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La révolte des communautés natives de l'Amazonie
péruvienne contre le gouvernement d'Alan Garcia s'est terminée par la
victoire des indigènes. Ce fut un triomphe inespéré qui casse la
tradition historique de la prééminence du pouvoir central sur les
groupes indigènes. Après deux semaines de protestations et une
prise de routes, entreprises hydroélectriques, stations pétrolières et
de puits de gaz, 65 ethnies natives de la forêt péruvienne qui
regroupent 350 mille personnes, sont parvenus à faire céder le pouvoir.
Vendredi, le Congrès a abrogé à une ample majorité de 66 voix contre 29
deux lois qui facilitaient la vente des terres communales des indigènes
et dont la promulgation a provoqué le soulèvement indigène dans la
forêt amazonienne.
Les natifs ont dénoncé qu'avec ces lois le
gouvernement essaie de promouvoir la vente de leurs terres aux
compagnies pétrolières transnationales et d'exploitation du bois. Le gouvernement avait promulgué ces lois comme partie du Traité de Libre Echange (TLC) avec les Etats-Unis et a tout essayé pour leur défense. Il a parié sur la répression pour abattre la révolte indigène, a déclaré l'état d'urgence et a appelé les Forces Armées, mais les indigènes se sont fermement maintenus sur le pied de guerre avec leurs lances, arcs et flèches.
Dans le Congrès, le parti de gouvernement s'est retrouvé seul. Il a
perdu le soutien de ses alliés de la droite et du fujimorisme, qui ont
voté en faveur de la dérogatoire des deux lois, bien qu'en mettant en
avant seulement des raisons formelles liées à leur promulgation avant
de la défense des terres communales. Cela constitue le plus grand échec
politique de Garcia des deux années de sa gestion et il survient au
moment où sa popularité atteint seulement 20 pour cent.
La marche arrière du Congrès a déclenché la colère de Garcia et de son gouvernement, mais a décomprimé une crise sociale qui menaçait de s'aggraver et d'avoir une fin violente.
Tandis qu'à Lima, les fonctionnaires du gouvernement n'arrivaient
toujours pas à digérer leur échec et répondaient en déchargeant leur
frustration en attaquant furieusement les opposants des lois abrogées,
dans les villages et zones de la forêt amazonienne des fêtes massives
ont éclaté. La nouvelle de la décision du Congrès a fait éclater
l'euphorie parmi les indigènes, qui s'étaient rassemblé sur les places
des principaux lieux habités pour attendre le vote. À peine connue la
nouvelle, avec leurs visages peints, ils ont commencé à danser et à
agiter leurs lances et flèches en signe de victoire. "C'est une grande
nouvelle pour nous. C'est une nouvelle aube. Pour la première fois dans
l'histoire, nous faisons grève et obtenons une victoire", a signalé
Wrays Perez, apu (leader) de l'ethni aguaruna qui a célébré la victoire
avec des milliers d'indigènes sur la place centrale de Bagua, l'un des
épicentres de la protestation. A Lima, Alberto Pizango, président de
l'Association Interethnique de Développement de la Forêt Péruvienne
(Aidesep), qui a pris la tête de la protestation indigène, vétu avec le
vêtement typique de sa communauté native était présent au Congrès pour
suivre le débat et le vote auprès d'une délégation de dirigeants
natifs. "C'est une décision historique. A gagné la raison et non des
lois qui attentaient contre les peuples indigènes et la société
nationale", a dit Pizango, tandis qu'il se retirait souriant et
victorieux du Parlement.
Dans l'autre bord de cette guerre pour les terres indigènes, le président Garcia a qualifié la décision du Congrès de "recul historique".
Avant le vote du Congrès, Garcia avait essayé de faire pression sur les
parlementaires en exigeant la ratification des lois de la discorde et
en accusant les congressistes qui avaient déjà annoncé leur vote pour
la dérogation de "céder au chantage par peur". Mais ses pressions n'ont
pas pu changer le cours des choses au Congrès. Vendredi a été une
mauvaise journée pour le président péruvien. Tandis que le Congrès
débattait la dérogation des lois pour lesquelles il avait décidé de
tout jouer et que son échec était déjà annoncé, Garcia a été reçu par des sifflets et des pierres à Chiclayo,
ville de la côte nord du Pérou, où il s'était rendu pour inaugurer des
infrastructures routières. Garcia a du abandonner Chiclayo sans pouvoir
inaugurer les oeuvres. La protestation de Chiclayo n'a rien eu à voir
avec les terres des indigènes, mais avec la revendication
d'augmentation de salaires des employés publics du secteur de la santé
et représente l'étendue du mécontentement social contre le gouvernement.
Mais
le président péruvien n'a pas été le seul qui a essayé de changer
l'histoire d'un vote qui depuis deux jours était déjà annoncé
défavorable pour le gouvernement. La Confédération d'Institutions
Patronales Privées (Confiep), le pricipal syndicat des entrepreneurs,
a émis avant le vote du Parlement un communiqué en exigeant du Congrès
la ratification des lois controversées sous l'argument que leur
dérogation "enfoncera le pays dans l'anarchie". Mais au final,
le pouvoir politique et le pouvoir économique ont perdu en face des
indigènes qui ont défendu leurs terres avec leurs lances, arcs et
flèches. Un fait qui n'avait jamais été vu auparavant dans l'histoire
du Pérou.
Carlos Noriega, Pagina/12, 24 août 2008.
http://www.pagina12.com.ar/diario/elmundo/4-110268-2008-08-24.html
Traduit par http://amerikenlutte.free.fr