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L'En Dehors


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Rome vaut bien une messe !
--> A droite et à gauche tous à la cour de Ratzinger.

Qu'il y aurait eu, avec l'élection de Ratzinger, un tournant dans la politique du Vatican, était facilement prévisible ; qu'il aurait vu une pareille accélération l'était peut-être un peu moins. Les traditions perdurent, et avec la capacité de manoeuvre qu'on lui connait et qui s'appuie sur des siècles d'expérience, l'Eglise a repris l'initiative et agit comme bon lui semble pour que les règles du jeu soient de nouveau dictées de son magistère.

La longue parenthèse wojtylienne est désormais fermée, cette période ou l'Eglise s'occupait plus de choses superficielles et de questions d'image spectaculaire que de mettre en place une stratégie efficace pour retrouver un rôle de premier plan. Il semble effectivement que malgré l'attention obsessionnelle des médias qui ont su construire l'image du pape, des jeunes, de la souffrance, satisfaisant ainsi l'ego narcissique démesuré de l'Eglise, le pontificat wojtylien n'a été, nous semble-t-il, qu'une parenthèse pendant laquelle les capacités de comédien du pape n'ont jamais dépassé la parodie. Il suffit de penser par exemple à la récupération des aspects les plus rétrogrades  de la religion avec l'offrande à la "populace" de la canonisation de sorciers et de criminels de guerre.

Mais aujourd'hui Ratzinger et ses électeurs acceptent à visage découvert le défi lancé par ce qu'on appelle la déchristianisation de la société. On se souviendra que le pontificat allemand commença sous le signe de la lutte contre le relativisme culturel qui , avec le Concile, attribua une dignité aux autres religions monothéistes, créant ainsi les fondements d'une possible érosion du dogme qui veut une église catholique non pas première inter pares, mais première tout court. Ce relativisme , qui a en partie desserré le filet étouffant du contrôle de la religion sur la société, forçant les prêtres à en accepter les transformations, redevient aujourd'hui la bête noire, l'ennemi pour la suprématie d'une religion qui se veut inspirée de la parole d'un dieu et d'un représentant sur terre infaillibles.

Evidemment, ce changement de cap de l'église ratzingerienne a déjà, a et aura, de lourdes répercussions sur ceux qui n'ont pas l'intention de conformer leurs vies à des principes qu'ils ne partagent pas. En fait l'église fait son métier (pourquoi crier à l'ingérence ou s'en indigner ?) , qui consiste entre autres à mettre les pieds dans le plat des normes sociales dès lors qu'elle les estime aller à l'encontre des normes religieuses. Nous avons vu la lourde ingérence lors du referendum sur la fécondation assistée, et nous voyons aujourd'hui les manoeuvres d'encerclement pour parvenir à l'élimination progressive de normes et droits consolidés : aujourd'hui l'avortement, bientôt le divorce. Et si pour remettre en cause l'avortement on s'est appuyé sur la condamnation des cellules souches embryonnaires  , pour remettre en cause le divorce on part de questions comme les droits civiques des couples de fait ou la reconnaissance des couples homosexuels. En d'autres termes on recommence à parler ouvertement de la "famille" en des termes qui semblaient dépassés et l'impossibilité de rompre le lien du mariage ne serait plus un dogme pour les croyants mais une règle universelle. Il n'y a pas de doutes, comme dirait Giordano, qu'ils ne se laissent pas intimider et le font savoir. Les armes sont celles de toujours, la menace et le chantage. Des armes qui seraient émoussées si la soi-disant classe dirigeante n'était pas ce ramassis de bigots disposés à toutes les lâchetés.

Ainsi que cela a été souvent dit, il n'existe pas de parti catholique parce que désormais ils le sont tous, et que donc l'efficacité du chantage clérical est multipliée par autant de partis qu'il en existe. Et ce chantage éhonté voit les politiciens faire la compétition à qui sera le plus dévot et obéissant au pape. Il va de soi qu'il continuera à y avoir des nuances - ne serait-ce que pour sauver les apparences - mais il suffit de voir ce qui vient juste de se passer avec la réforme fiscale pour comprendre ce qui se prépare. Exempter les propriétés ecclésiastiques, même celles à but lucratif, n'est d'ailleurs pas une invention du laïc Tremonti, mais bien la nouvelle version d'une loi qui trouve son origine dans la lointaine année 1992, c'est-à-dire en des temps qui n'étaient pas suspects. Et cela en dit long sur la sincérité des lamentations du centre-gauche et de Prodi (Et si c'était parce que le mérite ne lui en a pas été attribué ?) sur cette loi scandaleuse qui nous oblige à verser notre obole à l'Eglise, étant donné que le manque à gagner devra être compensé par des prélèvements ailleurs. Un scandale, certes, mais qui trouve son explication dans l'enthousiasme à embrasser la pantoufle sacrée, sachant que, même dans ce monde matérialiste, le jeune qui s'éclate en discothèque ou le no global au passe-montagne réglementaire, peuvent être sensible à la parole du curé quand ils vont voter. Sans même parler de la  célèbre femme au foyer de Voghera ! (Caricature de la femme au foyer, supposée ignorante et incapable de penser. NdT)

Du reste la relance de l'offensive morale des prêtres n'est pas un hasard et il est clair que les électeurs de Ratzinger ont choisi en toute connaissance de cause celui qui serait capable de faire le "sale boulot" d'essayer de réimposer à la société la présence de Dieu. C'est peut-être le minimum auquel s'attendre de la part de curés, mais ça pose évidemment un problème pour les non croyants. En effet, affirmer qu'il n'est pas acceptable que "la foi soit réduite à un phénomène privé avec l'éviction de Dieu de la vie publique qui en découle" signifie revenir au temps ou même ceux qui refusaient le dogme religieux devaient en subir les dictats. Il s'agit en fait d'une restauration en bonne et due forme qui fait place nette de ce qui restait de rebelle dans l'église dite dissidente, qui à cause de son absurde prétention à "démocratiser" cette institution a reçu des coups dans la gueule pendant vingt ans de la part du prêtre polonais et qui maintenant va être remise à sa place par l'allemand.

Il est surprenant d'entendre tout à coup crier au loup des politiciens apparemment inquiets d'une telle offensive. A part un ou deux, les autres semblent en effet prêts à se prosterner devant le prélat du jour, à reconnaître son rôle politique, à recevoir de ses lèvres, pensant que l'Eglise, outre les votes qu'elle peut apporter, peut être une institution ouverte, paritaire, et prête au dialogue, Légitimant ainsi le chantage de ce pouvoir "moral" que l'Eglise revendique, convaincue d'être la seule dépositaire de la vérité, de l'éthique et de la morale.

C'est cela le vrai problème au centre de la "question religieuse". Et si quelqu’un n'en a pas encore compris les termes, ce n'est pas le cas de l'Eglise, qui combat un relativisme plaçant sur le même plan les besoins spirituels et matériels, et qui s'oppose à la force subversive de la différence et de la transgression. Consciente que pour préserver son rôle elle doit reproposer des thématiques fortes, les replacer dans la société non pas seulement avec la force de la persuasion mais, surtout, avec la brutalité du chantage. La portée de cette stratégie échappe à qui devrait défendre les plus élémentaires postulats de la laïcité et cette séparation entre dimension individuelle et collective qui nous préserve encore quelques libertés. Nous verrons bientôt revenir un climat "médiéval" dans lequel le pouvoir du clergé cherchera à imposer ses propres croyances et règles morales, et nous verrons aussi les dévots Fassino, Bertinotti et Rutelli (politiciens de la « gauche » italienne. NdT) prêts, pourvu de recevoir l’ostie sacrée de la main grasse et molle d'un quelconque gros curé, à renoncer au combat contre des lois iniques et pécheresses telles que celles sur l'avortement et le divorce. 

Rome aussi vaut bien une messe !

Massimo Ortali

Traduction : rokakpuos
Article original en italien paru dans l'hebdomadaire anarchiste Umanità Nova du 16 octobre 2005

http://www.ecn.org/uenne/archivio/archivio2005/un33/art3927.html

Ecrit par , à 12:27 dans la rubrique "International".



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