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Les questions qui fâchent !
L’entrée de deux députés du Front National à l’Assemblée Nationale pose un double problème. D’une part la signification politique, idéologique et éthique des idées de l’extrême droite dans un parlement,… dont on sait ce que ça peut donner. D’autre part le décalage entre le nombre d’électeurs du Front National et le nombre de ses députés.
Ces deux problèmes montrent toute l’ambiguïté, les limites et les contradictions de ce que l’on appelle la démocratie représentative qui a su, et le 20e siècle nous nous montre, nourrir en son sein les germes du fascisme.
LE FRONT NATIONAL UN PARTI DANGEREUX
A l’origine, en 1973, le Front National s’est créé, d’entrée, sur une idéologie nationaliste et discriminatoire. Les fées qui se sont penchées sur son berceau sont en fait des sorcières qui ont pour nom : collaboration, vichysme, pétainisme, Milice, waffen SS, catholique intégriste, anti communisme, colonialisme, OAS,…
Le FN cajole les
exclus, les chômeurs, les pauvres, pour avoir leurs voix ( ce
qu’ont fait tous les partis fascistes et néo fascistes). Il fonde
son action et ses interventions sur des nervis directement issus
de l’extrême droite et mouvement néo nazi… les agressions voire
les crimes qui ponctuent son histoire sont là pour l’attester.
La brutalité des
actions, les fréquentations plus que douteuses de ses chefs en
font, en plus de ses idées un parti dangereux.
LE FRONT NATIONAL UN PUR PRODUIT DU « SYSTÈME »
Même si les chefs du FN
s’en prennent systématiquement au « système », il n’empêche
qu’il en est un pur produit et fait tout pour entrer dans ce
« jeu » qu’il dénonce à longueur de tribunes. Loin de lui
toute idée progressiste ou sociale, sinon pour surfer sur les
conséquences de la crise du système marchand,… ce que les partis
d’extrême droite on toujours fait. On n’a jamais vu le FN parler
du rapport capital/ travail, répartition des richesses,
initiatives solidaires, écologie, retraites, défense du système de
santé, défense du service public, respect des droits de l’homme…
Son discours économique est inexistant.
Il n’y a dans son programme aucune rupture avec les principes du capitalisme,… seulement un vague discours sur la nation, la culture (et encore succinctement !) et en filigrane, la race, la méfiance et le mépris de l’autre – hier le juif, aujourd’hui l’arabe, le tzigane,…
L’obsession des chefs du FN est de trouver leur place dans le système qu’ils disent honnir. Pour cela ils savent parfaitement jouer le jeu institutionnel et médiatique,… ce qu’ont toujours fait les partis d’extrême droite, sauf dans les cas de coup d’état militaire. L’accession au pouvoir par la voie légale est un grand classique du fascisme qui, une fois au pouvoir, supprime toutes les libertés.
Le danger est sournois, permanent et prend de multiples visages – même l’apparence démocratique - qu’il nous faut dénoncer.
LA SOUS REPRÉSENTATION DU FN
Avec un peu plus de
6 millions d’électeurs, le FN n’a que deux députés… Un tel
décalage le fait hurler – à juste titre - au nom du principe
d’égalité démocratique (ben voyons !). Formellement, il faut
reconnaître qu’il a parfaitement raison,… et il joue à merveille
de ce formalisme… la « vierge
démocratique » outragée !
Si le principe de la
proportionnalité est celui de la représentation démocratique – ce
que personne ne conteste – le FN devrait avoir beaucoup plus de
députés… surtout comparé au Front
de Gauche et aux écologistes.
Pourtant, à part lui, tout le monde se satisfait de cette
situation et évite soigneusement de l’évoquer.
Pourquoi ?
Il y a au moins deux raisons plus ou moins avouables :
- c’est un
parti « non républicain »
d’où ses difficultés dans les accords et reports de voix… Quoique
cette appréciation est plus ou moins élastique, pour la Droite
comme pour la Gauche (Mitterrand l’a favorisé en son temps et
l’UMP trouve des valeurs communes chez lui…) ;
- dans le jeu politique du bipartisme qui se met en place il est un troisième larron qui vient « picorer » dans la mangeoire de la classe politique déjà établie,… à ce titre il est mal venu… Rejet camouflé par une attitude pseudo morale qui tombe dès qu’il y a intérêt à s’entendre (non officiellement) avec lui.
Bref, le FN arrive difficilement à faire son « trou ». Est-ce scandaleux ?
Sur un plan formel, on l’a vu,…oui ! Mais peut-on en rester à un plan formel ?
Certainement pas.
Pourquoi ?
Parce que l’on sait ce qu’il en coûte de permettre à un parti néo fasciste de gravir les marches du pouvoir et de s’y installer.
Oui, mais dira-t-on, « que signifie de nier institutionnellement l’opinion de millions d’électeurs ? »
La réponse à cette question est difficile, car il faut pouvoir justifier, au nom de la « démocratie » et d’une « éthique politique », le fait qu’il se peut qu’une opinion partagée par une partie conséquente de la population, voire majoritaire est dangereuse… l’Histoire est là pour nous mettre en garde.
Oui, l’opinion publique majoritaire n’est effectivement pas à tous les coups ce qu’il y a de mieux pour l’ensemble de la population… Faut-il donner des exemples au 20e siècle ?
Oui, le suffrage universel peut conduire à la catastrophe, surtout quand les puissances d’argent se sont dotées de moyens de propagande efficaces et sans scrupules… ce qui est le cas aujourd’hui.
Oui, le fascisme est
toujours né des incapacités du système marchand à résoudre ses
contradictions et de son système politique à maintenir la paix
sociale.
Oui, l’expression de certaines idées, même majoritaires, ou soutenues par une partie importante de la population, sont dangereuses et à combattre.
En ce sens, la sous représentation des idées du FN est souhaitable ce qui ne règle pourtant aucunement la question de l’émergence de telles idées.
Mais quel politicien traditionnel osera l’affirmer ? Aucun ! Les intérêts – de caste, de nomenklatura - de la classe politique est plus dans la manipulation des citoyens que dans leur élévation de niveau de conscience. Reconnaître tout cela c’est montrer les limites du système économique marchand et celles du système politique dit « démocratique ». Donc silence total sur ces questions.
Le doute est maintenu au maximum jusqu’à ce qu’il soit finalement trop tard.
Une telle conception n’est-elle pas la porte ouverte au blocage de toute idée nouvelle, de toute idée progressiste, de toute idée de changement ?
Oui,… et là est
bien le danger ! Mais le système de « démocratie formelle » qui
fonctionne dans les pays démocratiques, permet dans une certaine
mesure d’imposer un ersatz
de démocratie, qui en a le goût, la couleur, l’odeur, mais qui
verrouille le processus démocratique en imposant de fait un bipartisme aboutissant
sur l’alternance. Les
risques de changements radicaux – dans le sens de la
transformation des rapports sociaux – sont ainsi conjurés… Par
contre l’éventualité d’une arrivée au pouvoir de l’extrême droite
est toujours possible,… et c’est cette solution que trouve le
capitalisme en cas de crise de majeure et de risque de son
renversement.
Juin
2012 Patrick
MIGNARD