Lu sur
Conspiracy watch :
Depuis près de quinze ans, l’humoriste Dieudonné utilise son statut d’amuseur public pour squatter la scène politique française et internationale. Issu de la gauche (surtout morale) des années 1980, il s’est progressivement radicalisé, dans un premier temps un peu plus à gauche, avant de finalement franchir le Rubicon, tourner définitivement le dos à ses anciennes amours et rejoindre les combats de l’extrême droite.
En effet, au fil des campagnes électorales, Dieudonné Mbala Mbala en est venu à développer une obsession politique : l’«antisionisme». Un étendard qui dissimule de plus en plus mal son antisémitisme et qui constitue le creuset des liaisons dangereuses qu’il cultive avec certains courants de l’extrême droite et de l’islamisme radical ; une idéologie, fondée sur des impostures, que Dieudonné cherche à diffuser auprès de son « cœur de cible » : les quartiers populaires.
De « dérapages » en provocations, Dieudonné continue malgré tout à
bénéficier d’une audience et d’un capital de sympathie non
négligeables. Il rassemble autour de lui des soutiens hétéroclites aux
stratégies parfois contradictoires, mais qui, in fine, s’alimentent
mutuellement. Un projet politique plus large et ambitieux prend forme
autour de ce « comique » qui se targue d’être un « trublion politique »,
mais qui dans les faits n’est qu’un mystificateur doublé d’un
imposteur.
La présentation d’une liste « antisioniste » aux élections
européennes du 7 juin 2009, ses résultats loin d’être ridicules dans
certains quartiers d’Île-de-France, l’existence d’un intérêt réel et
durable pour ce « regroupement » à géométrie variable au sein de
l’extrême droite française prouvent qu’il ne s’agit pas uniquement d’un
phénomène marginal ou éphémère, mais bien de l’un des symptômes du
nouveau cycle historique dans lequel nous évoluons depuis plus de vingt
ans. Un symptôme comme l’est, en miroir, la poussée des droites
nationales, autoritaires et xénophobes, à l’échelle du continent
européen. Ces dernières ayant, pour la plupart, fait le choix de surfer
sur l’idéologie néoconservatrice du «choc des civilisations», tant que
cela est utile à leur combat «identitaire».
Ici, nous essaierons d’identifier le symptôme, à d’autres de
s’attaquer à ses causes et au traitement de la maladie. S’agit-il d’une
dramatique mais banale réactualisation de l’antisémitisme politique ou
assiste-t-on à l’émergence d’un phénomène plus complexe ? Comment et
pourquoi Dieudonné est-il devenu le trait d’union d’un «front
antisioniste» ? Autour de quels axes politiques ce «front antisioniste»
s’est-il constitué ? Quelles en sont les forces, les objectifs ? De
quels soutiens et de quelles complaisances bénéficie-t-il ? Au profit de
qui ?
L’histoire, les orientations, les réseaux nationaux et
internationaux, les contacts et le parcours des diverses composantes de
la « galaxie Dieudonné » sont décortiqués tout au long de notre enquête.
Ce livre tente, en évitant tout amalgame, de répondre à ces questions
au travers d’un travail d’investigation s’appuyant sur de nombreuses
sources vérifiées et vérifiables. Ainsi, après en avoir identifié les
leviers et analysé certaines des impostures développées par Dieudonné et
ses amis politiques, nous avons structuré notre enquête à la manière
d’un jeu des « sept familles », avant de la clore en revenant sur le
parcours politique de l’ex-humoriste, de scrutin en scrutin, jusqu’à la
présentation de la liste antisioniste en juin 2009.
« On n’a même plus le droit de rigoler » s’indigne Dieudonné.
Pierre Desproges lui répondrait : « Si, mais pas avec n’importe qui ! »
Bas les masques !
De Michel Briganti, André Déchot & Jean-Paul Gautier, Editions Syllepse, 2011, 190 pages.
Les auteurs :
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Michel Briganti est juriste et membre de l’équipe d’animation du Centre de recherche, d’information et de documentation antiraciste (CRIDA).
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André Déchot est journaliste et a été l’un des animateurs de la « commission Europe » du réseau antifasciste Ras l’front.
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Jean-Paul Gautier est historien. Spécialiste de l’extrême droite, il a publié
La Restauration nationale (Syllepse, 2002) et
Les Extrêmes droites en France (Syllepse, 2009).
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dossier de presse avec la table des matières.
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interview des auteurs.