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Lu sur : Indymedia.CH « LOGEMENT - Le Municipal vient de refuser l'urgence pour une motion de soutien aux plus anciens squatters de Genève. Ceux-ci planchent sur un projet d'initiative.
Leur installation a beau remonter à seize ans: les habitants de Rhino, le plus ancien squat de Genève, vivent avec appréhension un compte à rebours qui pourrait bien déboucher cette fois sur une imminente évacuation.
Toutes les négociations avec les propriétaires des deux immeubles du boulevard des Philosophes et de celui de la Tour ayant échoué, la bataille s'est portée sur le front juridique.
Mais les démarches en cours arrivent à bout touchant et risquent fort de voir les squatters déboutés. Ceux-ci se préparent donc à mener le combat sur le front politique, planchant sur un projet d'initiative cantonale visant à déclarer d'intérêt public les deux bâtiments. Une autre bataille politique vient d'être mise en échec au Conseil Municipal. Craignant une prochaine évacuation, la socialiste Virginie Keller Lopez a tenté, mardi dernier, de faire voter l'urgence sur une motion de soutien aux squatters. Ce texte demande au Conseil administratif de jouer les intermédiaires en vue d'un rachat des deux immeubles, ou à tout le moins d'entreprendre des démarches pour reloger les 66 habitants (dont dix enfants) de Rhino. C'est pour deux petites voix que l'urgence a été refusée, trop d'élus de l'Alternative s'étant attardés à la buvette...
Le bref débat préalable n'en a pas moins permis d'identifier les fronts, la gauche appelant la Ville à ses responsabilités face à cette septantaine de personnes qui risquent de se retrouver à la rue et la droite campant sur des positions strictement légalistes: «Pour nous, l'urgence consiste à rétablir une situation de droit à Rhino», a tonné la démocrate-chrétienne Alexandra Rys. Une intransigeance dont s'indigne Virginie Keller-Lopez: «On ne peut nier une réalité qui a pris vie depuis seize ans. D'autant moins que Rhino a mené une lutte exemplaire contre la spéculation. Si le nouveau projet immobilier table sur des logements subventionnés plutôt que sur des appartements de luxe, c'est bien grâce à Rhino.»
Les habitants de Rhino sont eux aussi choqués par ce vote. «Nous sommes surpris de constater que la perspective de voir 66 personnes mises à la rue ne suscite pas plus d'émotion, lance Maurice Pier, l'un des vétérans du 12 boulevard de la Tour. Pour le Municipal, des squatters ne sont visiblement pas des êtres humains. C'est comme si le politique se substituait à la justice pour nous déclarer illégaux. Alors que, depuis huit ans, nous avons vainement tenté toutes les démarches possibles et imaginables pour trouver une solution avec les propriétaires et sortir de l'illégalité».
RECOURS EN CASCADE
Reste que, même si l'émotion est vive, une évacuation imminente n'est qu'une possibilité parmi différents scénarios. Rhino et l'Asloca ont certes perdu leur recours contre le projet de transformation des deux immeubles. Mais cette décision fait l'objet d'un autre recours auprès du Tribunal administratif (TA). Celui-ci est à la fois saisi par les propriétaires d'une demande de levée de l'effet suspensif, ainsi que d'une requête en irrecevabilité du recours, explique Carlo Sommaruga, l'avocat de l'Asloca et de Rhino. Si l'effet suspensif est levé avant un jugement sur le fond, le procureur général hésitera probablement à faire évacuer les habitants, estime MeSommaruga. « Par contre, si le recours est jugé irrecevable ou rejeté, le risque d'une évacuation est bien réel. »
Resteraient alors deux voies juridiques aux habitants : un recours au Tribunal fédéral, avec de très faibles chances de succès selon l'avocat, ou une demande de procédure d'évacuation prononcée en bonne et due forme par le Tribunal de première instance, qui pourrait retarder l'opération.
Mais on en est point encore là. Pour l'instant, c'est sur le front politique que les habitants de Rhino préparent la parade. Actuellement à l'étude au sein de la Chancellerie, leur projet d'initiative, s'il aboutit, n'offre évidemment aucune protection dans l'immédiat contre une éventuelle évacuation. Mais l'objectif des initiants à plus long terme, s'ils sont suivis par le peuple, est de pouvoir se réapproprier tout ou partie des deux immeubles après expropriation par l'Etat au nom de l'intérêt public.
ASSOCIATION ILLÉGALE ?
Dans l'immédiat, c'est toutefois une autre menace qui pèse sur Rhino: l'association risque d'être dissoute. Bénédict Fontanet, l'avocat des propriétaires (injoignable hier), a en effet introduit auprès du Tribunal de première instance une action visant à proclamer illégale l'association, estimant qu'elle viole le droit public.
Le juge Michel, qui instruit l'affaire, a dores et déjà statué sur les mesures provisionnelles, mais refuse de nous communiquer son verdict avant que les parties n'en aient connaissance. Si ces mesures sont accordées, Rhino se verra bloquer l'accès à ses comptes. Mais plus que cette éventuelle mesure, c'est le fond de la décision que devra prendre le juge qui inquiète Maurice Pier: « L'argumentaire de MeFontanet consiste à dire que nous poursuivons, derrière nos buts affichés, un but caché contraire à la loi. Si la justice lui donne raison, cela pourrait créer un dangereux précédent pour d'autres associations. On pourrait tout aussi bien incriminer, par exemple, toutes celles soutenant les sans-papiers. »
Didier Estoppey pour le courrier