

Cela dit les choses ne se font pas aussi mécaniquement que dans un phénomène physique. Toute structure mise en place « traîne » des tares du système dominant, subit les influences de ce système au point que celui-ci peut lui imposer des limites jugées indépassables ou du moins susceptibles d’entraver sérieusement la dynamique du changement.

 

Ces tares du système dominant sont souvent les réflexes, les réactions humaines imposées par le système dominant : rapport à l’argent, à la propriété, à la consommation,… et qui, c’est une évidence, ne peuvent pas être liquidés sur une simple déclaration de principe, aussi brillante et convaincante soit-elle, ou par la culpabilisation. Encore moins en l’imposant autoritairement. A cela s’ajoute la disparité entre les différents niveaux de conscience politique, culturelle et sociale des participants à ces structures.

 

Quant aux influences elles sont générales et de tous les instants. Le système dominant, envahissant tous les rapports sociaux, consciemment, et même inconsciemment, il « déforme », dénature, influence, modifie, perverti même la pratique alternative. Cette situation n’est pas à déplorer mais à être prise en compte pour comprendre les dérives possibles et agir en conséquence.

 

 

Une démarche, une réflexion et des jugements, souvent à l’ « emporte pièce » de « puristes » sont donc, non seulement parfaitement inadaptés et injustes, mais, de plus, néfastes car défaitistes et démobilisateurs. En effet, ils portent un jugement de valeur péremptoire et définitif sur des expériences qui ont souvent eu le mérite d’exister – par exemple le jugement souvent négatif et sceptique porté sur les systèmes coopératifs et mutualistse qui non seulement, au 19e siècle n’ont pas réussi à dépasser le système marchand, mais qui ont aussi, durant tout le 20e siècle, particulièrement dégénéré sous les coups de buttoir du Capital. C’est pourtant bien à partir de leurs valeurs et de leurs principes, et en tenant compte de leurs erreurs, que l’on pourra, et devra, mettre en place une transition au système marchand

 

Nous avons trop l’habitude de juger rapidement d’une expérience en terme purement « rationnel et objectif », d’échec ou de réussite, c’est peut-être vrai en science exacte, pas en science sociale.

 

Je ne prendrais comme exemple que la manière dont la bourgeoisie commerçante a réussi à imposer en Europe le système marchand. Travail de longue haleine, semé d’embûches, d’avancées, d’échecs…

 

L’échec fait partie de la construction du succès. S’arrêter à l’échec d’une seule expérience c’est, non seulement faire une grave erreur théorique, mais se priver, à terme, de la seule voie praticable pour transformer la société.

 

 

 

Les échecs passés, ceux des 19e et 20e siècle, ne doivent pas être jetés dans les poubelles de l’Histoire, mais au contraire, soigneusement archivés pour être décortiqués et analysés stratégiquement, afin d’alimenter la réflexion et la pratique actuelles… et sans à priori.

 

 

Septembre 2009  Patrick MIGNARD

 

Voir aussi :

 

« MEFIONS NOUS DES MODELES DEPOSES »

 

« QU’EST-CE QUE CONSTRUIRE UNE ALTERNATIVE ? » (1) (2) (3) (4)

 

MANIFESTE POUR UNE ALTERNATIVE

Ecrit par PatrickMignard, à 23:10 dans la rubrique "Pour comprendre".



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