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L'En Dehors


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Contre-culture - Keny Arkana propage la rage
Lu sur A voix autre : "Entretien avec la rappeuse marseillaise Keny Arkana : ses engagements internationaux et locaux avec le Collectif la Rage du peuple, son aspiration à la solidarité dans les luttes. Elle était de passage à Bruxelles en juin avec un forum.


- Quand as-tu commencé à chanter ?
- J’ai commencé à rapper à 13 ans quand j’étais au foyer en 1996. En 1998, j’ai pris des cours dans un atelier d’écriture à la Friche, un lieu animé par Narmor, un rappeur de Marseille. Il nous a fait goûter à la scène. A partir de là, c’était le rap ou rien. Au départ, au foyer, ils ne voulaient pas que j’y aille car ils trouvaient qu’il n’y avait pas de structure et que j’allais faire des conneries. Finalement, ça s’est très bien passé. J’ai beaucoup fonctionné avec des collectifs. Ca fait trois ans maintenant que je suis en solo.

- Tu étais en foyer et tu en parles dans tes chansons.
- Il y a plusieurs sortes de foyers. Dans beaucoup d’entre eux, on met les gamins sous médicaments, on les drogue. C’est plus facile à contrôler, 30 mômes légumés. J’ai vu la différence dans un de mes foyers privatisé. C’est le psychiatre qui venait de temps en temps au foyer qui l’a acheté. A partir de ce moment-là, c’était tout le monde sous traitement, et si tu ne prenais pas ton traitement, c’était l’injection de grosses doses de neuroleptiques. On a aussi testé des cachets sur nous qui n’étaient pas dans le commerce ! La plupart des gamins de foyers finissent toxicos. Quand tu sors du foyer, tu es en manque.

- Quand as-tu commencé à chanter ?
- J’ai commencé à rapper à 13 ans quand j’étais au foyer en 1996. En 1998, j’ai pris des cours dans unn atelier d’écriture à la Friche, un lieu animé par Narmor, un rappeur de Marseille. Il nous a fait goûte rà la scène. A partir de là, c’était le rap ou rien.

- Comment une fille des foyers s’est autant intéressée à la politique ?
- C’est un cheminement qui s’est fait naturellement. En tant qu’enfant de foyer, élevée par le système, j’ai vu l’hypocrisie du pays des droits de l’homme qui ne respecte pas ceux de l’enfant. J’ai vu que tous les éducateurs, les juges obéissaient à un système. Je voulais savoir qui était l’ennemi caché. Les flics disent : « C’est pas ma faute, c’est le système. » J’avais besoin d’avoir une réponse. Etant d’origine argentine, je me suis intéressée à ce qui s’est passé là-bas. L’Argentine est l’exemple type de la politique du Fonds Monétaire International. Elle s’est fait piller. Suite à la crise économique, beaucoup de militants argentins sont venus à Marseille raconter. Les rencontres dans les voyages m’ont aussi instruite.

- Autour de toi, il y a un collectif ?
- Il s’appelle La Rage du peuple et n’appartient à personne. C’est plus un mouvement qu’un collectif. Il y a un état d’esprit que j’essaie de propager dans ma musique : « Aie un conscience collective et ce côté spirituel de la révolution. » Ce n’est pas que politique, c’est aussi humain.
Aujourd’hui, ça fait longtemps que l’économique a pris le pas sur le politique. Nous ne croyons pas en leurs outils démocratiques. Ni au changement par le haut, mais au changement par le bas, à l’autogestion, à la prise en main citoyenne des quartiers. On essaye de trouver des alternatives multiples, des trucs simples comme faire des repas de quartier, inviter d’autres quartiers à venir…
A l’époque, on avait un lieu autogéré qui s’appelait la maison de David, dans le quartier de Noailles. On faisait des repas gratuits pour ceux qui n’avaient pas à manger, ou prix libre. Tout le voisinage venait. On mettait du son si des gens voulaient rapper… Il y avait un mélange d’âges, de cultures, un tissu social. En plus, c’était très mixte. Tu y rencontrais celui qui arrivait du bled, celui avait toujours vécu dans les montagnes, la maman muslim avec ses enfants, le cramé de base qui la haine contre tout le monde et qui découvre un lieu ouvert où il se sent chez lui, le SDF, etc. Un petit truc comme ça a changé beaucoup de choses dans la tête des gens. C’est déjà ça. Car d’habitude, on est tous en train de se refermer sur nous-mêmes.

- Vous étiez présents pendant la lutte anti-CPE [1] ?
- On a essayé d’unir les luttes. On a proposé de faire de la fac occupée par les étudiants un lieu autogéré en mettant plein de collectifs, d’unir un peu tout le monde avec les ouvriers des usines délocalisées, tous les gens en colère et d’essayer d’inventer des trucs. Mais ils étaient réticents. En face de la fac se trouvait le bâtiment de l’Office des migrations internationales, avec des sans-papiers dedans.
Malheureusement, il n’y a pas eu de jonction. Il y a un travail à faire car chacun lutte dans son coin, contre les privatisations, dans les quartiers, dans les universités, au lieu de lutter tous ensemble. J’ai l’impression que ce sont les syndicats et les partis qui essaient de cloisonner et de contrôler les luttes.

- Tu as fait des concerts de soutien ?
- Oui, j’ai fait un concert pour les prisonniers à Marseile suite aux émeutes CPE. J’ai aussi fait un concert devant la prison des Beaumettes, et u nautre contre l’inauguration de l’Inatech, où il était question de nanotechnologies, à Grenoble. Pour moi, il faut mettre l’art au service des idées, pas au service de son nombril ou de l’argent.

- La scène rap a été très récupérée par le fric ?
- Une partie, oui. Il y a deux tendances dans le rap. Il y a le hip-hop à l’ancienne sous toutes ses formes (danse, rap, DJ, etc.) avec des valeurs positives, solidaires et de gauche. A côté de ça, il y a le « rap game ». C’est un rap de droite : « J’ai une grosse chaîne en or, une belle voiture, des nanas à poil dans mes clips… » Le rap game, c’est la « petite pute du capitalisme », qui prône ses valeurs, c’est l’opposé du hip-hop, qu prône la voix des oubliés.

- J’ai l’impression que ça a pris le pas en France.
- Ca a fait rêver les jeunes Français. A Marseille, c’est différent de Paris, où il y a tout le milieu branché avec les journalistes, les productions. Il y a toute la jet-set et leurs soirées. Moi, je veux construire sans eux. Je veux surtout développer la scène et créer des alternatives au schéma classique qui est de passer par Skyrock. Je préfère m’esquinter la santé et aller dans tous les petits patelins.

- Il y a un DVD avec ton album. C’est toi qui l’as fait ?
- Je l’ai fait avec une amie qui était en foyer avec moi. Un jour, la maison de disques nous a dit que ce serait bien de faire un DVD pour l’album. Eux pensaient « Keny Arkana en studio, en concert, etc. » Mais on a fait des images de nos voyages en Argentine, au Mexique, en Afrique. On a voulu dire qu’on est plein sur la planète, et que les problèmes ne s’arrêtent pas à notre quartier. Je voulais montrer tous les frères et sœurs qui ont les mêmes aspirations au changement malgré le fait qu’on ne soit pas du même pays, qu’on n’ait pas la même langue, la même culture. Je trouve que ça donne du courage, car partout c’est en train de bouger. Le DVD a aussi un côté pédagogique. Il explique ce qu’est la mondialisation, les conséquences des privatisations…

- En voyageant, des expériences t’ont marquée ?
- Je voulais voir de mes propres yeux. Je me suis retrouvée à fond dans le zapatisme [2] et son côté universel : l’autogestion des communautés, leur système organisationnel très rotatif. Ils disent « gouverner en obéissant ». Chaque personne de la communauté passera par le rôle de gouverneur pour connaître cette position. Ils disent que pour être un bon citoyen, il faut connaître ; il y a donc plein d’alternatives éducatives dans leur système… Il y a aussi le côté spirituel qui m’a beaucoup plu. En Argentine, il y a plein de mouvements qui déchirent comme le mouvement des « piqueteros » (chômeurs qui occupent les routes), les usines occupées, les assemblées populaires. Le peuple argentin a connu les disparus et les pillages des comptes en banque. Ils ne veulent plus entendre parler des gouvernements.

[propos recueillis par le « Combat syndicaliste », mensuel des anarcho-syndicalistes de la CNT]
http://www.cnt-f.org









Notes

[1] Selon le gouvernement français, le contrat première embauche (CPE) devait faciliter l’emploi des jeunes par des conditions plus souples pour les patrons. Les organisations de gauche ont répondu que cela fragilisait le statut des jeunes travailleurs. D’où, conflit.

[2] Le mouvement zapatiste est né au Chiapas (Etat du Mexique) il y a une dizaine d’années. Il veut que les peuples indigènes puissent s’autogérer et milite pour le respect des ressources naturelles. Pour en savoir plus : Comité de solidarité avec les peuples du Chiapas en lutte http:// cspcl. ouvaton.org

Ecrit par libertad, à 22:30 dans la rubrique "Culture".



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