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Une notion très vaste, on aurait tendance à croire, en étant simpliste, que ce sont les secondes, les heures, les journées qui font les mois pour finir sur l’année.
Maintenant dans la vie quotidienne on ne se rend même pas compte qu’il passe, en citant par exemple "c’est déjà mercredi" ou "ce week-end est vite passé". Ça arrive de le dire après une semaine bien chargée à tel point qu’elle se déroule à une vitesse fulgurante. Le tout étant répétitif, fait que les mois s’enchaînent jusqu’à la fin de l’année. Et là, on se retourne en se disant en patois du sud-ouest "non di diou" je ne l’ai pas vue passer.
Bien sûr que dans les moments difficiles ou contraignants de la vie quotidienne, par exemple, dans les files d’attente des administrations pour avoir un document, on le regarde, le temps, passer désagréablement. Il y a aussi les dates d’anniversaires qui nous rappellent l’âge qui passe inexorablement au fur et à mesure. Mais dans l’ensemble on le vit tout simplement !
Dans l’autarcie carcérale, ce n’est plus la même chose. Une impression assez bizarre, comme si l’horloge s’était arrêtée, pas que les aiguilles ne bougent plus, mais plutôt font du sur place. On a presque envie de lui dire "Avance !". Les minutes paraissent des heures, qui paraissent des journées et ainsi de suite. Le plus long moment de la semaine est sans aucun doute le week-end : ces deux jours sont à eux seuls une éternité. On a beau essayer de se convaincre que ce n’est pas possible, malheureusement c’est le cas, même en le vivant on a du mal à le croire. Parfois on essaye de le prendre, un peu comme un train en marche, en regardant les informations sur France3, deux fois par jour, pour marquer une coupure dans le temps de la journée. Sinon, le plus appréciable, c’est la radio qui rend la journée beaucoup plus "humaine".
Mais quand on n’a ni l’un, ni l’autre, (c’est un moment où chaque détenu est passé à court ou long terme, question de finances), c’est le pire ! Là, on a le sentiment d’être complètement déconnecté de la réalité, de vivre dans un autre monde (ce qui est le cas) si je puis dire (comme si on était un martien). C’est à cet instant qu’il se rappelle à nous en nous disant "Je suis là, tu vas me regarder passer seconde par seconde", cela est effrayant.
Même si on a la télé et que l’on ne fait rien de ses journées, c’est la même chose, peut être pire car on finit par devenir un "zombi" : télé, manger, dormir, avec un grand trou noir entre chaque, ça fait réfléchir. Il n’y a pas trente six moyens d’y échapper, si ce n’est de s’occuper l’esprit en lisant, écrivant, dessinant... etc. En fait, toutes les activités sont les bienvenues, on les absorbe agréablement. Au départ, on croit que c’est pour s’occuper, mais au bout de quelques mois on comprend que c’est uniquement pour l’oublier. Car il est toujours là, l’inoubliable sablier.
Pour conclure, on pourrait dire : il suffit peut être de prendre un rythme, des habitudes quotidiennes qui font qu’on l’oublie, comme si c’était normal, mais je pense que c’est cela qui fait le plus peur, en effet, se résigner ! Car il ne le faut pas, pour que l’on puisse continuer à se dire : "j’existe".
Domi, taulard.
http://cnt-ait.info/article.php3?id_article=1438
le Comité d'Aide et de Soutien aux Prisonniers se réunit à Toulouse le samedi après midi de 17h à 19H au 7 rue St Rémésy 31000 TOULOUSE (05 61 52 86 48)