La confiance à disparue et la finance dérive en terre inconnue. La crise est nouvelle et personne ne sait ce qu’elle va devenir. Les banques sautent, la bourse perd les pédales et tout le monde attend ce qu’il va arriver. Le marché devait être régulateur, mais il n’a jamais régulé que le pillage de la planète pour le profit de quelques multimilliardaires qui s’accaparent ce magot démesuré, par les jeux obscurs de leurs spéculations sans limite.
Dans la panique les politiques retournent leurs vestes et appellent,
dans le désespoir, à plus de contrôle. Mais lorsque tout est
informatisé, plus de contrôle provoquerait la multiplication de
combines pour les éviter, et par conséquent plus de risques de
dérapages. Les remèdes ont parfois des effets secondaires inattendus.
L’argent qui abondait, il y a quelque temps, dans les sphères de la
haute finance, n’a pas disparu avec la crise, il a seulement changé de
main.
La richesse de quelques uns s’est réalisée par l’accumulation
permanente d’une part de la valeur du travail dérobée aux travailleurs.
Ces sommes cumulées depuis des années représentent aujourd’hui des
richesses colossales qui circulent sur les marchés financiers à la
recherche de profits juteux à court terme. Les richesses usurpées dans
l’économie réelle passent par des paradis fiscaux, des comptes
numérotés, puis sont rejouées dans l’économie virtuelle beaucoup plus
lucrative mais aussi plus incertaine.
C’est le temps des jeux sur la valeur de la valeur dans le temps. Sous
le règne de l’arnaque, il s’agit de faire miroiter beaucoup d’argent
facile et l’appât du gain fait le reste. Puis, il faut bien sûr,
retirer sa mise avant la fin de la partie, sortir du jeu sans respecter
les règles, ni les enjeux. A ce jeu pipé, les petits sont perdants car
ils subissent les fluctuations. Par contre, les très gros spéculateurs
créent les mouvements et les renversements, de ce fait ils ont toujours
un temps d’avance sur les autres, ce qui leur permet de rafler le
pactole.
Dans ce monde barbare, les truands de la fortune «à tout prix», ont
tous les pouvoirs, et notamment celui de disparaître aux yeux du monde.
Leurs larbins répandent la peur de la catastrophe pour maintenir le
peuple dans la soumission et la servitude. Recroquevillée dans son
quotidien, la trouille au ventre, il ne se rebelle pas. Et quand cette
folie des accapareurs de richesse provoque de gros dégâts dans
l’économie réelle, on demande aux populations appauvries de payer les
réparations, afin d’éviter la banqueroute du casino mondial. Les
gestionnaires d’État sèment la panique à tout vent pour mieux justifier
ce détournement des fonds publiques, qui n’est qu’une escroquerie
sociale de plus, mais une de taille.
N’oublions pas que les richesses n’ont pas soudainement disparues,
elles ont seulement changées de main. Certains font des affaires
extraordinaires.
«Ce qui est traité en bourse, cette plus-value volée aux travailleurs
puis rejouée aux dés sur le marché, n’est que la partie visible de
l’économie. La masse invisible de cet iceberg a plus que doublé en 10
ans, en échappant à toute réglementation. Elle représenterait plus de
80% des opérations financières. Les transactions sur le marché des
changes et les produits dérivés négociés entre particuliers,
représentent aujourd’hui environ 50 fois le volume des transactions de
l’économie réelle. Elles se comptent en millions de millards de
Dollars, et peut-être beaucoup plus car si elles ne sont pas
contrôlées, on ne peut pas en connaître précisément le montant.
Ce que la propagande nous montre de la spéculation n’en n’est qu’une
petite partie. En effet les quatre cinquièmes des opérations
financières se déroulent hors-marché, de gré à gré entre ordinateurs,
de particuliers à particuliers, sans comptabilité, sans contrôle et
sans entrave. La finance s’est numérisée et l’économie dématérialisée.»
(Stratagèmes du changement, de l’illusion de l’invraisemblable à l’invention des possibles, extrait du chapitre III)
Le spectacle, qui n’est rien d’autre que la vision publicitaire du
monde marchand sur lui-même, ne parle que de débâcle économique,
doublée d’une récession sociale, pour mieux faire disparaître cette
gigantesque rafle des richesses par quelques accapareurs au dessus des
lois, au delà du visible. Dramatiser la situation leur permet de faire
croire à la fatalité de cette crise inévitable, bouc émissaire
planétaire, afin de mieux cacher cette monstrueuse arnaque ainsi que
les suivantes qu’ils nous préparent. La prochaine crevaison
viendra-t-elle de la bulle des fonds de pension, des matières
premières, de l’énergie, des produits agricoles, ou alors des paris sur
le futur ? La réaction en chaîne qu’elle pourrait entraîner n’est pas
prévisible. Tout est possible...
La peur de l’avenir n’est que l’expression de l’incertitude du devenir
des capitalistes qui n’ont plus de futur. Tous ceux qui n’ont plus
grand chose à perdre ont tout à espérer d’un nouveau monde émergeant
par nécessité.
Ce qui nous arrive n’est pas un accident de parcours, mais bien
l’aboutissement du capitalisme, l’achèvement d’un monde suicidaire.
Lukas Stella
http://inventin.lautre.net
à 22:57