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Cette photo est un fragment d’une carte postale qu’envoyaient les colons d’Indochine à leurs compatriotes de France. Elle montre une pratique datant de 1856 envers les "pirates". "Pirates" était le nom donné aux premiers indépendantistes. Cette scène porte les germes de la défaite sans avenir. Quand les guerres ne disent pas leur nom : les "troubles d’Indochine", "les évènements d’Algérie"... les opposants sont aussi débaptisés. Les Américains surnommeront les Vietnamiens "Charlie" ou "face de citron" ; les Irakiens, les "insurgés" ; comme les Russes qualifient les Tchétchènes de "bandits", etc.
La cangue, carte postale de Gaston |
Cette photo représente une carte postale de 1905, envoyée par le colon Gaston à sa famille de France. Elle représente les Vietnamiens à la cangue. La cangue était une échelle qui prend la tête entre les barreaux, interdisant le déplacement aisé, le rapport avec l’autre et le sommeil, une vie entière à rechercher une meilleure position physique annihile la réflexion. La carte postale est signée : Bonne Santé, Gaston.
La chasse aux pirates, faute de tigre... |
Cette photo est prise dans le Nord-Tonkin (Nord du Viêt Nam) en 1908. Ces têtes de « pirates » sont soupçonnées d’avoir empoisonné des soldats français. Un délégué et des partisans posent autour du trophée. Ils pètent d’arrogance et de satisfaction comme font les chasseurs de tigres, tandis que dans les yeux de la garde indigène transparaît la dureté des combats à venir.
La carte postale... |
Cette carte postale représente une tête coupée dans un panier, encore un « pirate » indépendantiste empoisonneur décapité le 8 juillet 1908, selon la coutume.
Au Viêt Nam existe une petite île dont on ne peut sortir ni accéder aux marées d’équinoxes. A ce moment précis, pour des raisons de sécurité, s’y tenait le grand marché aux esclaves pour les plantations. Une mutinerie éclata. La Garde indigène sous le joug des colonisateurs reçut l’ordre d’ouvrir le feu. Les premières mitrailleuses haletantes pelaient la foule des parias comme un oignon. Les corps furent jetés à la mer. Dans les années quatre-vingts est né le Musée des Horreurs de la Guerre à Ho Chi Minh-ville (aujourd’hui rebaptisé Musée de la Guerre pour des raisons diplomatiques) Il y avait une photo des indigènes qui ont tiré sur les leurs : ils venaient d’être décorés, leurs mains étaient bandées puisque brûlées par les fûts rougis, et leurs yeux hagards étaient perdus. Ils avaient obéi sous la double menace du pistolet et du bagne de Poulo Condor avec ses cachots enterrés aux grilles aériennes permettant de surveiller les misérables enchaînés et de les chauler...
Chers députés, comment nos manuels scolaires racontent-ils les péripéties de nos « illustres généraux » dont nos rues portent les noms sans vergogne? Il en était un, réputé injuste et féroce, qui mettait (ou faisait mettre) des grenades dans la bouche d’enfants. Les têtes tombaient aux pieds des parents pour qu’ils parlent. C’était à Thu Duc, à 28 kilomètres au nord-ouest de Saigon.
Le bonheur est au premier plan, pas de femme... |
Cette photo montre un résident français et des notables indigènes de Quang-Ngaï, en 1933. Il est facile de reconnaître le maître des lieux. La tristesse des adultes et des visages d’enfants en dit long. Et l’absence totale de femme en dit bien davantage.
Le maître, chercher le maître... |
Cette photo des années trente montre le personnel d’une résidence supérieure. Au premier plan, le Bonheur et son fils sont entourés des servants. Là aussi, fermeté et absence totale de femme laissent apparaître les fondements de la colonisation.
Non, ce n’est pas la photo du temps des américains |
Non, ce n’est pas la photo du temps des Américains...elle est prise dans le delta du Mékong en 1946. Sans commentaire.
Chers députés de France, des « aspects positifs » de la colonisation...ne nous faites pas le coup des écoles et des hôpitaux, ils étaient destinés à la population coloniale et, dans une moindre mesure, aux notables indigènes collaborateurs. La religion importée mettait en place des dispensaires et des écoles de dernier ordre, anesthésiant de ce fait la conscience et repoussant la révolte. A propos de soins, le Viêt Nam possédait la médecine chinoise. A propos d’école, au Viêt Nam, le lettré -même en guenilles- détenait la plus haute considération sociale, avant l’homme de pouvoir, devant le notable, avant le riche commerçant. Ce pays organisait depuis des siècles des « joutes » de poésies. Chaque année, ce pays se passionnait pour élire le meilleur poète et diseur de poésie. Le nom du gagnant était gravé depuis des siècles dans le marbre, raffinement d’une civilisation autre que celle de l’arène et des jeux olympiques.
Des « aspects positifs » de la colonisation ? Au mieux, on peut dire qu’aujourd’hui les offices d’Etat de ces pays sont le plus souvent d’anciens édifices coloniaux, que les colons n’ont pas bâti pour cet usage. Maigre consolation pour les deux camps.
P.S. Ces photos sont empruntées à des collections privées et des musées. Eric Deroo & Pierre Vallaud les ont collectées, parmi tant d’autres, dans un livre « INDOCHINE FRANCAISE, 1856-1956, GUERRES, MYTHES ET PASSIONS » chez Perrin. Un livre que je vous recommande.
*André Bouny, père d’enfants vietnamiens, président du Comité International de Soutien aux victimes vietnamiennes de l’Agent Orange et au procès de New York (CIS).