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Confédération paysanne : "L'Union européenne avait commandé, à un très sérieux bureau d'étude, un rapport sur les effets de la dissémination des cultures d'ogm.
Ses conclusions mettent en lumière le caractère totalitaire des plantes transgéniques et leurs incidences néfastes sur les cultures conventionnelles et agrobiologiques. Du coup les autorités de Bruxelles ont courageusement décidé de ne pas divulguer cette étude. C'était compter sans la veille de Greenpeace. Le 16 mai dernier, l'association écologique Greenpeace révélait avoir réussi à se procurer une étude confidentielle, commandée par l'Union européenne et, vu ses conclusions, gardée au secret. Et pour cause. On y trouve confirmation de la conviction proclamée depuis longtemps par les opposants aux ogm : toute culture d'ogm à grande échelle en Europe engendrerait des coûts de production supplémentaires élevés, parfois insurmontables, pour tous les agriculteurs et rendrait impossible l'agriculture biologique.
L'Institut de prospective technologique du Centre commun de recherche de l'ue à qui la Commission Européenne a commandé cette étude n'est pas une officine sectaire bourrée de charlatans rétrogrades, mais bel et bien un bureau d'étude tout à fait officiel, ayant pignon sur rue. Il a travaillé sur trois espèces dont il existe aujourd'hui des variétés transgéniques : le colza pour la production de semences, le maïs destiné à l'alimentation animale et les pommes de terre de consommation.
Ses conclusions sont sans appel : la contamination des cultures conventionnelles et biologiques est inévitable.
Malgré des mesures de précaution extrêmement onéreuses pour de grosses exploitations et irréalisables pour les petites fermes, une contamination inférieure à 0,1 % des semences de colza serait impossible à obtenir. Conclusions identiques pour le maïs, même dans les régions où la part de maïs ogm ne dépasserait pas les 10 %. De plus, les impuretés potentielles des semences, comme les mélanges post-récoltes, rendraient une stricte séparation entre filières ogm et non ogm impossible du fait de l'organisation (logistique) des exploitations.
Impact sur le bio
Pour la pomme de terre, les caractéristiques biologiques de cette culture (multiplication par bouture éliminant les risques de transfert de gène par le pollen) semblent simplifier le problème. Par contre, la multiplication des étapes de production comportant chacune un risque de contamination très faible mais inévitable rend impossible un objectif inférieur à 1 %.
Quant aux producteurs bio, ils seraient tout simplement amenés à perdre leur certification, chaque année dans les régions à fort taux de culture ogm : qui les indemnisera ? Selon quel mode de calcul ? Acceptera-t-on d'indemniser un producteur qui voudrait se reconvertir dans une région où il est sûr d'être contaminé ? Et que mangeront les consommateurs qui veulent du bio ?
Autre révélation intéressante de cette étude : la production de semences de ferme non contaminées deviendrait impossible : quel bonheur pour les semenciers qui verraient ainsi leurs semences certifiées rendues obligatoires de fait pour tous les paysans refusant leurs ogm ! Quel bonheur pour les marchands de pesticides (ce sont les mêmes) puisque les semences de ferme sont les seules à pouvoir, grâce à leur adaptation aux divers terroirs, se passer la plupart du temps de tous ces poisons !
Quand on vous disait que les ogm, outre le fait qu'ils risquent de nous empoisonner, sont totalitaires de par leur nature même : ils contaminent tout de façon irréversible, ils suppriment les paysans bio, les petits paysans et les semences de ferme, bref tout ce qui fait tache de vie au milieu du paysage mort de l'agriculture industrielle.
Quoi d'étonnant à ce que M. Barry McSweeney, directeur général du Centre commun de recherche de l'UE, recommande que, compte tenu du caractère sensible de ce problème, ce rapport soit cantonné uniquement à un usage interne à la Commission ? Pas de chance, Greenpeace en a fait un usage totalement externe !
De nombreux paysans et consommateurs ont été condamnés, parfois très lourdement, pour avoir détruit " en réunion " des cultures ogm. Nous avons là la preuve officielle de leur état de légitime défense ainsi que du caractère d'utilité publique de leurs actions de décontamination des territoires. Et si on communiquait ce rapport aux juges qui ont prononcé ces peines, nous poursuivraient-ils pour recel de document officiel confidentiel ?
Guy Kastler, chargé de mission à Nature & Progrès".