Joueb.com
Envie de créer un weblog ?
Soutenez le Secours populaire
ViaBloga
Le nec plus ultra pour créer un site web.
Débarrassez vous de cette publicité : participez ! :O)

L'En Dehors


Quotidien anarchiste individualiste





Crée le 18 mai 2002

Pour nous contacter : endehors(a)no-log.org



D'où venons-nous ?


Nos références
( archives par thèmes )


Vous pouvez nous soutenir en commandant nos brochures :

Les éditions de L'En Dehors



Index des rubriques

Les collaborateurs et collaboratrices de l'En Dehors

Liens

A noter

Recherche

Archive : tous les articles

Session
Nom d'utilisateur
Mot de passe

Mot de passe oublié ?

VISIONS ONIRIQUES ET REALITE HISTORIQUE

Si l’imagination est une des caractéristiques les plus remarquables de l’esprit humain et est à la base de toute culture, elle n’en représente pas moins un danger, ou tout au moins un lourd handicap quand elle se détache de la réalité historique. La projection des désirs individuels et collectifs dans la réalité sociale, voire leur utilisation comme éléments de stratégie politique peuvent friser la catastrophe.

L’Histoire n’est pas réductible aux rêves des humains, aussi généreux soit-ils.


DU REVE…


Il n’est certes pas interdit de rêver, mais il est fortement déconseillé de confondre rêve et réalité.

Ce conseil pourtant simple et logique n’a jamais empêché les « penseurs » d’imaginer des mondes, des hommes et des femmes de tenter des expériences, de braver des interdits, souvent au péril de leur vie, pour inciter à créer des situations imaginées, parfois imaginaires.

Les multiples expériences, au 19e siècle, en Europe et en Amérique, des « socialistes utopiques » ont fait rêver, et font encore rêver. Pourtant, ces « utopies » se sont toutes terminées, soit dans le drame, soit dans l’indifférence générale. Elles ne demeurent plus, dans la conscience collective, que sous forme d’anecdotes, d’expériences tragiques, voire pour certaines de farces. Leur caractère limité, dans l’espace et le temps en font des expériences singulières qui sont pour les uns un encouragement, pour d’autres la preuve irréfutable que « ça ne marche pas et ne peut pas marcher ».

Est-ce à dire que l’humanité a cessé de rêver ? Certainement pas, et heureusement. Mais elle a payé parfois très cher la confusion entre ses rêves et la réalité. Des expériences du 19e siècle, aux communes libertaires espagnoles et jusqu’aux communauté d’après 68 en Europe et aux Etats-Unis, on n’a pas arrêté d’innover et… d’échouer, il est vrai pour des raisons toutes différentes.

Le rêve pour certains est d’ailleurs devenu une véritable obsession et se suffit à lui-même. Il permet d’entretenir un espoir qu’aucune réalité ne matérialise. Le rêve est parfois devenu un cri de ralliement, un slogan qui est passé du monde rationnel à la vision magique de la réalité. Des exemples ? « Grève générale », « autogestion », « révolution »… ce sont des termes qui n’ont de sens que dans un contexte historique précis, ce qui ne veut pas dire passé…(voir l’article « SUR LA GREVE GENERALE »). Lancés comme simple incantation, ce qu’ils sont le plus souvent, détachés d’un contexte, ils n’ont qu’une fonction magique permettant de se projeter dans le monde irréel ou la situation que l’on imagine. A travers eux on se donne/on se fait le spectacle de sa propre illusion et par là même de son impuissance politique. Parallèlement et en opposition avec le spectacle du système marchand, on produit sur le même plan, celui du spectacle, son immédiate, mais vaine, négation. La pensée devient la scène d’un théâtre imaginaire où les désirs deviennent la réalité…. et au tomber du rideau c’est la frustration et la désillusion.

Pourtant, prononcer ces mots, assister à ce spectacle a une fonction apaisante (comme tout spectacle onirique) certes, mais ne sert en aucun cas à dépasser la situation réelle… et pour cause.

Doit-on en conclure que le rêve est vain ? Non. Il fait partie, comme l’imagination, du processus de connaissance et d’élaboration des structures sociales. Ce que l’on a coutume d’appeler l’utopie a joué un rôle et jouera un rôle dans l’avenir que nous aurons à construire.

Il y a une part de réalité dans l’utopie et une part d’utopie dans les réalisations sociales, mais le problème c’est qu’aucun instrument scientifique n’est capable d’indiquer le dosage, aucune formule n’est capable d’indiquer la proportion ainsi que la nature et la quantité des ingrédients qui composent ce mélange. Là est la difficulté.


A LA REALITE


Qu’est ce qui fait que « ça ne marche pas » ou « que ça marche »?

Donner une réponse définitive sera hasardeux et bien présomptueux… pourtant l’Histoire nous permet d’approcher, si non la solution, du moins d’avancer des hypothèses.

Une structure sociale, une société est un système complexe qui détient les moyens de sa propre reproduction et de sa défense contre les mécanismes qui remettent en question ses principes. Ce n’est donc pas par le discours seul, la démonstration logique et rationnelle que l’on peut déstabiliser un tel système, encore moins avec les moyens qu’il met à disposition des « contestataires ». Le projet de changement ne peut se faire que par une réalisation de rapports sociaux nouveaux qui mettent en œuvre concrètement les valeurs et les principes nouveaux. L’utopie devient en quelque sorte réalité lorsqu’elle montre, prouve que ces principes sont viables… elle cesse alors d’être utopie.

J’appelle « utopie réaliste », non pas cette utopie qui consiste à faire des promesses et ou des projets inconsidérés, totalement coupés des conditions historiques qui permettraient, ou non, leur réalisation, mais l’imagination qui consiste, partant de l’analyse du réel social, de le dépasser en jetant les bases d’une alternative économique et politique.

Exercice difficile allez vous dire,… et vous avez raison. Et d’autant plus difficile que nous n’avons à notre disposition aucun repère, aucun instrument de mesure qui permette de mesurer l’écart entre le possible, le souhaitable et l’impossible. Les paramètres qui entrent en ligne de compte pour entamer une action, élaborer une stratégie, ne sont pas quantifiables. Leur existence, leur crédibilité est même problématique. En effet comment mesurer un niveau de conscience, un état de mobilisation, un degrès de combativité, la solidité d’une solidarité, un esprit de détermination, la fiabilité d’un engagement, une capacité d’organisation et d’initiatives, l’efficacité sociale d’une structure, une satisfaction collective… ? Certes l’expérience joue, mais elle est la chose la moins bien partagée au monde, elle est trop affaire personnelle, trop liée au ressenti individuel, trop empreinte de subjectivité, trop liée à des situations particulières qui ne se reproduisent jamais à l’identique…

De plus, et pour couronner le tout, l’Histoire nous apprend que rien n’est jamais définitivement acquis, autrement dit qu’il faut aussi, en plus, intégrer le fait que tout peut être remis en question. L’impondérable dans l’instituant mais aussi dans l’institué.

Seule l’expérience, la pratqiue collective concrète, présente, peut constituer le ciment nécessaire à l’élaboration d’une alternative politique et sociale. La bourgeoisie commerçante n’a pas « pensé » son système pour en faire ce que nous connaissons aujourd’hui, elle l’a concrètement implanté, au sein même de l’ancien système, durant plusieurs siècles, jusqu’à ce qu’il lui permette d’accéder à la reconnaissance universelle. D’une certaine manière on peut dire qu’elle a vécu « son » utopie, dans les villes, dans les échanges, dans le commerce, et en a fait une réalité historique qui s’est imposée.

Cet exemple nous montre la voie (voir l’article « TRANSITION »). Le monde nouveau ne peut pas « jaillir » spontanément d’une idée, voire d’une volonté individuelle ou collective, aussi généreuse soit-elle. Il se construit patiemment au milieu des bouffées d’enthousiasme, mais aussi des déceptions et par là même transforme les esprits, les idées, les valeurs et fini par s’imposer à ceux qui le vivent et à ceux qui le combattent.

On est loin des programmes électoraux bidons, démagogiques et manipulateurs mais l’on est loin aussi du rêve éveillé de celles et ceux qui veulent que tout change spontanément. On ne peut pas faire n’importe quoi à n’importe quel moment.


ET AUJOURD’HUI , QUE POUVONS NOUS FAIRE ?


Deux axes.

1 - Cesser de croire au mythe du changement par la voie électorale. Celle–ci n’a pour fonction que de reproduire le système dans ses différentes variantes sans jamais remettre en question ses principes… deux siècles de cette pratique nous permettent de l’affirmer sans trop d’erreurs. De plus, une telle croyance joue un rôle parfaitement démobilisateur (un peu comme la religion au Moyen Age qui promettait l’Enfer aux incroyants). Croire au changement par l’élection empêche toute initiative concrète d’organisation collective de structures alternatives. (voir l’article «VOTER EST UN DROIT, MAIS EST-CE VERITABLEMENT UN DEVOIR ? » ainsi que « ELECTION : PARTICIPER OU PAS ? ») et cantonne le citoyen dans une attitude passive au point de ne réduire son activité citoyenne qu’au moment de l’élection. D’ailleurs, la réalisation du point 2- rendra rapidement obsolète la pratique électorale telle qu’elle existe aujourd’hui.

2- Organiser, à tous les niveaux (certains sont plus faciles que d’autres), des structures alternatives susceptibles de se substituer aux circuits marchands classiques. Dans ce domaine, toutes les expériences, des plus anciennes, comme les coopératives, jusqu’au plus récentes comme les SEL et les altervillages, les plus structurées comme les plus informelles sont importantes, contribuent par leurs succès mais aussi par leur échec et leurs hésitations à forger des rapports sociaux nouveaux. Ils ne s’instaurent pas facilement, spontanément et définitivement… il y a des hauts et des bas… des échecs et des réussites… mais aussi une opposition de l’ancien régime qui tente de s’imposer et de détruire l’intrus.

De toute manière, quoique l’on fasse et même en dehors d’une concertation, la décadence du système marchand (voir l’article « DECADENCE ») pousse à l’apparition de structures alternatives. Elles sont certes discrètes, marginales mais elles existent, répondent à des besoins concrets, elles deviennent indispensables lorsque la décomposition de l’ancien système devient insupportable et est incapable de créer du lien social.

L’action politique doit donc s’axer sur ces initiatives, les fédérer, les généraliser, en faire une alternative économique qui deviendra une alternative politique. Bien entendu ne pas se cantonner au territoire national mais établir des liens, des relations, des contacts, des échanges avec les autres pays qui connaissent aussi la décomposition de leur tissu social.


C’est dans cette problématique d’une stratégie alternative que prendra réellement et sérieusement forme l’action politique. L’organisation politique cessera d’être un instrument d’embrigadement et de propagande, elle sera au service d’une cause qui aura pour objectif de construire une société nouvelle fondée sur des valeurs nouvelles. Le rêve alors rejoindra la réalité.

Patrick MIGNARD

Ecrit par , à 23:36 dans la rubrique "Pour comprendre".



Modèle de mise en page par Milouse - Version  XML   atom