L'En Dehors

Je vous entends et je vous emmerde

Manifestations de protestation de grande ampleur avant que l’Assemblée nationale ne ratifie comme prévu la loi scélérate qui permettra de fournir aux entreprises une main-d’œuvre* jeune, docile et bon marché éjectable sans motifs ni indemnités au terme de deux ans d’exploitation rigoureuse.

Comme naguère son compère Raffarin, Villepin comprend l’émotion que suscite l’infamie de cette nouvelle disposition qui rappelle aux capitalistes l’âge d’or des gosses descendant dans la mine pour un verre d’eau et une bouchée de pain ou les petites blanchisseuses qu’on sautait à volonté sous la menace de les priver de linge à laver, il comprend, mais comme Raffarin, il passe outre, ainsi que la clique chiraquienne le fait depuis bientôt quatre ans, dans l’irrespect le plus total de la volonté populaire et dans la plus obséquieuse soumission au pouvoir économique.

Je vous emmerde ! est sans doute une expression trop vulgaire dans la bouche du petit-bourgeois Villepin qui prend habituellement sa lourdingue prose verbeuse pour un aquilon poétique, mais nous, on va chercher les mots à la source, on pénètre directement dans sa matière grise et, là, ça ne sent franchement pas bon.

*on a dit, écrit et répété qu’aucune entreprise n’employait du personnel pour la beauté du geste, donc que les CNE et CPE ne créent pas d’embauches, ils les redistribuent au seul bénéfice de l’employeur (certains « naïfs » de la presse économique se demandent pourquoi l’intérim, jadis prospère, hésite aujourd’hui entre recul et stagnation).

Les affaires sont les affaires

Parmi les bagages emmenés par Chirac en Arabie saoudite, on remarquait Parisette Medef à son voile très couleur locale, quoique les accords protocolaires conclus entre le train élyséen et la caravane saoudienne l’autorisassent à n’en rien faire, donc à se montrer fièrement tête nue et en cheveux (pas dans la rue quand même, faut pas pousser).

De deux choses l’une : soit Parisette est vraiment spontanément et joyeusement soumise à l’ordre dominant, soit sa bonne volonté témoigne qu’il y a un fameux paquet de contrats à signer avec des princes qui apprécient qu’une femme, même puissante, reste à sa place, à l’échelon du dessous.

La course en tête

102 nouveaux milliardaires en dollars dans le monde depuis 1 an, voilà de quoi rassurer les libéraux qui, à les lire, sont toujours persuadés de vivre dans une économie collectiviste de type stalinien.

Dans la Corée du Nord européenne, la France « qui décline », Bernard Arnault (LVMH) se hisse à la 7eme place du classement grâce à la fanfreluche et au pinard à bulles et Liliane Bettencourt (L’Oréal) est la femme la plus riche du monde grâce à l’onguent qui déride et à la crème qui lave. Tout le monde ne peut pas être aussi inventif que le prix d’excellence Bill Gates ou rusé comme les créateurs de Google qui font des fortunes avec du virtuel et trois fois rien de personnel, mais bravo quand même !

Avec le renfort des CNE, CPE et autre travail de nuit des mineurs, on espère que Bernard et Liliane feront mieux l’année prochaine, et surtout que les Bouygues, Decaux, Pinault et Bolloré dépasseront les 10 milliards.

Un crime un peu raciste, mais pas trop

Chahib Zehaf, un Français d’origine algérienne d’une quarantaine d’années* a été abattu, et son cousin Nabyl blessé, au sortir d’un bar de la banlieue lyonnnaise à la fin de la retransmission d’un énième match de foot par un autre consommateur, un petit Blanc un peu bourré et tout à fait armé.

Quoique tout laisse à penser à un meurtre dû au racisme ordinaire –celui-là même dont l’agresseur n’a pas forcément une conscience nette-, les pouvoirs publics comme les assoces spécialisées ne semblent pas pressés de monter au créneau. Parce que le tueur n’a pas réclamé de fric ou bien parce que Chahib, pas assez jeune, pas assez innocent, trop Arabe, n’avait pas le profil de la victime idéale ?

*selon les sources, il aurait eu 40 ou 42 ans, son prénom s’écrirait Chaib, Chaïb ou Chahib.

Mathias Delfe

Nota : chapeau à ceux qui ont compris ce papier recomposé en rébus par on ne sait quel bogue informatique !