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Pourquoi nous ne pouvons pas ignorer le ’BANG’
Lu sur Hacktivist news service : "La convergence des technologies qui utilisent les sciences de l’information, les assemblages atomiques à l’échelle nanométrique, les sciences cognitives et les biotechnologies, lancée comme un programme prioritaire par les Etats-Unis en 2003, a été désignée par certains par le terme de petit ‘BANG’ (Bits, Atomes, Neurones, Gènes). Il s’agit d’une manipulation de la matière à l’échelle des atomes et des molécules, et comme à cette échelle, l’inerte ne se distingue plus du vivant, la combinaison des deux devient ainsi envisageable.

Pour ceux qui observent le développement des biotechnologies, le ’BANG’ apparaît comme un prolongement presque linéaire de la tendance réductionniste qui domine la recherche dans ce domaine depuis un demi-siècle. Ici, il semble que nous touchons le fond de la déconstruction de l’organisation du vivant en briques élémentaires, les bio-briques, pour expliquer son fonctionnement et imaginer sa reconception. La mise en œuvre de ce projet particulier fait appel à une palette de techniques utilisant ce qui est perçu par ses promoteurs comme les éléments de base de la matière (atome), du vivant (gène) et de l’esprit (neurone), tous considérés comme porteurs d’information (bits). Cette convergence pourra prendre de multiples appellations : NBIC (nano, bio, info, cogno), ou encore NGR (nano, génétique robotique)...

Les premières applications commerciales issues du ‘BANG’ rendent apparente une révolution silencieuse qui se fomente dans les laboratoires depuis déjà quelques années. Rares sont les observateurs de la société civile qui surveillent le développement de ce mouvement souterrain. À l’échelle internationale, l’organisation la plus active est certainement l’organisation nord-américaine ETCgroup [2], qui alerte régulièrement sur les dernières innovations technologiques du ’BANG’ et sur la concentration de l’industrie qui contrôle le secteur, le ’gang du BANG’. Ce gang du ’BANG’ fait converger les investissements éparpillés de la biotech et de l’infotech vers la physique et la chimie, domaines d’excellence du secteur nucléaire et des pétrochimistes. À son initiative, un regroupement international des responsables d’une trentaine d’organisations du monde entier a été invité à Montpellier pour discuter des enjeux et réfléchir rapidement à des réponses concertées de la société civile.

BEDE, en collaboration avec la Fondation Sciences citoyennes (FSC), l’Institut What Next issu de la fondation suédoise Dag Hammarskjöld, et ETCgroup, a pris en charge l’organisation de cette rencontre qui a eu lieu à Montpellier du 22 au 26 novembre 2008. . Plusieurs raisons expliquent que BEDE commence à s’intéresser à ce nouveau domaine inscrit depuis quelques mois dans son programme de ‘Veilles et coalitions sur la gouvernance du système alimentaire’ : l’accélération d’initiatives d’artificialisation des systèmes vivants et alimentaires par des solutions technologiques inadaptées et nuisibles, la concentration des moyens et des contrôles entre les mains d’une poignée d’industries, et la quasi-absence de débat public sur les enjeux de cette révolution. C’est pourquoi la première initiative de BEDE a été d’organiser, en clôture du séminaire international, le premier forum public « Sciences et société sur le ’BANG’ des nanotechnologies » à l’Université des Sciences de Montpellier. Ce forum a permis la rencontre de plusieurs disciplines sur cette thèmatique en croisant les approches du chimiste (Carine Bruguière, Chimsud), du sociologue (Brice Laurent, Ecole des Mines), du philosophe (Ion Vézéanu, Université de Grenoble), du paysan (Guy Kastler, RSP, Via Campesina) et de l’écologiste (Georgia Miller, Amis de la Terre-Australie).

Quelques questions cruciales soulevées par le ’BANG’

Parmi les nombreuses applications du ’BANG’ et les questions qu’il soulève, cinq reviennent fréquemment dans les préoccupations du public :
i) le non -étiquetage des nanoproduits,
ii) le développement de la biologie synthétique,
iii) l’utilisation de la géoingénierie contre le changement climatique,
iv) la recherche pour l’amélioration des performances humaines,
v) l’utilisation des technologies de l’information pour le contrôle social.
Nous avons réuni ci-dessous quelques éléments-clés, tels que nous les identifions aujourd’hui, visant à permettre une meilleure appréhension des enjeux.

i. Le non-étiquetage des nanoproduits

Les nanoproduits sont nombreux et plus d’un millier circulent déjà sur le marché. On en trouve partout : dans des peintures, des tissus, du verre, des ordinateurs, des téléphones portables, des crèmes solaires, des produits alimentaires ’amincissants’, des raquettes de tennis, des emballages..., sans qu’aucune réglementation n’oblige les fabricants à les distinguer par un étiquetage approprié. Pourtant il y a lieu de s’interroger sur l’innocuité de ces produits car les lois physiques qui régissent l’état de la matière à l’échelle nanométrique dépendent tout au moins partiellement d’effets quantiques, ce qui confère à ces objets des propriétés nouvelles comme une réactivité chimique accrue, une résistance mécanique, ou encore des propriétés optiques, électromagnétiques ou thermiques. Ceci explique que les nanotechnologies ont été développées rapidement pour de multiples applications industrielles. Cependant, les particules nano sont extrêmement petites -1000 à 10000 fois plus petites que les cellules qui composent notre corps - et leur structure particulière leur permet de franchir de nombreuses membranes, y compris la barrière hémato-encéphalique. C’est ici que se situe principalement le débat sanitaire lié aux nanotechnologies. Il n’existe pas assez de données, les études d’impact sont rares, et les méthodologies ne sont pas adaptées pour assurer une traçabilité (difficulté de détecter la présence des nanoparticules), il est donc impossible d’évaluer correctement les risques pour la santé. De plus, il n’existe encore aucun cadre législatif pouvant permettre la production et la diffusion des nanoproduits dans de bonnes conditions de sécurité. La preuve en est que même les compagnies d’assurance n’acceptent pas de couvrir les éventuels dommages provoqués par ces nouveaux constituants, ce qui est généralement un bon indicateur de l’ignorance de l’amplitude du risque. Alors pourquoi cet emballement ?

Qui contrôle la matière, contrôle le futur. Les nanotechnologues en sont bien convaincus. Le film de Julien Colin [3] : « Le silence des nanos » le montre à plusieurs reprises La course a été lancée officiellement par Clinton en 2000, avec des milliards de dollars d’investissement alloués à la recherche sur les nanotechnologies aux Etats-unis. Des sommes comparables ont également été octroyées aux programmes de recherche en Union européenne et dans les pays industriels d’Asie (Japon, Corée, Chine). La nanoélectronique est le secteur clé et l’objectif est de dépasser la limite des procédés de miniaturisation des puces, qui sera atteinte prochainement,

avec des nanostructures capables de stocker et de transmettre de l’information. Les recherches se poursuivent pour utiliser l’ADN comme support physique de composants électroniques : un bel exemple de convergence du ’BANG’.

Parmi les autres questions soulevées par les nanotechnologies, on peut citer celles qui sont liées aux droits de reproduction (brevets), à la disponibilité des ressources matérielles (outils, machines, matières premières) et cognitives (savoirs et savoir-faire) ou encore celles plus profondes de l’altération de l’humain. Toutes ces questions semblent aujourd’hui évacuées, tout comme le principe de précaution en matière environnementale et sanitaire, par un consortium recherche-gouvernement-industrie. Celui-ci compte piloter la communication sur les applications des nanos pour en permettre l’acceptation du public. Rien de nouveau a priori, mais cette communication n’a jamais été aussi concertée, programmée, subtilement distillée, qu’elle l’est aujourd’hui pour les nanotechnologies, en se servant par exemple des jurys citoyens ou des ’focus groups’.
Or il se trouve que le public, averti et mobilisé sur la question du nucléaire ou celle des OGM, est maintenant conscient et expérimenté en matière de décodage médiatique. Il retrouve ici les ingrédients désormais bien connus qui ont présidé au démarrage des veilles citoyennes indépendantes sur ces technologies : concentration des pouvoirs, amalgame privé-public, opacité, et propagande. Une nouvelle bataille de l’information en perspective qu’une alliance citoyenne sur les enjeux des nanotechnologies, en cours de construction, se propose de soutenir [4].

ii. Le développement de la biologie synthétique

Une nouvelle discipline se développe à la convergence de la biologie moléculaire, de l’informatique et de l’ingénierie : la biologie synthétique. Elle a pour ambition de concevoir et de construire des systèmes biologiques qui n’existent pas dans la nature, et de reformater les systèmes biologiques existants pour améliorer leurs capacités à réaliser certaines tâches. En biologie synthétique, l’ADN est la matière première, et la séquence de nucléotides est utilisée comme un logiciel pour donner des instructions à l’organisme qui réalise une fonction. La productivité des machines permettant la synthèse de l’ADN a été multipliée par 700 en une dizaine d’années, et elle double tous les ans. Le prix d’un ADN synthétique a chuté de 10$ par paire de base en 2000, et se monnaye à moins de 0,5$ aujourd’hui.

Avec la biologie synthétique, qui prolonge et amplifie les techniques de transgénèse classiques, il a été possible de recréer complètement des virus infectieux (grippe espagnole, polio) à partir des séquences communiquées par une base de données. Il est aussi envisageable de reprogrammer un organisme pour lui permettre de produire des constituants qu’il ne fait pas dans la nature ou de reconstruire entièrement des formes vivantes à partir d’ADN synthétique, pour différents usages industriels. En janvier 2008, l’équipe de Craig Venter, au premier plan dans le séquençage du génome humain, a déposé une demande de brevet sur un génome bactérien 100% synthétique. Pour passer à l’étape de l’organisme vivant synthétique, les chercheurs travaillent maintenant à transférer ce génome synthétique dans une cellule bactérienne pour “ reprogrammer ” la cellule.

Nombre de chercheurs en biologie synthétique ne sont pas des biologistes mais des ingénieurs, comme Drew Endy, dont le laboratoire se trouve à l’Institut Technologique du Massachusetts (MIT) de Boston. Il a élaboré plusieurs centaines de petites molécules d’ADN, les bios-briques, chacune programmée pour une tâche précise. Il veut maintenant assembler ces pièces pour reconstituer rapidement des organismes, à la manière de legos.

Les investisseurs industriels dans ce secteur sont divers, avec une prépondérance des pétroliers (BP, Shell, Chevron) et de certaines compagnies chimistes-semencières comme Dupont, intéressées par la production d’agrocarburants de deuxième génération à partir de la cellulose. On retrouve dans leur engouement pour la biologie synthétique la même logique que celle qui a accompagné celui qu’ils ont eu pour les OGM.
Les manipulations sont peut-être plus profondes (même si aujourd’hui elles ne touchent pas directement les organismes dits supérieurs (plantes et animaux), sûrement plus populaires (elles sont moins chères, et même à la portée de lycéens qui organisent déjà aux Etats-Unis des concours sur des microorganismes manipulés), et probablement plus dangereuses. La facilité avec laquelle des organismes virulents pourraient se disséminer leur confère un potentiel à servir aussi d’armes biologiques. L’ignorance des concepteurs de ces manipulations sur la complexité du fonctionnement des êtres vivants garantit des erreurs en cascade aux conséquences sanitaires et écologiques dévastatrices. Une surveillance populaire des laboratoires apparaît ainsi d’autant plus nécessaire...
Bien d’autres aspects sont à suivre, comme les conséquences du transfert des bases de données in-silico (inscrite dans la silice des puces informatique) de séquences d’ADN des échantillons de plantes conservées en banques de gènes vers l’in-vitro des synthétiseurs, ou la concentration du contrôle à travers les brevets...

Par ailleurs les cadres réglementaires construits pour les OGM paraissent maintenant trop étroits pour contenir les nouvelles inventions des ingénieurs du vivant, et il apparaît de plus en plus évident que de nouvelles dispositions légales sont nécessaires pour assurer une biosécurité efficace. Depuis quelques années, ETCgroup cherche à pousser l’idée d’une Convention internationale sur l’évaluation des nouvelles technologies (ICENT), un appareil indépendant qui serait chargé d’évaluer les nouvelles technologies majeures et de fournir un système d’alerte rapide à l’échelle mondiale. Un vaste chantier en perspective.

iii. L’utilisation de la géoingénierie pour contrer les effets du changement climatique

Les manifestations concrètes du changement climatique (fonte des glaciers, tornades, sécheresse...) ont dopé les initiatives de manipulation des écosystèmes à grande échelle pour modifier le climat. Une large gamme de programmes est en cours pour capter le CO2 ou provoquer une opacité des rayonnements solaires. La fertilisation des océans, avec des particules de fer ou de l’urée pour stimuler la séquestration du CO2 par le plancton marin, fait partie des expérimentations à grande échelle les plus décriées. Aux Philippines ou en Equateur, des compagnies ont projeté d’ensemencer des centaines de kilomètres carrés d’océans, parfois dans des réserves naturelles comme celle des Galápagos.

Soutenu par le Conseil scientifique de la Convention de Londres sur la pollution marine, une coalition d’organisations conduite par ETCgroup a pu obtenir des gouvernements réunis à la dernière session de la Convention de la diversité biologique à Bonn en mai 2008, un accord de moratoire sur les activités de fertilisation des océans. Cette victoire du principe de précaution est cependant altérée par le fait que les Etats-Unis ne sont pas partie à la Convention, ce qui semble encourager l’engagement de sociétés états-uniennes de géoingénierie comme Climos Inc. dans la poursuite de leurs activités.

La manipulation des écosystèmes à grande échelle présente des risques incalculables. Cependant les dernières estimations très pessimistes sur l’augmentation du réchauffement climatique provoquent un revirement des responsables politiques jusqu’à présent les plus prudents vis-à-vis de ces technologies à risques. La justification de la géoingénierie devant la menace globale d’un réchauffement planétaire à brève échéance de plus de 4°C trouve de plus en plus d’adeptes. Le fleurissement de projets pouvant réduire le CO2 de l’atmosphère sans changer les évangiles de la croissance est remarquable par la diversité des expérimentations. Quelques dispositifs en cours d’expérimentation : aérosol projeté dans la stratosphère, réflecteurs géants en orbite, ensemencement de nuages, substances chimiques pour sauver l’ozone, fertilisation de la mer par le fer, pompage du CO2 liquide vers le fond des océans ou dans les couches géologiques profondes de la terre, ou encore généralisation des plantes et des arbres génétiquement modifiés pour capter le CO2 ou comme agrocarburants....

Cette modification volontaire des écosystèmes est considérée comme l’une des principales menaces du ’BANG’ par de nombreuses organisations et en particulier les organisations des peuples autochtones qui observent avec inquiétude l’appropriation et la transformation des derniers espaces qui soutiennent leurs modes de vie. Le nouveau mot d’ordre de la Via Campesina : « l’agriculture paysanne refroidit la planète » oriente les choix technologiques vers des solutions autrement durables.

iv. Recherche pour l’amélioration des performances humaines

Les applications médicales des technologies du ’BANG’ peuvent offrir de nouveaux outils pour diagnostiquer et traiter des maladies à l’échelle moléculaire. Aujourd’hui, des centaines de médicaments, systèmes d’administration, tests diagnostiques utilisant les nanos sont à un stade préclinique, clinique ou commercial. Quelques exemples d’applications : nanoparticules d’argent pour détruire les microbes résistant aux antibiotiques, nanobilles d’or qui ciblent les cellules cancéreuses pour détruire les tumeurs au laser de manière non invasive, nanocapteurs qui circulent dans l’organisme pour contrôler les hormones, le taux de glucose ou de cholestérol...
La convergence des technologies du ’BANG’ permettra aussi, en théorie, d’augmenter la structure, la fonction et les facultés du corps humain. On a ainsi créé un implant neuronal artificiel pour remplacer les neurones endommagés par la maladie de Parkinson, avec un dispositif permettant de télécharger des logiciels directement d’un ordinateur vers l’implant installé dans le corps. Une application médicale de cette sorte peut être bien sûr tout à fait positive pour les malades, et apparaître comme inoffensive. Mais la question qui se pose est celle de l’objectif : où s’arrête le soin et où commence la transformation structurelle de l’humain ?

Pour ETCgroup, les nanotechnologies à usage interne vont gommer la frontière entre thérapie et amélioration, ce qui peut littéralement métamorphoser la notion de santé ou d’humanité. Gregor Wolbring, de l’Université de Calgary, qui a assisté au séminaire ’BANG’ de Montpellier, dit que la technologie d’amélioration de l’être humain sera aussi habilitante pour une petite minorité que débilitante pour une majorité, et si la tendance se maintient, nous verrons apparaître une nouvelle classe de marginaux : les non-améliorés.

La tendance risque fort de se maintenir cependant, car c’est probablement avec les technologies d’amélioration des facultés humaines, produisant soi-disant des corps plus robustes et des cerveaux plus performants, que les profits seront les plus conséquents. Les industriels visent notamment le marché que représentent la génération du baby boom, personnes âgées aisées aux pensions solides, donc solvables, qui ont construit leur conception linéaire du progrès dans les ’trente glorieuses’ et semblent se comporter comme des consommateurs socialement autistes de technologies qui prolongent leur existence.
D’autres secteurs importants sont aussi demandeurs des technologies du ’BANG’ pour améliorer l’humain, et parmi eux en particulier l’armée, qui travaille sur les facultés des super guerriers pour les conflits de demain.

L’idéologie transhumaniste qui prépare l’Homo sapiens posthumain porte le ’BANG’ comme un étendard, avec ses solutions technologiques qui permettraient de nous transformer pour survivre à la crise multiple. Elle exerce déjà un fort pouvoir d’attraction dans les cercles politiques convaincus que là réside la seule voie pouvant permettre d’échapper aux impasses dans lesquelles l’humanité s’est engouffrée, sans remettre en cause les logiques de la croissance industrielle. Plus cette idéologie sera forte, plus les humains seront confortés dans leur croyance qu’ils ont besoin de ces techniques pour survivre. Elle justifiera l’artificialisation des écosystèmes et de nouvelles manipulations du vivant, propulsant la destruction des équilibres écologiques de la planète et empêchant tout espoir de restauration. Il y a urgence à démonter l’engrenage de ce mécanisme.

v. L’utilisation des technologies de l’information pour le contrôle social

Les technologies de l’information sont celles sur lesquelles repose le développement des autres techniques par la libération de puissances de calcul de plus en plus grandes. Tant que cette capacité s’accroît, les autres technologies poursuivent leur développement. De plus, ces technologies génériques ont vocation à rendre peu coûteuses des technologies qui étaient jusque là inaccessibles, chères, encombrantes...
C’est ainsi que les nouveaux nanocomposants rendent possible et bon marché la surveillance et le dépistage systématiques des gens et des objets. Au moment même où les législations sur la protection de la vie privée foisonnent de par le monde, les gens abandonnent des quantités massives d’informations personnelles sur Internet, tout en portant des radio-étiquettes RFID sur leurs propres affaires. Ces puces sont des systèmes qui permettent la localisation, l’identification et l’authentification d’objets de tout type. Dans un monde où les nanotechnologies rendent tout objet potentiellement dangereux, le raisonnement des gouvernements est que la seule solution réaliste est de surveiller tout le monde tout le temps. Avec les nanotechnologies, ces technologies de l’information déjà très répandues ont vocation à s’intégrer vraiment partout ; des objets, des plantes, des animaux, des humains sont déjà pucés. De même, l’emploi des logiciels espions qui permettent à n’importe qui de surveiller sa vie de famille se popularise ; parfois ceux qui refusent de donner leur ADN à leurs employeurs, sont prêts à payer pour envoyer leur ADN à des entreprises en échange de leur arbre généalogique...

Quelles sont les avancées du séminaire international ’BANG’ de Montpellier ?

Les participants au séminaire international ’BANG’ étaient tous conscients qu’ils se réunissaient à un moment historique difficile. Militants connus, responsables d’organisations ou coordonnant des réseaux régionaux et internationaux sur la souveraineté alimentaire, la santé et l’environnement, la justice sociale, la gouvernance de la recherche observent avec préoccupation la cascade de crises de ces derniers mois. Parmi les plus marquantes : effondrement financier, crépuscule de l’économie des énergies fossiles, profond et durable dérèglement climatique, insécurisation des systèmes alimentaires... Ces crises, engendrées par un système capitaliste néo-libéral, sont aggravées par les guerres et le délitement de la gouvernance au niveau national et international, ce qui provoque un chaos social et écologique inégalé.

Le développement des technologies ’BANG’, apparaît être au centre de la réponse des gouvernements à la convergence des crises, mais les participants au séminaire estiment que ces technologies centralisées, à forte utilisation de capital, qui sont contrôlées par une poignée d’entreprises, et qui perturbent les équilibres écologiques complexes font partie du problème, pas de la solution.

Ces technologies font beaucoup de promesses mais elles posent de nombreux problèmes. Il y a encore assez peu de résultats et certaines annonces confinent à la mystification. En effet il existe encore de nombreux verrous techniques et théoriques avant que n’advienne ce qui a été imaginé : des organismes vivants complètement synthétiques, des ordinateurs quantiques ou le passage « transparent » aux caisses du supermarché grâce aux RFID ; sans parler même des espoirs de la nanomédecine, des reconstructions biotechnologiques ou des méga(lo)dispositifs de la géoingénierie. Il est bien possible que les nanotechnologies et les technologies convergentes ne produisent que quelques gadgets et échoueront globalement et pendant ce temps-là, un technoscientisme nous détourne de la résolution des véritables problèmes de société qui laissent indifférents les financeurs : à savoir les inégalités, l’accès aux ressources, à l’éducation...

Les participants ont rappelé que les premières phases de la révolution industrielle ont créé au moins quelques-unes des graves crises dans lesquelles nous sommes plongés aujourd’hui, y compris le changement climatique. Les technologies du ’BANG’ nous exposent à de nouvelles menaces et à des dangers qui sont très mal compris même par les scientifiques, et que les sociétés et les gouvernements sont peu aptes à gérer. Les participants ont estimé que la population doit définir le développement, les usages et les questions de gouvernance des sciences et technologies – et pas seulement y répondre. Et les populations ont la capacité de trouver les bonnes solutions. Cela implique le renforcement des communautés socialement justes, équitables, non exclusives, et écologiquement résilientes, qui respectent le projet d’émancipation, la diversité, la dignité et les droits humains. Les technologies ne sont pas neutres, ni dans leur conception ni dans leurs effets. La convergence des crises justifie donc des solutions radicales pour transformer et démocratiser la science et la recherche technologique.

Nous avons des solutions aux crises, fondées sur une toute autre démarche que celle qui préside au développement des technologies du ’BANG’. Nous pouvons avoir de l’espoir car nous avons déjà de nombreux acquis expérimentés par les milliers d’initiatives positives développées localement partout dans le monde. Il reste cependant beaucoup de travail pour rendre ces solutions réalistes à grande échelle, systémiques et suffisamment puissantes pour pouvoir transformer la société. La construction des alliances renforce les mouvements sociaux qui apprennent les uns des autres (agriculteurs, peuples autochtones mais aussi, au-delà des zones rurales, les habitants des villes). Il existe de nombreuses poches de résistances qui essayent de se mettre en réseaux, mais ces réseaux ne sont pas assez développés et ils ont besoin d’être renforcés. Améliorer la complémentarité des actions entre les différents groupes, réseaux, mouvements, ONG, est ressenti comme une nécessité historique pour faire connaître, diffuser et multiplier les solutions apportées par les communautés des poches de résistance, en les inscrivant dans un contexte politique plus large.

Une réflexion à poursuivre

Ce document, certes lacunaire et parfois imprécis, a cherché à recomposer à partir de plusieurs références certains des éléments nécessaires à une première compréhension. C’est un début. Les explications fragiles, à la cohérence encore incertaine, témoignent du manque de préparation que nous avons aujourd’hui, du moins à l’échelle de la plupart de nos organisations, pour affronter la complexité d’une situation qui pourrait se présenter néanmoins comme une déferlante technologique, en accentuant les crises que nous traversons et l’imprédictabilité de notre avenir. Il est temps semble-t-il de construire des espaces publics capables d’aborder trans-sectoriellement tous les impacts de ces technologies, pour mieux les comprendre et mieux y répondre.
Les prochains rendez-vous du BANG seront organisés au cours du Forum mondial Sciences et démocratie [5] et du Forum social mondial qui se tiendront à Belem fin janvier 2009.

BEDE [1], décembre 2008







Notes

[1] BEDE est une association internationale fondée en 1994. En lien avec une cinquantaine d’organisations de différents réseaux français, européens et internationaux, BEDE contribue à la protection et à la promotion des agricultures paysannes en soutenant les initiatives d’une gestion respectueuse du vivant par un travail d’information et de mise en réseau. BEDE organise des ateliers, des rencontres entre paysans, chercheurs et société civile des pays d’Europe, du Maghreb et d’Afrique de l’ouest et réalise du matériel pédagogique. Ce travail permet au grand public de se saisir des enjeux et aux paysans et organisations d’améliorer tant leur travail de terrain que leur capacité de négociation sur le plan législatif.

[2] www.etcgroup.org

[3] www.lesilencedesnanos.com

[4] www.vivagora.org

[5] www.fm-sciences.org



Ecrit par TOLKIEN, à 15:04 dans la rubrique "Social".



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