Samedi 21 juin 2014, fin de la grève contre la réforme ferroviaire. Dans son bureau en préfabriqué, Yannick a la gueule de bois. Par la fenêtre ouverte, le délégué cégétiste regarde les rails des voies de triage vides. Les entrepôts figés. Quelques wagons immobiles. Officiellement, le travail a repris, même si tout respire l’abandon. Ici, c’est Cerbère, village des Pyrénées-Orientales abritant un peu plus d’un millier d’habitants. Plein sud, à quelques centaines de mètres, le tunnel ferroviaire des Balitres, creusé dans la roche, mène jusqu’au village espagnol de Port-Bou. Il faut imaginer la ruche, il y a trente ans, les centaines de cheminots qui trimaient sur les voies. L’écartement des voies n’étant pas le même entre les deux pays, les manœuvres ne manquaient pas entre changement des essieux et transbordements. 70 % du fret ferroviaire franco-espagnol passait par là et tout ce mouvement faisait vivre le village. Yannick lâche quelques bribes de son CV : « Je suis rentré au fret en 2000, au triage du Bourget, qui doit être un des seuls à fonctionner encore puisque tous les autres ont été fermés. Avant, on triait les wagons, c’était la technique du “wagon isolé”, un wagon par client. Aujourd’hui, cette activité n’existe plus. Il n’y a plus de tri dans le fret pour des questions de rentabilité. En 2007, je suis arrivé à Cerbère et ça travaillait encore. On était 95 personnes sur le site, maintenant on n’est plus que 26 : agents de manœuvre, maîtrise et encadrement compris. »
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