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L’ECONOMISTE ET LE CITOYEN
Jadis lors des grandes catastrophes ou des grandes peurs, passage d’une comète, changement de siècle, de millénaire, inondations, épidémies de pestes, tremblements de terre… le peuple s’en remettait à ceux qui savaient, les prêtres.
Ceux-ci le rassuraient en lui expliquant que c’était la volonté de Dieu et que seule la prière pouvait apaiser le courroux de la divinité et les cœurs.
Aujourd’hui, du moins dans nos contrées, même si la démarche est la même, ce n’est plus aux prêtres que l’on s’adresse, mais aux scientifiques, autrement dit, une fois encore à celles et ceux qui savent.

LA REALITE ET SA CONNAISSANCE

La réalité n’est pas ce que l’on perçoit d’elle. La société, à toutes les époques, a mis, et met, un médiateur, un intermédiaire, pour nous guider au travers de la perception de nos sens. Ceci est un phénomène culturel, sociétal, qui déchiffre à notre insu ou non - en fonction de ses propres critères, le réel. Nous ne sommes, à priori pas plus libres aujourd’hui que hier dans la connaissance de la réalité.

La démarche personnelle en vue de la connaissance est certes possible mais elle est « perturbée » par deux facteurs :

- la complexité de la réalité qui de plus est mystifiée par les constructions idéologiques qui lui « donnent un sens » , dans le sens du système en place. Autrement dit, la réalité observable l’est au travers de prismes déformants ;

- l’existence, et le poids social, de « celles et ceux qui savent » et auxquels on a tendance à s’adresser,… il est d’ailleurs conseillé de passer par eux pour comprendre. 

La démarche de « connaissance » n’est donc pas un acte simple, et ce d’autant plus qu’il n’est pas obligatoire… On peut en effet, vivre en suivant simplement la route tracée par d’autres, par la société et ses idéologues, sans réfléchir, en acceptant ce qui nous est imposé/enseigné… ce que fait en général la majorité des individus. 

La réalité existe indépendamment de la conscience que l’on peut en avoir. Le regard décalé est nécessaire pour en comprendre le sens. Mais le choix de ne pas comprendre est possible. Bref, la connaissance n’est pas indispensable.

Toute construction sociale donne des repères à ses membres qui peuvent s’en satisfaire, les faire leurs, et même en devenir les propagandistes. L’Histoire nous montre que vouloir saisir, de la réalité, autre chose que ce qui est socialement admis peut être considéré comme une transgression, voire une pratique socialement et politiquement dangereuse… et il n’est pas besoin de remonter loin dans le passé pour le constater. 

Ainsi, l’homme libre, absolument libre, au sens d’une connaissance directe et spontanée, n’existe pas. La stabilité d’une situation sociale est communément acceptée comme hier « divine », aujourd’hui « naturelle » et donc peu propice à une recherche du « sens » et évidemment à un changement. Ce qui fonde le conservatisme.

LA CRISE COMME REVELATEUR

La crise déchire l’écran illusoire sur lesquelles se projettent nos certitudes. 

La crise fait tomber les masques. On peut difficilement tricher avec elle et ce d’autant plus qu’elle révèle des comportements passés.

La crise inquiète car, non seulement elle remet en question nos certitudes, mais elle hypothèque l’avenir. Le développement linéaire, de notre vie n’est plus assuré. Le modèle rassurant du « développement économique », de l’ « amélioration des conditions de vie », de la « stabilité sociale » n’apparaît plus comme une certitude. Ce qui constituait des acquis, considérés comme définitifs, passe de l’absolu au relatif.

La torpeur citoyenne, produit d’un développement, sinon harmonieux, du moins rassurant d’un système économique perçu comme éternel, cède la place d’abord à l’étonnement puis à l’inquiétude. Le désir de comprendre naît, non pas d’une démarche spontanée mais d’un réflexe d’angoisse face à un présent et surtout un futur désormais incertains. C’est au moment où le feu est à la maison que l’on se soucie de savoir où l’on va pouvoir trouver de l’eau.

Le traumatisme est d’autant plus important que l’environnement politique, idéologique, médiatique nous nourrissait d’une gelée royale qui faisait de nous les citoyens d’un monde ou tout était possible en matière d’amélioration de la vie quotidienne.

La plupart des « experts économistes », régulièrement invités dans les médias, conseillers des vedettes de la politique, rédacteurs inlassables de livres, articles traités et essais, nous rassuraient sur la « marche des affaires », les « perspectives de développement » et le sérieux des décisions économiques prises.

Celles et ceux, rares, qui, à l’inverse des précédents, refusaient le modèle standard , critiquaient les mesures prises, brandissaient des statistiques inquiétantes,  bref qui tiraient la sonnette d’alarme,… étaient ignorés des grands moyens de communication et laissés à leurs visions pessimistes de l’avenir. 

On aurait pu croire que la crise survenant – et je parle ici de la crise financière actuelle – les « experts du système » auraient fait, publiquement, amende honorable devant des faits, non seulement qu’ils n’avaient pas vu venir, mais dont ils s’étaient rendus complices par leurs travaux – certains même honorés d’un « Prix Nobel » Or, pas du tout, drapés dans leur dignité de « docteur de la foi libérale » ils ont su, après un court moment de flottement, redevenir les propagandistes zélés qu’ils étaient, et qu’ils demeurent, passer sous silence leurs précédentes analyses et continuer à pérorer dans les médias à l’image de ces médecins du Moyen Age qui, face à une catastrophe sanitaire, cachaient leur ignorance derrières des formules latines. 

Quant aux économistes « critiques » qui avaient en vain averti que la course à la « financiarisation de l’économie » nous conduisait, et nous conduit, à l’abîme, ils n’ont pas été pour autant entendus, encore moins écoutés. La pertinence de leurs analyses s’est perdue dans le brouhaha médiatique, ensevelie dans le fatras des explications des « experts » qui ont retrouvé toute leur vigueur.

EXPERTISE  ET VULGARISATION

Aujourd’hui, comme hier les rôles sont bien distribués pour le plus grand bien d’un système économique qui en rajoute dans la course au précipice.

Les « experts » ont retrouvé leur assurance et défilent sur les petits écrans. Ils jouent le rôle de « cellules d’aide psychologiques » qui à défaut de rassurer le patient lui explique en quoi ses douleurs et ses angoisses échappent à tout traitement puisque l’ « état de l’économie mondiale » nous oblige à prendre les mesures régressives qui non seulement liquident les acquis du passé mais sont lourdes de menaces pour l’avenir. Ils utilisent des trésors de pédagogie pour nous expliquer que l’économie est une « science exacte » – donc indiscutable – et que le marché, et tout ce qu’il entraîne de comportements, décisions, stratégies,… est « naturel ».

A l’opposé des précédents, il y a ceux qui pensent que contrairement aux voies du Seigneur, celles de l’économie ne sont pas impénétrables et cela pas seulement par les « initiés », mais aussi par le vulgum pecus, autrement dit par tout un chacun. Alors, prenant leur bâton de pèlerin, loin des cercles parisiens et des émissions à succès, ils font tout naturellement de la vulgarisation. Ils démontent les mécanismes, revisitent l’Histoire, dénoncent les manipulations, les démagogies, donnent un sens aux stratégies, analysent les conséquences des décisions prises,… bref donnent les outils de la compréhension, préludes indispensables à l’action citoyenne. Ils interviennent et animent des lieux, loin des projecteurs médiatiques fréquentés par celles et ceux qui ne croient plus aux « explications officielles » : cercles citoyens, associations, universités populaires,…

Même s’ils sont parfois invités - rarement – par les médias, il est donné à leur intervention, l’aspect, sinon de l’exotisme, du moins d’un décalage par rapport à une réalité dérangeante qui ne peut aboutir qu’à une vision utopique – autrement dit irréaliste - de l’avenir.

Pour eux le « savoir économique », n’est pas quelque chose de figé, champ de prédilection de « savants » et de spécialistes de formules et modèles mathématiques, mais est au contraire un des éléments indispensables à la réalisation d’une véritable citoyenneté.

Ils démontrent finalement que l’économie n’est pas une science exacte mais une science sociale. A ce titre, il n’y a plus de lois universelles imparables, d’état naturel, de situation de soumission pour le plus grand nombre. Ils dérogent ainsi au dogme qui veut que la logique implacable de lois économiques aboutisse à un déterminisme social qui s’imposerait à tous.

C’est le statut de tout le « savoir économique » qui est mis à nu. Savoir dans lequel, et pour lequel, l’éthique sociale domine sur la logique de rentabilité, y compris financière… reposant la problématique de l’économie dans les termes qui devrait être les siens : quelle organisation sociale en vue de la satisfaction des besoins, dans le respect de valeurs éthiques et de l’environnement, des femmes et hommes de cette planète ? 

Leur combat est historiquement juste et ne saurait être vain. Dans le cas contraire c’est l’avenir de l’espèce humaine – entre autre – qui est menacé. 

   Patrick MIGNARD

Cet article a été écrit à l’occasion de l’hommage rendu à François MORIN professeur de Sciences Economiques à l’Université de TOULOUSE 1

 

 

 

 

 

Ecrit par , à 08:53 dans la rubrique "Pour comprendre".



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