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L'En Dehors


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Le viol du droit par le pouvoir néolibéral

S'APPOSER AUX LOIS INIQUES est une attitude saine, car elles sont l'oeuvre de l'hydre étatique et en violation de toutes les normes juridiques. Il ne faut pas confondre le droit, qui est d'origine gouvernementale (Constitution, lois, ordonnances, décrets, arrêtés, circulaires, règlements) ou résulte de traités internationaux, avec les normes juridiques qui sont des créations spontanées dans la durée des interactions sociales: institutions sociales, coutumes, conventions collectives, règles internes aux groupements sociaux (syndicats, associations, communautés, collectivités territoriales). Par exemple, l'institution immémoriale du respect de la parole donnée, gage de la confiance, est très antérieure au droit bourgeois des contrats. Ainsi l'étatisme réduit-il les sources du droit à une seule: la décision des parlementaires ou du gouvernement, alors qu'il y a une pluralité de sources autonomes des normes juridiques issues de l'existence même du pluralisme des groupes sociaux. Avant le droit d'État, il y a tout ce que l'histoire et la culture ont donné comme principes généraux du droit.

Résister au droit étatique est d'autant plus indispensable que son contenu en univers néolibéral se traduit depuis quantité d'années par une fantastique régression de la justice sociale, du droit du travail, du droit pénal et des principes généraux du droit. Pour bien constater ces reculs, il faut repérer lesdits principes généraux. Alors, on pourra voir en quoi, à travers quelques exemples, ils sont remis en question par le pouvoir politique.

Pérennité de la Constitution

À tout seigneur, tout honneur: ce principe qui pourtant formalise le pacte social du pays est remis en question de plus en plus souvent car ladite Constitution est modifiée de plus en plus fréquemment. Récemment, la dernière modification de ce texte a été pour le statut pénal du président. La Constitution reprend les principes des droits de l'homme. Or ces derniers sont subrepticement détournés. Par exemple, ils disent que l'impôt doit être calibré sur les capacités contributives des citoyens. Depuis Villepin puis Tsarko, l'imposition des riches ne cesse de reculer, ce qui viole donc à la fois le principe et la Constitution.

Stabilité de la loi

La loi est censée reposer sur ce principe. Or on la change tous les quinze jours en fonction des circonstances, des événements, des affichages médiatiques et du clientélisme gouvernemental. Une loi alourdit les peines contre les violeurs et deux semaines après le viol et le meurtre du petit Enis on annonce sa modification. On vote contre les chiens dangereux et une semaine après on annonce un renforcement de la surveillance les concernant. La loi est normalement un des moyens de stabiliser les attentes et les relations sociales. Elle est devenue un outil de manipulation de l'opinion.

Indépendance de la justice

Depuis toujours elle ne l'est pas en France: elle n'est qu'une autorité. Mais c'est encore trop. Désormais au Conseil constitutionnel il y a dix membres de droite sur onze. Le Conseil d'État est truffé de membres nommés « au tour extérieur » et de membres désignés tout court par le pouvoir (en général sans qualification de juristes car ce ne sont que des énarques). Les magistrats du parquet dépendent directement de la chancellerie. Un juge qui n'avait pas requis la peine plancher en disant pourquoi a été convoqué pour se faire remonter les bretelles. Une réforme en préparation du Conseil supérieur de la magistrature prévoit d'en retirer la majorité de représentants aux magistrats. Du reste, de plus en plus ses avis sur les nominations ne sont pas retenus. Il est vrai qu'il n'est que consultatif. Sous Villepin, la valse des nominations de copains aux plus hautes fonctions de magistrat s'était accélérée pour sauver le soldat Chirac redevenu simple quidam. Dati nomme d'office un procureur à 9 mois de la retraite sur un poste fictif à la Cour de cassation. Elle réforme la carte des tribunaux (dont suppression de 63 tribunaux des prud'hommes) sans consulter qui que ce soit. Ah, quelle belle indépendance pour les chats-fourrés!

Équilibre des forces entre patrons et salariés Un acquis ancien du droit du travail était de rééquilibrer les forces entre les patrons et les salariés. On assiste en ce domaine à un retour au xlxe siècle. La loi Fillon avait à la fois obligé à négocier dans les entreprises et admis que les accords soient signés par la majorité des syndicats représentatifs même s'ils ne faisaient pas la majorité des salariés. Le CNE (annulé par un jugement de l'OIT), le CPE retiré par le gouvernement suite à un fort mouvement social, illustrent déjà les futures « ruptures »: la séparation à l'amiable, sans pouvoir ensuite plaider, les CDI de mission au heu des CDD, le contrat unique de travail, la diminution du rôle des CHS-CT et de la médecine du travail, etc. Affaire à suivre car il y aura passage du « nouveau code du travail » , simplifié, devant les députés les 27 novembre et 4 décembre.

Non-rétroactivité des lois

Principe fondamental entre tous! Or la réforme des retraites des régimes spéciaux modifie des contrats de travail souvent passés il y a bien longtemps. Prenez un retraité d'EDF: quand il a souscrit son contrat de travail, sa retraite était indexée sur l'évolution des salaires dans l'établissement. Eh bien ce serait annulé avec effet rétroactif. Remarquez que, grâce à la complaisance des syndicats compradores, les salaires (en termes d'évolution générale) évoluent depuis longtemps moins que l'inflation. Car ils sont remplacés par des augmentations individuelles et par des primes ou épargnes salariales qui, évidemment, ne sont pas touchées par les retraités. Ce qui percute le principe d'égalité de traitement.

Individualisation de la peine

Ce principe, qui plus est inscrit dans la Constitution, rend obligatoire l'individualisation des peines en fonction des circonstances et de la personnalité du mis en examen. La loi Dati sur les peines planchers en cas de récidive viole délibérément ce principe. Elle s'en défend en prétendant que les juges peuvent ne pas appliquer le plancher. Elle oublie un petit détail: le juge devra justifier pourquoi alors qu'avant c'était le contraire. Le sens de l'argumentation est donc renversé, et il est clair que les juges qui ne s'y plieront pas auront peu de chances d'avoir des primes et de l'avancement. Du reste, Mme Dati a dit qu'elle était elle-même le parquet, violant ainsi le principe d'indépendance de la justice. On sait aussi ce qu'il faut penser du prurit de textes régissant le droit des immigrés et des demandeurs d'asile. Ce sont des violations parfaites de ces principes.
Chacun a droit à un procès équitable avec instruction à charge et à décharge, droit à une défense par un avocat, dans une audience publique avec débat contradictoire. Depuis longtemps les comparutions immédiates (ex flagrants délits), dans lesquelles le prévenu et son avocat, en général commis d'office à la dernière seconde sans pouvoir vraiment rencontrer son malheureux client, n'ont pas le temps de préparer l'audience violent ces principes. Avec Perben, on a trouvé mieux: le plaider-coupable dans le cabinet d'un substitut du procureur (pas d'audience publique), devant un avocat réduit en gros à de la présence pour contrôler la procédure, pour négocier (?) la peine. Est-ce équitable? Le principe du débat contradictoire existe-t-il encore? Et surtout cela contrevient au principe d'égalité de traitement entre justiciables: les riches, dans le secret, seront bien mieux à même de transiger, ce qui élimine aussi le principe de publicité des jugements.

Égalité devant la loi

Le principe d'égalité de traitement est trahi d'une façon plus subreptice encore. Le pouvoir vient de publier le projet du nouveau code du travail, lequel devait être révisé pour le simplifier et le rendre plus lisible, à contenu égal. Cette révision a été faite par un groupe d'experts ayant travaillé dans le
secret. Contrairement à la promesse gouvernementale, non seulement le texte est plus compliqué qu'avant, mais encore il en modifie substantiellement le contenu. D'après Gérard Filoche, inspecteur du travail, le nouveau texte a 1890 divisions au lieu de 271, 3652 articles au lieu de 1891. Des pans entiers du vieux code sont révolutionnés au profit d'un recul sans précédent des droits des salariés, des syndicats et des organismes de représentation. Cinq cents lois ont été déclassées pour
être remplacées par des décrets sans passage devant le Parlement (voir le site Internet Bellaciao). Dans les gracieusetés, on notera que les peines de récidives pour les patrons ayant violé le droit du travail sont éliminées du code! Au moment même où pour le vulgum pecus elles sont renforcées. Les édiles municipaux ont été exonérés de poursuites (loi Fauchon de 2004) quand l'accident survenu à un administré ne résulte pas d'une faute intentionnelle. Loi pondue vite fait sur le gaz
suite à la chute d'un portique municipal de basket sur un élève. Les patrons ou dirigeants ne sont plus poursuivis au pénal; c'est remplacé par la responsabilité morale de leur entreprise. Ainsi, une explosion de gaz ayant fait 15 morts suite à des fontes cassantes a vu le PDG de GDF exonéré. Et pourtant c'étaient des décisions comptables qui avaient ralenti le programme de suppression des dites fontes grises établi par un de ses prédécesseurs! Liberté de parole à l'audience
Celle-ci aussi est bafouée; un juge vient d'être convoqué à la chancellerie pour en avoir usé à propos d'un cas de peine plancher pour récidive.

Irresponsabilité juridique

Le vieux principe de non-jugement des irresponsables, des fous, des malades mentaux est en train d'être remis en question là encore à l'occasion d'une affaire, celle de l'assassin de deux soignantes à l'hôpital de Pau. Il n'existerait plus que le droit des victimes. Le gouvernement voulait ajouter après la fin de la peine des mesures de rétention en hôpital ou en centre fermé. Le Conseil d'État vient de faire de grandes réserves sur ce projet, car il anéantit un vieux principe: quand la peine est purgée, le condamné est quitte de sa dette à la société.

Des actes et des faits

Le principe suivant lequel on juge les actes et les faits est en cours de remplacement par le délit de « mise en danger de la vie d'autrui », chose si peu définie qu'on peut y mettre à peu près n'importe quoi et qu'on s'oriente vers la pénalisation des intentions

Une arme réactionnaire redoutable

Rien de tout cela, qui met en place une autre conception du droit, ne peut surprendre
répression plus que prévention, punition plus que réhabilitation, responsabilité individuelle au lieu de prise en compte des circonstances sociales, exonération pénale du patronat au profit d'une simple responsabilité civile, etc. Quand il n'y a plus réellement de démocratie, le pouvoir en place peut imposer toutes les normes juridiques favorables à ses copains et au capital, surtout lorsqu'en plus le rapport des forces a été préalablement déséquilibré par des textes conçus à cet effet. La loi est une arme des puissants pour amoindrir les forces sociales opposantes au tout néolibéralisme et, de façon générale, au pouvoir. Et nous pouvons écrire ce théorème: plus les inégalités, la pauvreté et la précarité croissent, plus la répression augmente.

Jacques Langlois

Le Monde libertaire # 1498 du 13 décembre 2007

Ecrit par libertad, à 08:43 dans la rubrique "Pour comprendre".



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