Lu sur
le Ravi : "Pour atteindre un résultat net de 1 865 millions d’euros au 1er semestre 2005 (en hausse de 31,3% par rapport au 1er semestre 2004) (1), le Crédit Agricole doit se montrer impitoyable. C’est la raison pour laquelle Mme Saïda Oualdi, née il y 67 ans en Tunisie, résidant dans le quartier de l’Ariane à Nice, s’est vu forcée le 11 octobre dernier à clôturer le compte qu’elle détenait dans l’agence locale du Crédit Agricole depuis 30 ans. Mme Oualdi, qui se contente pour vivre de la maigre pension de réversion de son défunt mari, s’exprime mal en français et ses enfants, qui ont quitté le quartier, ne peuvent plus l’accompagner dans ses démarches : il n’a donc pas été trop difficile de la contraindre à signer le solde et la clôture de son compte, quitte à la menacer de bloquer son argent. Mme Oualdi s’entendra même dire que le directeur de l’agence est mort et que celle-ci va fermer définitivement. Malheureusement, on tombe parfois sur des individus qui ignorent tout de la nécessité pour le Crédit Agricole d’améliorer son résultat brut d’exploitation (+ 11,5% au 1er semestre 2005) et, surtout, de réduire le coût du risque (à un niveau historiquement bas au 1er semestre 2005, mais on doit pouvoir faire encore mieux). Ces individus donc, qui en l’occurrence se trouvent être les propres enfants de Mme Oualdi, parfaitement intégrés dans la société française, ont vivement protesté contre l’humiliation subie par leur mère, prouvant par là que l’on peut être un bon fils et ne rien comprendre aux impératifs du taux de profit à deux chiffres. Ils organisent donc tous les samedis matins une distribution de tracts devant l’agence du Crédit Agricole de l’Ariane. Comble de malheur pour le secteur bancaire en général et la croissance du Crédit Agricole en particulier (+ 27,2% au 1er semestre 2005), un avocat spécialisé dans les abus bancaires, Me Bousquet, se dit prêt à prendre la défense de Mme Oualdi (2). Et de nous expliquer que si les banques peuvent effectivement se débarrasser de leur client, elles sont tenues de motiver leur décision, ce qui, dans le cas de l’espèce, n’a pas été fait. « On est donc bien là face à une rupture abusive de contrat et un abus de droit », explique l’avocat.
Le directeur de l’agence de l’Ariane du Crédit Agricole, que nous avons également contacté, n’a pas souhaité communiquer, tout occupé qu’il était à vérifier le ROE annualisé du groupe (ratio entre le résultat net et les capitaux propres, qui se chiffrait à 15,9% en septembre dernier). Il nous a renvoyés vers le service communication du Crédit Agricole, lequel nous a assurés, sans vouloir nous montrer les justificatifs, que toutes les procédures avaient bien été respectées. « Si nous sommes là dans les bons moments de votre vie, nous y sommes aussi dans les moins bons », affirme une publicité du Crédit Agricole diffusée ces jours derniers dans la presse régionale. C’est peu de le dire.
GM
(1) Chiffres fournis par le service presse de la banque. (2) Comité d’action contre les abus bancaires, 04 97 21 94 48, www.lecaab.com. Me Bousquet est également l’auteur de « Abus bancaires : comment faire face », aux éditions Cheminement. La déontologie oblige l’auteur du présent article à faire part aux lecteurs de ses liens d’amitié avec la famille Oualdi.