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Immigration choisie : immigration pourrie !

lu sur hns-info.net : "Non content d’avoir attaqué en force en 2004 le droit des étranger une première fois, Nicolas Sarkozy de Nagy-Bocsa récidive moins de 2 ans plus tard, trahissant l’échec de sa politique... Ou de certain objectifs peu avouables... Enfin, de la politique réactionnaire, néoconservatrice, néolibérale ménée en général, et en particulier vis-à-vis des étrangers par l’ensemble des gouvernements qui se sont succédé depuis la fermeture des frontières.
Car il ne faut pas s’y tromper, si le nom apposé au projet de la contre-réforme du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et Demandeurs d’Asile (CESEDA) est le nom de Nicolas Sarkozy de Nagy-Bocsa, celui-ci ne représente que la bras agissant de deux instances en parfait accord avec ces nouveaux reculs : le duo Chirac-Galouzeau de Villepin et l’Union Européenne.
Affirmer que ce projet représente une contre-réforme n’est pas une opposition purement politique, il s’agit simplement d’une conclusion de l’analyse des thèmes coocurrents (liés) au sujet des étrangers. _ Cette réforme, encore provisoire, met au centre de son raisonnement des thèmes qui ignorent totalement la volonté et les conditions faites aux étrangers. Que ces étrangers soient demandeurs d’asiles ou immigrés. Cette contre-réforme du droit des étrangers repose sur 5 thèmes : l’emploi, les ressources (le revenu), le niveau d’étude, l’« intégration républicaine » et la sécurité nationale (ou le « sécuritaire »).

L’analyse que j’en propose pourra sembler fragile dans la mesure où il ne s’agit que d’une lecture d’un projet non définitif qui n’est pas totalement clair. Je me bornerai aussi aux thèmes majeurs, et majeurement stupides, de l’emploi et de l’« intégration républicaine » car ils sont plus que scandés sur un mode incantatoire, preuve de la pensée et de la tolérance zéro... Et encore en été, parce qu’en hiver, c’est en dessous de zéro. [1]

L’emploi, l’idéologie travailliste et employiste - la boursouflure de la valeur travail

Cette contre-réforme présente l’étranger comme un danger pour l’augmentation du chômage ou au contraire, comme un outil de production. Dans ce second cas de figure, l’étranger est presque « accaparé », pris en otage ; dans le premier cas il est refoulé.

1) Les étudiants qui peuvent demander une autorisation provisoire de séjour de 6 mois non renouvelable pour chercher un emploi dans leur formation doivent avoir un niveau master (niveau maîtrise, bac + 4). Il faut donc trouver un emploi en moins de 6 mois, or on voit que le Ministre se moque de l’état du marché de l’emploi car en moyenne, les chômeurs trouvent ou retrouvent un emploi en 236 jours, soit presque 8 mois ; même si les moins de 26 ans eux trouvent en moyenne du travail en 129 jours ou 4 mois et demi environ, c’est oublier que les étrangers sont plus souvent au chômage que les Français.

2) L’obtention d’un visa long séjour est subordonné à un projet professionnel, projet professionnel qui est lui aussi conditionné par une promesse d’embauche mais aussi par l’âge - on sait qu’on n’embauche pas les « vieux » - et de l’expérience professionnelle. Donc cela signifie que si on veut changer de secteur d’activité, pour l’étranger ce n’est pas possible, c’est interdit.

Dans le premier cas, l’étranger possède 6 mois pour trouver un emploi, dans sa formation, dans le second, l’expérience professionnelle doit orienter sa recherche d’emploi et conditionne la décision de délivrer ou non un titre de séjour. Pourquoi nous parle-t-on tant de mobilité professionnelle et de polyvalence ?

3) Il y a un titre de séjour temporaire pour activité professionnelle délivré à la personne possédant un contrat de travail. Ce titre est délivré pour une durée de 18 mois et est renouvelable. Le titre de séjour comporte la mention « salarié ». En clair, cette fois le Ministère de l’Intérieur reconnaît que le Ministère de l’Emploi lui a appris qu’il existe beaucoup plus d’emploi en CDD, au moment du renouvellement du titre de séjour, si l’étranger est sans emploi, on ne lui renouvellera pas, il rentre chez lui. S’il a encore un emploi, lorsqu’il faudra renouveler le titre de séjour, ce sont des tracasseries administratives car lorsqu’on travaille, on n’a pas forcément « que ça à faire » ! L’étranger risque de recevoir le renouvellement du titre de séjour en retard, et s’il y a contrôle sur le lieu de travail, il sera jugé comme en présence irrégulière, son travail est réalisé dans une condition de précarité car il risque d’être expulsé ! Les mauvaises langues disent que c’est en fait le but recherché. On les croirait presque.

4) Il y a un titre de séjour dont la dénomination n’est pas très claire « salarié - travailleur temporaire » ou simplement « travailleur temporaire. Il est délivré à l’étranger qui « décroche » (miracle !) un emploi déclaré au service public de l’emploi (ANPE). Seul 30 % des offres d’emploi sont déclarées à l’ANPE ! L’étranger ne peut « décrocher » cette offre que si l’employeur, après la déclaration à l’ANPE, n’a trouvé personne au bout de 3 mois. Le titre de séjour dure le temps du contrat de travail, mais dans la limites de 18 mois. Le Ministère doit estimer que les nouveaux contrats de travail se limitent donc bien à 18 mois !? Si ce contrat de travail est rompu avant les 18 mois, le titre de séjour est retiré, et l’étranger rentre chez lui ! Si c’est l’employeur qui rompt le contrat de travail, l’employeur doit verser une contribution pour que l’étranger puisse rentrer chez lui ! Et si notre étranger ou étrangère est tombé amoureux d’un(e) collègue de travail ? Il faut dire aussi que si on peut embaucher un étranger seulement sur les offres que d’autres n’ont pas voulu au bout de 3 mois, cela veut dire qu’il faut d’abord essayer de donner prioritairement du travail aux Français : selon Jean-Marie Le Pen cela s’appelle la « préférence nationale ». La directrice des programmes de France Culture, Laure Adler, avait licencié le philosophe et psychanalyste Miguel Benasayag en 2004 car il avait osé affirmer : « Nicolas Sarkozy réalise le programme du Front National... » Une vue de l’esprit ? On peut voir aussi que dans ce titre de séjour en lien avec le contrat de travail rien n’est prévu concernant la protection sociale, l’assurance-chômage, l’assurance maladie ou le logement de l’étranger, l’étranger est seulement vu comme venant fournir du travail, et après terminé. C’est à ça qu’on voit le côté réactionnaire, car pour une loi qui dit vouloir réformer l’entrée et le séjour, les conditions du séjour de l’étranger travailleur ou non travailleur, on s’en moque.

Le projet de contre-reforme du CESEDA met en place ensuite deux titres de séjours qui se ressemblent sur deux points : la mention portée à ce titre est la mention de l’activité, cette activité ne pouvant être prédéfinie et l’étrangers doit prouver qu’il peut vivre seul de ses ressources, il n’est ainsi pas un « coût » pour notre généreuse collectivité.

5) Il s’agit d’abord d’un titre de séjour temporaire mentionnant l’activité que l’étranger désire exercée, cette activité étant « non soumise à autorisation » (je cite). Ce qui sous-entend qu’il existe des activités soumises à autorisations pour les étrangers. Égalité quand tu nous tiens... Ce titre de séjour a une validité de 18 mois et est renouvelable.

6) C’est ensuite un titre de séjour pour les étrangers désirant exercé une activité commerciale, industrielle ou artisanale (Code du Commerce). Ce titre mentionne donc l’activité exercée. La durée du titre de séjour est de 18 mois renouvelable.

On peut évidemment renouveler les titres de séjour des « travailleurs indépendants » car dans ce cas de figure, rien ne coûte à la communauté ! Plus sûrement, dans ces deux cas, si au bout de 18 mois est constatée un chômage ou une inactivité, le titre de séjour risque de ne pas être renouvelé. Comme si l’administration avait besoin d’une raison officielle pour son arbitraire... Dans tous les cas, comme ces deux titres de séjours quasi-identiques, s’obtiennent par des ressources autonomes pour l’étranger, une fois expulsé, le bilan comptable pour les dépenses nationales et sociales à son égard est positif : 0 euros dans tous les cas ! Le délai très court, 18 mois, fait immanquablement penser à la fameuse « incitation » que connaissent déjà les politiques de l’emploi : réduction des durées d’indemnisation de l’assurance-chômage depuis 20 ans. Ici, dans le cas des étrangers on raccourcit les délais de renouvellement des titres de séjour pour vérifier plus tôt, pour inciter à être actif sur le marché, pour « motiver » l’insertion professionnelle et la productivité.

7) Il y a un titre de séjour pour les travailleurs dits saisonniers, c’est-à-dire très précaires. Le titre de séjour comporte la mention « travailleur saisonnier ». Pour bénéficier de ce merveilleux titre de séjour, l’étranger doit résider habituellement hors de France, ce titre de séjour de travail est d’une durée maximale de 3 ans mais autorise le travail pas plus de 6 mois sur 12 mois consécutifs. Même remarque que pour le 4), on se préoccupe finalement peu des conditions d’existence pendant la période de travail : cabane, tente, nuit à la belle étoile, hôtel, ce n’est pas le problème du Ministère de l’Intérieur.

8) Il existe encore le séjour pour les travailleurs détachés. Un travailleur détaché est un(e) salarié(e) envoyé(e) par son employeur travailler dans un établissement de la même entreprise ou d’une entreprise du même groupe à l’étranger. Le titre de séjour temporaire d’activité professionnelle portera la mention « détaché interne », sa durée est de 3 ans renouvelable. Ce titre permet l’entrée en France à tout moment pour une activité salariée, la durée totale d’activité salariée ne peut pas excéder plus de 18 mois sur la période de 3 ans. Pour ceux qui ont entendu parler des accords de l’OMC dits AGCS (le mode 4 précisément) ou de la directive Bolkestein, c’est ça ! Avec ou sans directive ! Car à quelle législation les travailleurs détachés sont-ils affiliés ? En théorie à la France, mais qui ira contrôler puisque le titre de séjour indique bien que le salarié est détaché d’une entreprise tartempion, donc on renverra à la législation du « pays d’origine », comme le disait la directive Bolkestein... Un flou, un bel avenir de précarité, comment porter plainte aux prud’hommes si la direction de l’entreprise de détachement ne respecte pas la légalité, comment prévenir l’étranger au bout de 3 ou 5 ans après la plainte tant les délais de justice sont longs si celui-ci est retourné au pays ?... Mystère.

9) Il existe enfin, la grande nouveauté, le titre de séjour dit « capacités et talents » - défense de rire. Il y a un risque de traitement à deux vitesses des étrangers avec ce titre de séjour. Il est valable 3 ans et renouvelable. Il est délivré à « l’étranger susceptible de participer, du fait de ses capacités et de ses talents, de façon significative et durable au développement de l’économie française ou au rayonnement de la France dans le monde ou au développement du pays dont il a la nationalité ». C’est la liberté absolue ! On comprend mieux ce que veux dire « immigration choisie » maintenant car : « nul ne peut obtenir la carte s’il n’a été choisi par l’autorité administrative compétente [préfet ?] dans des conditions définies par décret en Conseil d’État [Immigration choisie ne veut pas dire choisie par l’immigré !]. L’autorité administrative compétente prend notamment en compte le contenu et l’intérêt pour la France et pour le pays dont il a la nationalité du projet [professionnel] de l’étranger. Ce titre autorise son titulaire l’exercice toute activité professionnelle de son choix [ou le cas échéant d’effectuer des études] ». L’étranger titulaire de la carte « capacités et talents » - re-défense de rire- peut demander au bout de 6 mois de résidence en France à bénéficier de son droit à être rejoint au titre du regroupement familial par son conjoint et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans. Mais pas les plus âgés, le droit de la famille on en parle !

Tout semble prévu pour encadrer au mieux et surtout au plus court la présence des étrangers. On peut se demander si avec ces délais raccourcis et les contrôles qui en découlent, le Ministère n’opèrent pas une mise en place d’un listing serré, réactif. Ainsi, la connaissance facilitera l’expulsion. Le tableau page suivante synthétise les titres de séjour ouvrant droit au travail.

J’avais affirmé en introduction qu’il ne fallait pas s’arrêter à des considérations strictement nationales, mais qu’il fallait aussi tenir compte de la dimension européenne (notamment depuis Schengen). Voici l’illustration de la transposition française des directives européennes :

* la directive 2003/109 du 25 novembre 2003 relative au « statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée », explique que « le critère principal pour l’acquisition du statut de résident de longue durée devrait être la durée de résidence sur le territoire d’un État membre. Cette résidence devrait avoir été légale et ininterrompue pour témoigner de l’ancrage de la personne dans le pays. Afin d’acquérir le statut de résident de longue durée, le ressortissant de pays tiers devrait prouver qu’il dispose de ressources suffisantes et d’une assurance maladie, pour éviter de devenir une charge pour l’État membre ».

Bref, les étrangers sont un coût, il coûtent chers, on n’en veut pas, mais s’il peuvent faire briller la France on en veut bien !  [2]

L’« intégration républicaine » ou le racisme néocolonialiste législatif poli

Si la contre-réforme du CESEDA dessine l’étranger comme un risque pour les « coûts » sociaux de la nation en évitant tout « étranger chômeur », la contre-réforme présente aussi l’étranger comme un danger fantasmé pour la « cohésion sociale » de la Nation à travers l’« intégration républicaine ». Même si personne n’a pas encore réussi à définir ce qu’est l’intégration en dehors du domaine restrictif et spécialisé des sciences sociales (sociologie, anthropologie), le domaine politique, sans le dire explicitement, utilise des critères de mesure de l’« intégration républicaine » à géométrie variable. Malgré la faiblesse de cette thématique, l’obtention de certains titres de séjour lui sont pourtant subordonnée. Il n’est pas possible ici d’être totalement exhaustif, sauf à être pénible, tant les titres de séjour et leurs conditions d’attribution se subordonnent mutuellement les uns aux autres. Néanmoins, certaines évolutions méritent d’être pointées.

10) La carte de résident, qui reste valable pour 10 ans, s’obtient toujours pour un étranger au bout de 5 ans de résidence en France. Néanmoins, pour les conjoint(e)s et enfants qui obtiennent le titre de séjour « regroupement familial », il leur faut à présent résider depuis 3 ans au lieu de 2. La résidence doit être ininterrompue sous peine de retrait, ce qu’avait déjà instituée la précédente contre-réforme sarkozyenne. Pour les parents d’un enfant né en France, l’obtention de cette carte de résident se subordonne à la possession d’une carte de « séjour temporaire » pendant 3 ans, au lieu de 2 actuellement. Dans tous les cas, la présente réforme du CESEDA permet l’obtention de la carte de résident par l’« intégration républicaine » ! Dans une certaine mesure, grâce aux lois, on aura sous le même toit des gens de la même famille qui ne dépendront pas des même règles plus longtemps qu’avant (3 ans au lieu de 2 aussi).

11) Le must de la régression s’abat sur le titre de séjour dit « vie privée et familiale ». Passer toutes les catégories (une dizaine) qui voient leur droit à ce titre reculer relève de l’archéologie tant il y a de couches ! Mais principalement à retenir : le droit à ce titre de séjour pour l’état de santé disparaît et devient un titre provisoire de séjour, il faut quasiment être à l’article de la mort pour pouvoir, et de manière temporaire, se faire soigner (durée du séjour = durée des soins ! - après les CDD, la France invente les soignés à durée déterminée) ; et la disparition de la possibilité de régularisation des sans papiers en supprimant la possibilité d’obtenir un titre de séjour si on peut faire la preuve d’une présence ininterrompue depuis 10 ans en France. Les sans-papiers restent sans-papiers ! Il faut soit utiliser les pouvoirs discrétionnaires de « M’sieur l’Préfet » ou une régularisations exceptionnelle. À moins que les grévistes de la faim ne resurgissent. Les paris sont ouverts.

Dans ces deux cas, et dans d’autres (« visiteur » par exemple), la notion même d’« intégration républicaine » relève d’un vaste fourre-tout, un fumeux et vide intersidéral bric-à-brac « socio-administrativo-linguistico-comportementalo-économique » uniquement jugé par les autorités administratives. Ce catalogue Ikéa de l’intégration comprend pêle-mêle à la volée et dans le désordre :

* un niveau de ressources au moins égal au SMIC - à l’heure où 6,6 M de personnes vivent, pardon, survivent et dépendent des minima sociaux ;

* d’un logement bien situé (sans rire « la localisation » dit le projet) et dans lequel la maisonnée ne doit pas vivre en surpeuplement - à l’heure où les taudis réapparaissent et où la crise du logement pousse des salariés à vivre en foyer ou dans leur bagnole ;

* la maîtrise linguistique - alors que cela fait 20 ans que 600 mots seulement sont utilisés par les élèves de CAP/BEP ;

* le comportement - quand on voit certains de nos agriculteurs, on rit un peu... Sans parler des supporters de ballon rond bien de chez nous ;

* et, c’est le plus drôle, « de l’adhésion personnelle aux valeurs de la république », critère évidemment tout ce qu’il y de plus objectif à déterminer, cela va de soi !

Ce fourre-tout, qu’on croirerait presque mis en place pour justifier les refus de titre de séjour (mais ne soyons pas mauvaise langue) englobe et subordonne tous les titres de séjour qui n’ont pas à voir directement avec le travail-emploi.

Pour se débarrasser des étrangers soupçonnés de « piquer le boulot des gaulois », on multiplie les cartes de séjours en dualité avec le travail, et on vérifie le travail très régulièrement où on limite l’activité. Pour les étrangers qui n’ont pas vocation à travailler (les très jeunes, les très vieux - et les épouses ? - les accidentés du travail, etc.) on multiplie les indices objectifs ou quantifiables (revenu, logement, temps de résidence, durée du mariage, maintien de la vie commune) et subjectifs dont l’« intégration républicaine » est la pierre de touche des critères d’exclusion au séjour, exclusion qui ne pourrait pas être justifiée sur un simple refus non motivé. Il fallait bien inventer quelque chose pour sauver au moins les apparences.

Les effets induits ainsi au niveau de la famille, ou simplement des couples, sont difficilement mesurables à cette heure, mais ils auront certainement des effets. Sur les enfants, leur scolarité, comme sur les adultes. Juste un exemple, quelle image les étrangers vont-ils avoir du pays des droits de l’Homme ?

Un second tableau, à la page suivante, essaye de synthétiser les titres de séjour subordonnés à l’« intégration républicaine ».

Comme précédemment, il serait naïf de croire que Sarkozy de Nagy-Bocsa seul, ou aidé par l’ensemble du gouvernement ont eu cette trouvaille. L’Union Européenne nous livre encore quelques pistes, qui font voir que les régression en cours sont, peut-être, comme les titres de séjour accordés aux étrangers, simplement temporaires :

* la directive 2003/86 du 22 septembre 2003 « relative au droit au regroupement familial » dit explicitement que « le regroupement familial devrait viser, en tout état de cause, les membres de la famille nucléaire, c’est-à-dire le conjoint et les enfants mineurs », bref, le renouveau de l’idéologie colonialiste, la culture des autres et de la famille nombreuse « pas chez nous ! » alors que les grande famille catho comme les Gaymard, c’est 6, 7, 8 ou 10 enfants... Mais bon, ils sont français ! Plus loin, ladite directive insiste lourdement sur « la possibilité de limiter le droit de regroupement familial pour les enfants de plus de 12 ans dont la résidence initiale n’est pas chez le regroupant, vise à tenir compte de la faculté d’intégration des enfants dès le plus jeune âge et garantit qu’ils acquièrent l’éducation et les connaissances linguistiques nécessaires à l’école ».  [3]

Si l’ensemble de cette contre-réforme est plus qu’inquiétante et surtout inhumaine, il ne faut pas ignorer pour autant qu’elle est dans un rapport dialectique avec l’état social de l’opinion (fabriquée). Il n’empêche qu’avec un peu de recul, il faut reprendre la vision qui anime la politique migratoire depuis 1976, date de la fermeture officielle des frontières. Ce simple regard, même pas un analyse, un simple regard rétrospectif nous montre pourtant un vaste gâchis : humain, d’abord, politique ensuite, sociale enfin. L’échec politique est cinglant :

* 1974, choc pétrolier, fermeture officieuse des frontières, c’est-à- dire ralentissement des entrées saisonnières et permanentes de main-d’œuvre ;

* et toujours 1974, première grève de la fin de travailleurs algériens, les premiers sans-papiers, les premiers « ni-ni » (régularisables, explusables, employables), bloqués par la fermeture et l’arrêt de l’embauche légale des migrants ;

* 1976, fermeture des frontières officielles, arrêt de l’immigration de main-d’œuvre saisonnière et permanente en raison de la montée du chômage (prétexte ?), en contrepartie début de la mise en place des politiques d’intégration et reconnaissance au droit au regroupement familial (pendant quelques années à l’ANPE formation, et autres) ;

* fin 70 début 80, un chômage massif s’installe suite à la restructuration de l’appareil productif (du fordisme on passe au toyotisme, du capitalisme industriel qui a besoin de beaucoup de bras on passe au capitalisme cognitif qui n’a plus autant besoin de bras), licenciement massif des ouvriers dont une majeure partie étaient les soit-disant immigrés à intégrer ; apparition des « nouveaux pauvres », les politiques d’insertion s’installent : aux immigrés l’intégration, aux « indigènes » l’insertion - l’insertion devient aux français de souche (ou pas) ce que l’intégration est aux étrangers ; le score du Front National augmente lentement mais sûrement ;

* émeutes à Vénissieux en 1981, mise en place des premiers sous-contrats de travail d’insertion au début des années 80 (SIVP, TUC, stages jeunes 16-18 ans, 18-25 ans) ;

* 1984, disparition définitive de la dualité des titres de séjour et des titres de travail pour les étrangers (loi Deferre) ; 2 M de chômeurs que seul la création de nouvelles catégorie ANPE non comptabilisées permet de maintenir sous la barre des 2 M, pas pour longtemps ;

* les lois concernant les étrangers se font plus dures (limitation du travail pour les étrangers étudiants), les frontières au moins dans les discours doivent être étanches ; création de contrats précaires pour « lutter contre le chômage » et la précarité se développe ; les notions d’intégration et d’insertion deviennent des politiques et des thèmes récurrents dans les discours politiques ; le Front National gagne des Mairies, les étrangers sont ciblés, les chômeurs sont rendus responsables de leur chômage (1986, loi Séguin et inversion de la charge de la preuve, le chômeur doit prouver qu’il est bien à la recherche un emploi) ;

* 1992, première dégressivité de l’assurance-chômage et naissance des nouveaux « nouveaux pauvres » sans travail pris en charge par le RMI (depuis 1988) ;

* 1993 diminution des protections des étrangers face au expulsion, création des zones d’attente à l’arrivée (gare, aéroport pas un Ministre socialiste) ;

* 1996, mouvement des chômeurs ;

* 1997, mouvement des sans-papiers ;

* 1998, loi Aubry de lutte contre les « exclusions » - toutes les mesures précédentes n’ont donc servi à rien ; loi Chevènement, multiplication des titres se séjour de 1 an pour les étrangers « utiles pour la France » ; abstention massive aux élections depuis 15 ans, le Front National est partie prenante du paysage politique français pendant que les discours politiques avancent que faire barrage au Front National passe par une « surveillance » des étrangers et de leur descendants (surtout « coloniaux »), « paradoxalement » le score du Front National augmente, comme on le verra aux prochaines élections présidentielles ;

* 2001, contractualisation de l’assurance-chômage (le PARE de Martine Delors-Aubry) qui devait former plus facilement les chômeurs pour qu’ils retrouvent plus facilement un emploi ;

* 2002, Front National au deuxième tour des élections, gauche laminée (de façon justifiée ?) après une campagne axée sur l’insécurité des personnes mais pas sociale, 2,5 M de chômeurs officiels seulement grâce à d’autres catégories ANPE ajoutées (en 1995) rarement communiquées, 6 M de précaires, 2 M d’intérimaires, 1 M de RMIstes, 6 M de bénéficiaires de minima sociaux, environ 300 à 400 mille sans-papiers en France : la précarité est devenue structurelle, c’est un mode de vie pour certains ;

* 2004 entrée en vigueur des lois Sarkozy (asile et immigration) relatives aux étrangers afin d’accélérer les délais de traitement des dossiers, mettre fin aux situations des sans-papiers et à la double-peine en tentant de fermer plus les frontières et contrôler les entrées (longs séjours et naturalisations soumises à la contractualisation, le « contrat d’intégration ») ; rétro-activité du PARE 2 et création des « chômeurs recalculés », application de la réforme du RMI et opérationnalité du RMA, les pauvres doivent travailler en échange de leur allocation ;

* 2005, multiplication des expulsions (d’étrangers) qui deviennent des objectifs quantifiés, ruptures scolaires et enfermement des enfants en centre de rétention avec leurs parents, réforme du contrôle des chômeurs et aggravation de la contrainte, en novembre révolte infra-politique des quartiers périphériques et populaires où réside un grand nombre de personnes issues de l’immigration vivant du chômage ou de l’emploi précaire après quasiment un quart de siècle de discours d’« intégration » et d’insertion ;

* 2006, contrat précaire pour les jeunes (CPE) au nom de la lutte contre le chômage ajoutant une énième mesure en 25 ans, projet de loi Sarkozy visant à changer pour la deuxième fois en moins de 3 ans les politiques migratoires...

La régression continue. L’échec patent aussi.

Donc la fermeture des frontières, la contractualisation de la naturalisation et l’encadrement renforcé des comportement sociaux des étrangers (l’« intégration ») et leur sélection nous a conduit à cette échec, échec parallèle à celui de la lutte contre le chômage qui par la contractualisation du chômage et la création de mesures spécifiques à certaines catégories n’ayant réussi qu’à développer la précarité à côté du chômage, c’est donc que soit cet effet est voulu (perspective paranoïaque, théorie du complot), soit que ces politiques ne sont pas les bonnes (perspective politique).

Les deux perspectives ne sont d’ailleurs pas mutuellement exclusives. Mais, dans les deux cas, il faut inverser les politiques régissant la « question sociale ». À côté de l’abrogation des contrats précaires et du contrôle des chômeurs remplacés par une politique du revenu, il faut ouvrir les frontières, régulariser les étrangers (donner des « papiers »), libérer la mobilité géographique et la sédentarisation (droit de circulation et droit d’installation).

François Menduni
fmenduni@wanadoo.fr

Analyse CESEDA mars 2006 (pdf)
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Texte + Tableaux
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Tableau 1
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Tableau 2

[1] Nota : le texte qui suit ne comprend pas les tableaux : ils sont en fichiers indépendants en fin de publication, mais aussi le dossier complet en fichier joint au format pdf)

[2] Voir en fin de texte le fichier Tableau 1

[3] Voir en fin de texte le fichier Tableau 2


Source/auteur : http://www.pag69.org/
Mis en ligne le dimanche 3 septembre 2006, par Ludo 









Ecrit par patrick83, à 18:00 dans la rubrique "Actualité".



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