L'En Dehors

L’air de la montagne, tout comme les pluies estivales discontinues, nous ont gardés plus frais que nous l’aurions été dans le sud plus humide. Un ruisseau sinueux entourait le site, nous offrant de nombreuses occasions de faire trempette et de nous baigner quotidiennement facilement. Les pieds nus étaient à l’aise dans les prairies vertes et les chemins boueux, et le terrain plat facilitait les allers et venues sur ce site national forestier localement connu. Une cuisine commune avait été montée à l’entrée du camp où deux volontaires y cuisinaient deux fois par jour les repas pour plus de 100 personnes, GRATUITEMENT ! Un ‘espace info’ avait été installé où le magazine Green Anarchy et la distro «Black and Green » ainsi que plusieurs autres distros venus de partout dans le pays offraient la possibilité de lire des infos sur le savoir-faire primitif, sur la théorie et sur la résistance anti-civilisation.

De nombreux ateliers organisaient de multiples activités, à la fois pratiques et théoriques. Un espace spécifique appelé « Empathy Camp »(3) dont la priorité était le soin et le soutien émotionnel avait été mis en place. Un espace tannage offrait, tout au long de la semaine, du matériel et des conseils aux nombreuses personnes qui se chargeaient du tannage de la peau d’un cerf, activité qui s’étalait sur plusieurs jours. Les autres observaient le projet de tannage d’une peau d’ours et d’autres encore dépouillaient et commençaient à tanner la fourrure de petits mammifères qui avaient été ramenés après avoir été ramassés, trouvés morts sur la route.

Les ateliers permettaient l’étude sous tous ses aspects de techniques allant de la fabrication de paniers avec de l’écorce de sapin blanc récoltée sur le site, d’armes et de pièges primitifs, à l’allumage d’un feu par friction, en passant par la construction de cabanes à l’aide de débris, de flûtes en bambou, de sarbacanes et d’ustensiles en bambou, la confection de cordage, le feutrage de la laine, la permaculture ou la production d’hydromel et de végétaux fermentés. Les sujets de discussions incluaient aussi bien la santé mentale fondamentale, la spiritualité, les dynamiques des genres dans les communautés vivant à l’état sauvage, ‘les relations fondamentales’, ‘l’éducation primitive des enfants’ et la lutte indigène contre la Civilisation que le changement climatique et la théorie du pic de Hubbert. La discussion « au-delà de l’activisme » , au cours de laquelle furent examinées aussi bien les définitions et les motivations de l’activisme que les pièges et les bénéfices de la participation aux mouvements et campagnes, fut de loin la plus longue de toutes. Une autre discussion au cours de laquelle on s’est penché sur la résistance anti-civilisation, a traité la question de la confrontation physique contre la méga-machine. Ce qui pour certains a semblé être au début une discussion sur les tactiques et les stratégies élaborées dans le but d’affaiblir l’infrastructure, fut perçu par d’autres comme une approche valant la peine d’être débattue. L’examen des questions de l’effectivité et des mobiles de la mise en place ‘d’un effondrement assisté’ se succédait tour à tour avec (théoriquement, bien sûr) le partage d’infos sur les priorités et les défis tactiques et logistiques.

La série d'ateliers s’étalant sur cinq jours traitant de ‘l’adaptation à la vie sauvage’ fut l'une de celles qui fut le plus fréquentée et une des plus appréciée. Animée par des gens de l’école de plein air Teaching Drum du Wisconsin, elle s’est concentrée sur le développement de l’attention et les facultés de traque dans les bois, très clairement utiles dans bon nombre de situations. Débutant avec des exercices ciblés sur l’adaptation et l’éveil de l’attention, les ateliers ont évolué et recentré leurs activités sur la filature, des exercices d’équilibre et les yeux bandés, la furtivité et le camouflage et finalement la traque. Les ateliers étant indépendants les unes des autres, les gens avaient la possibilité de les rejoindre quand ils le souhaitaient. Les gens étaient venus à la fois de près et de loin jusqu’au site de Feral Visions. De l’underground urbain de l’ouest de Philadelphie à la communauté basée en forêt de Californie, environ cent cinquante personnes ont visité le site de FV au cours de la semaine. Les règles fixées par le Service Forestier exigeait d’un groupe comprenant plus de 75 personnes la signature d’un permis par lequel était fixé un certain nombre de règles concernant l’utilisation du domaine, ainsi tout au long de la semaine, alors que le nombre de personnes présentes augmentait, les « Freddies » (en référence aux « choses abominables qu’ils font subir à la forêt ») se sont fait de plus en plus présents, marchant aux alentours du site et même lisant les programmes des ateliers. La plupart des participants les ont ignorés mais ils ont finalement levé les menaces d’éviction, incitant une personne à signer un permis. Beaucoup ont cru que c'était un choix naïf et qu'on aurait pu maintenir les autorités à distance avec en fait quelques renforts. Lorsqu’un agent pénétra dans une zone délimitée et signalée dans laquelle un chien agressif était attaché, il finit par se faire mordre. Le chien fut emmené en ville pour que ses vaccins soient vérifiés, mais retrouva son compagnon le jour suivant. Ils ne sont pas revenus sur le site après ça.

Le rassemblement de Feral Visions de l’an prochain sera accueilli par une équipe du sud de l’Arizona et se déroulera vraisemblablement dans la partie nord de cet état. Les détails seront publiés sur le site Internet de Feral Visions lorsque l’échéance se fera plus proche. La liste de diffusion noir et verte est un bon moyen de se tenir au courant des projets du groupe FV lui-même ainsi que de ceux élaborés dans le cadre plus large du réseau Green Anarchy.

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Traduction par Anaïs du texte paru en anglais dans Green anarchy #21 automne-hiver 2005-2006

(1) NdT : groupement « Visions Sauvages »

(2) NdT : Racines Sauvages

(3) NdT : le camp d’empathie