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A l’approche du 30 juin, la bataille a repris. Les milliers de mobilisations dans les écoles, les lycées, les collèges, les villes, les villages aussi, les parrainages multipliés, les 60 000 signatures sur la pétition Nous les prenons sous notre protection, les milliers de messages publics offrant de prendre des enfants en vacances pour empêcher l’expulsion des parents, l’engagement de parlementaires et d’élus, souvent de gauche mais aussi parfois de droite, les prises de position de personnalités connues du monde des arts, des lettres, du spectacle, des sciences et du sport, la large médiatisation de la question, en France mais aussi à l’étranger, ont convaincu le ministre de l’Intérieur de lâcher du lest... le moins possible et sans s’en vanter. C’est, en effet, à un recul à géométrie variable que correspond la circulaire ministérielle du 13 juin.
UN TEXTE LACUNAIRE :
Quand bien même elle serait appliquée de façon très libérale, cette circulaire ne règlerait pas la question des sans papiers scolarisés. Elle laisse dans le désespoirs les milliers de jeunes entrés entre 13 et 18 ans pour rejoindre leurs parents (ou l’un d’eux) régulièrement établis en France mais que les conditions draconiennes mises au regroupement familial empêchent de vivre légalement auprès de leur famille. Non expulsables pendant leur minorité, ils vivent comme des garçons et des filles comme les autres qui étudient, font du sport, ont des copains... et qui deviennent brutalement sans papiers à 18 ans. Entrés hors regroupement familial, pas de papiers. Dehors. Ils sont ainsi probablement plusieurs milliers (5 000 ? 10 000 ?) à s’être rêvé une vie et un avenir dans le pays de leurs parents et condamnés à l’exil ou à la clandestinité. Pourchassés.
La circulaire ignore les cas (peu nombreux mais humainement très douloureux) des mineurs isolés qui, pris en charge par l’ASE après l’âge de 15 ans, se retrouvent pour beaucoup sans papiers à leur majorité.Pourchassés.
Elle exclue explicitement de ses dispositions les familles « réadmises » vers le premier pays par lequel elles sont entrées dans l’Union européenne (accords Dublin II). Pour parler clair, Patimat et sa mère à Brest, Alek, David et leur mère à Lyon qui vivent cachés depuis des semaines sont toujours menacés d’expulsion immédiate. Quelques dizaines ou quelques centaines d’enfants et de parents qui vivent traqués, comme du gibier. Reste enfin la question de tous les autres sans papiers, en particulier ceux parents de tout petits enfants, n’ayant pas encore atteint l’âge de la scolarité que Monsieur Sarkozy se propose toujours d’expulser. La chasse au nourrisson serait-elle plus honorable (ou moins risquée politiquement) que la chasse à l’enfant ? Dans le meilleur des cas, la circulaire du 13 juin ne concernerait que 20 à 25% des sans papiers.
UN BRICOLAGE APPROXIMATIF :
La circulaire du 13 juin ouvre donc l’éventualité d’une régularisation aux familles qui auraient refusé l’aide au retour que les préfectures sont chargées de proposer systématiquement.
L’entourloupe de l’aide au retour :
Les sommes proposées sont une insulte à la dignité de ceux à qui elles sont offertes : 10 000 € au maximum pour une famille de 3 enfants. Pas même un mois du salaire d’un ministre pour arracher définitivement 5 personnes à leur vie, trois enfants à leur école ! Ceux qui seraient néanmoins tentés d’accepter ces offres doivent se montrer prudents. Il est déjà arrivé par le passé que des familles à qui on avait remis la moitié de la somme au moment du départ et promis le reste à l’arrivée n’aient jamais perçu le solde ou l’aient touché en 12 mensualités, ce qui interdit de l’employer pour un investissement. Une procédure dans la précipitation La circulaire laisse 2 mois aux familles pour déposer leurs dossiers, jusqu’au 13 août. Deux mois, c’est court pour récupérer tous les papiers... notamment des certificats de scolarité, alors que les écoles seront fermées pendant l’été. Deux mois pendant lesquels il leur sera plus difficile de se faire aider et conseiller par les comités de soutien éventuels. Et au bout de ces deux mois, la préfecture aura un mois pour statuer. On imagine dans quelles conditions et avec quel sérieux les préfectures (dont une bonne partie des employés seront aussi en vacances) vont traiter tous les dossiers qui leur seront adressés. Certaines préfectures seraient même déjà en train de recruter des vacataires...
Des conditions parfois improvisées :
Certaines des conditions mises à la régularisation en France de ceux qui refuseraient l’aide au retour sont claires : deux ans de présence en France, un enfant scolarisé en septembre 2005, né en France ou entré avant l’âge de 13 ans. Par contre, d’autres ouvrent la porte à l’arbitraire des préfectures (qui, rappelons-le, restent soumises aux impératifs démentiels et chiffrés d’expulsions fixés par le ministre). C’est ainsi que le ministère exige « l’absence de liens de cet enfants avec le pays dont il a la nationalité ». On se demande ce que cela signifie : pas le droit d’avoir de relations avec les grands-parents restés au pays ? Défense d’aimer le couscous quand on est d’Afrique du nord et le maffé quand on est d’Afrique subsaharienne ? Comprenne qui pourra.
Autre série de conditions bien difficiles à apprécier : « la réelle volonté d’intégration de ces familles caractérisée notamment par [...] leur maîtrise du français ». Comment mesure-t-on la « volonté d’intégration » ? Port du béret basque et des mocassins à pompons, la baguette sous le bras et le quart de rouge dans la poche obligatoires lors de l’entrevue en préfecture ? « Leur maîtrise du français » : phrase ambiguë qui témoigne d’une certaine imprécision dans le maniement de la langue du rédacteur de la circulaire [expulsé ?]. Ce peut être la maîtrise des parents, des enfants ou des deux catégorie. Le bon sens veut que ce soit d’abord celle des enfants. « Le sérieux des études » ? 9 en anglais, 8 en maths, on expulse ?
En réalité, ces conditions ne figurent dans le texte de la circulaire ministérielle que pour permettre aux préfectures d’adapter leur niveau d’exigence en matière de critères subjectifs et donc le nombre des régularisations réellement accordées au degré de mobilisation. Autrement dit, Monsieur Sarkozy pousse à la mobilisation ! Plus les parents, les enseignants, les élèves eux-mêmes et leurs soutiens seront nombreux et déterminés à accompagner les familles en préfectures, à contrôler ce qui s’y passe, plus les régularisations seront nombreuses et moins les victimes de la chasse à l’enfant le seront.
Le RESF envisage de demander une audience au ministère de l’Intérieur afin de rappeler que s’il n’est pas question de discuter des critères de régularisation avec le ministre ou les préfectures, notre exigence demeure : pas un seul élève « disparu » pendant les vacances scolaires. Droit pour tous à la scolarisation dans des conditions normales : avec leurs parents, qui ont le droit (le devoir !)de les éduquer dans de bonnes conditions, et d’abord en gagnant leur vie. La chasse à l’enfant rêvée il y a quelques temps par Monsieur Sarkozy a du plomb dans l’aile. Il a du en rabattre et la réglementer un peu. Pour autant, ce n’est pas assez. Non à la chasse à l’enfant, même réglementée !
educsansfrontieres@free.fr
www.educationsansfrontieres.org
Contact sur ce dossier : Richard Moyon : getmr@wanadoo.fr
vendredi 23 juin 2006