--> Amplifions les luttes sociales dès aujourd'hui. Pour construire la société égalitaire de demain !
La crise : un désastre socialDepuis plus de 30 ans, le concept de crise (crise pétrolière de 73, Krach boursier de 87, crise du travail, des idéologies, de l'État-Providence, et aujourd'hui crise financière) est utilisé comme si celles-ci étaient provoquées par des forces invisibles qui agiraient hors du cadre, supposé harmonieux, du Capitalisme mondial. Pourtant, ces « crises » sont des phénomènes logiques inhérents au système capitaliste. Il s'agit de « crises d'adaptation » d'un système en mutation permanente, qui cherche à maintenir et accroître toujours plus le profit des classes dominantes. Elles permettent aux patrons de justifier les bas salaires, la précarité, les licenciements ou les délocalisations. Du côté des politiques, droite et gauche confondues, la crise est régulièrement utilisée pour faire apparaître tous les reculs sociaux comme quelque chose de nécessaire et d'inévitable.
La crise
financière actuelle n'est pas quelque chose de nouveau en soi car le
système en a connu plusieurs. Elle choque pourtant par sa dimension
mondiale et ses effets sociaux désastreux, au sein des pays les plus
riches. Elle permet à chacun de voir clairement les effets de la
spéculation boursière et du système capitaliste sur l'ensemble de la
planète : en France, en Chine, aux USA... Des usines ferment et mettent
au chômage des milliers de salariés (Renault, La Redoute...). 15,5 % de
la population américaine n'a aucune couverture sociale. Des milliers de
personnes sont expulsées de chez elles après que leur maison ait été
saisie. La récession mondiale qui s'annonce va se traduire par une
augmentation du chômage et un appauvrissement des couches de la
population les plus en difficulté. L'Islande, l'Ukraine, le Pakistan ou
encore la Hongrie, ont déjà demandé des prêts d'urgence au FMI, pour
éviter la faillite. A cela s'ajoute une crise alimentaire globale, et
son cortège de famines et de malnutrition, entraînée par le report des
fonds spéculatifs sur le marché alimentaire, suite à la crise des
subprimes.
La classe dominante organise le casse du sièclePour
assurer le salaire moyen des 50 patrons français les plus riches, qui
s'établit à 383000 euros par mois en 2007 (soit une augmentation de 20%
par rapport à 2006), et qui représente 310 fois le SMIC, il faut rogner
sur les salaires et les prestations sociales. Donc, pour répondre à la
baisse sensible des profits, les premières mesures prises en France
pour faire face à la crise sont la suppression définitive de la taxe
professionnelle des entreprises, (impôt direct qui servait à financer
une partie des recettes fiscales des collectivités territoriales),
l’assouplissement des règles du CDD, le départ à la retraite à 70 ans
« pour ceux qui le veulent », la suspension des cotisations patronales
à l'UNEDIC (soit 1 milliard et demi d’euros), les recours aux contrats
aidés et aux contrats de transition professionnelle, une future loi sur
le travail le dimanche... Bref, une cascade de mesures aggravant d’un
côté la flexibilité du travail et la précarité et facilitant, de
l’autre, le profit patronal.
Alors qu’il faudrait seulement 30
milliards de dollars par an pour assurer la sécurité alimentaire des
quelques 923 millions de personnes qui souffrent de la faim dans le
monde, l'État américain a déboursé 700 milliards de dollars pour sauver
son système bancaire ! L'Europe a - elle - débloqué 1700 milliards
d'euros pendant que la Chine y consacre près de 600 milliards de
dollars. Quant à l'État français, qui - au nom de son endettement -
supprime des milliers de postes de fonctionnaires, gèle les salaires et
les allocations chômage, rallonge la durée de cotisation pour les
retraites, dérembourse des actes médicaux et des médicaments, il a
débloqué 360 milliards d'euros en quelques jours pour prêter aux
banques en difficulté et aux spéculateurs ! Depuis, 100 milliards
d'euros supplémentaires ont été alloués aux entreprises pour 2009-2010,
sous forme notamment d'exonérations de cotisations sociales.
L'État au service du CapitalismePartout,
les gouvernements ont décidé de faire payer la crise à celles et ceux
qui travaillent, en organisant une redistribution historique des
richesses au profit du grand capital. L'État, qui a souvent évoqué son
impuissance face aux réalités économiques, montre qu'il peut tout à
fait intervenir dans la gestion de l'économie quand les multinationales
en ont besoin. Au cours de l'histoire, le Capitalisme a su s'adapter,
passer d'une forme où le profit était dominé par la banque et le
commerce, à une forme dominée par l'industrie et aujourd'hui par la
finance. De même, le système capitaliste a pris plusieurs visages, de
celui du libéralisme à celui de formes d'économies mixtes comme le
fordisme jusqu'au Capitalisme d'État en URSS ou en Chine. L'État, loin
d'avoir disparu a, au contraire, toujours servi à légiférer pour
assurer une pérennité à la classe dominante, dans la possession de ses
privilèges, tout en ménageant les classes populaires quand il existait
un risque trop élevé de révolte, comme au cours de la période des
« trente glorieuses ». L'État a favorisé l'essor du Capitalisme
financier international et favorise l'entraide pour les plus riches. Il
ouvre le champ à leurs profits en privatisant les secteurs publics
rentables, qui ont été financés par la population et à l'inverse, il
efface et rachète leurs dettes en nationalisant ou en rendant publique
les pertes des entreprises privées. Alors qu'il s'insurge
habituellement contre les déficits publics, il n'hésite pas à
s'endetter pour la France d'en haut, pour le système banquier et
boursier malgré son caractère parasitaire et destructif. Ce qui est
vrai pour la France est vrai ailleurs.
Propagande pour rendre la réalité acceptableAujourd’hui,
l'essentiel pour les dirigeants est de persuader les populations - par
le biais des experts et en particulier les experts économiques - que le
Capitalisme est le seul système viable. Rendre acceptable l'impasse
dans laquelle nous projette ce système est l'objectif de leur
communication. Cela leur est d'autant plus facile que depuis 40 ans,
les classes populaires, autrefois représentées par le mouvement
ouvrier, ont explosé en une myriade de statuts précaires, d’employés,
d’intérimaires, d’ouvriers, de rmistes, etc. isolés et donc fragilisés
face à la propagande étatique et médiatique. En agitant le spectre de
la récession et de la pauvreté imminente, ils nous préparent à accepter
le vol de l’argent public, le nôtre – celui de nos impôts, nos
cotisations, nos épargnes – pour renflouer ceux-là même qui ont
fabriqué la crise en jouant en Bourse et qui continuent à amasser des
profits considérables grâce au subtil jeu de « yoyo » des cotations
boursières ! Les patrons qui dissertent sur un code de gouvernance
depuis plus de 10 ans déjà, pour « moraliser le Capitalisme » ne
veulent, en réalité, pas de loi qui pourrait les contraindre. Pour eux,
ils prônent la responsabilité plutôt que la contrainte : la liberté
absolue pour eux, les lois liberticides pour la France d'en bas !
Pour
peaufiner leur stratégie, les dirigeants insistent, avec la complicité
des médias, sur les pourcentages de chômage chez les immigrés, sur des
pseudo fraudes aux prestations sociales ou encore sur tel ou tel fait
divers dramatique, afin de détourner notre attention, mais aussi la
colère, vers les plus démunis d’entre nous. Tout est fait pour
« diviser pour mieux régner » et briser tout cadre collectif, toute
solidarité.
Dans le même temps, la classe dirigeante met en place
des outils d'intimidation et de répression qui lui permettront, le cas
échéant, de faire face à une révolte sociale : lois sécuritaires,
construction de « l'ennemi intérieur » en brandissant le spectre du
« terrorisme », développement des fichiers et des effectifs de police,
entraînement de l'armée à la guérilla urbaine...
Il n'y a pas de Capitalisme à visage humain !Il
n'y a pas de Capitalisme qui soit basé sur le bien être des gens. Par
conséquent, il n'y a pas de solution capitaliste à la crise financière,
puisque la dynamique de profit du système capitaliste implique
nécessairement que l’enrichissement des uns entraîne l’appauvrissement
proportionnel des autres ! Le Capitalisme et l'État sont les facettes
d’un seul système qui perpétue les inégalités. Les filières de
formation (ENA, IEP,...) conduisent la grande bourgeoisie à des postes
de direction, qu'ils soient dans la fonction publique, dans les
conseils d'administration des entreprises, ou dans les cabinets
ministériels de droite ou de gauche. Il n'y a pas de coupure
idéologique ni économique entre les grands corps d'État et les grands
patrons : au sortir de ces « grandes écoles », les jeunes diplômés
choisissent d’adhérer à tel ou tel parti, en fonction des possibilités
d’avancement de carrière que ce parti leur offrira, là ou ils vivent !
C'est la même classe qui détient le pouvoir politique et économique, et
le système électoral participe de cette collusion. Au niveau local
comme au niveau national, nous n'avons aucun contrôle possible sur les
décisions qui se prennent, soi-disant en notre nom !
Se battre pour un autre systèmeLes
défenseurs du libéralisme prétendent que la crise n’est pas due à
l’élément systémique du Capitalisme - c’est-à-dire le profit - mais est
provoquée par des banquiers et boursiers avides qui profitent du
dysfonctionnement des marchés boursiers et des marchés des crédits,
alors que les amoureux de l’étatisme (rouges, verts et/ou autres)
assurent que la crise est due au néo-libéralisme et à la
non-intervention de l'État dans l’économie mondiale et nationale. Mais,
ni le Capitalisme fondé sur la recherche permanente du profit, au
bénéfice d'une minorité ; ni l'État basé sur la protection des intérêts
du Capital et sur la confiscation du pouvoir par une minorité, ne
peuvent représenter une solution à la crise pour les travailleurs ou
pour l'ensemble de la population.
Pour ne pas être une nouvelle fois
les dindons de la sinistre farce capitaliste, il faut d'abord refuser
le hold-up permanent que le Capitalisme nous impose, et qu'il tente
d'accroître pendant la crise. Dés aujourd'hui se battre pied à pied
dans toutes les mobilisations sociales : contre la privatisation de La
Poste, contre l'éducation au rabais du gouvernement, pour une
protection sociale et une retraite décente... Mais aussi faire
converger nos aspirations à la justice sociale vers un « lutter tous
ensemble », en construisant un mouvement social de grande envergure,
pour reprendre l'offensive face aux financiers, au patronat et à son
bras armé, l'État.
Mais, il faut aussi se donner des perspectives de
changement de société pour rompre avec le Capitalisme et l'État,
porteurs de crises et d'appauvrissement, faute de quoi pour l'immense
majorité de la population, le Capitalisme restera un horizon
indépassable, ce qui enfermera nos luttes dans le cadre de l'ordre
établi, favorisera le statut-quo et facilitera la tâche de répression
de l'État.
Des propositions anarchistes pour une alternative socialeNous
proposons de construire ces perspectives au sein des mouvements sociaux
pour qu'elles appartiennent à toutes et tous. Pour que la richesse que
nous participons tous et toutes à produire ne soit plus accaparée par
quelques uns, nous proposons la socialisation de l'ensemble de
l'économie. Nous militons pour la répartition égalitaire des richesses,
seul moyen de répondre, pour une société, à la satisfaction des besoins
de toutes et tous.
Pour établir et garantir cette égalité, il faut
rompre avec la confiscation du pouvoir par une minorité, il faut rompre
avec l'État. Il faut y substituer la participation du plus grand nombre
aux prises de décisions. Nous proposons une économie socialisée et
égalitaire gérée directement par les travailleurs et les usagers. Cela
avec des structures fonctionnant sur la démocratie directe, pour
permettre la participation de toutes et tous, sur des mandats
révocables pour ne pas permettre que se reconstituent des privilèges et
sur le fédéralisme pour construire des projets de grande ampleur. C'est
à partir des mouvements sociaux que doit se construire la gestion
directe de la société, de la production et de la distribution des biens
et des services. C'est dès maintenant, au sein des luttes, que nous
devons faire l'apprentissage de décider et gérer la conduite des
mobilisations, pour demain prendre en charge collectivement la conduite
de la société.
Le 10 décembre 2008
Coordination des Groupes Anarchistes
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