L'En Dehors

Curieux mouvement, se réclamant de l’apolitisme, ne voulant pas être "récupéré" mais revendiquant une démocratie "réelle", proclamant que les éluEs ne les "représentent pas". Ce qui ressemblerait à la démocratie directe, système politique qui les rapprocherait des conseillistes, autogestionnaires et communistes libertaires entre autres. Ce que le mouvement n’est pas, bien sûr.

Une dénomination tend à faire apparaître un groupe comme faussement homogène, tendance renforcée par la volonté des "IndignéEs" à rester dans un flou consensuel sur de vagues valeurs et des appels à une unité d’une communauté aussi virtuelle que les prétenduEs amiEs sur FesseBouc.

Un régal pour les sociologues et un sujet pour le-journal-de-vingt-heures.

Ce mouvement peut mûrir politiquement dans certains endroits. Sinon il se dissoudra dans le néant apolitique dont il se réclame.

L'anarchie c'est une praxis, c'est-à-dire d'abord une pratique.

Pendant 4 semaines, dans plusieurs villes espagnoles, les "indignados" ont planté un village alternatif entièrement autonome où ont vécu des milliers de personnes : auto-otganisation du campement, du ravitaillement, de la cuisine, de la voirie, des toilettes, etc. AG quotidiennes pour organiser, débattre et envisager la suite du mouvement.

Pendant ce temps, des auto-proclamés anarchistes écrivent des textes critiques à 3 ou 4 dans leur petit chez-soi. Ca ne suffit pas à être anarchiste. La pensée juste, la parole juste ne suffisent pas, ce ne sont que des outils. A la disposition de qui ces outils sont-ils mis ? Alors qu'il y a des espaces réels où des milliers de personnes débattent, ils sont publiés dans le monde virtuel d'internet (au maximum ils sont affichés sur les murs des villes de nuit quand surtout il y a le moins de risque de rencontrer quiconque avec qui en parler).  Les auteur-e-s de ces pamphlets formulent des critiques intéressantes, mais pourquoi n'ont-ils pas le courage d'aller en débattre avec des vraies gens ? A quoi servent tous ces anarchistes qui ne savent qu'écrire mais ni dialoguer ni agir ?

A Paris, les mêmes critiques ont été formulées lors d'un débat organisé rue des Vignoles dans le cadre du FRAP. Mais les rassemblements des "indignés" parisiens place de la Bastille, aussi foireux qu'ils aient été comparés à l'espagne, étaient ouverts. Des gens venaient, s'asseyaient en cercle, s'exprimaient, s'écoutaient... Les anars parisiens sont passés, ont regardé ça de haut, n'ont parlé à personne. Comment on va la faire la révolution anarchiste, si on méprise les non-anarchistes, si on ne croit pas qu'on puisse les convaincre que c'est possible ? En prenant le pouvoir, de force, avec le "parti" ? (Ca ne s'appelle pas une révolution anarchiste)

Rue des Vignoles, on sait faire cuire des merguez pour 50 personnes pendant une soirée. Place de la Puerta del Sol, on sait organiser la vie quotidienne dans tous ses aspects pour 1000 à 5000 personnes pendant 4 semaines. On ne ressort pas d'une telle expérience néant politiquement. L'anarchie, je vous dis, c'est d'abord une pratique.

Lunique

Je ne me suis jamais "auto-proclamé" anarchiste (ni quoi que ce soit d’autre) et que l’on me considère comme tel ou pas est le dernier de mes soucis. Mes influences dépassent la pensée anarchiste et je suis sans doute dans la catégorie inclassable, tout en me considérant comme compagnon de route des anars.

La critique est aisée, c’est vraie, mais critiquer ceux qui critiquent en fait partie.

Ma critique est fondée sur des textes et articles d’indignéEs. Je peux la développer et l’étayer avec liens et citations, mais ce serait fastidieux. Et encore une fois, ce mouvement est trop hétérogène pour pouvoir être analysé réellement. Mais quelques points :

Les "IndignéEs"prétendent être LE peuple. C’est absurde. L’idée révolutionnaire a toujours été et sera toujours plurielle, dans ses finalités et ses moyens. Qu’ils/Elles y occupent leur place, (sans jeu de mot) très bien, mais je ne m’y reconnais pas. C’est tout.

La filiation avec les révoltes dans les pays arabes me paraît douteuse. L’internationalisme du mouvement aussi. Ou faudrait-il parler de mimétisme ?

Enfin, une situation insurrectionnelle ne se décrète pas, ni sur Facebook ni ailleurs. Elle survient sans que l’on sache comment, ni quand. ". Appeler à..." est inutile. Et l’ouverture n’est pas une vertu en soi. Accepter que chacun fasse son truc, d’accord. Dire "venez discuter avec nous. Nous sommes ouverts" est un leurre. Je ne suis pas "ouvert". Je crois en certaines choses. Ce n’est pas politiquement correct mais c’est ainsi.

L’action et l’activisme sont deux choses différentes. L’action c’est le combat à ND des Landes par exemple. L’objectif est clair. Il dépend d’un rapport de force comme cela fut le cas à Plogoff et au Larzac. L’activisme, c’est "vouloir changer le monde", sans en avoir les moyens ni se les donner.

Tout cela n’a rien à voir avec le mépris. Que les Indign(E)s fassent leur truc. Mais que des voix s’élèvent pour émettre des doutes et des critiques n’a rien de critiquable.

D’autant plus que L’En Dehors me semble un lieu où il est encore possible d’échanger sans invectives, ni procès d’intention, comme sur l’abolition de la viande, l’intervention en Lybie, etc....

salut Didier56

je ne pensais pas spécialement à ton commentaire (qui n'est pas le plus virulent, même si je pense que tu commets quelques erreurs d'appréciation - comme sur ton site) quand je parlais d'auto-proclamés anars, mais peu importe - j'avais sciemment employé un ton provo pour rompre le consensus anti-indignés des articles et des commentaires, je comprends que tu réagisses, c'est normal.

j'approuve la plupart des critiques portées (et notamment les tiennes), j'affirmais juste ma désapprobation : 1) du ton sentencieux sur lequel elles étaient portées, 2) du fait de les porter entre soi quand les espaces publics pour les porter étaient ouverts. Je maintiens cette position.

sur le "mépris" de l'expérience espagnole, je maintiens que ce qui s'est passé n'est pas la caricature présentée sur l'en-dehors (et sur ton site). Certes je ne te ferai pas croire à toi que Grogan est ressuscité, mais il me semble qu'une chose qui nous échappe à nous en france est le rôle politique en espagne et en italie depuis longtemps des "centres sociaux autogérés". A ce sujet concernant l'espagne, ce lien me parait intéressant à lire : http://webcache.googleusercontent.com/search?q=cache:L2GNZeSGBe4J:www.laviedesidees.fr/La-democratie-directe-de-la-Puerta.html+centres+sociaux+autog%C3%A9r%C3%A9s+espagne&cd=5&hl=fr&ct=clnk&gl=fr&source=www.google.fr (ce n'est pas un site anarchiste, certains termes ou certaines idées peuvent être douteux, mais ce qui m'intéresse est la réalité décrite)

Ce ne fut donc pas du tout une "révolution facebook". Les militant-e-s des CSA ont organisé un mouvement massif, en réseau dans plusieurs villes. Ca a marché. Ils ont fait partager des pratiques militantes concrètes, horizontales. Et après 1 mois ils retournent dans les CSA, au niveau des quartiers. Pour l'action militante habituelle des CSA (sans-papiers, mal-logement, etc.). Sauf qu'ils y retournent plus nombreux ! (ça peut être utile)

salutations

L'Unique, toujours branché sur la freakence

Ma critique porte surtout sur le mouvement français, qui me semble coupé de toutes "racines" et qui le revendique comme symbole de "pureté", face au politique et face aux formes d’opposition politique radicales. En fait, je pense qu’il s’agit d’un malentendu. Les IndignéEs ne sont pas des révolutionnaires mais des révoltéEs . C’est un possible premier pas et comme tu le dis, certainEs dépasseront ce stade.

Allez, je suis jaloux et j’envie ta faculté à t’enthousiasmer et à croire.

C’est dit.