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L'En Dehors


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Rennes: Mobilisation étudiante
LE MARDI 7 MARS, malgré la pluie battante et le vent, plus de 20 000 personnes ont défilé dans les rues de Rennes à l'appel des syndicats d'étudiants et de salariés. La manifestation fut ouverte par la banderole intersyndicale, suivie immédiatement par des milliers d'étudiants et de lycéens d'où émanait une forte combativité. Suivaient ensuite les cortèges syndicaux peut-être plus revendicatifs qu'à l'accoutumée avec de forts bataillons d'hospitaliers et de personnel d'EDF-GDF. Le collectif des étudiants en lutte appelait à une assemblée générale interprofessionnelle en fin de manif, mais sans que cela ait été organisé au préalable. À la fin de la manifestation, plus de 2000 étudiants et lycéens suivis par quelques salariés, et sans leurs syndicats, investissaient la gare. Les voies ont été occupées pendant 2 heures environ, cela malheureusement avec une certaine dose d'improvisation ce qui empêcha la tenue de l'AG. À 15 h 15, les flics intervenaient à grands coups de tonfas et de lacrymos et dégageaient la gare et ses abords, un lycéen fut interpellé et conduit à l'hôtel de police, à la porte duquel plus de 400 manifestants attendaient sa libération. Il fut finalement relâché en fin d'après midi avec une convocation à comparaître pour « troubles à l'ordre public ».


Le jeudi 9 mars, une nouvelle manifestation a eu lieu dans Rennes, suivie d'une « casserolas » en soirée. Quelques actions isolées commises vraisemblablement par des provocateurs n'ont pas vraiment contribué à apporter de la lisibilité politique à la lutte contré le CPE sur Rennes, ni à y donner du crédit dans l'opinion, qui développe pourtant depuis peu une forte sympathie pour le mouvement.
La grève est toujours bien suivie sur la faculté de Rennes II (lettres et sciences humaines) avec blocage total de la fac, ,mais une certaine lassitude commence à se faire sentir et les votes de reconduction de blocage se font de plus en plus serrés... Les AG y regroupent jusqu'à 2 500 étudiants. Rennes I (sciences et philo) est installée dans le mouvement sous la forme de blocage partiel les jours de manifestation. Les AG y comptent jusqu'à 400 étudiants. Ceux de droit et de l'Institut d'études politiques ont voté le 6 mars en assemblée générale le blocage de leur faculté, du jamais vu depuis longtemps! À la fac de droit, 600 personnes étaient présentes à l'AG: la sauce commence aussi à y prendre, modestement, mais sûrement; quelques antigrévistes UNI et UMP-jeunes, encouragés par l'administration de la fac, étaient présents et particulièrement remontés en tentant de forcer le blocage. La fac d'éco a été lock-outée par l'administration le 7 mars pour empêcher les étudiants d'aller à la manif A noter la présence de Serge Halimi à Rennes II pour une conférence sur « Le libéralisme et le droit à l'éducation ».
Des pétitions contre le blocage commencent à circuler mais, pour le moment, sans trop de succès..
Les étudiants sont allés à la rencontre des six foyers de jeunes travailleurs du département pour sensibiliser les jeunes au CPE. Les étudiants « bloqueurs » qui sont aussi les plus motivés commencent à fatiguer, car cette lutte repose toujours sur les épaules de quelques uns seulement. En AG, les discussions portent sur la nature des revendications: faut-il se concentrer sur le CPE, étendre le périmètre des revendications au risque de faire chapelet « luttons contre la faim dans le monde »? Certains se posent la question d'aller davantage à la rencontre des salariés, et en particulier le personnel de leur université, enseignants et IATOSS, mais il faut bien reconnaître que cette idée n'est pas vraiment reprise par l'ensemble des étudiants.
Les prochaines journées de mobilisation auront lieu les 14 et 16 mars. Les AG d'une fac à l'autre fonctionnent de façon autonome sur le plan décisionnel, mais coordonnées dans les propositions qui y sont faites. Une grande maturité en ressort.
Parmi les décisions prises, la proposition d'avoir des « débats politiques sur le libéralisme » a été adoptée. Les diffusions de tracts sur les hypermarchés et restaurants interentreprises devraient se multiplier, mais elles n'ont pas soulevé un enthousiasme débordant. La proposition de faire une manif nationale à Paris sera soumise à la coordination nationale à Poitiers le week-end du 11 au 11 mars. À la fac de sciences, le blocage total (avec occupation) a été adopté, avec 60 % de voix environ à main levée, ce score montre une forme de division et laisse à penser qu'il pourrait être difficile à tenir si la grève ne s'étend pas à l'ensemble du salariat.
À ce sujet, il faut noter une initiative intéressante d'assemblée générale interpro de zone industrielle, à laquelle malheureusement très peu de salariés mais aussi d'étudiants ont participé le 6 mars. Une diffusion de tracts y sera à nouveau organisée le 14 mars. Les facs rennaises, devant les fausses informations données par la presse monopolistique calotine, à savoir Ouest-France, ont décidé d'éditer elles-mêmes un journal en 4 pages sur le mouvement. Ce journal comprendra dans son premier numéro des « paroles de salariés » qui reprennent des discussions que ces derniers peuvent avoir sur leur lieu de travail concernant le CPE.
Sans extension du mouvement sous la forme d'une grève interprofessionnelle reconductible au niveau de l'ensemble du territoire national, le CPE ne risque pas davantage- que d'être amendé à la marge, comme l'envisage déjà le « très social » Sarkozy..
Les atermoiements des confédérations syndicales en disent long sur leur volonté de réformer le CPE en y positionnant des critères cogestionnaires qui autoriseraient les licenciements. En effet, si les bureaucraties confédérales souhaitaient réellement rejeter le CPE, le CNE, l'apprentissage à 14 ans, le travail de nuit à partir de 15 ans... elles auraient organisé une manifestation et une grève le même jour que l'appel de la coordination étudiante nationale, à savoir le 16 mars. En appelant à la mobilisation du 18 mars et en n'appelant pas à la grève le 16 mars, elles torpillent objectivement la convergence des luttes. Il est grand temps de se réapproprier nos outils de lutte, d'organiser à la porte de nos entreprises des,opportunités de rencontre avec les étudiants, et d'inviter dans nos universités les lycéens et les travailleurs pour y témoigner!

Pierre & Philippe
Groupe la Sociale de la Fédération anarchiste

Le Monde libertaire #1430 du 16 au 22 mars 2006
Ecrit par libertad, à 08:40 dans la rubrique "Actualité".



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