Lu sur
Le Monde libertaire :
"Quand on milite pour l’anarchie, on peut s’interroger parfois sur
l’imprégnation de nos idées dans la société où l’on vit ; l’histoire
n’étant pas linéaire mais faite de périodes de progrès, de ruptures… et
de régressions. Au contraire d’une lutte syndicale (comme l’augmentation
des salaires après deux jours de grève), d’une action écologiste
(abandon de la construction d’une centrale nucléaire, d’un incinérateur
d’ordures ménagères, etc.), il est parfois difficile de prendre la
mesure des « résultats » de notre militantisme libertaire. D’autant plus
quand la répression, diffuse ou brutale, côtoie nos vies ; quand les
mouvements s’essoufflent ; quand la réalité de cette époque d’attaques
antisociales et de destructions écologiques revient inlassablement saper
non pas nos convictions, mais nos espoirs.
Pourtant, notre besace
n’est pas vide. Plutôt que de rebuter son monde – pas que les gens, mais
aussi nous-mêmes – en invoquant de grandes idées, certes légitimes,
mais qui nous font aller (et parfois dériver) vers un utopisme idéaliste
et dogmatique (quand bien même l’anarchisme est par définition un
adogmatisme en actes), il peut être bon de réfléchir aux conquêtes en
partie issues de nos pratiques, même si le chemin n’est jamais qu’à
moitié parcouru. Ainsi, nous évitons de projeter nos rêves dans une
eschatologie révolutionnaire (un avant et un après la révolution tant
souhaitée), et nous pouvons nous recentrer sur une notion et une
pratique de la révolution dans l’ici et le maintenant, une dynamique
d’émancipation individuelle et collective. La vieille dichotomie
réformisme/révolution se résout dans l’action directe, dans l’énergie
d’émancipation et de réappropriation à l’œuvre dans toutes les sphères
de la vie individuelle et sociale. L’anarchie, c’est l’anarchisme. Et à
bien y regarder, cette force, cette affirmation permanente de la vie
contre la résignation a œuvré pour transformer la société.
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