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Projet de loi sur les heures supplémentaires : travailler plus pour gagner plus ?

Lu sur Hacktivist news service : "Le nouveau président de la République a décidé de s’attaquer à la durée de travail des salariés. Il prétend rendre plus attractives les heures supplémentaires à la fois pour le patronat et pour les salariés pour que ceux-ci travaillent plus. Alors que les profits des entreprises explosent, que les conditions de travail se détériorent, que le pouvoir d’achat stagne, le slogan “travailler plus pour gagner plus” est une véritable imposture.

“Travailler plus pour gagner plus”, un slogan de campagne électorale peut-il devenir réalité ? Le projet de loi du gouvernement veut nous le faire croire. Il prévoit pour les employeurs une exonération des cotisations sociales sur les heures supplémentaires modulée selon les effectifs de l’entreprise.

Les salariés ne payeraient pas d’impôt sur les heures supplémentaires (ou les heures complémentaires pour les salariés à temps partiel). Dans les entreprises de 20 salariés et moins, les quatre premières heures supplémentaires devraient être majorées de 25 % au lieu de 10 % actuellement. Au-delà de ces mesures précises, la logique mise en oeuvre par ce projet est triplement néfaste : néfaste pour l’emploi, néfaste pour les finances publiques, néfaste pour les salariés concernés.

Un projet néfaste pour l’emploi

Ce projet de loi vise à encourager les entreprises à avoir recours aux heures supplémentaires, et ce à moindre coût. Comme l’a indiqué le Premier ministre, cela revient à “annuler complètement le surcoût de l’heure supplémentaire”. En cas de surchage de travail, l’employeur aura donc tendance à faire appel à des heures supplémentaires plutôt qu’à embaucher. En augmentant, de fait, le temps de travail de ceux qui sont déjà en place, ce projet joue directement contre l’emploi. L’hypocrisie de ce projet apparaît clairement quand on sait que plus de 1,3 million de salariés à temps partiel, qui sont pour la plupart des femmes, ne demandent qu’à travailler à temps plein.

Un projet néfaste pour les finances publiques

C’est l’analyse du Conseil d’analyse économique, instance placée auprès du Premier ministre, qui note “le coût exorbitant pour les finances publiques” de ce projet. Suivant les hypothèses, il coûterait de 3 à 5 milliards d’euros.

Le surcoût des heures supplémentaires pour les employeurs sera payé par le budget de l’Etat, c’est-à-dire par nous tous, notamment comme consommateurs (la TVA représente 50 % du budget de l’Etat). Ainsi tous les salariés payeront à la place des employeurs ce que ceux-ci rémunéreront à certains d’entre eux.

Au moment où le gouvernement veut supprimer un fonctionnaire sur deux et tailler dans les services publics, ces cadeaux au patronat sont une véritable provocation.

De plus, la sécurité sociale risque de voir ses recettes s’amoindrir du fait que les exonérations de cotisations sociales sont rarement intégralement compensées par l’Etat. Le gouvernement pourra donc tranquillement invoquer un déficit de l’assurancemaladie ou des problèmes de financement des retraites qu’il aura contribué à creuser pour imposer une “franchise” médicale qui sera payée par tous les salariés ou une augmentation de la durée de cotisation retraite.

Enfin le coût de ce projet risque d’exploser.

En effet, il y a un risque, notamment dans les petites entreprises où la présence syndicale est faible, pour que l’employeur déclare des heures supplémentaires fictives pour pouvoir recevoir les aides de l’Etat.

Un projet néfaste pour les salariés concernés

Contrairement à la propagande gouvernementale les salariés ne pourront pas exiger de faire des heures supplémentaires pour gagner plus. C’est l’employeur, et non pas le salarié, qui décide en la matière et tous les salariés, le voudraient-ils, ne pourront pas faire des heures supplémentaires.

Seule une minorité sera concernée.

Mais l’essentiel n’est pas là. En effet, depuis plusieurs années les conditions de travail se détériorent, de nouvelles pathologies apparaissent liées au stress, à la pression patronale et à l’augmentation de la productivité du travail.

Vouloir, dans ces conditions, augmenter le temps de travail accélérera encore cette tendance.

De plus, les salariés ont de plus en plus de mal à organiser une vie sociale convenable. Comment faire alors avec une augmentation du temps de travail ?

D’autres solutions existent

On peut à la fois augmenter les salaires, baisser le temps de travail et créer des emplois. Ainsi en France, du début du 19ème siècle à la fin du 20ème siècle, la production a été multiplié par 26, le temps de travail divisé par 2, l’emploi multiplié par 1,75 et le pouvoir d’achat a grandi dans des proportions très importantes. Cela a été possible par un partage des gains de productivité entre les salariés et les entreprises.

En vingt ans la part des salaires (salaires directs et cotisations sociales) a baissé de près de 10 points dans la richesse produite, et ce pour le plus grand profit des actionnaires et des rentiers. C’est un nouveau partage de la richesse produite qu’il faut aujourd’hui imposer, et non pas faire encore des cadeaux au patronat, si l’on veut que la situation des salariés s’améliore vraiment. Ce n’est visiblement pas la voie choisie par ce gouvernement.


Les salariés contre les heures supplémentaires

Pendant que le gouvernement élabore un projet de loi pour faire travailler plus les salariés, certains sont déjà en grève contre les heures supplémentaires. C’est le cas des salariés de la brasserie Kronenbourg à Obernai. Ils dénoncent “les cadences infernales” et exigent que les heures demandées soient faites sur la base du volontariat. Ils demandent, de plus, des embauches supplémentaires et une prime de 120 euros par mois.


Les Français sont-ils des feignants ?

Contrairement au discours patronal et gouvernemental les salariés français sont parmi les plus productifs du monde et ont une durée de temps de travail qui se situe dans la moyenne européenne.

Ainsi, selon le Bureau of Labor, Statistics, organisme officiel américain, un salarié français a produit 71 900 dollars de richesses en moyenne en 2005. C’est plus qu’un salarié japonais (56 300), allemand (59 100) et anglais (64 100).

Selon Eurostat, organisme officiel de l’Union européenne, un salarié français travaillait 36,4 heures par semaine en 2006, soit quasiment autant que les anglais (36,5 heures), plus que les danois (34,6 heures), que les allemands (34,5 heures) ou que les néerlandais (29,8 heures).


Le régime des heures supplémentaires aujourd’hui

Les heures supplémentaires sont à l’initiative de l’employeur, le salarié ne pouvant, sauf exception, les refuser. Dans les entreprises de 20 salariés et moins, les 4 premières heures supplémentaires sont majorées de 10 % jusqu’à fin 2008.

Dans les autres entreprises la majoration des 4 premières heures est fixée à 25 % et à 50 % au-delà. Un accord dérogatoire de branche peut fixer un taux inférieur qui peut aller jusqu’à 10 %.

Le contingent d’heures supplémentaires est de 220 heures par an et par salarié. Il peut être augmenté ou diminué par accord de branche, d’entreprise ou d’établissement.

En plus de ces majorations, des repos compensateurs sont prévus par la loi



Ecrit par libertad, à 16:26 dans la rubrique "Social".



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