Lu sur
Laurent Mucchielli :
"Dans la vie quotidienne de chacun, jeune ou moins jeune, cadre ou
ouvrier, à l'école comme au travail, dans les organisations publiques et
privées, au niveau des politiques publiques, etc., les évaluations se
font de plus en plus pressantes, diffuses, continues. Rendre des
comptes, être visible, mesurable et surtout compétitif devient
l'injonction permanente, stressante et très peu mise en cause. Être
évalué paraît généralement aller de soi, voire être désirable : « On
m'évalue, donc je suis. » Or ces évaluations sont tout à fait
paradoxales : au nom de la rétribution au mérite, elles dénient le
mérite véritable et engendrent un climat délétère de concurrence et de
sauve-qui-peut ; au nom de « plus d'efficacité », elles créent une forme
inédite d'inefficacité ; au nom de l'objectivité, elles écrasent les
différences, standardisent, normalisent.
La complexité de la vie sociale n'est pas respectée. Les nouvelles
évaluations rendent unidimensionnelle une vie multiple, ignorent les
conflits qui font le cœur de l'individu comme de la société et, surtout,
prétendent être justes et efficaces en dehors de toute situation
réelle, en dehors de toute territorialisation.
Illustration : telerama.fr