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No Pasaran : "On parle d'une crise de l'approvisionnement énergétique de nos sociétés industrialisées. Une crise énergétique inévitable face à une hausse constante de la démographie et à une consommation croissante de ressources limitées : la population mondiale atteindra 8,5 Milliards de personnes en 2020 soit un taux de doublement de 40 ans. Au rythme de consommation actuel, il nous reste du pétrole pour les 40 à 100 prochaines années selon que l'on considère que certaines réserves sont exploitables ou non. Selon les mêmes hypothèses, on peut encore utiliser du gaz pendant 80 à 160 ans. Le charbon sera encore disponible pendant 170 à 1965 ans (sources : Conseil Mondial de l'Energie).
On parle des problèmes de gestion des déchets nucléaires, du coût des centrales nucléaires, de leur dangerosité, de l'accroissement de l'effet de serre (centrales thermiques, voitures, industries...), d'une crise généralisée pour l'eau, l'air, la terre, la nourriture. Une modification radicale du mode de production de l'énergie devra être envisagée par nos sociétés. Cette réorganisation de la production énergétique est illusoire si elle n'est pas combattue de front avec les problèmes sociaux de notre siècle (chômage, travail précaire, inégalités Nord-Sud...). Aussi, des solutions écologiquement intéressantes comme les énergies renouvelables, ne peuvent se réduire à une substitution du nucléaire et du pétrole. Elles doivent s'intégrer dans une démarche qui privilégie l'homme, participer à une alternative sociale autant qu'écologique.
Energies renouvelables ?
Les énergies renouvelables (soleil, vent, eau, biomasse, marées) sont présentes partout. Elles sont inépuisables grâce aux cycles naturels. Mais elles sont aussi diffuses et pour la plupart irrégulières. La première de ces énergies est le negawatt (ou économie d'énergie). Il est en effet primordial de rappeler que l'énergie la moins polluante est celle que l'on ne consomme pas. Par conséquent, il faut avant tout apprendre à utiliser l'énergie de façon rationnelle (repenser nos modes de consommations et utiliser des appareils efficients). Quelles sont les autres énergies renouvelables ? L'énergie éolienne utilise la force du vent pour produire de l'électricité en faisant tourner une turbine (un mixte entre la dynamo et les anciens moulins à vent). Le flux solaire peut être directement converti en chaleur par l'intermédiaire de capteurs solaires thermiques. Cette technique est applicable au chauffage des habitations, des piscines, à la production d'eau chaude sanitaire (ECS), ou encore au séchage des récoltes (fourrage, céréales, fruits). Contrairement aux idées reçues, l'intérêt du solaire est sensiblement le même sur tout le territoire. En effet l'ensoleillement est plus fort dans le Sud, mais dans le Nord, les besoins en chauffage sont plus importants et plus étalés sur l'année. Du coup, le solaire thermique permet d'éviter l'utilisation de ressources non-renouvelables de facon aussi intéressante au nord comme au sud. Le solaire photovoltaïque, à ne pas confondre avec le solaire thermique, permet de produire de l'électricité. En effet, la lumière du soleil peut directement être transformée en électricité par des panneaux photovoltaïques, sans pièces tournantes et sans bruit. L'électricité produite peut-être soit stockée dans des batteries, soit convertie par un onduleur pour être distribuée aux normes sur le réseau. Actuellement, EDF est obligée d'acheter le courant à 0,15€/kWh.
La méthanisation est également une voie de conversion de la biomasse (matière organique) en énergie. Maîtrisée depuis un siècle pour diminuer la charge en matière organique des boues de station d'épuration urbaines, des effluents industriels, et plus récemment des déchets organiques ménagers, la méthanisation produit ce que l'on appelle le Biogaz. Le bois a longtemps été la seule source d'énergie à la disposition des hommes pour leurs besoins domestiques et industriels. Les émissions de CO2 sont neutres vis à vis de l'effet de serre si l'on tient compte du carbone réutilisé par la croissance des arbres sur les surfaces replantées. L'exploitation de la filière bois-énergie permet aussi d'améliorer la gestion du patrimoine forestier.
Le principe de la géothermie consiste à extraire l'énergie contenue dans le sol pour l'utiliser sous forme de chauffage ou d'électricité. Les grosses centrales hydrauliques d'EDF ne sont généralement pas considérées comme des énergies renouvelables du fait de leurs impacts sur l'environnement. Il existe en France environ 1 500 petites centrales hydrauliques (PCH) en activité, régies par des communes ou des producteurs indépendants. Enfin, l'architecture bioclimatique permet de tirer parti du climat pour gagner du confort et économiser l'énergie dans son habitation.
Les énergies renouvelables participent au développement durable ?
Oui, mais de quoi parle-t-on ? S'il est un mot consensuel et fourre-tout, c'est bien le développement durable. Mis sur le devant de la scène politique en 92 lors du sommet de Rio, sa définition est suffisamment vague pour que personne ne s'y oppose ou plutôt pour que tout le monde l'utilise à sa sauce : « Un développement qui remplit les besoins des générations présentes sans compromettre ceux des générations futures ». Oui mais … le rapport Bruntland qui a donné cette définition oublie de définir deux choses : Qu'est-ce que le développement et quels sont les besoins des générations ? Chacun interprète ces deux concepts en fonction de l'idéologie à laquelle il se réfère. Les réponses à ces questions dans le cadre d'un développement durable tel qu'il est présenté sont en complets désaccords avec le principe de croissance économique si chère aux capitalistes et aux libéraux. Il n'y a rien de moins révolutionnaire que le développement durable quand on y ajoute la définition suivante pour le développement : « un changement qualitatif d'une économie non croissante en équilibre avec l'environnement ». Le partage des richesses doit non seulement se faire dans le temps (les générations futures) mais aussi dans l'espace (apartheid social).
Repenser la production énergétique
Au Nord comme au Sud, une révolution énergétique est indispensable et elle doit être affrontée dans toutes ses dimensions : écologiques, techniques, économiques, culturelles et sociales. Amélioration de l'efficacité énergétique, et recours aux énergies renouvelables, élimination des gaspillages, programmes de reboisement ne pourront aboutir sans réforme profonde aux échelles locales, régionales et continentales, des modes de production et de répartition des richesses. Cet effort n'a de sens que collectif (décision au niveau local de la gestion de l'énergie) et mondial. Une solidarité entre les peuples est nécessaire, afin de mieux répartir les gisements d'énergie (fossiles ou renouvelables). Il faut choisir des énergies à forts rendements énergétiques, mais il est tout aussi important d'agir sur la consommation dans tous les secteurs : production, habitat, déplacement... Une telle réduction des consommations énergétiques des transports n'est envisageable sans un transfert massif des investissements de la route vers le rail, sans une réduction massive de l'usage de l'automobile privée. Ces réorientations sont inconcevables sans modifications radicales des choix économiques, sans un élargissement décisif de la démocratie au niveau local, sans transformations profondes des comportements, donc des systèmes éducatifs.
Relier les deux luttes, sociale et écologique
Si une transition énergétique apparaît inévitable, l'enjeu est de savoir comment la faire basculer vers un nouvel équilibre durable et équitable. Car l'échec serait que le système actuel absorbe une partie ou l'ensemble des contraintes environnementales, sans éliminer les effets pervers actuels en matière sociale. Car le marché économique actuel est tout à fait capable d'intégrer ces contraintes écologiques comme il l'a fait avec ses contradictions sociales avec le keynésianisme. A titre d'exemple, les normes environnementales Iso 14 000 et Iso 14 001 sont intégrées par les grosses industries non par soucis écologiques mais bien pour des raisons de marketing. De même, l'utilisation d'énergies renouvelables ou la réduction des consommations énergétiques pourront très bien être les stratégies des entreprises, du moment qu'elles permettent de réduire la facture d'électricité et par là de dégager de plus gros bénéfices. Si ces problèmes ne sont pas attaqués à la fois sur les deux fronts, écologique et social, rien ne changera de manière intéressante. La réorientation énergétique est liée au droit pour tous d'avoir accès et de participer aux richesses produites, ce qui s'accompagne forcément de la réduction de la part de travail salarié. Tout compromis sur l'un des deux axes serait un désastre pour l'autre. La lutte pour l'accès à un niveau de vie décent pour chacun, l'épanouissement de l'individu ailleurs que dans le travail va de pair avec celle du respect des écosystèmes.
Développer les énergies renouvelables
Les perspectives d'une réorientation énergétique qui respecte l'homme et l'environnement, nous permettent de dégager quatre exigences : réduire nos consommations énergétiques, utiliser une énergie propre écologiquement, favoriser la démocratie locale et la responsabilité des citoyens, réduire les inégalités sociales. L'intérêt et les apports des énergies renouvelables, comme pour toutes les technologies, dépendent de l'utilisation qui en sont faites. En premier lieu, les Energies Renouvelables (EnR) sont intéressantes car elles permettent une production d'énergie décentralisée, indépendante du réseau national. De fait, elles peuvent être utilisées facilement dans les pays reculés ou ceux en voie de développement, qui n'ont pas accès au réseau national. Elles permettent de produire de l'énergie avec des ressources présentes sur place. Les EnR présentent une alternative au système classique de production centralisée de l'énergie. Il est maintenant possible (techniquement), de créer des structures de production énergétique au niveau d'un quartier, d'un syndicat intercommunal ou d'un individu. Cette possibilité est intéressante si elle s'intègre dans une démarche beaucoup plus globale de la gestion de la production. Ceci afin que la production corresponde aux besoins locaux, pour ne produire que ce qui est utile. Cette démarche implique une démocratie locale plus importante, pour que la production (énergétique, alimentaire, vestimentaire...) soit déterminée collectivement, en fonction des besoins, des ressources et du temps que les gens sont prêts à consacrer. Il faut au maximum rechercher des technologies à visage humain, de petites tailles, que l'homme maîtrise localement. Il s'agit de renverser le processus d'automatisation du travail humain qui conduit à des opérations sans acteurs pour produire des choses sans auteurs. Se réapproprier les activités qui entretiennent notre lieu de vie, qui nous permettent de nous nourrir (jardinage, cuisine...), de nous habiller, tout comme produire l'électricité pour son quartier, c'est une manière de redonner du sens à nos activités et de nous responsabiliser.
Manolín"