Le mois de juin se termine,… l’été est déjà installé. Les dernières traditionnelles manifestations viennent de se dérouler… Celles et ceux qui vont pouvoir partir en vacances - il y en a de moins en moins et de moins en moins longtemps – vont pouvoir oublier durant quelques jours la fonte vertigineuse des acquis sociaux.
Il règne dans ce pays une tenace odeur de pourriture, de décomposition, une atmosphère malsaine, à tous les niveaux, du bas au haut de la société et jusque dans les recoins les plus insignifiants – le sport par exemple.
UN SYSTEME A BOUT DE SOUFFLE
La crise financière, qui se prolonge par une crise économique, puis sociale, n’est qu’un des révélateurs de la décomposition. Le problème n’est pas que financier, il est structurellement social. Social, dans toutes ses dimensions, politique, mais aussi éthique. C’est tout le lien social (salarial) qui se délite… Ce lien qui, malgré ses contradictions, maintenait un minimum de cohérence à ce système d’exploitation.
La destruction massive de ce qui constituait un ciment de cohésion et de consensus social : les acquis sociaux, les services publics fait place nette pour les affrontements à venir. L’effondrement et la faillite du système républicains d’intégration sociale couronne logiquement le tout.
Non seulement ce système n’arrive plus à créer un lien social qui pourrait lui garantir un minimum de crédibilité, mais la classe politique qui le gère directement ou indirectement perd toute crédibilité. En effet, la marche forcée vers la rigueur – pour la majorité de la population - cohabite difficilement avec des pratiques dignes des privilèges de l’Ancien régime : népotisme, corruption, détournement et gaspillage d’argent public, passe-droits,…. Déferlement d’ « affaires » scandaleuses. Une véritable « République des Princes » et de leurs suites. Et pour couronner le tout un Pouvoir servi dans les médias par des caricatures de politiciens, synthèses entre Philippe HENRIOT et le Sergent GARCIA (celui de Zorro).
Qu’un sénateur condamné pour « détournement d’argent » public, reste sénateur (à noter qu’aucun autre sénateur de droite comme de gauche, n’a protesté), qu’un ministre de l’Intérieur condamné pour « propos racistes », reste ministre,… et la liste des méfaits est longue (voir le CANARD ENCHAINE),… en dit long sur le degrés de pourrissement du pouvoir.
Face à cela : rien ou presque. Une « opposition » qui n’a de cesse de vouloir accéder au même pouvoir avec les mêmes privilèges. Jusqu’au « contestataires » qui finissent par se faire acheter et rentrent dans le rang. Un exemple ?: Avez-vous vu ces temps-ci José BOVE prendre des risques dans les champs d’OGM depuis qu’il gagne prêt de quinze fois le SMIC, plus les avantages en nature ? »,… sans parler des écologistes de salon qui « sautent » de postes en postes pour prolonger leurs carrières….des noms ?
Quant à la « Gauche de la Gauche », elle ressasse les vieilles lubies d’unité et de rassemblement pour faire élire ses chefs – le dernier congrès du PCF est édifiant à cet égard.
Et le « bon peuple » me direz vous !
Le « bon peuple » croit.
Il croit,…
- qu’il a le pouvoir parce qu’il vote ;
- que les élus sont là pour gérer dans le sens de ses intérêts ;
- que le problème des retraites est démographique ;
- que la police est là pour le protéger ;
- que la Justice est la même pour tous ;
- que la concurrence va faire baisser les prix ;
- que le service public est ruineux et dépassé ;
- que ceux qui sont morts pour la liberté nous obligent à voter pour des profiteurs ;
- qu’il est normal qu’un sénateur escroc condamné continue à siéger et qu’un ministre de l’Intérieur condamné pour racisme, continue à l’être (ministre) ;
- que le capitalisme a été humanisé et qu’il n’y a plus de « paradis fiscaux » ;
- que la Gauche fera mieux que la Droite et réciproquement ;
- que les salaires exorbitants des footballeurs et des élus sont justifiés,……
Bref il croit comme à une certaine époque il croyait que :
- la Terre était plate,
- le Pape était infaillible,
- le Roi était le représentant de Dieu sur la Terre ;
- l’Église détenait la Vérité ;
- il fallait brûler les hérétiques et les sorcières ;
- les chauves souris et les chouettes étaient des animaux maléfiques,……..
Et qu’à une autre époque plus récente, il croyait que :
- la Patrie était en danger ;
- le Maréchal avait toujours raison,
- la « race » blanche était supérieure ;
- la colonisation apportait les vraies valeurs aux « sauvages » ;
- la planète était capable de digérer toutes les saloperies que nous fabriquions,…
LES DERNIERE CARTOUCHES
Les trépignements syndicaux, les « grandes » manifestations donnant lieu à des « batailles de chiffes » homériques et stériles, les délégations symboliques dans les préfectures, les déclarations « langue de bois »,… rien n’y fait ! ! !
Les menaces ridicules des responsables syndicaux laissent le Pouvoir de marbre… il s’en fout royalement. Il sait parfaitement que les organisations syndicales, de même que les organisations politiques d’oppositions (la Gauche de la Gauche), n’ont aucune stratégie en dehors de la contestation verbale, des manifestations « traîne savates » et des prochaines élections.
La faculté d’indignation des leaders de l’opposition frise le ridicule – par exemple quand le PS déclare sans rire qu’il reviendra à la « retraite à 60 ans » en cas de victoire,… alors que tous le monde sait qu’il n’en est rien. Ou quand les syndicats déclarent que 2 millions de personnes dans la rue (pourquoi pas 1,8 million ou 2,3 millions ?) vont faire céder le Gouvernement.
La dernière manifestation du 24 juin a été un échec retentissant, pas du fait du nombre,… au contraire,… du fait que le grand nombre n’a eu aucune influence sur le Gouvernement. On peut faire l’hypothèse qu’avec 3, 4 et même 5 millions de personnes dans les rue, le résultat serait le même… Pourquoi ? Mais puisque le Pouvoir sait qu’après une manifestation il n’y a plus rien, et même dans ce cas ce sont les vacances.
Bien sûr, on peut rêver et fantasmer sur la « rentrée sociale »… dans le style « Eté chaud,… rentrée brûlante ! ». On nous fait le coup tous les ans… En fait il ne se passe,… rigoureusement rien.
Pourtant on arrive au « bout du rouleau », la libéralisation généralisée de l’économie aboutit peu à peu à l’élimination de tout service public, la précarisation des statuts de la force de travail aboutit inéluctablement et massivement à l’accroissement du sous emploi, de l’exclusion et des inégalités. Or rien, politiquement, n’entrave cette chute vertigineuse. On essaye de nous vendre la version « social démocrate » au travers de DSK, mais ce n’est qu’un pis aller qui ne règlera rien.
La montée des violences sociales est directement liée à cette dégradation sociale… ce qui permet au pouvoir de profiter de cet état de fait pour affiner et consolider son arsenal répressif qui, le moment venu sera, bien évidemment, utilisé contre les « contestataires ».
Il sait pouvoir compter sur ses bandes armées, ses mercenaires surarmés, qu’il sort à toute occasion, pour sauver ce système.
Nous, nous n’avons rien, et tout dérapage dans la violence sera sauvagement réprimé comme le système marchand l’a toujours fait durant tout le 20e siècle quand les circonstances l’exigeaient..
Quand les dernières cartouches de la contestation sociale traditionnelle auront été « tirées », que nous restera-t-il ?
Là est toute la question,… et un jour nous paierons très cher le fait de ne pas avoir voulu nous la poser.
Là-dessus,… bonnes vacances et rechargez les batteries en vue d’une nouvelle année merdique !
Juin 2010 Patrick MIGNARD
Voir aussi :
«
DECADENCE »
«
MANIFESTE POUR UNE ALTERNATIVE »