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Errico Malatesta
in Le programme anarchiste
Marcher vers l'anarchie ne peut pas signifier le reniement de l'anarchisme à travers la constitution d'un gouvernement de soi-disant anarchistes. Il faut tendre vers ce que l'on veut en faisant ce que l'on peut.
Errico Malatesta
in Pensiero e volonta # 4, Rome, du 15 février 1924
Citation reprise en conclusion du Mémorandum du groupe Kronstadt
Fût-il un personnage aussi sulfureux que Georges Fontenis dans l'histoire du mouvement libertaire français au 20ième siècle. Celui qui se plaît à se nommer « Satan », « le Prince des ténèbres », celui qui, il y a quelques années encore en visite incognito à la librairie du Monde libertaire tendait un chèque au permanent de la boutique en lui disant : « la main du diable » ! Celui, aussi, qui verra son nom décliné dans de nombreux articles et ouvrages historiques en une sorte d'idéologie, le « Fontenisme », et en adjectif : « fonteniste ».
Evoquer Georges Fontenis n'est pas une affaire facile, une importante littérature aussi diverse que passionnée existe sur le sujet. De nombreux textes autobiographiques et thèses d'universitaires ou bien de militants s'attachant à l'histoire du mouvement abordent le personnage et bien souvent l'argumentation partisane contribue à forger un mythe autour du personnage.
Maurice Joyeux rédigera à ce propos dans le dix-huitième numéro de la revue anarchiste La Rue un long article justement intitulé : « L'affaire Fontenis ».
En introduction, il écrit : « Depuis une trentaine d’années, il existe dans notre milieu un mythe. Ce mythe c’est celui de « l’affaire Fontenis » ! Mythe qui repose sur un seul homme dont la présence parmi nous fut relativement courte, six ou huit ans au plus, et qui n’exerça son autorité que pendant la moitié de ce temps. Pour les militants qui se succédèrent, Fontenis fut le « méchant », le « loup-garou » de la fable, « l’affreux » de la tragédie, « l’Antéchrist » qui épouvanta non seulement une génération mais celles qui suivirent, qui ne l’ont pas connu mais qui l’évoquent chaque fois qu’une querelle idéologique secoue notre mouvement. Le personnage ne méritait ni un tel « honneur » ni une telle constance dans ce rôle « classique » que tous les groupes humains inventent pour se débarrasser du poids de leurs « péchés » et rejeter sur « Satan » celui de leurs erreurs. Je trouve ridicule ce recours à « l’affaire Fontenis » de la part d’un certain nombre de nos camarades pour expliquer ou justifier des désaccords. Le recours au « méchant » n’est rien d’autre que le recours à l’irrationnel, et la philosophie nous a appris que seule la littérature lui donne le visage du Faust de Goethe alors qu’il se trouve en nous et que c’est là qu’il faut le débusquer, plutôt que lui attribuer à la fois un visage séduisant et angoissant. Et si pour exorciser le diable il suffit, disent les bons pères, d’en parler, alors parlons de l’affaire Fontenis ! »
La thèse d'un Georges Fontenis mythifié, sorte de bouc-émissaire des échecs et des divisions d'un mouvement anarchiste, alibi de certains de ses compagnons de route rejetant sur un seul un bilan bien encombrant, parait séduisante. Car si Fontenis tint assurémment le premier rôle dans cette entreprise, rien n'aurait été possible sans l'obéissance aveugle de la part de ses complices et d'autre part de l'inquiétante passivité et légereté des militants d'une organisation se réclamant pourtant de l'anti-autoritarisme. Les anarchistes ne disent-ils pas justement que là où nul n'obéit, personne ne commande ?
Si cet épisode a rencontré autant d'écho et que l'évocation de Fontenis provoque encore chez de nombreux militants un sentiment d'inquiétude et de colère, c'est peut-être que cela renvoit directement à un tabou, celui du danger des comportements autoritaires et bureaucratiques dans le mouvement libertaire.
Sur cette brève considération, et à partir des multiples témoignages plus ou moins partiaux, ou bien encore des travaux d'historiens universitaires ou militants, tentons avec prudence de retracer le parcours de ce Georges Fontenis.
Revenir sur la vie et l'action de Georges Fontenis, c'est aussi et surtout retracer l'évolution complexe de la sensibilité « communiste libertaire » dans le mouvement anarchiste français du lendemain de la seconde guerre mondiale à aujourd'hui.
Georges Fontenis est né le 14 avril 1920 à Paris de parents socialistes et syndicalistes. Dès 1936, il approche le mouvement libertaire à l'occasion des grèves de juin 1936 et de la Révolution espagnole. C'est d'ailleurs à l'occasion d'un meeting sur l'Espagne organisé à Noisy-le-Sec qu'il rencontre ces premiers militants anarchistes. Il rejoint peu après un groupe de jeunes libertaires qui milite sur Noisy. Pendant la guerre, il devient instituteur, réussit à échapper au STO et rejoint la CGT et l'Ecole émancipée. C'est à ce titre qu'il participera aux Commissions d'épuration de l'Education nationale en 1945. C'est à l'Ecole émancipée qu'il rencontrera la militante anarchiste Solange Dumont qui le présentera à la Commission administrative provisoire, chargée de poser les bases de la reconstruction du mouvement anarchiste et d'organiser un congrès national. Intégré immédiatement dans la Commission, il est désigné pour organiser les liaisons parmi les jeunes militants et devient membre du groupe de Paris-Est. Les 6 et 7 octobre 1945 ont lieu les Assises du Mouvement libertaire et le 12 décembre se tient le congrès constitutif de la Fédération anarchiste (FA). Georges Fontenis contribue à la création de la Fédération des jeunesses libertaires et en devient secrétaire à son congrès de fondation. Il est également chargé d'animer les formations théoriques destinées aux jeunes adhérents. La Fédération anarchiste se développe rapidement tandis que le Libertaire, redevenue hebdomadaire tire à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires et caracole en tête des ventes. Les 13, 14 et 15 septembre 1946 se tient à Dijon le second Congrès de la Fédération anarchiste, lequel voit les divisions d'avant-guerre renaîtrent et les conflits entre les tendances s'exacerber. Alors que le Congrès peine à nommer un nouveau secrétariat, Georges Fontenis est contre toute attente proposé au poste de secrétaire général. Homme neuf et irréprochable, sa jeunesse, son statut d'instituteur, comme le fait qu'il n'appartienne à aucun des clans qui s'affrontent, dégage rapidement un large et inespéré consensus : à juste 26 ans, il devient secrétaire général de la jeune Fédération anarchiste et directeur de publication du Libertaire. Ce même congrès décide également la création d'une Commission d'autodéfense. Tenue secrète, celle-ci devait lutter contre les infiltrations et intoxications policières, staliniennes ou fascistes et préparer la lutte clandestine en cas de prise de pouvoir totalitaire ou de troisième guerre mondiale. La commission sera durant toute son existence sous la responsabilité de Fontenis, que celui-ci soit renommé ou pas dans ses fonctions de secrétaire général.
En 1947, George Fontenis est reconduit au secrétariat général à l'issue du troisième congrès qui se tient à Angers. Il est alors en disponibilité (congès sans solde) de l'Education nationale et peut donc donner tout son temps à la FA et au Libertaire dont il devient secrétaire permanent de rédaction.
Le quatrième congrès tenu en 1948 à Lyon le nomme encore une fois secrétaire général, ce congrès décide également de la création de « La Revue anarchiste » dont Fontenis sera également responsable.
Cette même année, Georges Fontenis participe à une tentative d'assassinat contre le Général Franco, avec des anarchistes espagnols en exil. Son rôle se limite à signer l'acte d'achat d'un avion de tourisme Norécrin qui sera transformé en bombardier et piloté par trois militants espagnols dont le fameux « général sans dieu ni maître », Antonio Ortiz. L'attentat échouera de peu : au moment de larguer les bombes volées dans un dépôt de la Luftwaffe sur la résidence de Franco située dans la baie de Saint-Sébastien, deux, puis quatre, puis six avions de chasse se présenteront et contraindront à la fuite le Norécrin. La tentative ne sera pas renouvelée, Fontenis sera plus tard interrogé sur l'affaire par la DST qui décidera de ne pas donner suite.
Lors de l'été 1949 a lieu près de Cannes dans une auberge de jeunesse gérée par le couple José et Renée Salamé un « stage de formation » qui regroupera plusieurs militants communistes libertaires et dont les débats conduiront à la nécessité de se constituer en fraction secrète. L'Organisation Pensée-Bataille (OPB), du nom d'un ouvrage de Camillo Berneri, est créée en janvier 1950. L'OPB est une organisation clandestine à l'intérieur de la Fédération anarchiste, elle est fondée selon Georges Fontenis sur « la nécessité d'une organisation très structurée, alliant unité idéologique, unité tactique et nature de classe », dans le but de « mettre fin à la domination dans la FA des courants individualisants et synthésistes qui faisaient prévaloir un immobilisme et un confusionnisme ». Pour cela il faut combattre et écarter ceux qui seront qualifiés de « vaseux », « nullistes », « puristes », « verbeux », « libéraux »... afin de « transformer les mouvements anarchistes le plus possible dans le sens d'organisations efficaces et sérieuses défendant un corps de doctrine cohérent » (Statuts de l'OPB). Alexandre Skirda dans son ouvrage « Autonomie individuelle et force collective – Les anarchistes et l'organisation de Proudhon à nos jours » (Editions AS - 1987) affirmera que le groupe d'autodéfense se détournant de sa mission originelle et profitant du secret entourant son fonctionnement constituera le creuset de l'OPB.
Fontenis en devient dés sa création et jusqu'à sa dissolution le secrétaire du bureau, dit également « Responsable au plan ». Les adhésions à l'OPB se font par cooptation après enquête sur le passé du futur militant et sur propositions de deux parrains. Ses membres sont tenus au secret et à la plus stricte obéissance, le bureau de l'OPB vérifiant la stricte application des consignes, les Statuts allant jusqu'à préciser de façon sidérante que : «Tout militant en activité, suspendu, exclu ou démissionnaire doit observer le secret absolu sur OPB et les militants qui la composent. Tout manquement à cet égard entraîne les mesures judiciaires adéquates par OPB et pouvant aller jusqu’à la suppression en cas de dénonciation mettant en danger la sécurité des militants » !
L'OPB va rapidement noyauter l'ensemble des postes à responsabilité de la FA, chaque réunion, chaque congrès sont préparés en amont et les décisions de l'OPB deviennent systématiquement les décisions de la FA.
Le cinquième Congrès de Paris en 1950 instaure le vote dans l’organisation sur la base d'un mandat par militant remplaçant le vote par groupe, mais les positions restent indicatives et n’engagent pas les groupes opposants. Georges Fontenis conserve toujours le secrétariat général de la Fédération.
Lors du sixième congrès de Lille de la Fédération anarchiste, Georges Fontenis déclare ne plus vouloir être reconduit dans sa fonction de secrétaire général après cinq années de mandats consécutifs. Prétextant laisser la place aux jeunes, il propose André Moine, adhérent comme Fontenis au groupe de Paris-Est et à l'OPB, qui sera nommé sans le moindre souci. De fait Fontenis ne lache rien, et pour cause, au congrès de Lille, l'OPB est entièrement opérationnelle et a placé et imposé ses partisans dans 8 des 9 secrétariats, tandis que les responsabilités des commissions paysannes, ouvrières et de lecture du Libertaire incombent également à des militants OPB.
En mai 1952 Georges Fontenis demanda une entrevue à Maurice Joyeux, membre du groupe alors le plus nombreux de la FA : le groupe Louise Michel du XVIIIe arrondissement. Le rendez-vous fixé dans une contre-allée des Jardins des Buttes-Chaumont, digne d'un vieux film d'espionnage, visait sans dévoiler l'existence de l'OPB à sonder l'attitude de Joyeux et de l'incontournable groupe Louise Michel en vue du prochain congrès. Fontenis voulait proposer à Joyeux une sorte de double direction de la FA, la direction intellectuelle étant naturellement attribuée à Fontenis, l'autre direction, ouvrière, revenant à Joyeux. Le refus de ce dernier allait, sans qu'il le sache encore, contraindre Fontenis et l'OPB à se débarasser de Joyeux et du groupe Louise Michel.
En juin 1952, au Congrès de Bordeaux, Fontenis et l'OPB profitent de la division pour obtenir à chaque vote une majorité pour l'ensemble des postes et responsabilités tandis qu'une « Résolution sur l'orientation et la tactique préparée par l'OPB, amendée jusqu'au dernier moment » d'une inspiration nettement communiste libertaire, est adoptée. En octobre une première scission des opposants se produit ; en outre des exclusions furent prononcées à l’encontre de Joyeux, Aristide et Paul Lapeyre, Fayolle, Arru, Vincey, etc. Ces militants se regroupent alors à partir d'octobre 1952 au sein de l'Entente anarchiste, « organe destiné à mettre en contact, en dehors de tout exclusivisme, les fédérations, groupes et individus, se réclamant de l'anarchisme. » Dans son premier numéro, Raymond Beaulaton écrira : « L'unité anarchiste du lendemain de la guerre fut vite brisée. Il y a deux ans, au congrès de Paris, le système de consultation par vote fut institué. En deux ans, cette unité fut détruite ».
De 1952 à 1953, Georges Fontenis rédige dans le Libertaire une longue série d'articles sous la rubrique « Problèmes essentiels », tandis que suite à l'éviction de Maurice Joyeux, Fontenis assume désormais l'écriture des éditoriaux du journal.
Le congrès de Paris des 23, 24 et 25 mai 1953 verra l'achèvement de l'opération de prise de contrôle de la Fédération anarchiste et la consécration de la stratégie de l'OPB et de son leader Georges Fontenis. Les derniers groupes refusant de se soumettre à la ligne politique de l'OPB sont exclus (groupes d'Asnières, Louise Michel et de Bordeaux). La FA se transforme en Fédération Communiste Libertaire (FCL) par un vote majoritaire de 71 mandats contre 61 (les autres noms proposés étant « Parti communiste anarchiste » et « Parti communiste libertaire » !). Désormais, les adhérents sont tenus de défendre en public les résolutions de congrès, mêmes s’ils ont voté contre. La FCL récupère ainsi le fruit de l'ensemble des efforts de reconstruction du mouvement anarchiste depuis la Libération : le journal, la boutique du Quai de Valmy et la trésorerie. Le titre du Libertaire désormais devenu « Organe de la Fédération Communiste Libertaire » est désormais imprimé en rouge et non plus en noir, expression symbolique de la rupture avec le « vieux » mouvement anarchiste.
En fait, la FCL ne regroupe que seize groupes et environ 130 à 160 militants placés sous le contrôle de l'OPB. Rapidement le caractère « collégial » de l'OPB a fait place à l'autorité d'un seul, son commissaire au plan, Fontenis. Les premières tensions que d'autres qualifieront de rivalités apparaissent au sein du camp communiste libertaire, des militants du groupe Kronstadt qui protestent contre les excés autoritaires et la « déviation fonteniste » sont exclus en mars 1953 de l'OPB (des 17 membres fondateurs de l'OPB, seuls 6 en sont encore membres en 1954, dont trois sont toujours les 3 mêmes membres du bureau). Le groupe Kronstadt fera paraître en août 1954 un Mémorandum de 82 pages dénoncant publiquement, dans le détail et pour la première fois l’existence de l’organisme secret OPB ainsi que l’orientation léniniste de la FCL. Il sera exclu à son tour de la FCL en mars 1955.
Une compilation des articles de Fontenis publiés dans la rubrique « Problèmes essentiels » est éditée en début mai 1953 dans une brochure intitulée « Manifeste du communisme libertaire ». Une version à peine modifiée de ce texte sera adoptée par le congrès de la FCL quelques jours plus tard sous la forme d'une « Déclaration de principes » de la nouvelle organisation qui consacrera la nouvelle orientation de la FCL : « L’organisation spécifique des militants du communisme libertaire se considère l’avant-garde, la minorité consciente et agissante exprimant dans son idéologie et son action les aspirations du prolétariat... » Jean Maitron dans son ouvrage « Histoire du mouvement anarchiste en France » (Editions Maspéro - 1982) parlera à propos du « Manifeste communiste libertaire » de Georges Fontenis d'un « effort de synthèse entre l'anarchisme et le léninisme ». Roland Biard dans son « Histoire du mouvement anarchiste 1945-1975 » (Editions Galilée – 1976) dira du Manifeste que « ce texte, sous des allures « plate-formistes » était en fait une apologie de l'avant-gardisme et contenait une orientation nettement léniniste ». Alexandre Skirda dans son ouvrage précité s'interrogera si le but du Manifeste n'était pas comme on l'a cru, adressé au mouvement anarchiste, dans une tentative de le « bolchéviser », mais plutôt, orienté vers les militants ouvriers, sympathisants et dissidents du PCF, dans le but de les « anarchiser ». Ce que semble confirmer la stratégie de la FCL qui en janvier 1954, publie un « Programme ouvrier », dénoncé par le groupe Kronstadt comme une « pâle copie » du programme revendicatif de la CGT. Cette tendance à prendre le PCF et la CGT comme modèles deviendra un leitmotiv constant.
Cette orientation est confortée par l'attitude d'un Georges Fontenis, qui dès novembre 1953, n’hésite plus à cacher sa pensée profonde : « La doctrine communiste libertaire est plus réellement basée sur le matérialisme dialectique que ne le sont les positions politiques du marxisme ». Il commence par ailleurs à participer au collectif et revue marxiste proche des communistes de conseil « Socialisme et Barbarie » avec un premier article, « Présence dans les syndicats » dans le numéro d'octobre 1954.
En juin 1954, une éphémère Internationale Communiste Libertaire (ICL) tient son premier et unique congrès à Paris, 3 pays sont alors représentés, la France, l'Italie et l'Espagne mais une seule organisation, la FCL.
La question de l'élaboration d'un nouveau « Front populaire » ou « Front ouvrier » est posée, en mai 1955, le Libertaire ouvre largement ses colonnes à André Marty, député et dirigeant du PCF qui vient juste d'être exclu, tandis qu'en juillet 1956 la FCL participe à un meeting commun avec le député communiste René Bellanger.
Les militants et groupes exclus de la Fédération anarchiste se resaisissent rapidement : du 25 au 27 décembre 1953, se tient à Paris un congrès réunissant 56 groupes qui organisera la reconstruction de la nouvelle Fédération anarchiste, celle-ci reprend le nom délaissé par la FCL et se dote d'un nouveau journal : Le Monde libertaire, dont le premier numéro mensuel paraîtra en octobre 1954.
La FCL qui s'est emparé de la trésorerie de la Fédération anarchiste, de son siège et de sa librairie et surtout du Libertaire hebdomadaire va survivre jusque 1956 et sa participation aux élections législatives de janvier de la même année. En effet, dés février 1955, la question d'une participation aux élections est posée, une motion qui posait la question suivante : « La bataille électorale étant devenue une forme de lutte de classe, ne pourrions-nous pas envisager cette question comme une question de tactique liée aux circonstances et aux faits du combat social ? » est unanimement acceptée. Dans le Bulletin intérieur d’avril, un article de neuf pages signé F. (Fontenis ?) intitulé « Pour le praticisme révolutionnaire » affirme : « Nous pouvons participer aux luttes électorales, (…) nous occuperons alors non des postes de législateurs mais d’agitateurs. Nous voyons là une forme d’agitation qu’on ne peut négliger ». La discussion s’engagea dans les groupes et le congrès de mai accepta à une assez forte majorité la participation aux élections sauf les groupes de Grenoble et Mâcon qui quitteront la FCL. A l'occasion des élections législatives du 2 janvier 1956, la FCL présente dix candidats dont Fontenis et André Marty. Le Libertaire titrera « La FCL entre dans la lutte » tandis que Maurice Joyeux dans le Monde libertaire répliquera par un cinglant « La FCL entre dans la merde » ! Finalement, la liste communiste libertaire récoltera 2219 voix soit près de 0,5% des suffrages exprimés.
Quelques militants du groupe Kronstadt exclus de la FCL fonderont en novembre 1955 le groupe Noir et Rouge et la revue du même nom. Ils créeront en 1956 avec les groupes de Mâcon et Grenoble les Groupes Anarchistes d'Action révolutionnaire (GAAR). Ces mêmes groupes et quelques autres réintégrerons la FA en 1961 au sein d'une tendance organisée, l'Union des Groupes Anarchistes Communistes (UGAC). « Le but de l’UGAC n’est plus d’éliminer comme Fontenis ces tendances par des pratiques secrètes et bureaucratiques, mais d’en prendre la tête, de constituer un noyau actif qui dans la pratique comme dans la théorie devrait le supplanter. (Rolland dans le Monde libertaire d'octobre 1962) ». Malgré une démarche initiale plutôt louable, les manoeuvres pour accéder aux responsabilités tout comme l'édition d'un bulletin secret vont raviver de mauvais souvenirs et créer rapidement des tensions. Maurice Laisant dénoncera « une UGAC qui se comporte comme une organisation extérieure dont le ralliement n'aurait pour objet que le noyautage et la conquête de la FA ». Qualifiée de « fraction de type léniniste » par Maurice Joyeux, l'UGAC, prenant acte de son échec, quittera la FA en 1964.
La dernière campagne importante de la FCL et qui précipitera sans aucun doute sa fin, fut son soutien sans réserve aux indépendantistes algériens. Dans une sorte de fuite en avant, la FCL se jette à corps perdu dans la lutte, et enchaîne les procès, les saisies du Libertaire et les arrestations de militants dont Pierre Morain qui sera incarcéré. Des militants de la FCL seront des porteurs de valises aux profits du Mouvement National Algérien (MNA) de Messali Hadj et du Front de Libération National (FLN) d'Ahmed Ben Bella (qui deviendra le premier président de l'Etat algérien indépendant). Entre octobre et décembre 1956, Georges Fontenis écope de pas moins de 10 condamnations au tribunal pour complicités d'injures publiques et de diffamation diverses contre la police, l'armée et l'Etat, provocation de militaires à la désobéissance... il totalise déjà 19 mois de prison et près de 900 000 francs d'amende. Le Libertaire épuisé par les saisies quasi systématiques et les amendes et ayant perdu une bonne partie de son lectorat, cesse de paraître en juillet 1956. La FCL se met en sommeil et ne se réveillera plus. Les derniers militants dont Fontenis basculent dans la clandestinité. En juillet 1958, la DST met un terme à la cavale de Georges Fontenis et après quelques semaines de quartier militaire, celui-ci se voit accorder une liberté provisoire avant de bénéficier d'un décret d'amnistie du Général de Gaulle s'appliquant à tous les faits concernant la guerre d'Algérie.
Ainsi donc, sous les effets conjugués des départs et exclusions de plusieurs groupes et militants en désaccord avec les méthodes autoritaires et les dérives léninistes et avant-gardistes ou bien, au contraire, attirés par le trotskysme, de la désaffection causée par le piteux épisode électoral, et enfin de la répression consécutive au soutien aux luttes algériennes, prend fin l'aventure de la Fédération Communiste Libertaire.
Comment expliquer l'ascension d'un Georges Fontenis qui pu aussi facilement cumuler à la fois au sein d'une organisation composée, à priori, de militants anarchistes, les fonctions de secrétaire général pendant cinq années, responsable du groupe d'autodéfense, responsable des cours de formations aux jeunes militants, responsable de la Revue anarchiste, secrétaire de rédaction permanent et directeur de publication du Libertaire, responsable de la commission éducation, secrétaire des Jeunesses anarchistes et par dessus tout secrétaire de l'OPB !
Le Mémorandum du groupe Kronstadt se tente à une explication : « Ainsi, utilisant la passivité de la masse des militants et le noyautage méthodique, une fraction est parvenue à contrôler et à diriger l'ensemble de la Fédération. [...] Son monolithisme de pensée et sa cohésion disciplinée lui ont permis une stratégie et une tactique triomphant aisément des militants dispersés confiants dans le fédéralisme de l'organisation ». Selon le Mémorandum, le succès de l'entreprise de Fontenis tenait surtout au « manque de vigilance révolutionnaire des militants et au renoncement passif d'un grand nombre d'entre eux à exercer leur droit de critique sur les faits qui pouvaient leur paraître sujets à caution ». Enfin, dans sa conclusion, il dénonce : « [...] quelques militants ont organisé une société secrète au sein d'une Fédération anarchiste avec un bureau directeur, répartition des tâches, gestion, discipline quasi-militaire, statuts et objectif, ainsi qu'un but final inavoué et inavouable. Il est difficile, en effet, de prouver péremptoirement que ce but final : la bolchévisation, la prise de direction de la Fédération se trouve à la base de l'O.P.B. pour certains, cela est suffisamment rassurant seulement, il se trouve que dans une question d'ordre idéologique et organisationnel, nous n'avons aucun droit de nous préoccuper des intentions peut-être sincères à l'origine mais qui n'étaient pas pour autant moins déviationnistes dès le départ. On ne peut pas introduire dans une analyse politique la notion sentimentale des « bonnes intentions » et surtout nous ne pouvons pas le faire en tant que militants conscients quand il est question tout simplement des agissements totalement opposés à la base même à la doctrine anarchiste. Croire ou faire semblant de croire qu'on arrivera à mettre sur pied une organisation libertaire et fédéraliste en agissant en cachette et derrière le dos des camarades, en passant par dessus la tête des groupes et assemblées contrairement à tous les principes fédéralistes, s'assurer le contrôle bureaucratique de l'appareil organisationnel, croire qu'en organisant la dictature, on se bat pour la liberté, ne peut avoir d'autre signification que la naïveté ou alors l'absence totale de formation politique anarchiste ».
Maurice Joyeux dans ses mémoires intitulées « Sous les plis du drapeau noir – souvenirs d'un anarchiste » (Editions du Monde libertaire – 1988) propose une autre thèse axée sur la personnalité de Fontenis : « Le secrétariat général de l’organisation n’a pas chez nous l’importance qu’il a ailleurs, dans les partis politiques de gauche. Pour lui donner une importance similaire il faut transformer l’organisation et la faire grandir. En faisant grandir l’organisation, on fait grandir celui ou ceux qui se trouvent à sa tête. Le fossé qui sépare le fédéralisme libertaire de la population est encore trop important pour que l’organisation se développe et acquière un caractère de masse. Une seule solution, y introduire à côté d’un esprit libertaire aimable le matérialisme dialectique issu de Marx et qui, à cette époque, se répand un peu partout à une vitesse de croisière. Seul l’apport du marxisme peut permettre le développement accéléré de la Fédération anarchiste, seule la transformation de la Fédération anarchiste peut donner de l’importance à son secrétariat général d’abord et, par voie de conséquence, à son inspirateur, supposé, tel Lénine, patauger dans le génie.
Pour moi, c’est ça l’affaire Fontenis et les méthodes mises à part bien d’autres par la suite essaieront de barbouiller de marxisme l’idéologie libertaire. Armé de ce corps de “doctrine”, Fontenis ne travaille pour personne d’autre que pour lui-même. Où se trouve la sincérité dans ce mélange d’ambitions qui lie l’homme, qui impulse l’organisation, et l’organisation qui grandit l’homme ? »
Georges Fontenis maintient malgré tout quelques liens avec ses derniers fidèles. Le 22 juin 1958, la liaison des anciens militants de la FCL prend le nom d'« Action communiste », des contacts sont pris avec Voie communiste, opposition interne du PCF qui regroupe des troskystes pablistes et des opposants communistes ainsi qu'avec des militants du groupe Socialisme ou Barbarie. Action communiste se dissout à l'été 1958 et rallie Voie communiste, Fontenis rejoint l'équipe de rédaction de La Voie communiste et continuera d'y militer quelques années.
La même année, Georges Fontenis est réintégré dans l'Education nationale, son activité militante ayant fortement décrue, il peut désormais consacrer du temps pour sa carrière et préparer le concours d'inspecteur de l'Education nationale. A la rentrée 1959, il intègre l'Ecole normale supérieure de Saint-Cloud. Il sera par la suite nommé inspecteur en zone rurale de 1962 à 1967 puis professeur de psycho-pédagogie à l'Ecole normale de Tours.
En 1961, et contre toute attente, Georges Fontenis effectue un bref passage dans la Franc-maçonnerie. Par la suite, il affirmera en éprouver « ni honte, ni regret ».
A partir de 1968, Georges Fontenis reprend contact avec le mouvement libertaire. A Tours, il contribue à créer le Comité d'Action Révolutionnaire (CAR) et le 1er mai, il lance avec Pierre Morain un « Appel aux anciens de la FCL et de l'UGAC » dans lequel il propose aux militants communistes libertaires, aux groupes anarchistes communistes et aux marxistes critiques d'oeuvrer à une « solution commune ». Fontenis constituera très vite à Tours un groupe communiste libertaire, dit « Action Tours » qui adhère aussitôt à l'UGAC.
En 1966, L'UGAC publia une Lettre au mouvement anarchiste international dans laquelle elle affirme sa conviction que l'anarchisme ne peut assumer de leadership dans le mouvement révolutionnaire, et se résigner à n'être qu'une composante d'un mouvement plus large. L'UGAC entama alors une politique frontiste qui la conduit à faire des alliances avec des mouvements maoïstes ou pablistes.
En 1969, l'UGAC qui ne se considère plus comme une union de groupes se transforme en simple tendance et prend le nom de Tendance Anarchiste Communiste (TAC) qui intégrera un éphémère Comité d'Initiative pour un Mouvement Révolutionnaire (CIMR) aux côtés d'Alain Krivine, Daniel Bensaïd et Henri Weber de la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR), des militants du courant pabliste ainsi que des dissidents du PCF
Des militants de la TAC, de la Jeunesse Anarchiste Communiste (JAC) et des anciens de la FCL tiennent à Paris les 10 et 11 mai 1969 le congrès constitutif du Mouvement Communiste Libertaire (MCL). On y retrouvera notamment, outre Fontenis dont la réapparition causera quelques remous, Daniel Guérin (qui vient d'éditer « Pour un marxisme libertaire » (Editions Laffont - 1969) dans lequel il écrit notamment : « En prenant un bain d'anarchisme, le marxisme d'aujourd'hui peut sortir nettoyé de ses pustules et regénéré. »), Alexandre Skirda et Roland Biard. Fontenis est chargé de rédiger le texte de base de l'organisation, il écrira plus tard à propos du MCL que celui-ci était une sorte de « synthèse » de « certains apports du marxisme, du courant ouvrier libertaire, et du conseillisme ».
Outre la présence problématique de Fontenis qui risque par sa seule présence d'hypothéquer l'avenir du MCL et la place en marge du mouvement anarchiste, des tensions apparaissent dès l'origine entre des tendances plateformistes, spontanéistes, conseillistes et néo-situationnistes, le MCL s'étiolera rapidement avant la fin de l'année 1969 sans avoir pu réaliser ni une unité idéologique ni avoir pu capter la jeunesse contestataire.
Le MCL et l'ORA (Organisation Révolutionnaire Anarchiste, autre tendance organisée créée en 1968 au sein de la FA qui s'en détachera et se constituera en organisation spécifique en 1970) tentent un rapprochement qui échouera malgré l'intervention et la médiation de Daniel Guérin. En juillet, un groupe du MCL rejoint l'ORA tandis que quatre groupes de l'ORA rejoignent le MCL et donnent naissance à la première Organisation Communiste Libertaire (OCL-1) lors d'un congrès à Marseille les 10 et 11 juillet 1971. Ce même congrès adopte un texte proposé par Georges Fontenis qui sera publié dans le numéro de novembre de Guerre de classes sous le titre de « Plateforme communiste libertaire de 1971 ».
L'OCL-1 entretient dès sa création des contacts avec un groupe dénommé la Gauche marxiste autour de thèmes favorables au conseillisme. L'OCL-1 aura une existence assez agitée, tiraillée constamment entre des tendances contradictoires. En 1974, Daniel Guérin quitte l'OCL-1 pour l'ORA tandis que Georges Fontenis continue d'y militer, le groupe de Tours auquel il adhère assumant désormais le secrétariat de l'organisation. L'OCL-1, renforcée par la venue de deux groupes scissionnistes de l'ORA, fonde un nouveau Bulletin de discussion et de confrontation, Rupture, qui déclare contribuer à « l'élaboration du projet communiste à l'émergence d'un mouvement communiste radical ». Cette orientation « ultra-gauche-marxiste-luxembourgiste et conseilliste » va les conduire vers ce que l'on appellera « l'Autonomie ». En 1976, l'OCL-1 qui se désagrège progressivement, prononce sa dissolution le 28 novembre.
Après les grèves de 1974 dans les banques, le rail et aux PTT, naît une tendance ouvriériste et syndicaliste révolutionnaire au sein de l'ORA Cette tendance, baptisée Union des Travailleurs Communistes Libertaires (UTCL), critique les dérives ultra-gauchistes de l'ORA (notamment son antisyndicalisme) et sa confusion politique (divergences sur les questions de nationalité, de régionalisme et sur les luttes de libération nationale, départs en 1971 de militants vers des groupuscules maoïstes et exclusions en 1972 de militants qui soutiennent les « candidatures révolutionnaires uniques » et qui rejoindront en majorité Lutte ouvrière ou la Ligue communiste !).
En 1976, le Congrès de l'ORA à Orléans entérine l'exclusion de la tendance UTCL, et se rebaptise Organisation Communiste Libertaire (OCL-2 dite « deuxième manière », dont la filiation actuelle correspond à l'OCL éditant le mensuel Courant alternatif à partir de 1980). L'OCL-2 publie Front libertaire et un premier numéro de Pour l'autonomie ouvrière et l'abolition du salariat.
En avril 1976, les exclus de l'ORA créent un collectif pour une UTCL et se dotent au mois de mai d'un organe de presse : Tout le pouvoir aux travailleurs.
Georges Fontenis assiste en simple sympathisant les 25 et 26 février 1978 au congrès constitutif de l'UTCL qui passe du statut de tendance à celui d'organisation. Daniel Guérin adhère immédiatement tandis que Fontenis donnera son adhésion formelle en novembre 1980 et militera au groupe de Tours.
Au cours des années suivantes, l'UTCL agrégera divers groupes d'obédience communiste libertaire dont le Collectif jeunes libertaires (CJL) issu du mouvement lycéen et étudiant contre les lois Devaquet en 1986. En 1989, un processus d'unification est engagé et un « Appel pour une alternative libertaire » est publié dans le numéro de mai de Lutter et signé par plus d'une centaine de militants.
En 1991, l'UTCL et le CJL s'autodissolvent et fusionnent dans une nouvelle organisation : Alternative libertaire (AL) qui publie un « Manifeste pour une alternative libertaire » et édite le mensuel Alternative libertaire.
Georges Fontenis éditera en 1990 aux éditions Acratie ses mémoires sous le titre L'Autre communisme, histoire subversive du mouvement libertaire. Une édition revue, corrigée et augmentée sera publiée en 2008 aux éditions Alternative libertaire sous le titre de Changer le monde – Histoire du mouvement communiste libertaire 1945-1997.
En 2002, Georges Fontenis publiera à compte d'auteur Non conforme aux Editions Bénévent, accueilli avec « un certain malaise » dans Alternative libertaire de décembre 2002 par Guillaume Davranche et Patrice Spadoni qui écrivent : « Hélas, si Georges Fontenis a toujours le soucis de « briser les tabous », il ne le fait pas dans Non conforme, avec beaucoup de pertinence. L'exercice tourne ici à la recherche d'une posture iconoclaste qui le plus souvent rate sa cible, quand elle ne se fourvoie pas carrément. Le propos est confus, et ambigu sur certaines questions de société. En fin de compte, Georges Fontenis veut poser des questions non conformes mais la rédaction souvent ambivalente de ses réponses risque de conduire des lecteurs(trices) à des conclusions trop conformes... à l'idéologie dominante ». Georges Fontenis communiquera une protestation véhémente dans le numéro suivant de janvier 2003. Il restera adhérent à Alternative libertaire à Tours et, son état de santé se dégradant, se retirera de toute activité militante.
Militant à la Libre-Pensée d'Indre-et-Loire, il participera activement au Collectif Contre La Venue du Pape à Tours en 1996.
En 2008, un entretien filmé de Georges Fontenis réalisé par Franck Wolff est publié au format DVD sous le titre de Parcours libertaire. On le verra une dernière fois publiquement à une projection du documentaire à Tours le 21 février 2009.
Georges Fontenis aura indubitablement constitué une figure marquante et déterminante dans le mouvement libertaire de la deuxième moitié du vingtième siècle. Plus de six décennies de présence et de militantisme de la FA d'après-guerre, puis à l'OPB, la FCL, Voie communiste, l'UGAC, le MCL, l'OCL-1, l'UTCL jusqu'à AL d'aujourd'hui, dessinent un parcours plutôt hors du commun. S'il a largement contribué à l'affirmation et à l'autonomie d'un courant communiste libertaire se « suffisant à lui-même » naviguant entre un mouvement anarchiste et une extrême-gauche, on se rappellera surtout de lui pour ses méthodes autoritaires et dérives idéologiques ayant marquées un épisode des moins glorieux de l'anarchisme français. L'évocation de Fontenis, évoque encore aujourd'hui pour les uns un passé difficile à assumer et un héritage plutôt encombrant, pour les autres, il restera le responsable désigné d'un traumatisme profond qui affectera durablement le mouvement ainsi que le symbole du danger mortel pour l'anarchisme du leadership et de la tentation politique. Malgré de profondes et nombreuses inimitiés aussi bien dans le camp anarchiste que dans sa propre famille communiste libertaire et des désaccords récurrents avec les « historiens » du mouvement anarchiste (Jean Maitron, Roland Biard, Alexandre Skirda, Frank Mintz...)
Pour autant, Georges Fontenis assume, ainsi, dans une lettre à Alexandre Skirda en mars 1987, il affirme que « face à ceux qui condamnaient le mouvement anarchiste à une lente dégénérescence, à l'étiolement, la FCL, grâce à l'OPB, a sauvé l'honneur et permis, à travers maintes vicissitudes historiques, que se constitue un courant communiste libertaire dont la permanence est évidente aujourd'hui ». En juin 2000 dans un entretien avec Gilbert Estève dans l'Ecole émancipée, il affirme que « l'essentiel n'est pas à renier » et insiste « en ce qui me concerne, je persiste et je signe ».
Georges Fontenis s'est éteint dans sa quatre-vingt-dixième année le 9 août 2010 à son domicile d'Esvres en Indre-et-Loire.