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Après avoir revisité le paradigme néodarwiniste de la théorie de l’évolution à travers l’histoire des idées, ce manifeste pour une écologie évolutivese propose à la fois de réfuter les idéologies qui parcourent la science du vivant et d'esquisser les fondements d’une nouvelle synthèse de la biologie évolutive intégrant les découvertes les plus contemporaines.
La
biologie est au cœur de la société tant par ses avancées
scientifiques que par les énoncés normatifs qu’on attribue à la
nature. Certes
l’histoire évolutive est louée comme le fondement de la biologie
Pourtant, le récit des manuels montre que l’évolution n'y possède
qu'une place marginale.
En outre, l’enseignement de la biologie parait échouer à
retoucher nombre d’erreurs et d’approximations notoires que
partagent nos contemporains.
Si l’évolution est la seule explication scientifique à la diversité biologique, le paradigme évolutif s’est mis en place au cours d’une longue histoire qui débute avec Lamarck. Nombre d’idées fondamentales sont alors posées. Le darwinisme, corrigé à la fin du 19ème siècle par Haeckel et Weismann notamment, va ensuite conforter la théorie évolutive en célébrant Darwin autour d'un corpus d'énoncés simples comme la concurrence des apparentés, la survie des plus aptes, la sélection naturelle et la lutte pour la vie. Mais cette biologie a aussi été parcourue par des conceptions ambiguës tolérant de poser le racisme ou l’eugénisme au centre de ses préoccupations.
Le recentrage de la théorie évolutive sur la diffusion des bons gènes a ensuite favorisé l’apparition de nouveaux paradigmes, et celui du gène égoïste de Dawkins est devenu l'un des plus consensuels. Se redéfinissant dans la continuité d’un darwinisme officiel, cette théorie, centrée sur le gène, fonde le principe matériel de l’évolution sur un matérialisme véritable, la réplication des gènes alors confondu avec la reproduction. Pourtant, des paramètres nouveaux comme la dérive génétique et le neutralisme de Kimura ont en même temps révélé que les variations évolutives pouvaient provenir de processus non sélectifs.
Les oppositions réactionnaires à l’évolution n’ont cependant pas cessé, déterminant contradictoirement une hégémonie de la théorie sur des positions affirmées irréductiblement néodarwinistes et sélectives. L’évolution est un fait scientifique, mais l’absence de finalité des processus continue d’être contesté par les réactionnaires. Comme le créationnisme est un révisionnisme fondamentaliste, il a aussi pris des aspects laïcs et s'est inscrit parmi d'autres confusions admises, religieuses ou ésotériques.
Il a fallu attendre l’émergence de chercheures féministes pour réfuter le sexisme de la théorie et certaines des conceptions les plus arbitraires du néodarwinisme. Enfin, plusieurs aspects clé de la théorie moderne comme la concurrence, la référence à l’égoïsme, les manifestations génétiques ont été interrogés par des modèles nouveaux (Reine rouge, exaptation, transferts horizontaux, épigénétique) contestant progressivement la suprématie d'une réduction de la biologie évolutive à la sélection des gènes. En outre, l’incertitude qui persiste autour des termes « sélection naturelle » et « concurrence » a fait subtilement, mais sans le dire, glisser la théorie biologique vers une conception quasi-lamarckienne où l’histoire naturelle prend le pas sur ces grands principes autrefois considérés comme universels
Cependant, des orientations scientifiques modernes, qui participent à une correction de l’ubiquité du paradigme sélectif du néodarwinisme, semblent dessiner les contours d’une nouvelle synthèse qui incorporerait nombre d’épisodes non darwiniens. La prise en compte de la reproduction différentielle et du principe d’efficacité en lieu et place de l’usage ambigu du terme sélection, favoriserait de beaucoup l’intégration des récentes observations dans un paradigme évolutif modernisé et permettrait d’en finir avec de nombreux de concepts périmés. Car, n’en déplaise à Dawkins et aux néodarwinistes orthodoxes, bien plus que les gènes, c’est leur expression qui reste l’objet de l’évolution biologique. La question évolutive ne réside pas dans le gène qui se « reproduirait », mais dans la diversification des phénotypes et l’évolution est une histoire collective.
La compréhension de mécanismes, dont le néodarwinisme ne rend compte que très imparfaitement, comme l’évolution de la sexualité, pourrait aussi permettre d’esquisser une piste vers un renouveau du paradigme évolutif. En se penchant sur l’importance des échanges archaïques de gènes, un autre scénario évolutif (théorie des bulles libertines) peut être construit qui privilégie les seules interactions immédiates, quand bien même les « bénéfices » sont nuls ou de faible ampleur. D’ailleurs, plutôt que de s’arrêter à la seule interaction négative de la concurrence, c’est l’ensemble des relations que les êtres vivants construisent avec eux-mêmes et avec les autres qu’on pourrait analyser. L’évolution se fait toujours avec les autres. Une interaction n’est jamais négative et même la pire apparemment, la prédation bénéficie aux populations de proies en réduisant la propagation des maladies. Car ici agit un principe matériel, la force structurante des interactions qui révèle combien l’évolution est l’histoire d’un agencement d’événements organisant progressivement des cellules, des organismes, des populations et des communautés à un travers un modèle en poupées russes. Que les mécanismes non-darwiniens soient rares ou très fréquents n’y change rien, une autre évolution est possible.
Et ce dépassement en cours constitue une perspective enthousiasmante pour tous les jeunes chercheurs et pour tous ceux qui tiennent à rendre la science populaire.