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La mort de Marie Trintignant est l'occasion d'un délire médiatique assez bien résumé sur le site Acrimed ( 1 ) du Figaro Magazine à Marianne le but final est de déconsidérer l'anarchisme par des amalgames plus que douteux, JF Kahn n'hésitant pas à écrire : « Mais - et c'est peut-être l'essentiel - le leader de Noir Désir, qui irradie sur scène sa propre fièvre de liberté en la projetant sur le public comme sur le monde, se réclame de l'anarchisme "libertaire". », enfonçant le clou par une généralisation abusive, il conclut : « L'idéologie libertaire, dans l'histoire, est l'une de celles qui ont le plus détruit de corps au nom d'un irrépressible désir, pas toujours noir, de libérer les esprits pour faire le bonheur des intelligences. » On voit bien ici l'opération de récupération politique d'un fait divers et l'exploitation de la souffrance et de la mort pour une triste opération de dénigrement du courant libertaire devenu sans doute dangereux pour le pouvoir en place qu'il importe de faire feu de tout bois pour le décrédibiliser. Bien sûr il n'est pas question de vouloir affirmer ici qu'un militant anarchiste doive être soutenu à tout prix quelque soit ses actes et la violence à l'égard des femmes est inadmissible et ignoble mais le détournement qui s'opère à l'occasion de cette affaire est scandaleux à un double titre, parce qu'il permet à la droite de jeter son fiel sur les anars : on ne s'attendait pas à autre chose mais également par la concours prêté par le victimisme à cette manipulation. En effet certains groupes féministes tentent de récupérer, la mort de Marie Trintignant pour en faire le symbole des femmes battues. Tout cela bien sur ne justifie en rien le geste de Cantat et je trouve assez lache son attitude ou du moins celle de son avocat, parlant "d'hystérie" chez sa compagne, il faut assumer ses actes et s'il l'a aimé il est indigne de parler ainsi d'elle.
Effectivement Marie Trintignant fut une femme libre, féministe revendiquant son indépendance, sa réussite professionnelle en tant qu'actrice force le respect, elle fut certainement repésentative des femmes libres que nous souhaitons voir émerger dans une société débarrassée du patriarcat. Le drame de cette histoire fut qu'elle perdit la vie sous les coups de son compagnon, lui-même censé par les idées qu'il défend reconnaître la liberté de la femme et refuser la violence contre les femmes. Alors bien sûr le victimisme avec son explication simpliste s'empare de cette affaire, fait de Marie Trintignant le symbole des victimes de la violence faite aux femmes par le patriarcat et cela sans attendre que tous les éléments d'appréciation soient réunis, de nombreuses circonstances du drame sont encore dans l'ombre, mais peu importe les faits, l'occasion est trop belle de redorer le blason d'une idéologie qui prend l'eau de toutes parts depuis que des féministes ( Badinter et Iacub ) contestent ses présupposés. Et l'on constate une nouvelle fois que cette idéologie fait chorus avec la droite la plus réactionnaire, ce phénomène avait déjà pu être observé lors du vote des lois Sarkosy à propos de la prostitution. Pourtant ce drame serait l'occasion pour notre courant d'apporter une analyse critique et de réfléchir à ses éventuelles faiblesses. Je m'étonne en particulier que personne ne souligne les ingrédients qui ont abouti à ce déchaînement de violence de la part de B. Cantat, la violence n'est en aucun cas justifiable, mais les circonstances réelles doivent en être élucidées pour analyser et permettre de comprendre. Il me semble que deux éléments ont été largement sous-estimés : l'alcool, la passion amoureuse et la jalousie . Au siècle dernier les anarchistes menaient une propagande déterminée contre les méfaits de l'alcool, c'est une dimension de notre action bien oubliée aujourd'hui et dans le milieu anar on peut même constater un certain laxisme sur ce sujet, pour ne pas dire une complaisance. Or les effets de l'alcool sont connus de tous, cette lamentable affaire vient le rappeler, les femmes en sont les victimes, les enfants aussi, il serait temps d'en revenir à nos sources plutôt que de ressasser des explication simplistes. Deuxième ingrédient essentiel de cette affaire : la passion amoureuse. Rien dans les faits à ce jour connu ne vient étayer que des violences aient déjà existé au sein du couple Trintignant-Cantat, par contre tous les témoins interrogés parlent de passion. Or qu'est-ce que la passion amoureuse sinon la négation de l'autre dans ce qu'il est réellement et l'idéalisation mais lorsque cet idéal s'effondre face à la réalité, c'est au mieux la séparation au pire le drame. Il serait peut-être temps à l'occasion de cette mort de réfléchir à ce qui devient une norme sociale : passion amoureuse et familles recomposées. En effet il est devenu normal de nos jours de faire de l'amour ( au sens de passion ) le critère unique de composition ou de décomposition de la structure familiale, sans tenir aucun compte de la douleur ressentie par les enfants lors des séparations, or l'amour s'accorde mal de la structure rigide du couple et de la famille et nous anarchistes le disons depuis longtemps et prônons l'amour libre qui n'a rien à voir avec les familles recomposées mais permet à chacun(e) de vivre ses sentiments, tout en respectant les liens avec les enfants. Trintignant et Cantat nous montrent également que la jalousie est un sentiment largement partagé par les hommes et les femmes et que la jalousie a certainement constitué un déclencheur de la violence verbale puis physique. Il apparait des éléments de l'enquête, à notre disposition à ce jour ( à travers les médias, à prendre naturellement avec prudence ) que l'un et l'autre éprouvaient de la jalousie vis à vis du conjoint antérieur et que c'est ce qui a entraîné la dispute. La jalousie est un sentiment commun à tous les êtres humains, comme le racisme il marque une peur et comme le racisme il appartient à chacun(e) de le combattre et sur cette question les anarchistes ne sont pas non plus sans réflexion théorique ( voir à ce sujet les nombreuses brochures d'E. Armand ). Le combat contre la jalousie devrait être réactualisé pour éviter ce genre de drames. Quant à la violence masculine au sein du couple elle existe bien sur et il serait absurde de la nier, les femmes sont victime plus que les hommes de cette violence, non pas parce que les hommes seraient par essence plus violents, ni qu'un conditionnement idéologique rendraient les hommes tous violents mais tout simplement parce que le patriarcat contient la violence des femmes ( au du moins la limite à des personnes plus faibles : enfants, vieillards ). La violence est la manifestation d'une situation de domination et elle s'exerce dans un cadre conditionné par le système patriarcal. L'égalité entre hommes et femmes pour la quelle nous luttons aboutira certainement à une augmentation de la violence des femmes, fait déjà constaté chez les jeunes femmes adolescentes. La violence doit être combattue d'où qu'elle vienne mais la violence des femmes reste un sujet tabou, comme être humains les femmes n'échappent pas à la violence, un exemple parmi d'autres : Simone Weber. Rappel des faits d'une histoire un peu oubliée : Simone Weber a été condamnée à 20 ans de réclusion criminelle pour le meurtre de son amant qui s'était lassé d'elle, après l'avoir empoisonné, elle avait découpé le cadavre à la meuleuse à béton avant de disperser les morceaux du corps dans des sacs poubelles et le tronc noirci dans une valise ( pour un rappel plus complet : ( 2 ) ). Je me garderai bien de tirer aucune conclusion hâtive de cette sordide histoire, il serait bon que chacun en fasse autant car il est parfaitement possible de se jeter à la figure des faits divers allant dans un sens ou dans l'autre. Reste que la violence conjugale doit être analysée, cette violence est majoritairement le fait des hommes mais les femmes peuvent également s'y livrer, ce qui nous éloigne passablement des théories victimistes. La violence est un phénomène complexe, multiforme et qu'il est important d'analyser dans tous ses aspects, pour l'éradiquer des rapports de couples et familiaux plus généralement ( les enfants étant eux aussi victimes de violences des deux sexes ). Il n'existe malheureusement pas de statistiques en France analysant les violences masculines et féminines dans le couple. Par contre le Québec a produit des données intéressantes sur cette question : Victimes de violence conjugale, selon l'infraction et le sexe, Québec, 1995-1997 ( 3 ) ( 4 ). Cette étude montre qu'en 1997, 58 femmes et 19 hommes ont été victimes de meurtres ou de tentatives de meurtre de la part de leur conjoint, 7877 femmes et 1106 hommes de voies de fait. On remarquera que dans les violences, certaines catégories sont presque exclusivement masculines : les agressions sexuelles et les enlèvements, séquestrations. La violence n'est donc pas un phénomène lié à un sexe mais elle a des manifestations multiformes et des causes également multiples, il faut en prendre la mesure dans tous ses aspects pour la combattre efficacement, aucune théorie simpliste et binaire ne peut prétendre l'expliquer complètement, naturellement la violence s'exerce également dans le cadre d'un rapport de pouvoir et de domination, ce qui explique que la violence masculine soit prédominante sur la violence féminine qui reste contenue globalement par le pouvoir qu'exercent les hommes dans la société en général. Mais cette approche globale ne peut faire l'impasse sur d'autres facteurs (alcool, drogue, passé familial, conditions de vie, etc... ) qui permettent de comprendre pourquoi hommes et femmes sont capables de violence.
Libertad
(1) http://acrimed.samizdat.net/article.php3?id_article=1212
(2)http://www.republicain-lorrain.fr/XX_siecle/aff_criminel/weber.htm
(3)http://www.stat.gouv.qc.ca/donstat/societe/droit_justc_crimn/secrt_persn/conjugale/tab20.htm
(4)http://www.stat.gouv.qc.ca/donstat/societe/droit_justc_crimn/secrt_persn/conjugale/tab18.htm
Commentaires :
Monica |
Bertrand CantatC'est BerTRANT Cantat et non BerNARD Cantat
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à 15:52